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XI

TRAITÉ DE COMMERCE SIGNÉ A MADRID ENTRE L'ESPAGNE ET LE MAROC LE 20 NOVEMBRE 1861

A la suite des traités signés entre l'Espagne et le Maroc dans les dernières années du XVIII® siècle (V. supra), les relations entre les deux pays avaient été satisfaisantes, lorsque des incidents répétés, surgis à partir de 1830 entre les peuplades du Riff et les garnisons des présides, motivèrent, le 25 août 1844, la signature d'une sorte de compromis, avec le représentant de l'Angleterre pour arbitre; la convention de Larache qui en résulta le 6 mai 1845 régla ces incidents.

Après l'occupation par l'Espagne des îles Zaffarines (6 janvier 1858); après la tension diplomatique qui suivil ses prétentions élevées sur l'ilot de Peregil, un acte, signé à Tétouan le 25 août 1859, étendit les limites de la juridiction de Melilla et fixa les mesures nécessaires à la protection des présides du Peñon de Velez et d'Alhucemas.

Viennent les événements de 1859 l'attaque et la destruction par les Marocains d'un fort de Ceuta; la rupture; l'expédition dirigée par le général O'Donnell, la bataille de Castillejos, désastreuse pour l'armée marocaine (1er janvier 1860) et la prise de Tétouan. La paix est rétablie par le traité signé dans cette place le 26 avril 1860, complété le 30 octobre 1861 (1), et seule l'intervention de l'Angleterre empêche l'Espagne de réaliser ses projets d'annexion. C'est par application de l'article 13 du traité de Tétouan qu'a été conclu l'accord commercial du 20 novembre 1861 (2).

Cel accord est calqué sur le traité de commerce anglo-marocain du 9 décembre 1856, dont il reproduit les principales clauses: liberté commerciale (art. 44, 45 et 49) sous réserve des droits limitatifs du Sultan en matière d'exportation (art. 46, 48, 50). — Égalité fiscale (art. 49). Égalité fiscale (art. 49).- Droit pour les Espagnols de posséder des immeubles, mais étant stipulé que ceux-ci auront été acquis de l'aveu des autorisés (art. 5). Dispense du paiement de tous autres droits les droits de douane (art. 5 et 46), notamment des droits de cabotage (art. 52). que Limilation à

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10 p. 100 du taux des droits de douane à l'entrée el fixation des droits spécifiques à la sortie d'après une liste identique à celle du traité avec l'Angleterre (art. 50). — Répression de la contrebande (art. 56 et59). — Application, enfin, aux sujets espagnols de tous les droits et privilèges accordés aux ressortissants des autres puissances (art. 15, 44, 49, 50).

Nous rencontrons, en outre, les dispositions suivantes :

1° Protection espagnole accordée aux interprètes, gardes et serviteurs des représentants de l'Espagne, mais sans que les agents consulaires indigènes puissent à leur tour protéger d'autres indigènes (art. 3). — Cette limitation se retrouvera sous l'article 4 de la convention internationale de Madrid de 1880. Par contre, l'exclusion des courtiers indigènes ou « censaux », prononcée par l'article 47 de notre traité, a disparu de l'acte de Madrid; 2o Juridiction consulaire. Les articles 10, 11 et 16, qui règlent les trois cas: litiges entre Espagnols, entre Espagnols et Marocains, entre Espagnols et étrangers, sont copiés sur les articles 8, 9 et 14 du traité général anglo-marocain de 1856;

3o Extradition des déserteurs (art. 17 et 18). Le traité du 26 avril 1861 abroge tous les traités antérieurs, autres que ceux de Tétouan (art. 61). Sont visés par cette clause les accords de 1767, 1780 et 1799.

(1) On trouvera le texte des traités énumérés ci-dessus dans l'ouvrage déjà cité de M. Rouard de Card, Les relations de l'Espagne et du Maroc. Nous ne les avons pas donnés, comme sortant du cadre de ce recueil.

