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les qualités de père et de fils adoptifs, ni rompre les rapports de paternité et de filiation civile établis entre elles. La raison en est que l'autorité publique est intervenue pour confirmer le contrat d'adoption passé entre les deux parties. Il ne leur suffirait donc pas de paraître une seconde fois devant le juge de paix, et d'y déclarer que leur volonté est de révoquer l'adoption et de rompre réciproquement le contrat qu'elles avaient passé.

Mais ne pourraient-elles pas le rompre en faisant homologuer le second contrat par le même tribunal qui avait homologué le premier, en déclarant qu'il y avait lieu à l'adoption?

Il n'y a rien de si naturel que de dissoudre un contrat de la même manière qu'il a été formé. L. 35, ff. de R. J.

C'est sur ce fondement que le Code Prussien (no. 7-14 ) ordonne que l'adoption, une fois légalement opérée, ne peut être révoquée que comme elle a été effectuée ; c'est-à-dire, avec l'agrément des intéressés, et sous la sanction des tribunaux.

Nous citons le Code Prussien comme la source où ont été puisées les dispositions de notre Code sur l'adoption. Il est vrai qu'on ne trouve en ce dernier, aucune disposition sur la révocation de l'adoption, mais ou n'en trouve point de contraire. Il ne dit point que les liens de l'adoption seront indissolubles comme les liens du sang; ce qui ne saurait être, puisque l'adoption n'est qu'un contrat. Ce contrat doit donc être soumis à la Tome II.

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règle ordinaire de tous les contrats qui peuvent être dissous de la même manière qu'ils ont été passés. Le Code n'a point excepté de cette règle le contrat d'adoption.

II y a donc lieu de penser que l'adoption pourrait être révoquée de la même manière qu'elle a été faite, par un contrat ; ou, pour employer un terme ancien, mais énergique et propre, par un distract passé devant le juge de paix, et homologué par le tribunal qui aurait admis l'adoption. Cependant, on ne peut dissimuler que le conseild'état considérât l'adoption comm'e irrévocable. Voyez Locré, tome V, pag. 450, édit. in-8°.

Mais le Code n'ayant rien décidé sur ce point, les tribunaux pourraient-ils suppléer à son silence sans excès de pouvoir?

1019. Cette question se présentera rarement. En voici une qui peut devenir plus fréquente : comment ceux qui y ont intérêt, par exemple, les héritiers de l'adoptant, peuvent-ils attaquer et faire annuler les adoptions irrégulières et illégales, et les arrêts qui les ont admises ou rejetées?

Il paraît d'abord évident qu'on ne peut se pourvoir en cassation contre l'arrêt qui rejette une adoption, par la raison que les juges n'ayant point dit et ne devant point dire leurs motifs il est impossible de juger s'ils ont eu tort où raison en rejetant l'adoption; mais quand ils auraient eu tort, aucune loi ne serait violée.

Il n'en est pas de même lorsqu'ils ont admis une adoption contre les dispositions de la loi; par

exemple, si l'adoptant n'avait pas cinquante ans, ou si le tribunal était incompétent, comme n'étant pas celui du domicile de l'adoptant.

Il est évident qu'on peut se pourvoir contre un pareil arrêt, autrement les dispositions du Code deviendraient illusoires.

Mais comment doit-on se pourvoir ? M Grenier, dans son Traité de l'adoption, pag. 527, prétend qu'on ne peut pas se pourvoir à la Cour de cassation, parce qu'on n'est, dit-il, obligé à se pourvoir, que lorsqu'il s'agit d'un jugement dans lequel on a été partie, et qui a été notifié d'une manière juridique. En conséquence, il pense que les héritiers de l'adoptant, devraient se pourvoir à la Cour d'appel qui a admis l'adoption, comme dans le cas d'un arrêt sur requête auquel on s'oppose comme étant subreptice, et surpris sur un faux exposé, et cela, parce que l'instruction n'est pas contradictoire.

Cette opinion nous paraît souffrir beaucoup de difficultés. Si c'est l'adoptant qui a poursuivi la confirmation du jugement qui admettait l'adop-~ tion, et fait rendre l'arrêt de confirmation, on ne peut pas dire que cet arrêt n'ait pas été contradictoire avec lui; et, d'un autre côté, comment dire que l'arrêt était obreptice, si, par exemple, l'acte de naissance était joint aux pièces? Comment dire que l'arrêt est surpris sur un faux exposé, s'il s'agit de l'incompétence du premier tribunal?

M. Grenier reconnaît que le pourvoi en cassation est nécessaire dans le cas de l'article 360,

lorsque l'adoptant étant mort avant l'arrêt, ses héritiers ont remis des mémoires et observations tendant à faire rejeter l'adoption. Dans tous les autres cas, il pense que c'est à la Cour d'appel qui a rendu l'arrêt qu'il faut s'adresser.

Quant à nous, il nous paraît que c'est, dans tous les cas, à la Cour de cassation qu'il faut se pourvoir contre un arrêt qui a confirmé ou rejeté une adoption contraire à la loi (1). La voie d'opposition n'est admise que contre les arrêts par défaut. Or, on ne peut considérer comme tel, l'arrêt qui confirme un jugement rendu en matière d'adoption.

L'opinion de M. Grenier tendrait à faire revivre les propositions d'erreurs proscrites, il y a plus d'un siècle, par l'ordonnance de 1667.

CHAPITRE II.

De la Tutelle officieuse.

1020. Définition.

SOMMAIRE.

1021. C'est un contrat inventé par les auteurs du Code civil, et pourquoi.

1022. Comment il diffère de la tutelle ordinaire.

1023. Privilége qu'il procure au tuteur officieux.

1024. La survenance d'enfants révoque l'adoption testamentaire. 1025. Conditions requises de la part du tuteur pour la tutelle officieuse.

(1) Voy. l'arrêt de la Cour de cassation, du 14 novembre 1815. Sirey, n 1816, pag. 45 et 47.

1026. La tutelle officieuse n'est point interdite aux femmes. 1027. Conditions requises du côté du pupille.

1028. Où et comment doit être fait le contrat de la tutelle officieuse.

1029. Effets de la tutelle officieuse; le tuteur gère gratuitement les biens du pupille.

1030. Il est tenu de le nourrir, et de le mettre en état de gagner sa vie.

1031. Cette obligation passe aux héritiers du tuteur.

1032. Le pupille devenu majeur peut refuser l'adoption. 1033. Le tuteur n'est point obligé de l'adopter.

1034. Mais s'il refuse, il peut être condamné à une indemnité. 1035. Il est censé y avoir renoncé, s'il n'a pas requis l'adoption dans les trois mois de sa majorité.

1036. Le tuteur ne doit point d'indemnité s'il n'est point en faute. 1037. L'indemnité peut être due par la succession. 1038. Rareté de la tutelle officieuse.

1020. La tutelle officieuse est un contrat de bienfaisance, par lequel on s'oblige de nourrir et élever gratuitement un mineur, de le mettre en état de gagner sa vie, et d'administrer aussi gratuitement sa personne et ses biens.

1021. C'est un contrat dont on ne trouve le modèle ni dans les lois romaines, ni dans les législations des peuples voisins. L'invention en est due toute entière à nos législateurs.

Leur but a été de faciliter l'adoption à ceux qui, voulant adopter un mineur, craignent de mourir avant qu'il ait atteint sa vingt-cinquième année.

1022. Elle diffère de la tutelle ordinaire, qui est une charge de famille, qu'on ne peut refuser

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