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disposer par là à se rapprocher de nous dans les questions difficiles d'Italie, que nous commençons à aborder. J'ai obtenu quelque chose; car de lui-même il m'a demandé de lui indiquer de quelle manière je proposerais de régler l'affaire de Naples, me promettant d'envoyer un courrier pour demander les ordres dont il pourrait avoir besoin. Je lui ai écrit la lettre ci-jointe'. Après l'avoir reçue, il m'a proposé de me montrer sa correspondance avec lord Bentinck. Je l'ai lue; et il est certain que les Anglais sont parfaitement libres dans cette question. Mais on a fait à Murat certaines promesses que l'on pourrait être, comme homme, embarrassé de ne pas tenir, s'il avait lui-même tenu fidèlement toutes les siennes. « Je crois savoir, m'a-t-il dit, que Murat a entretenu des correspondances avec Bonaparte, dans les mois de décembre 1813, de janvier et de février 18142; mais je serais bien aise d'en avoir la preuve : cela faciliterait singulièrement ma marche. Si vous aviez dans vos archives de telles preuves, vous me feriez plaisir de me les procurer. » J'écris aujourd'hui, dans ma lettre au Département, de faire faire des recherches pour trouver celles qui pourraient exister aux Affaires étrangères. Il serait possible qu'il y eût quelques traces d'intelligence

1 V. d'Angeberg, p. 525.

2 Dans les derniers jours de décembre 1813, Murat fit proposer à Napoléon son concours, à condition qu'on le laissât se mettre en possession de toute l'Italie, à la droite du Pô, et proclamer l'indépendance italienne. Cette proposition demeura sans réponse. Vers le milieu de janvier 1814, la Besnardière sonda de nouveau l'Empereur à ce sujet, à la suite de lettres venues de Naples, et peut-être de la Reine Caroline • Que voulez-vous, lui dit Napoléon, que je réponde à un fou? Comment cet insensé ne

entre Murat et Bonaparte à la secrétairerie d'État. Du reste, lord Castlereagh n'a fait aucune objection à la forme que je lui ai proposé de suivre.

M. le comte de Jaucourt mettra sûrement sous les yeux de Votre Majesté les deux lettres que j'adresse aujourd'hui au Département. Je supplie Votre Majesté de vouloir bien se refuser aux propositions qui lui seront faites à Paris relativement au pays de Gex. On ne tient aucun compte des conditions auxquelles Votre Majesté avait subordonné l'échange proposé. Nous avons d'ailleurs beaucoup de raisons d'être mécontents des Génevois qui se trouvent ici. L'autorité de M. le chancelier est plus que suffisante pour motiver l'abandon de cette question, qui a été conduite avec un peu de précipitation.

Je suis, etc.

voit-il pas que mon extrême prépondérance en Europe a pu seule empêcher que le Pape ne fût à Rome ? C'est l'intérêt et le vœu de l'Europe qu'il y retourne, et moi-même je suis le premier à le désirer. Et sur l'observation qu'il pourrait être bien de faire quelque chose pour s'attacher Murat A quoi cela servira-t-il? repartit l'Empereur. C'est un homme à qui la tête tourne. Vous le voyez par ses continuels changements.

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L'Empereur Napoléon, ajoute la Besnardière, ne doutait pas qu'il ne dépendît entièrement de lui de retenir ou de rappeler dans son alliance le Roi Joachim, comme et quand il voudrait. ›

(Mémoire de la Besnardière à Talleyrand, 5 février 1815.)

1

No 12.

XXX

LE ROI AU PRINCE DE TALLEYRAND

18 décembre 1814.

Mon Cousin, j'ai reçu votre numéro 15, qui m'a causé une vive satisfaction. Si l'Angleterre se déclare franchement en faveur de la Saxe, sa réunion avec l'Autriche et la plus grande partie de l'Allemagne doit triompher des lumières du siècle1. J'aime la fermeté de l'Empereur François, et la défection du Roi de Wurtemberg me touche peu. J'attends l'explication de ce que vous me dites au sujet de ce Prince; mais, d'après ce que je connais de lui, je ne saurais tenter de conseiller à personne de s'y allier de bien près.

