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une main, et de l'autre la menaçant avec un couteau, il consomma le viol. Quelques jours après, il se présenta, à Roquevaire, chez son père, alors absent; on ignorait encore dans ce pays la perpetration de son dernier crime. Un serrurier va lui ouvrir les portes du domicile paternel; mais bientôt, apprenant l'expulsion qui avait eu lien, cet ouvrier retourne sur ses pas, et Jouve est forcé de prendre la fuite.

Il a déclaré depuis que son intention avait été de prendre dans la maison de son pere tout ce qu'il aurait pu emporter, et d'y mettre le feu. Forcé d'ajourner l'accomplissement de ce crime, Jouve revient à Marseille à travers champs et montagnes pour éviter les gendarmes; puis, le 46, il se montre de nouveau sur le territoire de Roquevaire, et arrive cette fois à une petite campagne appartenant à son père. Il s'introduit dans le bâtiment en défonçant le toit, et après s'y être muni d'armes, de vivres et de munitions, il y met le feu.

Retiré dans un champ voisin, il surveille les progrès de l'incendie, tout en consommant une partie des provisions qu'il venait de prendre; enfin, quand la flamme s'élance par toutes les croisées et que le toit s'affaisse, il se retire, et, en passant, il éveille un voisin pour lui apprendre ce qu'il vient de faire et proférer de nouvelles menaces contre son père et sa sœur.

En attendant qu'il puisse les exécuter, Jouve va passer son temps à arrêter sur la grande route.

Huit ou dix voyageurs, cultivateurs ou charretiers, sont successivement mis à contribution. Après en avoir détroussé quelques-uns, il arrête un pauvre berger. Quand Jouve s'est assuré que celui-ci n'a rien sur lui, au lieu de le maltraiter, il lui offre de boire à sa gourde, lui donne un pain blanc et le renvoie.

Enfin, après s'être attaqué à des voyageurs isolés, il voulut arrêter une diligence; mais le conducteur, au lieu d'obéir aux injonctions de Jouve, passa rapidement à côté de lui, et lui lança un coup de fouet. Le coup de fusil partit alors. Aux débats, l'accusé a prétendu que l'explosion de l'arme n'avait été déterminée que par la secousse imprimée à son arme par le coup de fouet.

Cependant, depuis les menaces dont il avait été l'objet, Jouve père n'osait presque plus quitter sa maison. Sper tanément la population de Roquevaire s'etait mise en armes à la recherche du brigand. Jouve, qui en avait reçu connaissance par une personne qu'il n'a jamais consenti à nommer, disant qu'il ne trahirait jamais ceux qui lui avaient fait du bien, voulut aller au-devant du danger, et en même temps réaliser les menaces si souvent répétées. Du haut d'un rocher, il aperçut dans la plaine son père, qui, accompagné de deux gendarmes travestis, était venu se livrer à ses travaux habituels; il s'avance alors couvert par des arbres et par des accidents de terrain; puis tout-à-coup, se démasquant quand il n'est plus qu'à trente pas de distance, il crie à son père, en le couchant en joue : « Ah! ah! nous y sommes. »

Le pauvre vieillard se mit à courir à toutes jambes en appelant les gendarmes; ceux-ci s'élancent, et l'accusé lâche alors son coup de fusil, sans qu'on ait jamais pu préciser s'il l'avait dirigé contre son père ou contre les gendarmes, qu'il prenait, ainsi qu'il l'a dit plus tard, pour des gens de Roquevaire. Le coup ayant manqué, les gendarmes hâtent le pas, se jettent sur Jouve, qui n'oppose qu'une faible résistance; ils lui lient les mains avec sa Cravate et l'entraînent avec eux.

Depuis son arrestation, Jouve a fait preuve de la plus grande indifférence Pour sa position. Dans ses interrogatoires, il raconte en quelque sorte avec complaisance l'histoire de ses actes et de ses sensations. Il ne cherche pas plus à faire naître la pitié que l'indignation; mais il raconte simplement, sans emphase, avec une admirable précision de détails, tout ce qu'il a vu, tout ce qu'il a fait.

Dans les prisons d'Aix, il a été l'objet de la surveillance la plus active; mais il n'a jamais fait la moindre tentative d'évasion. On assure que sa principale occupation était de construire avec du papier des petits bateaux et des moulins à vent, comme l'aurait fait un enfant.