(2) ART. 13. « Il sera conclu dans le plus bref délai possible un traité de commerce par lequel les avantages déjà accordés ou qu seront accordés à l'avenir à la nation la plus favorisée sont accordés aux sujets espagnols. »

AU NOM DE DIEU TOUT-PUISSANT,

Les Très-Puissants Princes, S. M. la Reine d'Espagne et S. M. le Roi du Maroc, désirant faciliter de tout leur pouvoir les relations commerciales entre leurs sujets respectifs, suivant les besoins mutuels et la convenance réciproque, et jugeant opportun à la fois de déterminer avec exactitude les attributions consulaires et les privilèges dont jouissent les Espagnols au Maroc, tant pour ce qui regarde la juridiction que les autres droits, en vertu des stipulations des articles 13 et 14 du traité de paix signé à Tétouan le 26 avril 1860, et vu l'article 5 du traité conclu à Madrid le 30 octobre de l'année présente, ont nommé pour leurs plénipotentiaires, savoir:

S. M. la Reine des Espagnes, Don Saturnino Calderon Collantès, ancien ministre de l'Intérieur et du Commerce, de l'Instruction et des Travaux publics, sénateur du Royaume, grand-croix des ordres royaux de Charles III et d'Isabelle la Catholique, grand cordon de l'Ordre impérial de la Légion d'honneur de France, de l'ordre de Léopold de Belgique, etc., son premier secrétaire d'État des Affaires étrangères;

S. M. le Roi du Maroc, son ambassadeur plénipotentiaire, le Calife du Prince des croyants, fils du Prince des croyants Muley-el-Abbas;

Lesquels, après avoir échangé leurs pleins pouvoirs respectifs et les avoir trouvés en bonne et due forme, sont convenus des articles suivants :

ARTICLE PREMIER. Il y aura paix et amitié perpétuelles entre S. M. la Reine d'Espagne et le Roi du Maroc, et entre leurs sujets respectifs.

ART. 2. S. M. la Reine d'Espagne pourra nommer un Consul général, des Consuls, Vice-Consuls et Agents consulaires dans tous les domaines du Roi du Maroc. Ces fonctionnaires auront la faculté de résider dans tous les ports de mer ou villes marocaines que choisira le Gouvernement espagnol et jugera convenables pour le bien du service de S. M. Catholique.

ART. 3. Le Chargé d'affaires d'Espagne ou tout autre agent diplomatique accrédité par S. M. Catholique près le Roi du Maroc, le Consul général, les Consuls, Vice-Consuls et Agents consulaires espagnols qui résideront dans les domaines du Roi du Maroc recevront les honneurs, la considération et les distinctions dus à leur rang. Ces agents, leurs maisons et leurs familles jouiront d'une immunité absolue, d'une complète sécurité et protection. Personne ne pourra les molester ni leur manquer le moins du monde en paroles ni en actions; et si quelqu'un enfreint cette prescription, il recevra un châtiment sévère qui servira de peine au délinquant et d'exemple aux autres. Le Chargé d'affaires ou le Consul général pourra librement choisir ses interprètes ou ses serviteurs parmi les sujets musulmans ou les sujets de tout autre pays. Leurs interprètes ou serviteurs seront exempts de toute contribution personnelle ou directe, de toute capitation, de tout impôt forcé ou de toutes autres charges analogues.

Les Consuls, Vice-Consuls ou Agents consulaires résidant dans les ports marocains et placés sous les ordres du Chargé d'affaires ou Consul général, auront

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le droit de choisir un interprète, un garde et des domestiques pris parmi les musulmans ou les sujets de tout autre pays; l'interprète, le garde et les domestiques ainsi désignés seront également exempts d'impôts de capitation, de contributions forcées ou de toutes autres charges analogues.

