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ANNEXE DU No 31.

LXII

INSTRUCTIONS ADRESSÉES PAR LE ROI AU PRINCE

DE TALLEYRAND

Paris, le 5 mars 1815.

M. le prince de Talleyrand fera tous ses efforts pour accélérer la conclusion d'un traité secret entre la France, l'Angleterre et l'Autriche, conformément au principe adopté dans le memorandum no 1, remis par lord Castlereagh, et aux propositions renfermées dans le contre-projet no 2.

Les points les plus essentiels sur lesquels M. le prince de Talleyrand ait à insister sont :

1° La fixation d'une époque prochaine pour l'exécution du plan concerté. Il paraît qu'il n'aura, sur ce point, aucun obstacle à rencontrer.

2o La reconnaissance des droits héréditaires de l'Infant Charles-Louis à la souveraineté de Parme, Plaisance et Guastalla, en adoptant pour l'établissement de l'Archiduchesse Marie-Louise les dispositions transitoires indiquées dans le contre-projet. Il est vraisemblable que la cession des Présides sera le principal objet des difficultés qu'élèvera l'Autriche. M. le prince de Talleyrand cherchera dans

ce cas à obtenir, pour l'Infant et pour la Reine sa mère, un équivalent dans lequel se trouvera comprise la jouissance de Lucques et de son territoire, sous la condition de réversibilité à la Toscane.

Tous les autres articles du traité projeté ne paraissent pas susceptibles de discussion. La réunion de la Valteline au Milanais était déjà regardée comme à peu près inévitable, et en conséquence il ne s'agit que de la faire envisager comme une concession très-importante de la part de la France. A l'égard des secours pécuniaires que l'Autriche demande, à titre d'emprunt', M. le prince de Talleyrand est autorisé à prendre des engagements jusqu'à la concurrence de vingt millions, en se réglant, d'après cette autorisation, sur les offres que fera l'Angleterre relativement au même objet, et sur les prestations en nature qui pour

ront être convenues.

M. le prince de Talleyrand traitera directement avec M. le prince de Metternich et avec lord Wellington de tous ces objets, sans admettre à cette négociation aucune personne de la légation française, et il écartera soigneusement toute proposition étrangère aux bases déjà établies dans le projet et contre-projet qui doivent le guider ainsi que les présentes instructions.

Signé: LOUIS.

Le papier baisse d'un jour à l'autre; au dire des hommes d'affaires, il ne peut manquer de baisser encore journellement. Il était au-dessous de 300 à la dernière bourse. Ainsi, pour retracer une partie de la fortune publique (en Autriche), un homme qui en 1811 (époque où par une ordonnance le

LXIII

No 25.

LE ROI AU PRINCE DE TALLEYRAND

7 mars 1815.

Mon Cousin, j'ai reçu votre numéro 30. Je crois que la déclaration de M. de Metternich, dont je serais fort peu satisfait dans toute autre circonstance, s'explique par ce que je vous mandais l'autre jour, et par les pièces ci-jointes ; l'instruction vous fait assez connaître mes intentions pour qu'il soit superflu d'y rien ajouter ici.

Je me proposais de revenir aujourd'hui avec vous sur la convention du 11 avril dernier. Buonaparte m'en épargne la peine. Avant de recevoir cette dépêche, vous serez sans doute instruit de son audacieuse entreprise '; j'ai pris sur-le-champ les mesures que j'ai jugées les plus propres à l'en faire repentir, et je compte avec confiance sur leur succès 2. Ce matin, j'ai reçu les ambas

papier subit une réduction des 4/5es) avait 1,500 fr. les vit réduire à 300, et aujourd'hui les 300 ne se réaliseraient pas pour 100 fr. en numéraire. On a donc, depuis cette époque, perdu les 14/15 de son avoir, ou de 93 à 94 pour 100., (La Tour du Pin au Département, 30 janvier 1815.)