Aux débats, son aspect a vivement excité la curiosité. Jouve est grand, d'une corpulence au-dessous de l'ordinaire; sa tête est longue, son front

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déprimé; ses yeux, petits et extrêmement vifs, sont recouverts par des paupieres dont le clignotement continuel a quelque chose de convulsif. Du reste, il paraît se complaire à être l'objet de la curiosité publique, et on devine qu'il s'est promis de faire bonne contenance.

Interrogé après chaque déposition de témoin, il prétend ne se souvenir de rien, sans donner cependant, ni à ses interrogatoires, ni aux dépositions des témoins, aucun démenti formel.

La tâche de l'accusation a été rem. plie par M. l'avocat général Lieutaud. Celle de la défense, confiée à EI® Bedarrides, était épineuse; un seul système présentait quelque vraisemblance, celui de la monomanie. Le défenseur, en le développant, s'est élevé aux plus hautes considérations.

Après le résumé de M. le président, les jurés se retirent dans leur salle pour procéder au scrutin.

Au moment où les débats allaient être clos, le président a demandé à l'accusé s'il n'avait rien à ajouter pour sa défense; il s'est levé alors pour dire qu'il n'éprouvait qu'un désir et qu'un besoin, celui de manger un morceau. L'accusé a fait cette demande sans ricanement et sans ironie, avec le ton de déférence et de soumission de celui qui fait une demande pour qu'elle soit accueillie.

Aussi, lorsque le fatal verdict ayant été prononcé, Jouve rentre, personne n'est surpris que son désir ait été pris au sérieux, et on s'en aperçoit en le voyant mâcher encore sa dernière bouchée. Le repas qu'il vient de faire est le digne pendant de celui qu'il faisait en voyant brûler la maison de son père. Hélas! qui oserait dire que l'un et l'autre ne peuvent s'expliquer de la même manière?

Après la lecture du greffier, on lui annonce sa faculté de pourvoi; il répond alors, d'un ton jovial et résolu :

Non, non, tout de suite!» En se retirant, il cherche à échanger des signes de connaissance avec quelques témoins, qui se détournent avec encore plus de pitié que de dégoût.

26. Paris. Ouverture du chemin de fer de Saint-Germain. — On peut aisément se figurer la curiosité, l'empressement excité par l'inauguration de ce

chemin de fer, le premier construit à Paris. Déjà il avait été parcouru deux ou trois fois par des voyageurs privilėgiés; mais c'est aujourd'hui seulement que le public en a pris possession. L'événement s'est passé de la manière la plus heureuse, bien qu'une immense affluence d'hommes, de femmes et d'enfants se soit portée toute la journée à l'embarcadère de la rue de Londres. Tout le quartier Tivoli semblait être en fète. On évalue à dix mille le nombre des personnes qui ont fait aujour d'hui, dans les voitures et wagons de la compagnie, le voyage de Saint-Germain. Ce voyage, qui est de 18,430 mètres, a duré communément trente minutes. Dans son parcours, le chemin de fer traverse deux souterrains et des tranchées qui ont jusqu'à 16 mètres (49 pieds) de profondeur; sur plus des deux tiers de la ligne les rails sont établis sur une chaussée haute moyennement de 15 à 20 pieds; le chemin traverse deux fois la Seine sur trois ponts; il coupe quinze routes ou chemins au moyen de pontceaux établis tantôt audessus, tantôt au-dessous de ces routes. Le souterrain de Paris a été commencé le 5 mai 1836 et terminé le 15 février suivant ; il est à quatre voies, sa largeur est de 13 mètres 32 centimètres, sa longueur est de 183 mètres. Le souterrain des Batignolles a été entrepris le 7 juin 1836, et terminé le 9 mars 1837. Il a 328 mètres de longueur. La nouvelle voie ouverte n'est pas d'une grande étendue, surtout si on la compare aux immenses travaux réalisés dans le même espace de temps aux EtatsUnis; mais il est bien qu'on ait créé aux portes de Paris, à Paris même, qui exerce tant d'influence sur toute la France et sur les états voisins, un chemin modèle, grâce auquel le public parisien pourra désormais comparer un chemin de fer à une route ordinaire, se rendre compte de la vitesse du parcours, et juger par lui-même des résultats qu'on peut attendre de l'application générale de ce puissant moyen de communication.

