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dollars (8,500,000 fr.) pour la cession Gdes terrains, qui valent plusieurs millions, pour un territoire riche et productif et aussi grand qu'un royaume d'Europe. Le gouvernement ne voulut leur donner qu'un million de dollars. Telle, du moins, a été la décision prise au Capitole, ce palais magnifique, désigné par les Indiens « la Maison de conférence de leur grand-père». On fuma des calumets; des présents furent donnés, et toutes les cérémonies accoutumées des Indiens furent strictement et solennellement observées pendant le conseil. Cependant la sagacité supérieure des visages pâles prévalut; et enfin, le pays natal, les terrains de chasse de ces pauvres sauvages, ces lieux consacrés par les ossements de leurs pères, et qui leur sont chers par de nombreuses traditions et des légendes d'amour et de guerre, ont été vendus aux Américains pour un million de dollars! Cette somme doit leur être payée en argent, partie en bons portant intérêt, partie en marchandises, et partie enfin en dividendes annuels dans l'espace de vingt années,

D'autres tribus doivent arriver des parties les plus éloignées de l'ouest pour conclure de semblables marchés, qui seront sans doute aussi équitables et non moins paternels.

Pour revenir à ces Indiens, on peut dire que jamais sauvages plus hideux n'étaient venus au milieu d'un peuple civilisé. Leur nombre se compose d'in. dividus des deux sexes; et au moment où S, A. R. leur prince passait dans l'avenue du Capitole, presque dans un état de nudité absolue, S. M. la reine suait sang et eau, portant sur son dos son illustre poupon, soigneusement enveloppé dans une couverture, S. M., pour faire mieux ressortir la dignité et la noblesse de sa personne, portait sur sa coiffe une grande paire de cornes. S. M. a voulu relever ses grâces natu relles, en faisant peindre sur son dos nerveux une énorme paire de mains. Les têtes de tous ces sauvages sont rasées, à l'exception d'une touffe de cheyeux qu'ils laissent croître sur le haut et qu'ils ornent de peaux de serpent et de plumes.

Ces sauvages ont visité le théâtre : on donnait la représentation de la Mer profonde. Quand mademoiselle Nelson

parut, tous ces Indiens furent simultanément frappés de l'éclat de sa beauté. L'un d'eux, se levant brusquement, jeta sur la scène, en applaudissant, sa coiffure à plumes, qui roula aux pieds de la belle actrice. L'interprète expliqua cette démonstration: c'était un hommage rendu à la beauté; la pièce continua. Mademoiselle Nelson s'inclina gracieusement. Un couplet chanté avec goût valut à l'actrice un nouvel hommage d'un autre Indien. Mais dans la scène suivante, lorsque cette charmante personne parut avec les plumes des Indiens disposécs en guise d'ailes, l'enthousiasme de ces sauvages ne connut plus de bornes, bien que les Sioux, leurs rivaux, pendant toutes ces démonstrations, semblassent se retrancher dans un froid dédain. Un troisième chef indien s'avança sur la scène, et déposa aux pieds de l'actrice sa magnifique robe de buffle. L'interprète traduisit ainsi cet hommage :

Je vous fais ce présent pour vous prouver que j'apprécie la beauté des dames de Washington. »

Les autres Indiens se mirent en devoir d'ôter leurs robes et de se déshabiller. Mademoiselle Nelson les remercia; et, faisant un geste pour demander le silence, elle leur dit :

R

Je regrette de ne pouvoir pas vous adresser la parole dans votre langue; mais je vous estime autant que les fils de mon souverain..

Puis elle distribua à chacun de ses admirateurs une plume blanche d'autruche; ils en couronnèrent aussitôt leurs têtes guerrières. Quand l'interprete eut exprimé en indien ce que venait de dire l'actrice, toutes les tribus indiennes se levèrent, et les acclamations ébranlérent les murs du théâtre. On entendit retentir, par-dessus toutes ces voix confuses, le cri de guerre d'une des tribus, Les témoins auriculaires de cette scène n'oublieront jamais l'effet produit par ces mâles et fiers accents. Tout-à-coup on vit pleuvoir sur la scène des robes de buffles, des peaux de serpents, des massues, des armes de toute espèce; et si on les avait laissé faire, bientôt on eût vu les sauvages admirateurs de la belle actrice se mettre, en son honneur, dans un état de nudité. complète. Heureusement pour les da, mes, mademoiselle Nelson, dans cette dernière scène, était censée transportée

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dans les cieux. Un nuage l'enleva, et elle disparut au bruit des acclamations les plus bruyantes; et pendant quelque temps se prolongèrent les démonstrations de l'enthousiasme le plus vif et le plus grotesque. Tous les jours ces tribus se sont livrées à leurs danses habituelles, et ont entonné leurs chants de guerre en présence de milliers de citoyens de Washington attirés par la nouveauté de ce spectacle.

