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quelques cas où la poursuite de la partie civile provoque nécessairement l'action de la partie publique et se confond avec elle (1). » Il est un seul point qui les divise et les caractérise à la fois : l'action publique, lors même qu'elle provoque le succès de l'action civile, ne peut poursuivre, quand elle agit isolément, que dans l'intérêt général; l'action civile, lors même qu'elle appelle le châtiment, ne peut le requérir.

Telles sont les règles qui régissent les deux actions. Nées d'un même fait, mais puisant leur existence dans la double lésion produite par ce fait, elles se distinguent l'une de l'autre par l'intérêt différent qu'elles représentent, par leur caractère nécessairement divers, par le but vers lequel elles tendent. Elles se rapprochent, d'un autre côté, malgré ces dissidences, parce qu'elles ont l'une et l'autre un objet commun, la réparation complète du mal causé par l'infraction.

Essayons maintenant de résumer toute cette discussion en formulant aussi nettement que possible les règles qui en sont les conséquences.

Tout fait de l'homme qui cause un dommage oblige son auteur à le réparer (2). Si ce fait est purement privé, l'action qu'il produit n'est soumise qu'aux règles du droit civil.

S'il constitue une infraction à la loi pénale, et qu'il lèse à la fois l'ordre social et l'intérêt pri

(1) Arr. cass. 10 mars 1827. (Dev. et Car., tom. VIII, p. 545.) (2) C. civ., art. 1382, 1383.

vé, deux actions coexistent aussitôt, l'action publique et l'action civile.

Ces deux actions, longtemps confondues dans la pratique, ont été séparées par la jurisprudence du seizième siècle, et cette distinction, soigneusement conservée par notre législation, est la première règle de la matière(1).

L'action publique a pour objet de punir l'atteinte portée à l'ordre social (2); son but est l'application d'une peine (3). Elle consiste dans le droit, qui appartient à la société, de poursuivre la répression des infractions commises à ses lois.

L'action civile a pour objet la réparation du dommage que le délit a causé (4). Elle consiste dans le droit qui appartient à la partie lésée de réclamer l'estimation de ce dommage.

La première appartient à la société entière; car son but est d'assurer l'ordre social qui est la propriété commune des citoyens. L'autre appartient à la personne qui a souffert du dommage, car la réparation de ce dommage n'intéresse que cette personne.

L'action publique est déléguée par la société, d'abord au pouvoir exécutif, dont elle constitue l'une des attributions les plus importantes, ensuite, et directement, à l'autorité judiciaire elle-même,

(1) C. inst. crim., art. 1, 2 et 3.

(2) Art. 5 du C. du 3 brum. an iv. (3) Art. 1 du C. d'inst. crim.

(4) Art. 6 du C. du 3 brum. an Iv et 1 du C. d'inst, crim,

pour suppléer, s'il est nécessaire, à la surveillance du pouvoir exécutif et pour veiller à ce qu'elle soit exactement appliquée. Elle ne peut être exercée que par les officiers du ministère public, nommés et délégués à cet effet par le pouvoir exécutif, soit que ces magistrats agissent par les ordres de ce pouvoir ou de leur propre mouvement, soit qu'ils reçoivent leur impulsion de l'autorité judiciaire.

L'action civile est exercée, directement, et en son nom, par la partie qui a été lésée. Comme elle ne représente qu'un intérêt privé, l'intérêt que la pratique a nommé civil, par opposition à l'intérêt public, elle ne dépend que de cette partie.

Ainsi se trouvent résumées, dans ces deux actions, les trois règles que nous avons incessamment retrouvées dans la législation : le droit de l'État de poursuivre les crimes; le droit de la justice d'intervenir pour provoquer cette poursuite; le droit des parties lésées de concourir à l'intenter.

Ainsi se trouvent résolues les questions que nous avions posées, au seuil de ce chapitre, sur la source, les caractères différents et la fin des deux actions.

CHAPITRE III.

PAR QUELLES PERSONNES SONT EXERCÉES L'ACTION PUBLIQUE ET L'ACTION CIVILE.

§ 105. Exposé et division de la matière de ce chapitre.

$ 105.

Nous avons établi, en thèse générale, dans le chapitre précédent : 1° que l'action publique est exercée par les officiers du ministère public, sous la surveillance et la direction du pouvoir exécutif et des cours royales; 2° que l'action civile est exercée par les personnes que les crimes et délits ont pu léser.

L'ordre des matières veut que nous recherchions maintenant quelles sont, pour l'exercice de ces deux actions, l'étendue et les limites des droits de chacune des personnes qui concourent à cet exercice.

A l'égard de l'action publique, en effet, il importe de connaître avant tout quels sont les fonctionnaires qui sont appelés à la porter devant les différentes juridictions répressives, quelle est la compétence de chacun d'eux, quelles sont, enfin,

les attributions du pouvoir exécutif et des cours royales.

A l'égard de l'action civile, il faut également examiner quelles sont les conditions déterminées par la loi pour que les parties soient admises à la former.

Ce chapitre sera donc divisé en deux sections: La première aura pour objet l'énumération et les pouvoirs des personnes que la loi appelle à la mise en mouvement ou à l'exercice de l'action publique. La deuxième traitera des conditions d'aptitude à l'exercice de l'action civile.

SECTION Ire.

DES PERSONNES QUI CONCOURENT A L'EXERCICE DE L'ACTION

PUBLIQUE.

§ 106. Enumération générale des fonctionnaires auxquels l'action publique est confiée.—Conditions d'aptitude.

§ 107. Droits et compétence des procureurs généraux, des avocats généraux et des substituts du parquet.

§ 108. Droits et compétence des procureurs du roi et de leurs substituts.

S 109. Droits et compétence des commissaires de police, maires et adjoints.

§ 110. Droits et compétence des agents des administrations des contributions indirectes, des douanes et des eaux et forêts.

§ 111. Quelle part prennent les parties civiles dans l'exercice de l'action publique.

§ 112. Attributions des cours royales. Elles mettent en mouvement l'action publique et en surveillent l'application.

§ 113. Surveillance du procureur général près la Cour de cassation, -Sa compétence.

S 114. Surveillance du ministre de la justice.-Sa compétence.

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