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dent des sénateurs dans la réunion des deux Chambres, l'incom, patibilité des fonctions de sénateur et de député, l'inviolabilité des sénateurs et des députés pour leurs opinions exprimées dans les Chambres, et la nécessité de l'autorisation de la Chambre à laquelle il appartiendrait pour l'arrestation d'un député ou d'un sénateur, à l'exception du cas de flagrant délit et de crime capital, les Cortès abordèrent un article d'un plus haut intérêt ; il était ainsi conçu : « Les sénateurs et députés ne pourront plus, du moment où leur élection aura été déclarée au ministre de l'intérieur, et pendant tout le temps de la législature, accepter ni solliciter soit pour eux soit pour leurs parens, ni pension, ni décoration, ni emploi du Gouvernement, si ce n'est lorsque cela leur échéera par rang d'ancienneté ou de grade dans la carrière qu'ils parcourent. » Plusieurs membres combattirent cette dernière partie de l'article, soutenant qu'elle laissait subsister tous les inconvéniens qu'on voulait éviter. La discussion étant devenue très vive, il fut décidé que l'on procéderait au vote nominal, et l'article fut adopté par 38 voix contre 9. Ce vote avait eu lieu sans préjudice d'un amendement tendant à établir que ceux qui accepteraient des emplois par droit d'ancienneté ou de grade, seraient soumis à une nouvelle élection. Cet amendement rendit à la discussion toute sa vivacité, dans la séance suivante (27 octobre), et il ne fut rejeté qu'à une majorité de 8 voix (41 contre 55). On passa ensuite à un article portant que les sénateurs et les députés pouvaient cependant être nommés ministres d'Etat, mais qu'alors leurs places devraient rester vacantes dans les Chambres. La question, débattue pendant tout le reste de cette séance et celle du lendemain (28 octobre) fut, en définitive, résolue de la manière suivante: 75 voix contre 3 décidèrent que les sénateurs et les députés pourraient être nommés ministres d'Etat, et qu'ils n'auraient pas besoin pour cela du consentement des Chambres; il fut statué à la presque unanimité, que le sénateur ou le député nommé ministre, laisserait sa place à la Chambre

vacante, et, à la majorité de 42 voix contre 36, qu'il pour rait être réélu.

Il fut d'ailleurs interdit aux sénateurs et aux députés d'exercer, pendant le temps des sessions, d'autre emploi public que celui de ministre d'Etat, ainsi qu'au Gouvernement de les employer, dans l'intervalle des sessions, lorsque cela rendrait impossible leur mission aux Cortès ordinaires, sauf, pour le premier cas, l'autorisation, et pour le second, l'approbation ultérieure de la Chambre respective. (30 octobre.)

D'après les dispositions adoptées, sans débats remarquables, relativement à la Chambre des députés, cette Chambre, déclarée élective et temporaire, aurait l'initiative pour les impôts et la conscription, pour l'examen de l'administration passée et la réforme des abus qui s'y seraient introduits, pour la discussion des propositions faites par le pouvoir exécutif. Ce serait, en outre, une attribution exclusive de la même Chambre, que de décréter la mise en accusation des ministres. Un article, dont la discussion fut assez animée, est celui qui portait que les députés auraient un traitement pécuniaire pour tout le temps des sessions, et une indemnité de voyage. Soumis au vote nominal, cet article fut adopté par 62 voix contre 4. Quant aux députés d'outre-mer, parmi lesquels n'étaient pas compris ceux des îles adjacentes, ils auraient un traitement même pendant l'intervalle des sessions, pourvu qu'ils ne résidassent ni dans ces îles, ni en Portugal. (31 octobre.)

Arrivant au Sénat, à l'égard duquel elle n'avait encore fait que statuer qu'il serait électif et temporaire, l'assemblée décida que les sénateurs n'auraient point de traitement et qu'ils ne pourraient être élus que parmi les propriétaires ayant une rente annuelle, en biens propres, de deux contos (12,000 francs); les grands commerçans et manufacturiers dont le bénéfice annuel monterait à cinq contos au moins; les archevêques et évêques ayant diocèse dans le royaume ou dans les provinces d'outre-mer; certains professeurs des universités et

des écoles polytechniques de Lisbonne et de Porto; les amiraux, vice-amiraux, lieutenans - généraux, maréchaux-decamp et chefs d'escadre; les ambassadeurs et les ministres plénipotentiaires, après cinq ans d'exercice dans la carrière diplomatique. L'âge requis pour siéger au Sénat fut fixé à 55 ans. Un article du projet portant que le prince royal et les infans seraient sénateurs de droit à 18 ans, et pourraient voter à 25, donna lieu à une vive discussion; en résultat, cet article fut maintenu, par 37 voix contre 31, à l'égard du prince royal, et rejeté dans sa partie relative aux infans. Les attributions exclusives du Sénat seraient de connaître des délits individuels commis par les membres de la famille royale, les ministres d'Etat, les sénateurs, et par les députés pendant la législature; de connaître de tout ce qui concernerait la responsabilité des ministres d'Etat. Ce serait aussi une attribution exclusive du président ou du vice-président de la dernière Chambre des sénateurs, et, à leur défaut, du président ou du vice-président de la dernière Chambre des députés, de convoquer les Cortès, après la mort du roi, pour l'élection de la régence définitive, toutes les fois que la régence provisoire ne les aurait pas convoquées dans l'espace de trois jours. (1er, 3, 6, 7, 8 novembre.)