Si ledit Chargé d'affaires ou le Consul général nomme Vice-Consul ou Agent consulaire dans un port marocain un sujet du Roi du Maroc, cet individu, de même que ceux de sa famille qui habiteraient la maison même, seront respectés et seront exempts du paiement des impôts de capitation ou autres charges pareilles ou analogues; mais ledit Vice-Consul ou Agent consulaire ne devra prendre sous sa protection aucun sujet du Roi du Maroc, sauf les membres de sa famille, s'ils habitent la même maison.

Le Chargé d'affaires ou le Consul général, les Consuls, Vice-Consuls et Agents consulaires de S. M. Catholique auront un lieu destiné à la célébration du culte; ils pourront hisser le pavillon national en tout temps au faîte des maisons qu'ils occuperont, à l'intérieur ou à l'extérieur de la ville et le déployer sur leurs navires quand ils s'embarqueront.

Les effets, meubles ou tout autre objet importés par lesdits agents pour leur usage personnel ou celui de leurs familles, pourvu qu'ils ne soient pas commerçants, seront francs d'impôts et il ne sera mis aucun obstacle à leur importation dans les domaines du Roi du Maroc; mais le Chargé d'affaires ou le Consul général, les Consuls, les Vice-Consuls ou Agents consulaires devront remettre aux officiers de la douane une note écrite spécifiant le nombre des articles qu'ils voudront introduire.

Si le service de son Souverain exige la présence d'un Agent espagnol dans son pays et qu'une autre personne soit nommée pour le représenter en son absence, cette personne sera reconnue par le Gouvernement marocain et jouira des mêmes considérations, droits et privilèges. Dans ce cas, ledit Agent pourra aller et revenir en toute liberté avec ses serviteurs et ses effets, sans cesser en aucune circonstance d'être considéré et respecté. Le Chargé d'affaires ou tout autre Agent diplomatique, Consul général, Consuls, Vice-Consuls, Agents consulaires ou le délégué de l'un ou l'autre des représentants de S. M. Catholique auront droit à toutes les prérogatives et privilèges dont jouissent aujourd'hui tous agents étrangers de rang égal ou qui leur seraient concédés à l'avenir.

ART. 4. - Les sujets de S. M. Catholique pourront voyager, résider et s'établir librement dans les domaines du Roi du Maroc en se soumettant aux règlements de police applicables aux citoyens de la nation la plus favorisée.

ART. 3. Si, dans l'Empire du Maroc, les Espagnols achètent, avec l'autorisation des autorités, des maisons, magasins ou terrains, ils pourront disposer librement de leurs propriétés sans que personne les inquiète. Toutes les fois qu'ils loueront des maisons. ou magasins pour un temps et un prix fixés, on ne

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haussera point le prix de location durant ce temps et on ne les en délogera pas.

De même, les Marocains pourront acheter et louer des maisons, magasins et terrains en Espagne, conformément aux lois espagnoles.

On ne pourra, sous aucun prétexte, obliger les sujets espagnols à payer des impôts ou contributions.

Ils seront exempts de tout service militaire, aussi bien sur terre que sur mer, comme ils seront exempts de charges personnelles, emprunts forcés et tous impôts extraordinaires.

On respectera leurs maisons, leurs magasins et tout ce qui leur appartiendra, que ce soit destiné à un objet de commerce ou à l'habitation, et ils ne seront obligés à héberger ni entretenir personne contre leur gré. On ne pourra exercer aucune vérification ou visite arbitraire dans les maisons des sujets espagnols, ni examiner ou inspecter leurs livres, papiers ou comptes. Ces opérations ne pourront être exécutées que d'accord et en vertu de l'ordre exprès du Consul général, Consul, Vice-Consul ou Agent consulaire national.

S. M. le Roi du Maroc s'oblige à faire jouir les sujets espagnols résidant dans ses États ou domaines d'une sécurité et d'une protection aussi complètes pour leurs personnés et leurs propriétés que celle à laquelle auront droit les sujets marocains sur le territoire de S. M. Catholique.