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ciers du 4o bataillon de la garde royale, se sont rendus à l'hôtel du général Seoane pour lui demander réparation. Le général a répondu avec empresse ment à cette provocation, et il a invité les deux ofliciers à se rendre auprés du comte Almodovar, qui réglerait avec eux les conditions du combat; l'entrevue a été courte, et il a été convenu avec le comte Almodovar que l'affaire aurait lieu à six heures du soir. M. Manzano s'est rendu sur le terrain avec MM. Fernando Cordova et Tenorio, ses témoins. Ceux du général Seoane étaient le comte Almodovar et Jean Arana, député. Il avait été décidé, vu la grande réputation d'habile tireur acquise au général Seoane, que le duel aurait lieu au pistolet, mais à dix pas de distance. Sur les deux pistolets un seul était charge. Le pistolet chargé ayant été donne par le sort à M. Manzano, il a fait fen; le général Seoane est tombé; mais sa blessure n'était pas mortelle.

31. Paris. Le fronton du Panthéon. -Ce fronton vient enfin d'être débarrassé de son enveloppe de toiles et de charpentes. M. David, à qui cette grande page de sculpture a coûté deux ans d'un travail non interrompu, s'est inspiré de l'inscription même qui consacre le monument : « Aux grands hommes la patrie reconnaissante!» et il a traduit cette pensée avec bonheur,

Au milieu du fronton, et montée sur un autel, est une grande et majestueuse figure, le front ceint d'une couronne étoilée; c'est la Patrie distribuant des couronnes à tous ceux qui l'out honorée et servie par leurs vertus, leurs talents ou leur épée. A ses pieds sont assises 'Histoire et la Liberté. l'une inscrivant sur ses tablettes les noms des grands hommes; l'autre,calme et forte, tressant les couronnes que la patric décerne. A droite sont les illustrations de l'ordre civil; à gauche, toutes les gloires militaires.

De ce partage si simple du sujet résulte un contraste plein d'effet d'un côté, c'est le recueillement et la méditation; de l'autre, l'action et l'enthousiasme ; là, sont Malesherbes, Fénelon, Mirabeau, Laplace, Cuvier, David, etc.; ici, le général Bonaparte, revêtu de l'aniforme républicain, et dominant par sa position, plus que par sa taille, un groupe de soldats de toutes armes, où

l'on retrouve jusqu'au vieux grenadier de la fameuse 32e, et jusqu'à l'intrépide enfant qui battait la charge au pont d'Arcole.

Enfin, les deux angles aigus du fronton sont remplis par des groupes de jeunes gens qui se livrent à des études sérieuses, avant de songer à venir prendre leur part des récompenses nationales. Quelques-uns d'entre eux portent l'uniforme de l'Ecole polytechnique, et paraissent absorbés dans des calculs et des problèmes que M. Arago a traces lui-même sur la pierre.

Le gouvernement a hésité quelque temps à faire découvrir ce fronton, qui aurait pu être inauguréaux dernières fé. tes de juillet. Des-lors, il est devenu l'objet d'une vive polémique entre les journaux de l'opposition et les journaux ministériels; polémique qui s'est ensuite continuée, mais en changeant de caractère, entre ces derniers et les journaux légitimistes. L'archevêque de Paris Inimême, sortant du sanctuaire, s'est mêlé à la lutte, en fulminant un mandement contre ce fronton; ce qui n'a pas empêché son inauguration de se faire avec le plus grand calme.

SEPTEMBRE.

4. Paris. Cour d'assises. Affaire du Journal l'Europe. — La Cour d'assises avait à statuer aujourd'hat sur l'opposition du gérant du journal l'Europe a un arrêt par défaut qui l'a condamné à un an de prison et 8,000 fr. d'amende.

Le gérant a déclaré se nommer HenriEdouard de Perdrauville.

M. Partarrien-Lafosse, substitat da procureur général, a dit : « Messieurs, le sentiment de l'honneur national est parmi nous le plus irritable de tous. Un gouvernement qui serait considéré comme placant la France dans une situation déshonorante pour elle, comme la mettant aux genoux et à la merci de l'Europe, serait par ce seul fait un gouvernement flétri dans l'opinion. Il n'aurait pas les premières conditions de la vie. Les partis le savent, car depuis que par une politique où l'habileté s'est alliée avec la modération, le gouvernement de 1830 a su maintenir la paix européenne, les partis n'ont pas manque de dire que cette paix, le gouver nement l'avait achetée par des conces

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sions sans dignité et sans mesure, qu'il avait obtenu ce qu'on a nommé une paix à tout prix.

