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5. La loi n'a le droit de défendre que les actions quisibles. à la société. Tout ce qui n'est pas défendu par la loi ne pent être empêché; et nul ne peut être contraint à faire ce qu'elle n'ordonne pas.

6. La loi est l'expression de la volonté générale. Tous les citoyens ont droit de concourir personnellement, ou par leurs représentans, à sa formation. Elle doit être la même pour tous, soit qu'elle protège, soit qu'elle punisse. Tous les citoyens, étant égaux à ses yeux, sont également admissibles à toutes dignités, places et emplois publics, selon leur capacité, et sans autre distinction que celle de leurs vertus et de leurs talens.

7. Nul homme ne peut être accusé, arrêté ni détenu que dans les cas déterminés par la loi, et selon les formes qu'elle a prescrites. Ceux qui sollicitent, expédient, exécutent ou font exécuter des ordres arbitraires, doivent être punis; mais tout citoyen appelé ou saisi en vertu de la loi, doit obéir à l'instant il se rend coupable par la résistance.

8. La loi ne doit établir que des peines strictement et évidemment nécessaires; et nul ne peut être puni qu'en vertu d'une loi établie et promulguée antérieurement au délit, et légalement appliquée.

9. Tout homme, étant présumé innocent jusqu'à ce qu'il ait été déclaré coupable; s'il est jugé indispensable de l'arrêter, toute rigueur qui ne serait pas nécessaire pour s'assurer de sa personne, doit être sévèrement réprimée par la loi. 10 Nul ne doit être inquieté pour ses opinions, même religieuses, pourvu que leur manifestation ne trouble pas l'ordre public établi par la loi.

11. La libre communication des pensées et des opinions est un des droits les plus précieux de l'homme; tout citoyen peut donc parler, écrire, imprimer librement, sauf à répondre de l'abus de cette liberté dans les cas déterminés par la loi.

12. La garantie des droits de l'homme et du citoyen nécessite une force publique : cette force est donc instituée pour l'avantage de tous, et non pour l'utilité particulière de ceux auxquels elle est confiée.

13. Pour l'entretien de la force publique, et pour les dépenses d'administration, une contribution commune est indispensable; elle doit être également répartie entre tous les citoyens, en raison de leurs facultés.

14. Tous les citoyens ont le droit de constater par eux

mêmes, ou par leurs représentans, la nécessité de la contribution publique, de la consentir librement, d'en suivre l'emploi, et d'en déterminer la quotité, l'assiette, le recouvrement et la durée.

15. La société a le droit de demander compte à tout agent public, de son administration.

16. Toute société dans laquelle la garantie des droits n'est pas assurée, ni la séparation des pouvoirs déterminée, n'a point de constitution.

17. La propriété étant un droit inviolable et sacré, nul ne peut en être privé, si ce n'est lorsque la nécessité publique, légalement constatée, l'exige évidemment, et sous la condition d'une juste et préalable indemnité (1).

CONSTITUTION.

L'assemblée nationale, voulant établir la constitution française sur les principes qu'elle vient de reconnaître et de déclaabolit irrévocablement les institutions qui blessaient la liberté et l'égalité des droits.

Il n'y a plus ni noblesse, ni pairie, ni distinctions héréditaires, ni distinction d'ordres, ni régime féodal, ni justices patrimoniales, ni aucun des titres, dénominations et prérogatives qui en dérivaient, ni aucun ordre de chevalerie, ni aucune des corporations ou décorations pour lesquelles on exigeait des preuves de noblesse, ou qui supposaient des distinctions de naissance, ni aucune autre supériorité que celle des fonctionnaires publics dans l'exercice de leurs fonctions.

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Il n'y a plus ni vénalité, ni hérédité d'aucun office public. Il n'y a plus, pour aucune partie de la nation, ni pour aucun individu, aucun privilége ni exception au droit commun de tous les Français.

Il n'y a plus ni jurandes, ni corporations de professions, arts et métiers.

La loi ne reconnaît plus ni vœux religieux, ni aucun autre engagement qui serait contraire aux droits naturel, ou à la constitution.

(1) Cette déclaration avait été décrétée en août 1789.

TITRE PREMIER.

Dispositions fondamentales garanties par la Constitution. La constitution garantit, comme droits naturels et civils; 1° Que tous les citoyens sont admissibles aux places et emplois, sans autre distinction que celle des vertus et des talens;

2o Que toutes les contributions seront réparties entre tous les citoyens également, en proportion de leurs facultés ;

3° Que les mêmes délits seront punis des mêmes peines, sans aucune distinction des personnes.

La constitution garantit pareillement, comme droits naturels et civils:

La liberté à tout homme d'aller, de rester, de partir sans pouvoir être arrêté, ni détenu, que selon les formes déterninées par la constitution;

La liberté à tout homme de parler, d'écrire, d'imprimer et publier ses pensées, sans que les écrits puissent être soumis à aucune censure ni inspection avant leur publication, et d'exercer le culte religieux auquel il est attaché;

La liberté aux citoyens de s'assembler paisiblement et sans armes, en satisfaisant aux lois de police;'

La liberté d'adresser aux autorités constituées des pétitions signées individuellement.