De son côté, S. M. Catholique s'oblige à assurer aux sujets de S. M. Chérifienne, qui résideraient dans ses domaines, toute la protection et les privilèges dont jouissent aujourd'hui ou pourront jouir dans la suite les sujets de la nation la plus favorisée.

ART. 6. L'exercice de la religion catholique sera permis librement à tous les sujets de la Reine d'Espagne dans les domaines de S. M. Marocaine, et ils en pourront célébrer les offices dans leurs maisons ou dans leurs églises.

Les Espagnols auront un lieu destiné à la sépulture des morts; el aucune Autorité ou aucun sujet marocain ne les troublera pendant les cérémonies de l'enterrement, ni ne les molestera lorsqu'ils iront ou reviendront des cimetières, qui seront respectés par tous.

Les Marocains, en Espagne, pourront aussi exercer en particulier, ainsi qu'ils l'ont pratiqué jusqu'aujourd'hui, les actes propres à leur religion.

ART. 7. -Les sujets espagnols auront pleine faculté d'employer toute personne de confiance dans leurs affaires, par terre ou par mer, sans aucune défense ni empêchement.

S'il arrivait qu'un commerçant espagnol eût besoin de visiter un navire abordé dans ou hors de l'un des ports du Roi du Maroc, on lui permettra d'aller à bord de ce navire, seul ou accompagné de toute autre personne, sans que lui ni ceux qui l'accompagnent soient soumis de ce chef au payement d'aucune contribution forcée.

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dettes de ses concitoyens, à moins qu'il ne s'en fût porté garant par un acte écrit et signé de sa main. La même règle sera applicable en Espagne aux sujets du Roi du Maroc.

ART. 9. Tout Espagnol qui, dans les domaines marocains, se rendra coupable d'un scandale, d'une insulte ou d'un crime qui mérite correction ou châtiment, sera livré à son Consul général, aux Consuls, Vice-Consuls ou Agents consulaires pour que, suivant la loi observée en Espagne, cette peine lui soit infligée, ou qu'il soit renvoyé dans son pays, avec la sécurité convenable, toutes les fois que le cas l'exigera.

ART. 10. Le Consul général d'Espagne, les Consuls, Vice-Consuls ou Agents consulaires seront les seuls juges ou arbitres qui connaîtront des causes criminelles, procès, litiges ou différends de tout genre, tant civils que commerciaux, soulevés entre les sujets espagnols résidant au Maroc, sans qu'aucun gouverneur, Cadi ou aucune autre autorité marocaine puisse y intervenir.

ART. 11. Les causes et plaintes criminelles, les procès, litiges ou différends, de quelque nature qu'ils soient, en matière civile ou commerciale, qui seraient suscités entre sujets espagnols et marocains, seront décidés de la manière suivante :

Si le demandeur ou plaignant est sujet espagnol et le défendeur ou le prévenu, sujet marocain, la cause sera soumise au Gouverneur de la ville ou du district ou au Cadi, suivant que le cas ressortira à la juridiction de l'un ou de l'autre. Le sujet espagnol introduira sa demande devant le Gouverneur ou le Cadi par l'intermédiaire du Consul général, du Consul, Vice-Consul ou Agent consulaire d'Espagne, lesquels auront droit d'assister au tribunal durant le jugement.

De même, si le demandeur est sujet marocain et le prévenu, sujet espagnol, la cause sera soumise uniquement à la connaissance et à la décision du Consul général, du Consul, Vice-Consul ou Agent consulaire d'Espagne. Le demandeur présentera sa demande par l'intermédiaire des autorités marocaines; et le Gouverneur marocain, le Cadi ou tout autre employé par eux désigné seront présents, s'ils le désirent, durant le jugement et la décision de la cause.

