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les seuls où le désaveu n'est point admis. Toute
reconnaissance du mari, consignée dans un acte
authentique ou même privé, suffirait pour le ren-
dre non recevable à contester ensuite l'état de
l'enfant; il faut pour être admis à désavouer que
le mari n'ait laissé échapper, soit au moment du
mariage, soit au moment de la naissance de l'en-
fant,
soit depuis, aucun acte, aucun signe, aucun
aveu volontaire, exprès ou tacite de sa pater-
nité (1): s'il avait toujours cru que l'enfant lui fût
étranger, aucun acte ne démentirait une opinion
qui devait déchirer son ame. S'il a varié dans
cette opinion, il n'est plus recevable à refuser
à l'enfant, l'état qu'il ne lui a pas toujours con-
testé (2).

825. L'acte contenant le désaveu du mari, ne suffit pas pour dépouiller l'enfant de la possession d'état d'enfant légitime où sa naissance l'a placé. Cet acte est regardé comme non avenu, s'il n'est pas suivi, dans le délai d'un mois, d'une action en justice réglée, dirigée contre un tuteur ad hoc, donné à l'enfant en présence de la mère (art. 318).

826. Ce tuteur,ainsi que la mère, peuvent faire valoir non-seulement les fins de non recevoir mentionnées dans l'art. 314, mais encore tous les moyens de défense propres à faire rejeter le désaveu. Quoique l'enfant naisse à un terme qui prouve que sa conception est antérieure au ma

(1) Du Veyrier, Exposé des motifs, tom. 111, pag. 91, édit. de Didot, (2) Préamneu, ibid., pag. 36.

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riage, il peut néanmoins appartenir au mari, si le mariage a été précédé d'un commerce entre les deux époux; ainsi, quoique la naissance prématurée de l'enfant dispense le mari de donner d'autres preuves au soutien de son action, le tuteur peut articuler contre lui des faits de fréquentation intime, ou même de cohabitation (1) avec la mère, pour en conclure qu'ayant connu la femme, il a aussi connu ou dû connaître la grossesse, et qu'il est le père de l'enfant ; et ces faits peuvent être prouvés par tous les genres de preuves, même par témoins, sans qu'il soit besoin de commencement de preuve par écrit.

Mais le mari, de son côté, peut combattre ces moyens par des faits contraires, en prouvant, par exemple, qu'il était éloigné, ou qu'il ne connaissait pas encore la mère à l'époque de la concep

(1) M. Proudhon, tom. II, pag. 18, pense que le tuteur de l'enfant ne pourrait être admis à prouver les faits de fréquentation intime, antérieurs au mariage, parce que l'art, 314 ne parlant que de la connaissance posi. tive de la grossesse, il n'est pas permís d'articuler d'autres faits sans

retomber dans l'arbitraire.

Mais la preuve des faits de cohabitation et de fréquentation, tendent à prouver que le marí a eu counaissance de la grossesse ; car s'il a cohabité avec sa femme enceinte, il n'a guère pu ignorer sa grossesse.

D'ailleurs, M. Proudhon enseigne, pag 12, que la disposition de l'art, 314 n'est pas limitative.

Il ajoute que les faits d'une pareille fréquentation laissent sur leur conséquence une incertitude telle que la loi a cru devoir abolir toute recherche de paternité, fondée sur de pareilles circonstances.

Mais il y a une grande différence entre l'enfant naturel qui, n'ayant. au cune possession de son état, demande à prouver une paternité toujours incertaine, et l'enfant né sous le voile sacré du mariage que sa naissance a mis en possession de son état, et qui ne fait que défendre sa possession.

tion de l'enfant, comme dans l'arrêt de Bonnafé, rapporté dans le Nouveau Denisart (1).

SECTION III.

Des enfants conçus et nés depuis la dissolution du mariage.

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827. L'enfant né le trois centième jour de la dissolution du mariage ou plus tôt, ne peut être désavoué que dans les cas

de droit.

828. L'enfant né plus tard est de droit illégitime.

829. Sa légitimité peut être contestée. Il ne faut pas confondre cette contestation avec le désaveu.

827. L'enfant né au plus tard, le trois centième jour de la dissolution du mariage, est présumé conçu pendant le mariage; il a pour père le mari (312); il ne peut être désavoué que dans les cas expliqués dans le premier paragraphe, si, par exemple, immédiatement avant la dissolution du mariage, le mari, pour cause d'absence ou par l'effet de quelque accident, avait été dans l'impossibilité physique de cohabiter avec la femme depuis un temps suffisant pour former, avant la naissance de l'enfant, le nombre de trois cents jours, y compris ceux qui se sont écoulés depuis la dissolution du mariage.

828. Au contraire, l'enfant né trois cents jours (1) Tom. VIII, pag. 5, no. 5.

après la dissolution du mariage, ou, ce qui est la même chose, le trois cent unième jour de la dissolution, est présumé conçu depuis le mariage. Loin de pouvoir invoquer la règle que l'enfant conçu pendant le mariage a pour père le mari, elle se retourne contre lui; il est donc rangé au nombre des enfants naturels. S'il prétendait exercer les droits que donne la légitimité, sa légitimité pourrait être contestée. Il suffirait de comparer l'acte de sa naissance avec l'acte du décès du mari, avec le jugement qui a fait encourir la mort civile au mari ou à la mère, ou bien enfin avec le jugement qui a prononcé le divorce. S'il résultait de cette comparaison qu'il s'est écoulé trois cents jours entre la dissolution du mariage et la naissance de l'enfant, il serait illégitime de droit. Ainsi, la différence d'un seul jour peut décider irrévocablement du sort de l'enfant. S'il en était autrement, si l'enfant né trois cents jours après la dissolution du mariage, n'était pas de droit illégitime, il faudrait en dire autant de l'enfant né trois cent dix, trois cent cinquante, quatre cents jours ou plus après le mariage dissous; car, après l'époque des trois cents jours, fixée par la Ioi, il n'est point de terme où l'on doive s'arrêter plutôt qu'à tout autre.

L'enfant né trois cents jours après la dissolution du mariage, est donc illégitime de plein droit.

829. Mais il est possible que le jour de la naissance de l'enfant ou celui de la dissolution du mariage soient incertains; que l'acte de sa nais

sance ou celui de la mort du père contiennent des erreurs ; car ces faits et d'autres semblables peuvent procurer à l'enfant des moyens légitimes pour défendre son état, en prouvant que l'époque de sa conception doit être rapportée au temps du mariage: de-là peuvent naître des contestations.

Et d'un autre côté, si, quoique né trois cents jours après la dissolution du mariage, l'enfant, à l'aide d'un acte de naissance qui lui donnerait pour père le mari de sa mère, prétendait s'arroger les droits de famille, tels que les droits de succession, de tutelle, etc., sa légitimité pourrait être contestée, suivant les expressions énergiques de l'art. 315, qui semblent avoir à dessein,évité l'expression de désavouer, employée dans les trois articles précédents. Il ne faut donc pas confondre l'action en désaveu avec la contestation de légitimité, deux actions de nature fort différente (1).

SECTION IV.

- Du désaveu et de la contestation de légitimité.

SOMMAIRE.

830. Ce qu'ont de commun la contestation de légitimité et le dé

saveu.

831. En quoi ils different.

(2) Voyez un arrêt de la Cour de Grenoble, du 12 avril 1809. Sirey, au 1809, 2. part., pag. 288.

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