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se trouvait placé sous la garantie des trois plus grandes puissances de l'Europe, d'une armée de 12,000 hommes? Et lorsque l'on songeait que parmi ces 12,000 hommes figuraient encore, à la fin de cette année, 5,647 hommes de troupes allemandes, qu'on était obligé de tenir à l'écart dans les temps de troubles, parce que leur présence était une cause d'irritation, et qu'on ne pouvait non plus disposer le long des frontières, parce que ignorant la langue, ils étaient incapables de rendre aucun véritable service; lorsqu'on songeait à cette circonstance, il était impossible de ne pas croire qu'une réduction de 5 à 4 millions sur le budget de la guerre serait d'une opération facile, prompte et d'un résultat assuré.

CHAPITRE IV.

SUISSE. Révision de plusieurs constitutions cantonales. - Troubles dans le canton de Berne. — Etablissement d'une nouvelle constitution dans le canton de Glaris. - Ouverture de la session de la diete. — Organisation militaire de la Confédération — Garantie donnée à la nouvelle constitution de Glaris. — Interdiction aux milices de Neufchâtel de porter une médaille prussienne dans les camps fédéraux.- Question de la révision du pacte. Clôture de la session. SARDAIGNE. Rupture des relations commerciales avec l'Espagne. - Abolition des services personnels, et réglement pécuniaire des prestations féodales dans l'île de Sardaigne.-Promulgation d'un nouveau Code civil. DUCHÉ DE MODÈNE. Jugement des auteurs de l'insurrection de février 1851. Commutations de peines accordées aux prisonniers politiques. ETATS ROMAINS. Choléra.- Attitude de la population à Rome.

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Mesures du Gouvernement. - Massacres de quelques individus accusés d'empoisonnement. Invasion du choléra à Rome. - Aspect de cette ville. Troubles à Viterbe. - Ravages de la maladie à Rome. - Affaire de l'archevêque de Cologne.

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Palerme. Etat de cette ville.

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DEUX-SICILES. Célébration du mariage du roi avec une archiduchesse d'Autriche. Nouvelle apparition du choléra à Naples. - Ravages de la maladie dans cette ville. Moyens employés pour y mettre un terme. Insurrection politique à Penne. — Jugement des insurgés par une commission militaire. Invasion du choléra en Sicile. Ses ravages à Massacre de prétendus empoisonneurs. Le gouvernement envoie des troupes en Sicile. Horribles massacres à Syracuse. -Troubles à Messine. — Insurrection politique à Catane.-Troubles et massacres en plusieurs autres endroits. Changemens opérés par le gouvernement dans l'administration de la Sicile. Etat général de ce pays.

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Exécution des assassins.

SUISSE.

Dans les nouvelles constitutions cantonales établies en 1830 et 1831 se trouve un article qui parle d'une révision de ces mêmes constitutions après un laps de six ans. Ainsi on

avait renoncé à l'antique prétention des législateurs qui croyaient imposer leurs lois à l'avenir le plus reculé; on avait voulu prévenir les renversemens violens, en imprimant d'avance le sceau de la légalité aux révolutions qui se présenteraient sous des formes prescrites; enfin, on avait adouci la révolution du moment même en montrant une époque assez rapprochée où elle pourrait être achevée. Cette époque arrivait cette année, et deux partis contraires se proposaient d'en profiter dans des vues diamétralement opposées, l'un voulant ramener les choses en arrière, l'autre s'efforçant d'élargir encore la base populaire sur laquelle reposaient les nouvelles constitutions.

Le premier de ces deux partis, celui du patriciat, celui que la révolution de 1850 avait dépossédé du pouvoir, semblait conserver, dans le canton de Berne, plus que partout ailleurs, l'espoir de prendre sa revanche en 1857, à la faveur de la révision de la constitution. Une association que l'aristocratie bernoise, point de ralliement et d'appui de celle des autres cantons, avait formée dans le but de préparer les voies à une réaction, fut frappée de dissolution, le 8 mars, par le grand Conseil, qui déclara cette association illégale et dangereuse pour l'Etat. Les mécontens essayèrent alors d'agir directement sur les masses, en provoquant des assemblées populaires dans lesquelles ils prêchèrent à peu près ouvertement l'insurrection. C'est ainsi du moins que les choses se passèrent, le 30 avril, à Briënzwyler, village voisin de Brienz. Les meneurs se préparaient à parcourir le pays pour appeler leurs partisans aux armes, puis à marcher sur Interlaken, et de là sans doute sur Berne. Mais l'autorité prit ses mesures, les milices furent convoquées; un colonel se porta avec 400 hommes contre les mutios, et parvint à les disperser sans faire usage de la force.