Si le plaignant ou plaidant espagnol ou marocain ne se conforme point à la décision du Consul général, Consul, Vice-Consul ou Agent consulaire, du Gouverneur ou Cadi, suivant que l'affaire ressortira aux tribunaux des uns ou des autres, ils auront le droit d'en appeler respectivement au Chargé d'affaires d'Espagne ou au Commissaire marocain pour les affaires étrangères.

ART. 12. Si un sujet espagnol actionne devant un tribunal marocain un sujet du Roi du Maroc pour une dette contractée dans les domaines de S. M. la Reine d'Espagne, il devra présenter un acte de reconnaissance de cette dette écrit en caractères européens ou arabes, et signé par le débiteur marocain, avec la certification du Consul, Vice-Consul ou Agent consu

laire de sa nation, ou bien écrit en présence de deux témoins, dont les signatures seront légalisées par le Consul marocain, Vice-Consul ou Agent consulaire, ou par un notaire espagnol, si dans le lieu ne réside aucun de ses Agents. Cet acte, ainsi légalisé et certifié par le Consul marocain, l'Agent consulaire ou notaire espagnol, aura pleine force et valeur devant les tribunaux marocains.

S'il arrivait qu'un débiteur marocain se réfugiât dans quelque ville ou place du Maroc où ne résiderait aucun Consul ou Agent consulaire d'Espagne, le Gouverneur marocain obligera le débiteur à se rendre à Tanger ou à tout autre port ou ville du Maroc où le créancier espagnol désire poursuivre son droit devant le tribunal marocain.

ART. 13. — Si le Consul général d'Espagne ou l'un des Consuls, Vice-Consuls ou Agents consulaires espagnols requéraient, à l'occasion, du Gouvernement marocain, l'assistance de soldats, gardes, embarcations armées ou tout autre appui, en vue d'arrêter ou d'amener un sujet espagnol, la requête sera accordée immédiatement, moyennant le payement des droits exigés en pareil cas des sujets marocains.

ART. 14. Lorsqu'un sujet du Roi du Maroc sera jugé par le Cadi coupable de faux témoignage, aut préjudice d'un sujet espagnol, il sera puni sévèrement par le Gouvernement marocain suivant la loi maho

métane.

De même, le Consul général, le Consul, Vice-Consul ou Agent consulaire espagnol veilleront à ce que tout sujet de S. M. Catholique, coupable d'un semblable fait envers un sujet marocain, soit puni suivant les lois espagnoles.

ART. 15. Les sujets ou protégés espagnols, tant mahométans que chrétiens et israélites, jouiront également de tous les droits et privilèges accordés par ce traité et de ceux que l'on accorderait dorénavant à la nation la plus favorisée.

ART. 16. Dans les causes criminelles, différends, querelles ou litiges qui seraient débattus entre sujets espagnols et les sujets ou citoyens d'autres nations étrangères, aucun Gouverneur, Cadi ou autre Autorité marocaine n'aura le droit de connaître ou d'intervenir, à moins qu'à cette occasion quelque sujet marocain n'ait souffert un tort en sa personne ou un préjudice dans sa propriété, dans lequel cas l'Autorité marocaine ou l'un de ses représentants aura le droit d'assister au tribunal du Consul.

Ces causes seront décidées uniquement au tribunal des Consuls étrangers, sans intervention du Gouvernement marocain, suivant les usages établis ou les arrangements à concerter entre lesdits Consuls.

