Page images
PDF
EPUB

persévérante des sous-administrateurs, ou si ces derniers compromettent par leurs actes la sûreté ou la tranquillité publique, les suspendre de leurs fonctions, à la charge d'en instruire le roi, qui pourra lever ou confirmer la suspension.

7. Le roi peut, lorsque les administrateurs de département n'auront pas usé du pouvoir qui leur est délégué dans l'article ci-dessus, annuler directement les actes des sous-administratrateurs, et les suspendre dans les mêmes cas.

8. Toutes les fois que le roi aura prononcé ou confirmé la suspension des administrateurs ou sous-administrateurs, il en instruira le corps législatif.

Celui-ci pourra, ou lever la suspension, ou la confirmer, ou même dissoudre l'administration coupable, et, s'il y a lieu, renvoyer tous les administrateurs, ou quelques-uns d'eux, aux tribunaux criminels, ou porter contre eux le décret d'accusation.

SECTION III.

Des Relations extérieures.

Art. 1. Le roi seul peut entretenir des relations politiques au dehors, conduire les négociations, faire des préparatifs de guerre proportionnés à ceux des Etats voisins, distribuer les forces de terre et de mer ainsi qu'il le jugera convenable, et en régler la direction en cas de guerre.

2. Toute déclaration de guerre sera faite en ces termes : De la part du Roi des Français, au nom de la Nation.

3. Il appartient au roi d'arrêter et de signer, avec toutes les puissances étrangères, tous les traités de paix, d'alliance et de commerce, et autres conventions qu'il jugera nécessaires au bien de l'Etat, sauf la ratification du corps législatif.

CHAPITRE V.

Du Pouvoir judiciaire.

Art. 1. Le pouvoir judiciaire ne peut, en aucun cas, être exercé par le corps législatif, ni par le roi.

2. La justice sera rendue gratuitement par des juges élus à temps par le peuple, et institués par lettres-patentes du roi, qui ne pourra les refuser.

Ils ne pourront être, ni destitués que pour forfaiture dûment jugée, ni suspendus que par une accusation admise." L'accusateur public sera nommé par le peuple.

3. Les tribunaux ne peuvent, ni s'immiscer dans l'exercice du pouvoir législatif, ou suspendre l'exécution des lois, ni entreprendre sur les fonctions administratives, ou citer devant eux les administrateurs pour raison de leurs fonctions.

4. Les citoyens ne peuvent être distraits des juges que la loi leur assigne, par aucune commission, ni par d'autres attributions et évocations que celles qui sont déterminées par les lois.

5. Le droit des citoyens de terminer définitivement leurs contestations par la voie de l'arbitrage, ne peut recevoir aucune atteinte par les actes du pouvoir législatif.

6. Les tribunaux ordinaires ne peuvent recevoir aucune action au civil, sans qu'il leur soit justifié que les parties ont comparu, ou que le demandeur a cité sa partie adverse devant des médiateurs pour parvenir à une conciliation.

7. Il y aura un ou plusieurs juges-de-paix dans les cantons et dans les villes. Le nombre en sera déterminé par le pouvoir législatif:

8. Il appartient au pouvoir législatif de régler le nombre et les arrondissemens des tribunaux, et le nombre des juges dont chaque tribunal sera composé.

9. En matière criminelle, nul citoyen ne pent être jugé que sur une accusation reçue par des jurés, ou décrétée par le corps législatif dans les cas où il lui appartient de poursuivre l'accusation.

Après l'accusation admise, le fait sera reconnu et déclaré par des jurés.

L'accusé aura la faculté d'en récuser jusqu'à vingt, sans donner de motifs.

Les jurés qui déclareront le fait ne pourront être au-dessous du nombre de douze.

L'application de la loi sera faite par des juges.

L'instruction sera publique; et l'on ne pourra refuser aux accusés le secours d'un conseil.

Tout homme acquitté par un juré légal ne peut plus être repris ni accusé à raison du même fait.

10. Nul homme ne peut être saisi que pour être conduit devant l'officier de police; et nul ne peut être mis en arrestation ou détenu qu'en vertu d'un mandat. des officiers de police, d'une ordonnance de prise-de-corps d'un tribunal, d'un décret d'accusation du corps legislatif dans le cas où il Jui appartient de le prononcer, ou d'un jugement de condam nation à prison ou détention correctionnelle.

11. Tout homme saisi et conduit devant l'officier de police sera examiné sur-le-champ, ou, au plus tard, dans les vingtquatre heures.

S'il résulte de l'examen qu'il n'y a aucun sujet d'inculpation contre lui, il sera remis aussitôt en liberté; ou, s'il y lieu de l'envoyer à la maison d'arrêt, il y sera conduit dans le plus bref délai, qui, en aucun cas, ne pourra excéder trois jours.

12. Nul homme arrêté ne peut-être retenu s'il donne caution suffisante, dans tous les cas où la loi permet de rester libre sous cautionnement.

13. Nul homme, dans le cas où sa détention est autorisée par la loi, ne peut être conduit et détenu que dans les lieux légalement et publiquement désignés pour servir de maison d'arrêt, de maison de justice ou de prison.

14. Nul gardien ou geolier ne peut recevoir ni retenir aucun homme qu'en vertu d'un nandat, ordonnance de prise-de-corps, décret d'accusation, ou jugement mentionné dans l'article 10 ci-dessus, et sans que la transcription en ait été faite sur son registre.

15. Tout gardien ou geolier est tenu, sans qu'aucun ordre puisse l'en dispenser, de représenter la personne du détenu à l'officier civil ayant la police de la maison de détention, toutes les fois qu'il en sera requis par lui.