1 Le Moniteur du 8 mars annonçait le lendemain la nouvelle du débarquement de Napoléon Ier.

2 14

J'ai proposé au Roi : 1o d'expédier un courrier au premier bruit; il a

sadeurs', et m'adressant à tous à la fois, je les ai priés de mander à leurs Cours qu'ils m'avaient vu n'étant nullement inquiet des nouvelles que j'ai reçues, et bien per

voulu suspendre; 2o une circulaire adressée aux ambassadeurs et ministres ; je vous en envoie copie, elle est partie avec des Moniteur; 3o j'ai proposé au Roi de vous faire connaître l'intention où il était que Bonaparte fût mis hors du droit des gens de l'Europe, en vous chargeant d'en faire la proposition au Congrès. Hier au soir il m'a annoncé sa lettre pour ce matin. J'ai pris la liberté de lui demander s'il vous parlait de ma proposition. Nous étions seuls, et il m'a dit : « Non, mais je vous charge de lui en parler. » La conséquence de cette mesure serait de faire accéder les Souverains qui ne se trouvent pas au Congrès.....

Nous avons remporté une immense victoire en obtenant du Roi la convocation des Chambres; j'ose le dire, les événements même heureux contre Buonaparte pouvaient préparer d'immenses difficultés au Gouvernement. La proclamation et la convocation font entrer la Royauté constitutionnelle dans le cœur des citoyens et dans le langage de tout le monde. Le chancelier, M. de Blacas (qui d'abord avait été persuadé), surtout le maréchal, étaient contre; nous avons déclaré que nous regardions le salut public comme compromis sans cette mesure. Le Roi s'y est déterminé.

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Il y aura demain une adresse au Roi proposée aux pairs et à la Chambre des députés. La session se rouvrira purement et simplement.

« Le maréchal (Soult) a perdu, je crois exprès, vingt-quatre heures pour faire arriver le maréchal Saint-Cyr. Pour lui, il a mis une heure à quitter son château, et deux heures après son arrivée à Paris il était en route pour Lyon. Il trouvera, et c'est ce que le maréchal a voulu, les dispositions faites : les généraux déjà en mouvement à Lyon. Je ne peux m'empêcher de voir que ce que l'on voulait était de donner à Monsieur un succès personnel, de le lui donner avec quelques personnes, hors des appuis constitutionnels, et notre fermeté a détruit ces petits et bien dangereux calculs. »

(Jaucourt à Talleyrand, 8 mars 1815.)

1 Les ambassadeurs ou chargés d'affaires accrédités auprès de Louis XVIII étaient :

Baron de Vincent (Autriche); Sir Crawford (États-Unis);

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le baron

le duc le géné

de Walterstorf (Danemark); le comte de Péralada (Espagne); de Wellington (Angleterre); — le baron Homptede (Hanovre); ral de Fagel (Pays-Pas); ;- le marquis de Marialva (Portugal); - le comte de Goltz (Prusse); — le comte Pozzo di Borgo (Russie);

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-

- le marquis Alfieri de Sostegno (Sardaigne); de Signeul (Suède); le comte Zeppelin (Wurtemberg).

suadé que ceci n'altérera pas plus la tranquillité de l'Europe que celle de mon âme. Ma goutte a fait depuis l'autre jour des progrès sensibles en mieux. Sur quoi, etc.

No 32.

LXIV

Vienne, 7 mars 1815.

SIRE,

Je dois croire que Votre Majesté sait déjà, ou qu'Elle aura appris avant de recevoir cette lettre, que Buonaparte a quitté l'île d'Elbe. Mais, à tout événement, je m'empresse de lui en transmettre la nouvelle. Je l'ai eue d'abord par un billet de M. de Metternich', auquel j'ai répondu que je voyais, par les dates, que cette évasion de Buonaparte se trouvait liée à la demande que Murat avait faite à l'Autriche de lui accorder pour ses troupes un passage par ses provinces. Le duc de Wellington m'a ensuite communiqué une dépêche de lord Burghest, dont j'ai l'honneur de joindre ici la traduction, ainsi que l'extrait d'une lettre du vice

1 Lorsque les ministres vinrent chez moi, ils ignoraient encore l'événement. Talleyrand entra le premier; je lui fis lire l'avis que j'avais reçu de Gênes. Il resta impassible, et nous eûmes ensemble la conversation laconique que voici: Talleyrand: « Savez-vous où va Napoléon? Moi: Le < » rapport n'en dit rien. Talleyrand: Il débarquera sur quelque côte d'Italie et se jettera en Suisse. Moi: Il ira droit à Paris. »

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(Mémoires de METTERNICH, t. I, p. 206.)

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