Si le Sénat faisait subir aux lois sur les impositions et la conscription quelque altération que la Chambre des députés refusât d'admettre, ces lois passeraient à la sanction royale, telles qu'elles auraient été définitivement approuvées par cette Chambre. (9 novembre.)

La nomination des députés serait faite par élection directe. Les Portugais ou les étrangers naturalisés, possédant un revenu liquide annuel de 80,000 reis (environ 500 fr ), provenant de propriétés, d'une industrie, d'un commerce ou d'un emploi, auraient droit de voter dans les élections. Cet article ne fut admis qu'après une longue discussion dans laquelle plusieurs orateurs s'étaient efforcés de faire diminuer le cens électoral. N'auraient pas le droit de voler, ceux qui n'auraient Ann. hist. pour 1837.

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pas atteint l'âge de 25 ans, à moins qu'ils ne fussent mariés ou officiers-militaires et qu'ils n'eussent 21 ans ; ceux qui se destineraient aux ordres sacrés et qui en auraient pris les premiers degrés; les fils de famille vivant avec leur père, à moins qu'ils ne fussent employés publics. Tous les électeurs ayant 25 ans accomplis et un revenu annuel de 400,000 reis (2,300 fr. environ) provenant de propriétés, d'une industrie, d'un commerce ou d'un emploi, seraient éligibles. Seraient exceptés de cette disposition et absolument inéligibles, les affranchis, les faillis qui n'auraient pas justifié de leur bonne foi, les prévenus de crime. Seraient respectivement non éligibles, les administrateurs-généraux (préfets) dans la province où ils résideraient; les intendans (contadores), dans leurs districts; les évêques et les vicaires capitulaires, dans leurs diocèses; les curés, dans leurs paroisses; les juges, dans le ressort de leur juridiction; les commandans des divisions du royaume et les commandans des places, dans les lieux de leur commandement. Les commandans des corps d'armée de premier ordre ne pourraient pas recevoir les voix des militaires qui leur seraient soumis. L'article du projet de la commission portant que tous les citoyens éligibles pourraient être élus dans une partie quelconque de la monarchie, alors même qu'ils n'y seraient ni nés, ni résidens, ni domiciliés, ayant été rejeté par 42 voix contre 34, il fut résolu que la moitié au moins des députés de la province devraient être nés ou avoir leur résidence depuis un an dans cette même province. (9, 10, 11, 15 novembre.)

Après avoir statué, dans la séance du 14 novembre, sur les prérogatives ordinaires du pouvoir royal, l'assemblée đécida que le roi ne pourrait pas empêcher l'élection des députés; s'opposer à la réunion des Cortès, qui devrait avoir lieu tous les ans, au 2 janvier; commander la force armée, ni nommer pour commandant en chef aucun prince de la maison royale ; exercer aucune des attributions qui, en vertu de la constitution, appartiennent aux Cortès ou aux juges,

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-remettre ou commuer la peine des ministres d'Etat condamnés; être en même temps le chef d'un autre Etat, sans le consentement des Cortès; sortir du royaume de Portugal et des Algarves, sous peine d'être considéré comme ayant abdiqué.

Un article du chapitre qui traite de la succession à la couronne, portait que la ligne collatérale de l'ex-infant don Miguel et de toute sa descendance serait pour toujours exclue de cette succession. Le vote nominal ayant été demandé sur cet article, il fut adopté à l'unanimité des 74 députés présens.

Si la succession appartient à une femme, celle-ci ne pourra se marier qu'à un Portugais, et avec l'approbation des Cortès. Le mari n'aura aucune part dans le Gouvernement, et ne prendra le titre de roi que lorsqu'il aura un fils ou une fille.

Les chapitres suivans concernaient les ministres, dont la responsabilité était établie sur les bases les plus larges; la force armée, dans laquelle était comprise la garde nationale, qui concourrait à l'élection de ses officiers; l'ordre judiciaire, se composant de jurés et de juges, et dont l'indépendance et l'inamovibilité étaient garanties; l'administration, réglée de telle sorte qu'il y aurait dans chaque district administratif un magistrat du pouvoir exécutif nommé par le roi, une junte élective et un conseil permanent, et dans les arrondissemens, des chambres municipales (camaras) auxquelles appartiendrait l'administration économique et municipale; les finances nationales et la révision de la constitution, à laquelle les réformes seraient faites, non par la législature qui les aurait jugées nécessaires, mais par la suivante.

Enfin le président des Cortès, M. Macario de Castro, proposa une disposition transitofre ainsi conçue : « La première Chambre des députés qui sera réunie conformément à la présente constitution, pourra faire les altérations qu'elle jugera convenables à l'article 45, relatif à l'organisation de la Chambre des sénateurs. » Cette proposition donna lieu encore à des débats très animés pendant trois séances;

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