16. Académie royale de Musique. Première représentation de LA CHATTE MÉTAMORPHOSÉE EN FEMME, ballet-pantomime en trois actes de MM. Coraly et Duveyrier, musique de M. Montfort. -La fille d'un certain empereur de la Chine veut épouser un pauvre écolier, et fait si bien que S. M., frappée d'une éclipse de soleil qu'il prend pour un arrêt du ciel, consent

ce mariage. Mais cet écolier, le plus imbécille des écoliers qui ait jamais existé en Chine ou ailleurs, refuse la main de la princesse pour rester fidèle à une grosse chatte blanche dont il est amoureux fou. La princesse, ainsi dédaignée, se met en tête de guérir l'écolier de sa passion animale en faisant elle-même la chatte, et en lui inspirant peu à peu de l'amour par ses manières de chatte. A ces causes, mademoiselle Fanny Elssler'baisse le dos, se plie en deux, s'accroupit, saute à droite et à gauche, donne autant que possible à ses deux pieds la ressemblance et l'agilité de quatre pattes, court après un peloton de fil, leche du lait dans une soucoupe, renverse une cage, guette une souris, etc. De bonne foi, n'y avait-il pas un meilleur usage à faire de cette taille élégante, de ces mouvements moelleux, de cette légèreté gracieuse, de cette mine agacante? Quoi qu'il en soit, le public a laissé passer cette pompeuse niaiserie, cette chinoiserie chorégraphique, séduit, enivré qu'il était par les adorables chatteries de mademoiselle Fanny Elssler, et aussi par des décorations et des costumes d'une richesse éblouissante, d'une recherche et d'une vérité tout-à-fait originale et curieuse.

Un événe-
17. Incendie et suicide.
ment horrible vient de se passer dans la
maison rue des Amandiers, n° 19.

Depuis assez long-temps l'une des

mansardes de cette maison était occupée
par la femme Bachelier, petite vieille
de soixante-dix à soixante-quinze ans,
qui, tout en recevant de nombreux se-
cours du bureau de charité, trouvait
chaque matin de l'argent pour se gri-
ser; mais en revanche, elle était tou-
jours dans le dénuement le plus absolu,
quand arrivait le moment de payer son
terme. Peu jaloux de conserver éter-
nellement au nombre de ses locataires
cette femme, dont l'intempérance était
d'ailleurs un objet permanent de scan-
dale dans sa maison, son propriétaire se
décida, pour en finir, à lui donner congé.
La femme Bachelier devait done démé-
nager le 8 du courant. Mais la petite
vieille tenait à ses habitudes, il lui répu-
guait infiniment de chercher gite ail-
leurs, et, s'imaginant qu'en pareille oc-
currence c'était tout obtenir que d'obte-
nir quelques jours de répit, elle supplia
d'une voix tellement pitoyable son pro-
priétaire de lui rendre ce dernier ser-
vice, que, touché de commisération,
celui-ci lui accorda jusqu'au 12, jour
auquel les lieux devaient être irrémissi-
blement vidés.

Cependant le jour fatal était arrivé, et la femme Pachelier, ne se pressant pas d'exécuter le déménagement convenu, le propriétaire lui signifia fort sérieusement que le dernier délai étant écoulé, elle eût à deguerpir au plus vite, faute de quoi il réclamerait l'intervention du commissaire de police du quartier. La vieille alors exhala son dépit par les injures les plus grossières, et répondit que le déménagement ne serait pas long, que le lendemain au matin le commissaire pourrait venir, qu'il n'aurait pas la peine de la mettre sur le pavé.

Samedi matin, en effet, vers dix heu-
res, on s'aperçut qu'une fumée épaisse
s'échappait de la chambre occupée par
la femme Bachelier, et se répandait
dans les escaliers. On se hâta aussitôt
d'enfoncer la porte, qui était fermée à
l'intérieur, et l'on vit, en s'efforçant de
pénétrer dans la chambre, que tout y
était en feu. Les pompiers du poste voi-
sin accoururent, et leurs efforts, joints
à ceux des habitants de la maison, les
rendirent bientôt maîtres de l'incendie,
qui déjà avait envahi la pièce voisine.