ART. 17. Les Hautes Parties contractantes sont convenues de ne recevoir sciemment ni de maintenir à leur service aucun sujet qui ait déserté de l'armée, de la flotte ou des bagnes. Les sujets de S. M. Catholique qui auraient déserté de l'armée, de la flotte ou des Présides espagnols seront conduits, dès qu'ils toucheront le territoire marocain, en présence du Consul

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Les Hautes Parties contractantes sont convenues que les marins et les individus d'un équipage, sujets du pays où aura lieu la désertion, aussi bien que les esclaves marocains qui déserteraient dans les ports espagnols, seront exceptés des stipulations comprises au paragraphe précédent. ART. 19. Tout sujet de la Reine d'Espagne qui se trouverait dans le domaine du Roi du Maroc, même en temps de guerre, aura la liberté entière de se retirer dans son pays ou tout autre, sur bâtiments espagnols ou étrangers; il pourra aussi disposer comme il lui plaira, de ses propriétés de toute nature et emporter avec lui la valeur desdites propriétés et emmener sa famille et ses gens, même alors qu'ils seraient nés et élevés en Afrique ou dans tout autre lieu hors des domaines espagnols, sans que personne puisse y intervenir ou l'empêcher sous aucun pré

texte.

Les sujets espagnols devront néanmoins obtenir le consentement du Consul général, du Consul, ViceConsul ou Agent consulaire, afin que ceux-ci sachent s'ils sont libres de dettes ou de toute autre obligation dont ils devraient s'acquitter avant leur départ; et ces Agents ne seront, en aucune façon, responsables des dettes que contracteraient les Espagnols au Maroc, à moins qu'ils ne soient obligés expressément sous leur signature à les satisfaire.

Tous les droits mentionnés seront également garantis aux sujets du Roi du Maroc qui se trouveraient dans les domaines de S. M. Catholique.

ART. 20. Le Consul général, les Consuls, ViceConsuls ou Agents consulaires de S. M. Catholique devront expédier gratuitement à tout sujet marocain. qui se rendrait en Espagne le passeport nécessaire sans lequel il ne pourra être admis dans les domaines espagnols.

ART. 21. Si ce traité entre les deux Parties contractantes était enfreint, et qu'en conséquence de cette infraction la guerre fût déclarée (ce qu'à Dieu ne plaise), tous les employés et sujets de la Reine d'Espagne et les individus sous sa protection, de quelque classe et catégorie qu'ils soient, qui à cette époque se trouveraient dans les domaines du Roi du Maroc,

pourront se rendre dans telle partie du monde qu'ils voudront et emporter avec eux leur fortune et leurs biens, emmener leur famille et leurs serviteurs, qu'ils soient ou non de naissance espagnole, et il leur sera permis de s'embarquer à bord d'un navire de la nation qu'ils voudront. Il leur sera accordé, en outre, un délai de six mois, s'ils le demandent, pour régler leurs affaires, vendre leurs effets ou disposer de leurs biens comme ils l'entendront; et, durant le terme de six mois, ils jouiront d'une sécurité complète et d'une entière liberté à l'égard de leurs personnes et de leurs propriétés, sans intervention, grief, ni embarras d'aucune nature du chef de cette guerre. Les Gouverneurs ou Autorités les assisteront et protègeront dans le règlement de leurs affaires, les aideront au recouvrement de leurs créances, sans délai, retard ni contro

verse.

D'égales facilités seront accordées aux sujets du Roi du Maroc dans tous les domaines espagnols.

Dans le cas imprévu d'une rupture, S. M. le Roi du Maroc s'oblige à respecter les officiers, soldats et marins espagnols faits prisonniers durant la guerre, les traitant comme prisonniers et non comme esclaves, les échangeant sans distinction. de personnes, classes, grades, le plus tôt qu'il sera possible, sans que dans aucun cas on dépasse le terme d'un an à partir de la captivité, exigeant un reçu au moment de leur remise, en vue du règlement de l'échange subséquent; on ne considérera pas comme prisonniers de guerre les femmes, les enfants, les vieillards, qui, dès le moment de leur capture, seront mis en liberté et transportés en leur pays par embarcations parlementaires ou neutres, les frais de ce transport restant à charge de la nation à laquelle appartiendront les prisonniers. S. M. Catholique promet d'agir de même, les deux Hautes Parties contractantes s'engageant réciproquement, sous leur parole loyale, à l'exécution fidèle de cet article. Et en cas que, la guerre terminée, il y ait un excédent de prisonniers, cette affaire sera considérée comme terminée sans avoir besoin d'aucune diligence à cet égard, les reçus étant restitués par la partie qui les détiendrait.