2

Les lettres trouvées dans le portefeuille de lord Oxford n'ont produit aucune lumière sur les menées de Murat 2; mais les faits contenus dans la lettre de Livourne, et de la vérité desquels on ne peut douter, puisque le prince de Metternich avoue en avoir connaissance, parlent d'eux

1 L'Empereur Alexandre et ses conseillers La Harpe, etc.

2 Le personnage le plus compromis fut le général Exelmans; il s'était trouvé dans les papiers saisis une lettre de lui à Murat, que M. de Jaucourt qualifiait de tout à fait insensée».

mêmes'; et il est plus que temps que toutes les puissances s'entendent pour arracher la dernière racine du mal. A ce sujet, M. de Jaucourt vous a sûrement instruit du reproche injuste, et j'ose dire ingrat, qui a été fait au comte Hector d'Agout. Il serait bon que vous en parlassiez à M. de Labrador, afin que son témoignage servit à éclairer M. de Cevallos s'il est dans l'erreur, ou du moins à le confondre, si, comme je le soupçonne très-violemment, il se ment à lui-même.

Je regarde comme de bon augure le désir que l'Empereur de Russie témoigne de vous revoir. Je n'ai rien à ajouter à ce que je vous ai dit sur les grandes affaires ; mais il en est une que de manière ou d'autre je voudrais voir terminer, c'est celle du mariage. J'ai donné mon ultimatum. Je ne regarderai point à ce qui pourra se passer en pays étranger; mais la duchesse de Berry, quelle qu'elle puisse être, ne franchira les frontières de France que faisant profession ouverte de la religion catholique, apostolique et romaine2. A ce prix, je suis non-seulement prêt,

Dans sa lettre du 18 décembre à Talleyrand, Jaucourt parle de cette correspondance de bricole qui va de l'île d'Elbe en Toscane, de Florence à Chambéry, à Lausanne, en Franche-Comté, à Paris ».

A ce moment même, le ministre de France en Suisse, M. Auguste de Talleyrand, faisait surveiller le Roi Joseph réfugié à Prangins, et demandait son éloignement.

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M. le duc de Berry m'a demandé si vous me parliez de son mariage; il m'a montré un peu d'humeur de la rigidité papiste et romaine du Roi. Je lui ai répondu que vous ne m'en disiez rien. Je suppose que la naissance de M. le duc de Nemours lui donne cette avidité matrimo(Jaucourt à Talleyrand, 29 octobre 1814.) M. le duc de Berry est fort occupé de son mariage n'importe

niale.....

mais empressé de conclure; si, au contraire, ces conditions ne conviennent pas à l'Empereur de Russie, qu'il veuille bien le dire; nous n'en resterons pas moins bons amis, et je traiterai un autre mariage.

Je ne m'aperçois pas moins que vous de votre absence ; mais dans des affaires aussi importantes, il faut s'appliquer ce que Lucain dit de César. Sur quoi, etc.

avec qui; sur ce point, il a raison; il est nécessaire qu'il soit marié et qu'il ait des enfants. C'est à vous, mon Prince, à le marier pour l'intérêt de la France..... ' (Jaucourt à Talleyrand, 1er novembre 1814.)

« Je sors de chez Monsieur.....; à la fin de sa conversation, il est revenu à parler de Vienne, du mariage de son fils, qu'il a trouvé entièrement décidé à ce grand parti; pour chercher des causes dans les petits senti. ments cachés au fond du cœur, la naissance d'un jeune priuce de la famille pourrait bien y contribuer. Quoi qu'il en soit, Monsieur m'a demandé si vous écriviez quelque chose sur la princesse, sœur de l'Empereur Alexandre. Il m'a dit : « Ce qui arrête, c'est cette chapelle dont il paraît que l'on ne « veut pas se départir. Mais, au fait, je ne sais pas pourquoi on mettrait tant « de prix à un mariage politique. Je ne crois pas à leurs résultats. M. de Tal«leyrand vous a-t-il parlé de la nièce du Roi de Saxe? Vous pourriez le questionner là-dessus, c'est-à-dire après avoir pris les ordres du Roi. »

(Jaucourt à Talleyrand, 9 novembre 1814.)

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