Quant à la chambre même de la femme
Bachelier, d'où s'exhalait une odeur de

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roussi très-prononcée, cette chambre offrait un épouvantable spectacle. Au fond de la pièce était, en forme de bûcher, un échafaudage de matières combustibles telles que lit, chaises, commode, paillasse et matelas, et au milieu gisait le cadavre à demi calciné de la petite vieille, qui, pour se venger, avait, en méditant sa propre ruine, médité celle de son propriétaire, espérant sans doute que le feu, ainsi allumé par ses mains, se propagerait dans le reste de la maison et en déterminerait l'incendie.

48. Versailles. Mariage de la princesse Marie d'Orléans avec M. le duc Alexandre de Wurtemberg. (Voyez plus haut, page 45.)--Le mariage a été célé bré hier soir, à neuf heures, au château royal de Trianon.

A six heures, le roi a dîné en famille dans ses appartements; un banquet de cent vingt couverts, présidé par le général Atthalin, premier aide-de-camp de S. M., et par madame la marquise de Dolomieu, dame l'honneur de la reine, réunissait dans la galerie la maison du roi tout entière, celle de la reine, celle de M. le duc et de madame la duchesse d'Orléans, celles des princes et des princesses, MM. les ministres, les témoins qui devaient signer l'acte de mariage, les principales autorités civiles de Versailles; enfin, quelques personnages éminents, parmi lesquels on remarquait M. le maréchal comte Lobau. M. de Sémonville et M. le duc Decazes.

A huit heures et demie, le roi a passé dans la salle des actes; S. M. donnait le bras à S. A. R. la princesse Maric, et M. le duc Alexandre à la reine. Venaient ensuite le roi et la reinejdes Belges, M. le duc et madame la duchesse d'Orléans, M. le prince Paul de Wurtemberg et madame Adélaïde, M. le duc Ernest et la princesse Clémentine, et enfin les deux jeunes princes.

Après la signature de l'acte civil, le roi s'est rendu à la chapelle, où le mariage catholique a été célébré par M. Pévêque de Versailles, assisté de MM. les évêques de Meaux et de Maroc.

M. l'évêque de Versailles a adressé aux époux une touchante allocution empreinte de la foi la plus tolérante et la plus éclairée.

La cérémonie luthérienne a été faite par M. le pasteur Cuvier, assisté d'un

ministre de la même communion. Le langage de M. Cuvier a été plein d'onction et de sagesse. Ces deux discours étaient puisés à la même source, l'esprit évangélique.

24. Paris. Théâtre Français. Première représentation de LA MARQUISE DE SENNETERRE, comédie en trois actes et en prose, par MM. Mėlesville et Duveyrier. Abandonnée par son mari, au fond de la Bretagne, quoique jeune et nouvellement mariée, la marquise de Senneterre prend la plus étrange résoTution qui soit jamais tombée dans la tête d'une femme modeste et timide, comme on nous la représente d'abord. Elle imagine de venir, sous un faux nom, à Paris chez Marion Delorme, et de lui demander le secret de plaire et de séduire, de prendre d'elle des leçons de coquetterie, à cette seule fin d'en user auprès du marquis, dès qu'elle l'aura retrouvé, pour ramener le volage et reconquérir son cœur. Marion, après avoir ri aux éclats de cette idée singulière, se prête charitablement aux désirs de notre marquise provinciale. Les ruses, les petits manéges, les sourires, les pleurs, les œillades, les évanouissements, toutes les ressources, en un mot, de la stratégie féminine, Marion les dévoile et les explique à sa nouvelle écolière. Celle-ci profite vite et met immé. diatement la théorie en pratique, au milica des amants de tous les rangs admis auprès de la célèbre courtisane à des titres différents. Mais voici bien autre chose. Madame, dans le nombre de ces amants, rencontre son mari luimême caché sous le nom de Léonard, éperdament amoureux de Marion, et son ami de cœur. Il semble, à cette rencontre, qu'une explication va s'en suivre et que la piece sera terminée; que du moins un gentilhomme, un homme d'honneur se respectera assez pour retirer au plus vite sa femme du lieu où elle s'est fourvoyée. Cependant le marquis de Senneterre n'en fait rien, et il prend lestement son parti de la conduite de la marquise. Au reste, il n'échappe pas plus que les autres aux manœuvres que celle-ci emploie pour plaire, et l'action arrive, par des complications assez plaisantes, jusqu'au moment où Marion Delorme s'aperçoit qu'elle est dupe de son propre ouvrage, qu'elle a

introduit chez elle et instruit une rivale qui lui vole toutes ses conquêtes, sans en excepter le jeune et beau Léonard, la plus chère de toutes. Alors une lutte de femmes, longue et sérieuse, s'établit entre Marion et la marquise. Il y a des fuites, des jeux de scène, des déguise ments, des quiproquos, des projets d'en lèvement, des plaintes, des reproches, des soupirs, des menaces. Enfin la fortune se prononce pour la cause légitime; le marquis, plus amoureux que, jamais, tombe aux pieds de la marquise,

dre à côté de moi, ça sera une consola. tion du moins...