ART. 22. Si un sujet espagnol venait à mourir dans les domaines du Roi du Maroc, aucun Gouverneur, aucun employé marocain ne pourra, sous prétexte aucun, disposer des biens ou propriétés du défunt et personne ne pourra intervenir.

Les personnes qu'il aura désignées et nommées ses héritiers dans son testament, si elles sont sur les lieux, entreront immédiatement en possession de toutes les propriétés et biens appartenant au défunt et de tout ce qu'il se trouvera posséder au moment de sa mort; et, en cas que les héritiers soient absents, le Consul général, le Consul, Vice-Consul ou Agent consulaire ou leur délégué prendra possession de toutes les propriétés et effets, après en avoir dressé l'inventaire, désignant chaque chose clairement, jusqu'à

(1) Bateaux légers servant au cabotage.

remise à l'héritier du défunt. Mais si celui-ci n'a fait aucune disposition testamentaire, le Consul général, le Consul, Vice-Consul, Agent consulaire ou leur délégué aura le droit de prendre possession de tous les biens de la succession et de les conserver pour les personnes appelées par la loi à l'héritage. Si le défunt laissait des créances à charge de sujets marocains, le Gouverneur de la ville ou les personnes compétentes obligeront les débiteurs à verser le payement de leur dette au Consul général, Consul, Vice-Consul, Agent consulaire ou leur délégué; et de même, si le défunt laissait des dettes au profit d'un sujet du Roi du Maroc, le Consul général, le Consul, Vice-Consul, Agent consulaire ou leur délégué aideront le créancier au recouvrement de ce qu'il réclame de la succession testamentaire ou ab intestat.

S'il mourait en Espagne un sujet marocain, le Commandant, Gouverneur ou Juge du territoire où il serait décédé gardera en dépôt ce qu'il aura laissé et informera le Consul général espagnol, en lui envoyant un inventaire, afin qu'il en donne avis aux héritiers et en procure le recouvrement sans détournement.

ART. 23. Les navires des deux nations pourront aborder librement aux ports de chacune.

Les navires marchands devront être munis de papiers des autorités compétentes et ils pourront demeurer dans lesdits ports aussi longtemps qu'il sera utile à leurs opérations de commerce.

ART. 24. Tout bâtiment marocain qui partira pour se rendre dans un port espagnol devra emporter son connaissement et sa patente de santé, légalisés par le Consul, Vice-Consul ou Agent consulaire d'Espagne au port de départ.

ART. 25. Afin d'éviter les abus auxquels donnent lieu les carabos (1) du Riff, les deux parties contractantes sont convenues que les maîtres ou patrons desdites embarcations devront se munir de passeports du Gouverneur des places espagnoles sur les côtes de la Méditerranée, ou des Consuls espagnols quand ils s'équipent dans un port où résident lesdits agents; et cet acte leur sera délivré gratuitement et leur servira de sauf-conduit pour leur trafic légal.

ART. 26. S. M. Catholique et S. M. le Roi du Maroc s'obligent à détruire la piraterie par tous les moyens en leur pouvoir; et S. M. le Chérif s'engage particulièrement à faire tous les efforts possibles pour découvrir et châtier ceux qui, sur les côtes ou dans l'intérieur de ses domaines, se rendraient coupables de ce crime, et à prêter son concours dans cette vue à S. M. Catholique.

ART. 27. - En preuve de la bonne harmonie qui doit régner entre les deux nations, toutes les fois que les navires marocains captureront une embarcation ennemie, et qu'il s'y trouvera des marins ou passagers espagnols, des marchandises ou toute autre propriété qui puisse revenir à des sujets de S. M. Catholique, les Marocains les remettront librement à leur Consul

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