> Telle a été en particulier la tactique du parti qui se rattache à la défense de la dynastie déchue en juillet, et cela s'explique très-facilement. Les espérances de ce parti reposaient tout entières sur la guerre ; il avait dû calomnier la paix, parce que le maintien de la paix a fait son désespoir.

Tel est, Messieurs, le caractère qui est imprimé spécialement dans l'article que nous vous dénonçons aujourd'hui. Il a cela de particulier, que ce n'est pas seulement aux agents responsables du pouvoir, à un systéme ministériel, qu'il fait remonter la responsabilité de cette politique présentée par lui comme honteuse; c'est le roi lui-même qu'il met en avant, qu'il prend corps à corps, et auquel le parti fait remonter le blâme de ce système.

Le but de l'article est écrit dans son titre même: Situation de la France actuelle à l'égard des autres puissan

ces. "

Ici M. l'avocat-général donne lecture de tous les paragraphes, en les accompagnant d'un court commentaire.

Le rédacteur de l'article n'attaque pas seulement le système gouvernemental, mais le roi lui-même. On y lit ces propres expressions : « Louis-Philippe, en abandonnant les Polonais, ses alliés naturels, a voulu régénérer sa couronne par le baptême du sang d'autrui. Pour être admis dans la Sainte-Alliance que ne ferait-il pas ? »

Non content d'attaquer aussi indécomment le roi, son gouvernement, les Chambres, tous les dépositaires du pou voir, le rédacteur s'en prend encore à la garde nationale elle-même, en disant:

tation à la haine et au mépris du gouvernement du roi.

Me Hennequin, dans une plaidoirie très-développée, a entrepris d'établir que l'article inculpé ne contient rien de plus fort que la polémique habituelle des journaux de la même couleur. 11 pense que l'on peut sans délit présenter la révolution de juillet comme née de l'insurrection. Les attaques du journaliste contre une politique méticuleuse sont l'usage du droit, accordé nommément par la loi de 4822, de discuter ét d'attaquer les actes des ministres. Il n'y a rien, suivant lui, dans l'article qui soit de nature à faire remonter jusqu'au roi lui-même le blâme des actes de son gouvernement.

Après les répliques de MM. Partarieu-Lafosse et Hennequin, M. Dupuy, president de la Cour, a fait le résumé des débats.

Les jurés ont délibéré pendant cinq à six minutes. M. de Perdrauville, déclaré non coupable sur les deux questions, a été acquitté.

6. Malte. Cholera. Il paraît que la maladie s'est d'abord déclarée dans une maison de charité située dans le faubourg Lavalette et appelée la Floriana, ou environ 750 vieillards infirmes sont entretenus aux frais de l'état, et que de la elle se serait répandue dans diverses autres parties de l'île. Du 9 juin au 3 juillet, on a compté 1084 cas, dont 663 décès. Le fléau n'avait pas encore atteint son plus haut degré d'intensité, car le nombre des cas variait de 60 à 70 par jour, jusqu'à 110 et 120. Comme cette cruelle maladie a principalement sévi contre les classes pauvres, les cas ont été moins nombreux parmi les troupes de la garnison et les marins de l'escadre. Un seul officier du 47° règiment asuccombé. Les Maltais, même ceux qui appartiennent aux classes les plus aisées, manifestaient des craintes sérieuses et redoutaient surtout la contagion du cho

Les bourgeois de Paris ne compren nent l'honneur national que dans l'enceinte des barrières, et les parasites de tout ce système quí, assis autour d'un budget de 1,800 millions, défendent aujourd'hui les Tuileries, seraient ca-léra; aussi, un grand nombre de familpables de porter en tribut à l'ennemi les têtes des héros de juillet, s'il fallait cet holocauste pour qu'ils pussent continuer à dévorer tranquillement la France. »

De pareilles assertions constituent, aux yeux de M. l'avocat-général, le double délit d'offense au roi et d'exci

les se sont retirées dans leurs maisons de campagne. Cet exemple a produit le plus mauvais effet sur le peuple, qui a refusé d'ensevelir les morts. Un acte du conseil investit de pouvoirs extraordinaires le gouverneur sir Henry Frédérick Bouvrie. Les médecins anglais et maltais ont fait prenve de zéle

et d'énergie et ont donné le meilleur exemple en prodiguant leurs soins à des centaines de malades qu'ils ont arrachés à une mort certainc.