Ah ça! eh! vous autres, bonnes gens qui m'écoutez! s'il y a quelqu'un de la profession ici, prenez conseil de ce qui m'arrive: quand vous volez un homme, tuez-le-moi sur place; alors, vous n'avez rien à craindre : les morts ne parlent pas. J'ai volé bien des gens, moi..., je puis m'échapper de prison et en voler bien d'autres encore... Mais, par le ciel et l'enfer, tout homme que je vole à l'avenir, je le tue. »

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Le triomphe de l'épouse sur la mafSur ma tête soit le sang de quicontresse, de la femme honnête sur la courque vous tuerez! s'écria le juge Cauftisane, tel est le but de cette œuvre, field.... M. le shériff, faites venir un but sérieux et moral, mais qui nous sem cha pentier, qu'on dresse le gibet, qu'on ble manqué, puisque c'est par les armes de celle-ci que celle-là a vaincu, et qu'il apporte une bière à l'instant, à la mia fallu que, pour fixer son mari, la mar-nute, car je ne quitterai point ce siége quise de Senneterre s'instruisît à l'école de Marion Delorme et mit en pratique ses règles de conduite. Il y a d'ailleurs des longueurs, des détails trop multipliés, une profusion d'incidents et d'épisodes, dans cette comédie, dont l'alJure générale est celle d'un vaudeville distribué en trois grands actes. Cependant des effets piquants, des scènes ingénieuses et bien faites, ce mouvement d'action et de personnages, ce pêle-mêle de surprises auxquelles le public est toujours pris, ont fait réussir la pièce de MM. Melesville et Duveyrier.

25. Corck (Irlande). Cour d'assises. Vol a main armée sur le grand chemin.

Aux dernières assises de Cork (Ir fand). présidées par lord Caufield, deux hommes élaient accusés de vol à main armée sur le grand chemin. Quand le jury fat rentré rapportant un verdict de culpabilité contre les deux prévenus, le plus âgé, James Rogburn, sé tourna vers le plus jeune, William Giddy, et avec une figure où se peignaient à la fois la fureur, la méchanceté et la soif de la vengeance, il s'é.

cria:

Que l'âme de Satan étouffe ton âme, cœur de poule, va! N'avait été de toi, j'aurais envoyé au fond des enfers cet imbécille qui vient de déposer contre nous. Je voulais le tuer, et les morts ne parlent pas; mais toi, lâche que tu es, tu m'as embêté pour le laisser aller. Chien, enfant de chienne que tu es, si je suis pendu, du moins je të verrai pen

si c'est un homme. Quant à vous, Wilque je n'aie vu exécuter cet homme... Tam Giddy, dont le cœur corrompu par l'influence de ce moustre inferual a cependant retenu quelques principes d'humanité, vous ne périrez pas avec lui. Je ne puis me dispenser de prononcer contre vous la sentence de mort; mais, au nom de S. M., je vous accorde un rèpit pendant lequel je me fais fort d'obtenir Ainsi, chacun sera rémunéré suivant ses pour vous une commutation de peine... œuvres... Ainsi, j'enlèverai du moins à ce misérable d'abominable satisfaction qu'il se réservait encore en ce monde. »

Le sheriff obéit. Les juges et les jurės restèrent en séance, et les accusés vis-àvis d'eux; nul ne broncha dans l'audi. toire, nul ne quitta sa place. Pendant une heure un quart il y eut dans cette enceinte un silence comme celui de la mort, et l'on entendait distinctement les clous et le marteau des charpentiers qui dressaient le gibet et la plate-forme dans la cour même du palais. Quand cela fut fait, le sheriff entra dans la salle, accom pagué des sous-sheriffs; une fenêtre s'ouvrit: on y porta James Rogburn, qui, alors seulement, recouvra la force d'articuler des jurements et des blasphemes, qu'il continua jusqu'à ce que le bourreau l'eût lancé dans l'éternité.