La représentation de la personne du détenu ne pourra de même être refusée à ses parens et amis, porteurs de l'ordre de l'officier civil, qui sera toujours tenu de l'accorder, à moins que le gardien ou geolier ne représente une ordonnance du juge, transcrite sur son registre, pour tenir l'arrêté au secret.

15. Tout homme, quel que soit sa place ou son emploi autre que ceux à qui la loi donne le droit d'arrestation, qui donnera, signera, exécutera ou fera exécuter l'ordre d'arrêter un citoyen; ou quiconque, même dans les cas d'arrestation autorisés par la loi, conduira, recevra ou retiendra un citoyen dans un lieu de détention non publiquement et légalement désigné; et tout gardien ou geolier qui contreviendra aux dispositions des articles 14 et 15 ci-dessus, seront coupables du crime de détention arbitraire.

17. Nul homme ne peut être recherché ni poursuivi pour raison des écrits qu'il aura fait imprimer ou publier sur quelque matière que ce soit, si ce n'est qu'il ait provoqué à dessein la désobéissance à la loi, l'avilissement des pouvoirs constitués, la résistance à leurs actes, ou quelques-unes des actions déclarées crimes ou délits par la loi.

La censure sur les actes des pouvoirs constitués est permise; mais les calomnies volontaires contre la probité des fonctionnaires publics et la droiture de leurs intentions dans l'exercice de leurs fonctions, pourront être poursuivies par ceux qui en sont l'objet.

Les calomnies et injures contre quelques personnes que ce soit, relatives aux actions de leur vie privée, seront punies, sur leur poursuite.

18. Nul ne peut être jugé, soit par la voie civile, soit par la voie criminelle, pour fait d'écrits imprimés ou publiés, sans qu'il ait été reconnu et déclaré par un jury, 1o s'il y a délit dans l'écrit dénoncé; 2° si la personne poursuivie en est coupable.

19. Il y aura pour tout le royaume un seul tribunal de cassation, établi auprès du corps legislatif. Il aura pour fonctions de prononcer,

Sur les demandes en cassation contre les jugemens rendus en dernier ressort par les tribunaux;

Sur les demandes en renvoi d'un tribunal à un autre, pour cause de suspicion légitime;

Sur les réglemens de juges et les prises à partie contre un

tribunal entier.

20. En matière de cassation, le tribunal de cassation ne pourra jamais connaître du fond des affaires; mais, après avoir cassé le jugement qui aura été rendu sur une procédure dans laquelle les formes auront été violées, ou qui contiendra une contravention expresse à la loi, il renverra le fond du procès au tribunal qui doit en connaître. '

21. Lorsqu'après deux cassations, le jugement du troisième tribunal sera attaqué par les mêmes moyens que les deux premiers, la question ne pourra plus être agitée au tribunal de cassation, sans avoir été soumise au corps législatif, qui portera un décret déclaratoire de la loi, auquel le tribunal de cassation sera tenu de se conformer.

22. Chaque année, le tribunal de cassation sera tenu d'envoyer à la barre du corps législatif une députation de huit de ses membres, qui lui présenteront l'état des jugemens rendus, à côté de chacun desquels seront la notice abrégée de l'affaire, et le texte de la loi qui aura déterminé la décision.

23. Une haute cour nationale, formée de membres du tribunal de cassation et de hauts jurés, connaîtra des délits des ministres et agens principaux du pouvoir exécutif, et des crimes qui atta

queront la sûreté générale de l'Etat, lorsque le corps législatif aura rendu un décret d'accusation.

Elle ne se rassemblera que sur la proclamation du corps législatif, et à une distance de 30,000 toises au moins du lieu où la législature tiendra ses séances (1).

24. Les expéditions exécutoires des jugemens des tribunaux seront conçues ainsi qu'il suit:

N. (le nom du roi), par la grâce de Dieu et par la loi constitutionnelle de l'Etat, roi des Français; à tous présens et à venir, salut: le tribunal de..... a rendu le jugement suivant:

(Ici sera copié le jugement, dans lequel il sera fait mention du nom des juges.)

. Mandons et ordonnons à tous huissiers sur ce requis, de mettre ledit jugement à exécution; à nos commissaires auprès des tribunaux d'y tenir la main, et à tous commandans et officiers de la force publique de prêter main-forte lorsqu'ils en seront légalement requis: en foi de quoi le présent jugement a été signé par le président du tribunal et par le greffier.

25. Les fonctions des commissaires du roi auprès des tribunaux seront de requérir l'observation des lois dans les jugemens à rendre, et de faire exécuter les jugemens rendus.

Ils ne seront point accusateurs publics; mais ils seront entendus sur toutes les accusations; et requerront, pendant le cours de l'instruction, pour la régularité des formes, et avant le jugement, pour l'application de la loi.

26. Les commissaires du roi auprès des tribunaux dénonceront au directeur du jury, soit d'office, soit d'après les ordres qui leur seront donnés par le roi,

Les attentats contre la liberté individuelle des citoyens, contre la libre circulation des subsistances et autres objets de commerce, et contre la perception des contributions;

Les délits par lesquels l'exécution des ordres donnés par le roi, dans l'exercice des fonctions qui lui sont déléguées, serait troublée on empêchée;

Les attentats contre le droit des gens, et les rebellions à l'exécution des jugemens et de tous les actes exécutoires émanés des pouvoirs constitués.

27. Le ministre de la justice dénoncera au tribunal de cassation, par la voie du commissaire du roi, et sans préjudice du droit des parties intéressées, les actes par lesquels les juges auraient excédé les bornes de leur pouvoir.

(1) Six myriamètres (douze lieues moyennes.)

« PreviousContinue »