Quant à la révision des constitutions, dont l'approche était devenue la cause occasionnelle de ces mouvemens, elle se fit sans donner lieu à aucun incident remarquable, et laissa intactes les institutions conquises en 1850; on n'y introduisit que

des modifications peu importantes et généralement favorables au parti populaire.

Pour le canton de Glaris, ce n'était pas seulement d'une révision qu'il s'agissait, mais d'un renouvellement de la constitution. Ici, c'est l'assemblée de tous les citoyens qui exerce la souveraineté cantonale; mais il y existait une séparation légale entre les protestans et les catholiques. Après s'être querellés pendant 150 ans, ces deux partis avaient conclu, en 1683, un traité par suite duquel la population de chaque religion avait sa propre juridiction ainsi que sa propre assemblée, qui s'attribuait une partie des fonctions de l'assemblée commune, et qui nommait alternativement avec l'assemblée de l'autre confession, aux premières charges du canton. Or, les sept huitièmes de la population de Glaris étaient protestans, et le dernier huitième se composait de catholiques parmi lesquels trois ou quatre familles seulement étaient assez aisées et assez éclairées pour s'occuper des affaires publiques. En effet, elles jouirent du pouvoir comme d'un héritage, et par une espèce d'analogie, le même phénomène s'établit du côté protestant. Depuis quelque temps, les autres familles riches et instruites s'impatientaient de l'impossibilité où elles étaient d'arriver au pouvoir; elles dirigèrent leurs attaques contre le privilége catholique, en s'alliant la partie protestante du Gouvernement, et il en résulta une nouvelle constitution qui, émanée de l'assemblée commune, avait principalement pour objet d'établir dans le canton l'égalité des droits civils et politiques entre les citoyens des deux communions religieuses.

La question de la garantie à donner à cette constitution était au nombre des principales à résoudre dans la prochaine session de la Diète, qui se réunit le 3 juillet, à Lucerne, où avait été transféré, depuis le 1er janvier, le siége de l'autorité fédérale. Avoyer du canton de Lucerne, et en cette qualité président de la Diète, M. Amrhyn inaugura son ouverture par un discours où perçaient les regrets, le désappointement et la cessation de toute confiance dans la force vitale de l'assem

blée. Après avoir rappelé qu'en 1852, époque de la dernière réunion de la Diète à Lucerne, on avait foi dans la prochaine régénération politique de la Confédération, qu'on s'enthousiasmait à l'idée de voir le principe de la liberté et de l'égalité des droits devenir la base du nouvel édifice fédéral, l'orateur demandait si cette foi existait encore, si les espérances d'alors avaient été réalisées, si la parole donnée au peuple avait été tenue. S'adressant ensuite aux représentans de la nation suisse, il s'écriait :

« Lors des réformes politiques cantonales sorties du peuple, avez-vous parallèlement complété les institutions fédérales en leur donnant l'unité qui leur était nécessaire, en les rendant nationales, en les reliant ensemble, afin qu'elles pussent présenter quelque garantie à l'extérieur comme à l'intérieur ? Avez-vous placé notre état fédératif vis-à-vis des autres nations dans la position à laquelle il a droit de prétendre? Avez-vous pourvu aux moyens de défendre énergiquement cette position? Par vos soins, la patrie est-elle en état, dans le cas de conflits européens, de maintenir avec dignité sa neutralité ? Nous devons avouer avec douleur que la réponse à ces graves questions nous pèse.

« Quelque évident qu'il soit que la force d'un Etat républicain ne consiste que dans la confiance et dans la volonté du peuple, cependant, jusqu'à cette heure, c'est peu de chose ce que la Diéte a fait dans le but d'améliorer les institutions fédérales et de répondre à la volonté du peuple hautement manifestée. Quelque évident qu'il soit que la Confédération, décomposée en vingt-deux cantons, resserrée au milieu de puissans Etats, avec un territoire limité au cœur de l'Europe, trouvera difficilement, à l'heure du danger, de la sympathie ou une garantie pour sa conservation, en dehors de ses frontières, tandis que son salut dépend de son union, de l'amour fraternel de ses citoyens, de ses propres forces, nous devons avouer que la Diéte a peu fait encore pour amener cette union nécessaire, pour raviver cet amour fraternel et bannir cet égoïsme qui paralyse nos forces et menace de nous détruire. >>

La Diète avait donc un devoir sacré à remplir. Les relations de la Confédération avec les puissances étrangères étaient tout amicales et ne laissaient rien à désirer. C'était aux députés de mettre ce moment à profit; de comprendre ce qu'exigeaient les temps actuels, de sentir l'impérieuse nécessité de doter la patrie d'un meilleur pacte, de ne pas permettre que la juste attente du peuple fût trompée.

Deux jours après ce discours (3 juillet), et comme pour témoigner que les choses continueraient à marcher dans le sens qu'il blâmait, on constatait en Diète que la nouvelle organisation militaire projetée, à laquelle une commission fé

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