En vérité, c'est quelque chose de bien grave que ce pouvoir d'un lord juge d'Angleterre, dont le jugement condamne et frappe ainsi; mais il faut avouer que, dans ce cas, pas un murmure ne se fit entendre pour blåmer la

constitution d'avoir mis un tel pouvoir dans les mains d'un seul homme.

31. Paris. Théâtre de l'Opéra-Comique. Première représentation de PiQUILLO, opéra-comique en trois actes; paroles de M. Alexandre Dumas, musique de M. Monpou. Pour l'effronterie, l'audace à faire ses coups, l'habileté à se tirer des mauvais pas. Piquillo est le Robert Macaire de l'Espagne. Rien de plas plaisant que la manière dont il mystifie un digne alcade pendant tout le cours de la pièce. Tantôt il se fait aider par lui dans ses vols, tantôt il lui donne sur son propre compte, à lui Piquillo, des renseignements qui, comme on le pense bien, sont tout opposés à la vérité; tantôt il le vole luimême, cet excellent alcade, et enfin il vient, sous un habit de moine, lui demander un sauf-conduit qu'il obtient fort adroitement. Cette pièce, qui renferme plusieurs situations comiques de bon goût et semées de mots spirituels, et où abondent des incidents romanesques dont nous avons négligé de parler, amuse et amuserait encore davantage si la fable en était plus simple, le sujet mieux disposé et l'intrigue moins obscure. Quant à la musique, elle confirme les preuves de talent que M. Monpou a déja données dans les Deux Reines et dans le Luthier de Vienne. Souvent, vive et gaie, originale dans la coupe des phrases, et heureuse dans le choix des mélodies, qui ont presque toutes de l'ex, presssion et dont plusieurs sont pleines de charme, la nouvelle partition atteste encore que le style du compositeur s'est élargi sans rien perdre de la grâce et de la fraîcheur qui le caractérisaient jusqu'alors.

NOVEMBRE.

1er, Lyon. Cas extraordinaire de lethargie. On écrit de cette ville:

Vendredi dernier, M. Deschamps, riche habitant de la Guillotière, mourut à la suite d'une courte indisposition. Ses obsèques furent commandées pour le lendemain, samedi soir; mais on réfléchit que la cérémonie aurait lieu de nuit, et on la renvoya à dimanche matin. Ce jour-là, de bonne heure, arrivérent devant la maison du défunt, pretres et bedeaux, inspecteurs des

convois et porteurs. Au moment fatal où on allait clouer sur la face du mort la planche de sapin qui ferme la bière, quel ne fut pas l'étonnement et l'effrai de tous les assistants, en voyant le corps se lever dans son suaire, se mettre sur son séant et demander à manger!

»Tout le monde allait fuir épouvanté, lorsqu'on reconnut que ce n'était point, un fantôme, mais bien M. Deschamps lui-même, qui revenait très-heureusement d'un sommeil lethargique qu'on avait pris pour la mort. On lui a prodigué de suite tous les soins nécessaires, et son état ne laisse plus aucune inquietude. Il est fort heureux que l'enterrement n'ait pas eu lieu le samedi, ainsi qu'il avait d'abord été convent, car M. Deschamps eût incontestablement succombé, lors de son réveil, aux tourments de la faim et du déses poir, comme cela s'est vu quelquefois. Il a affirmé que dans son état léthargique il entendait tout ce qui se disait et se passait autour de lui, sans pouvoir faire un mouvement ni exprimer ses sensations; supplice horrible qu'il faut avoir éprouvé pour le comprendre, et qui doit mettre plus que jamais l'autorité en garde contre les inhumations précipitées, »

13, Valdivia (Chili). Tremblement de terre.-Un tremblement de terre vient de se faire sentir, à partir du 7, dans une grande partie de la république chilienne. Dans le nord, le mouvement fut assez faible; mais dans le sud, et surtout à Valdivia et à Chiloë, il fut tellement intense, qu'au dire des habitants, il surpassait de beaucoup celui qu'on avait ressenti en 1835. On pouvait à peine se tenir debout, et beaucoup de personnes furent renversées ; des secousses très-fortes se succédèrent à courts intervalles pendant des jours entiers. Les maisons de Valdivia, Osorno, San Carlos, etc., furent plus ou moins endommagées, mais non détruites, grâces à la flexibilité des bois dont elles sont construites et à leur peu de hauteur, la plupart n'ayant qu'un rez-de-chaussée; mais tous les édifices en pierre furent entièrement renversés.

A Chiloe, ce tremblement de terre fut précédé d'une forte tempête avec une pluie abondante, la mer fut très. agitée, et, dans l'espace d'une demi

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