Le pouvoir législatif ne pourra faire aucunes lois qui portent atteinte et mettent obstacle à l'exercice des droits naturels et civils consignés dans le présent titre, et garantis par la constitution; mais, comme la liberté ne consiste qu'à pouvoir faire tout ce qui ne nuit ni aux droits d'autrui ni à la sûreté publique, la loi peut établir des peines contre les actes qui, attaquant ou la sûreté publique ou les droits d'autrui, seraient nuisibles à la société.

La constitution garantit l'inviolabilité des propriétés, ou la juste et préalable indemnité de celles dont la nécessité publique, légalement constatée, exigerait le sacrifice.

Les biens destinés aux dépenses du culte et à tous services d'utilité publique appartiennent à la nation, et sont, dans tous les temps, à sa disposition.

La constitution garantit les aliénations qui ont été ou qui seront faites suivant les formes établies par la loi.

Les citoyens ont le droit d'élire ou choisir les ministres de leurs cultes.

Il sera créé et organisé un établissement général de secours publics pour élever les enfans abandonnés, soulager les pauvres infirmes, et fournir du travail aux pauvres valides qui n'auraient pu s'en procurer.

Il sera créé et organisé une Instruction publique, commune à tous les citoyens, gratuite à l'égard des parties d'enseignement indispensables pour tous les hommes, et dont les établissemens seront distribués graduellement dans un rapport combiné avec la division du royaume.

Il sera établi des fêtes nationales pour conserver le souvenir de la révolution française, entretenir la fraternité entre les citoyens, et les attacher à la constitution, à la patrie et aux lois.

Il sera fait un code de lois civiles communes à tout le royaume.

TITRE II.

De la Division du Royaume, et de l'Etat des citoyens.

ART. 1. Le royaume est un et indivisible: son territoire est distribué en quatre-vingt-trois départemens, chaque département en districts, chaque district en cantons.

2. Sont citoyens français:

Ceux qui sont nés en France d'un père français ;

Ceux qui, nés en France d'un père étranger, ont fixé leur résidence dans le royaume.

Ceux qui, nés en pays étranger d'un père français, sont venus s'établir en France, et ont prêté le serment civique;

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Enfin ceux qui, nés en pays étranger, et descendant, quelque degré que ce soit, d'un Français ou d'une Française expatriés pour cause de religion, viennent demeurer en France, et prêtent le serment civique.

3. Ceux qui, nés hors du royaume de parens étrangers, résident en France, deviennent citoyens français après cinq ans de domicile continu dans le royaume, s'ils y ont en outre acquis des immeubles ou épousé une Française, ou formé un établissement d'agriculture ou de commerce, et s'ils ont prêté le serment civique.

4. Le pouvoir législatif pourra, pour des considérations importantes, donner à un étranger un acte de naturalisation, sans autres conditions que de fixer son domicile en France, et d'y prêter le serment civique.

5. Le serment civique est : Je jure d'être fidèle à la noir tion, à la loi et au roi, et de maintenir de tout mon pouviola constitution du royaume, décrétée par l'assemblée natio

nale constituante aux années 1789, 1790 et 1791.

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6. La qualité de citoyen français se perd, 1° par la naturalisation en pays étranger; 2 par la condamnation aux peines qui emportent la dégradation civique, tant que le condamné n'est pas réhabilité; 3° par un jugement de contumace, tant que le jugement n'est pas anéanti; 4o par l'affiliation à tout ordre de chevalerie étranger, ou à toute corporation étrangère qui supposerait, soit des preuves de noblesse, soit des distinctions de naissance, ou qui exigerait des vœux religieux.

7. La loi ne considère le mariage que comme contrat civil. Le pouvoir législatif établira pour tous les habitans sans distinction, le mode par lequel les naissances, mariages et décès seront constatés; et il désignera les officiers publics qui en recevront et en conserveront les actes.

8. Les citoyens français, considérés sous le rapport des relations locales qui naissent de leur réunion dans les villes et dans de certains arrondissemens du territoire des campagnes, forment les communes.

Le pouvoir législatif pourra fixer l'étendue de l'arrondissement de chaque commune.

9. Les citoyens qui composent chaque commune ont le droit d'élire à temps, suivant les formes déterminées par la loi, ceux d'entre eux qui, sous le titre d'officiers municipaux, sont chargés de gérer les affaires particulières de la

commune.

Il pourra être délégué aux officiers municipaux quelques fonctions relatives à l'intérêt général de l'Etat.

10. Les règles que les officiers municipaux seront tenus de suivre dans l'exercice, tant des fonctions municipales, que de celles qui leur auront été déléguées pour l'intérêt général, seront fixées par les lois.

TITRE III.

Des Pouvoirs publics.

ART. 1er. La souveraineté est une, indivisible, inalićnable et imprescriptible: elle appartient à la nation; aucune

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