Le choléra n'en continua pas moins à faire d'affreux ravages. Au 4 août on comptait 7,456 personnes qui avaient été attaquées par le fléau, sur une population de 120,000 âmes; 3,374 avaient succombé, Le fléau était alors dans sa période de décroissance.

Les décès du 3 au 5 septembre n'ont été que de 22, ce qui ne fait guère que 7 morts par jour. Les hôpitaux militaires et ceux de la marine n'ont aucun malade, et les Anglais qui résident à Malte n'ont pas éprouvé une seule at teinte; cette circonstance est aussi remarquable qu'elle est neuve, dans la marche et le caractère de cette maladie extraordinaire, et digue de l'attention des gens de l'art. Quelle que soit leur opinion à cet égard, l'observation générale conduit à cette conclusion, qu'une diete saine et substantielle, aidée d'un genre de vie prudent et modéré, est le meilleur préservatif contre le fléau; car les naturels qui, dit-on, mangent peu de viande, et dont l'attachement à leur religion les porte à faire maigre et à jeûner deux et trois jours par semaine, malgré la dispense de l'évêque de Malte qui leur permet de se nourrir de viande, étaient généralement emportés au bout de quelques heures, leur constitution, affaiblie par une nourriture trop peu substantielle, ne leur permettant pas de lutter avec avantage contre l'attaque du fléau.

8.Paris. Theatre de l'Opéra-Comique. 1 représentation de LES ETATS DE BLOIS, drame lyrique en trois actes, paroles de MM. Planard et Saint-Georges, musique de M. Onslow.- L'assassinat du duc de Guise est un événement trop connu, et la manière dont MM. Planard et Saint-Georges l'ont disposé pour le théâtre, n'a rien d'assez remarquable, bien que leur pièce renferme quelques belles scènes, pour que nous nous y arrêtions long-temps. Le sujet est bien grave pour l'Opéra-Comique,et appelle une musique puissante et profonde, dont ni les chœurs, ni l'orchestre, ni la plupart des chanteurs de ce théâtre ne semblent pouvoir soutenir le poids. Cette musique, M. Onslow, auteur d'un grand

nombre de quatuors et de quintettes, admirés dans toute l'Europe, était ausi capable que qui que ce soit de la faire, et il n'y a pas manqué. Généralement marquée au cachet d'une belle et large ordonnance, d'un style franc, vigonreux, incisif, d'une intention dramatique bien évidente et bien rendue, elle a reçu un brillant accueil. Malheureusement ce n'est pas dans un théâtre comme celui-ci que cette musique, savante et hardie, mais plus riche de travail que de mélodie et de nouveauté, pouvait être dignement appréciée ; et, si son succès n'a pas eu la durée qu'il aarait dû avoir, cela tenait à des conditions tout-à-fait indépendantes du composi

teur.

10. Marche générale du choléra en Europe. - La Gazette médicale de Paris, qui poursuit ses recherches sur le cholera-morbus, a publié dans son dernier numéro son opinion sur le mal épidémique qui a désolé et dévaste encore notre vieille Europe. Les considérations qu'elle présente à ce sujet ne peuvent manquer de piquer vivement l'intérêt.

Le cholera ne s'arrête pas. Apres avoir ravagé Naples, Palerme, Rome, il sévità Dantzick, à Berlin; il est à Marseille. Tant qu'il n'avait pas franchi le littoral, nous pouvions nous borner à parler de ses étapes, du chiffre de ses victimes; 'mais le voici en France, le voici dans tout le midi; avec lui renaissent les questions, l'intérêt, les craintes qui se rattachent à sa présence. Comment est-il venu? Comment se propage-t-il? Quel chemin prendra-i-il? Arrivera-t-il jusqu'à nous ? voilà ce que tout le monde se demande à Paris; et c'est bien pis dans les parties du territoire qui se trouvent entre l'épidémie et nous. Et pourtant que d'irrégularités dans sa marche, que de bizarrerie dans son mode de propagation! Il est à Naples, il respecte presque toute la côte, épargne la Calabre, franchit quarante lieues de mer et ravage Palerme. Puis, suivant le littoral, il se montre à Livourne, revient sur ses pas pour décimer Rome, épargne la Toscane, le duché de Modène, traverse le golfe de Gênes et paraît à Marseille, laissant entre sa dernière résidence et son point de départ, la Corse et la Sardaigne. Pour comble de bizarrerie, en méme

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