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pourraient, suivant les circonstances, rejeter l'action alimentaire dirigée par les petits-enfants contre leurs aïeuls ou aïeules, sans craindre la cassation du jugement, car il n'y aurait pas de loi violée (1).

Ce n'est pas seulement à leurs enfants, mais encore à leurs gendres et à leurs brus ou bellesfilles que les pères et mères doivent des aliments. Art. 206 et 207.

L'obligation de fournir des aliments est réciproque entre les ascendants et les descendants (art. 207).

Les enfants doivent des aliments à leurs père » et mère, et autres ascendants qui sont dans le >> besoin (205).

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Les gendres et belles-filles doivent également,' » et dans les mêmes circonstances, des aliments » à leurs beau-père et belle-mère ( 206 ) ». Le gendre, gener, est le mari de notre fille. La belle-fille, ou la bru, nurus, est la femme de notre fils.

Le beau-père, socer, est le père de notre épouse ou de notre mari.

La belle-mère, socrus, est la mère de notre épouse ou de notre mari.

La pauvreté de la langue française nous oblige d'appeler aussi beau-père, le second mari de notre mère, que les Latins appelaient vitricus, et nos anciennes coutumes, parastre ;

Et belle-mère, la seconde femme de notre

(1) Locré, ibid.

père que les Latins appelaient noverca, et que nous appelons marâtre ;

Et beaux-fils ou belles-filles, les enfants issus du premier mariage de notre femme, ou de notre mari, que les Latins appelaient, privigni, privignæ, et notre ancien langage, filiastres.

Le gendre et la bru, gener et nurus, doivent des aliments à leurs beau-père et belle-mère, socero et socrui; et réciproquement le beau-père et la belle-mère, socer et socrus, doivent des aliments à leur gendre et à leur bru, genero et nurui.

Mais le beau-fils et la belle-fille, privignus et privigna, les filiastres n'en doivent point à leurs beau-père et belle-mère, vitrico et privignæ ; et réciproquement le beau-père ou parastṛe, et la belle-mère ou marâtre, vitricus et noverca n'en doivent point à leurs beaux-fils ou belles-filles, ou à leurs filiastres, privignis.

Tel est le sens de l'article 206. Il est à remarquer que cet article n'établit point l'obligation de se fournir des aliments entre un des époux et les aïeuls de l'autre époux.

S. II.

Quelle est l'étendue de cette obligation.

613. L'obligation de fournir des aliments comprend tout ce qui est nécessaire à la vie : la nourriture, le logement, le vêtement (1), dans la pro

(1) Legatis alimentis, cibaria et vestitus, et habitatio debebitur, quia sine his ali corpus non potest. Cætera quæ ad disciplinam pertinent, legato non continentur. L. 6, ff. de Alim, vel sib. leg. V. LL. 43 et 44, ff. de V. S.

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portion des besoins de celui qui les réclame; mais dans nos mœurs, et dans celles de toutes les nations civilisées, ces besoins n'ont rien d'absolument fixe. Ils ont toujours quelque chose de relatif, et la mesure en est nécessairement abandonnée à la prudence dumagistrat; la loi ne peut que lui tracer quelques règles pour le guider.

« Les aliments ne sont accordés que dans la >> proportion du besoin de celui qui les réclame, » et de la fortune de celui qui les doit». Art. 208.

Ainsi l'obligation des père et mère, varie suivant leur fortune et leur état, suivant les besoins et les ressources de l'enfant: c'est au magistrat d'étendre ou de resserrer l'obligation suivant les circonstances. Il est possible que l'enfant n'ait besoin que d'un supplément: ceci s'applique à tous ceux qui réclament des aliments.

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Dans la classe des personnes pauvres, chez les paysans, chez les artisans, l'obligation se réduit à mettre les enfants en état de travailler et de gagner leur vie.

Mais ceux qui sont nés de parents plus favorisés de la fortune, ont droit à des secours plus étendus, lors même que leur éducation est finie, et qu'ils ont atteint leur majorité.

Telle était la jurisprudence des arrêts avant le Code civil (1), et telle est encore celle des cours

(1) Foy, le Nouveau Denisart. Vo. Aliments, §. 1, no. 31

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royales depuis sa promulgation (1). Cette jurisprudence paraît dans l'esprit du Code; mais les magistrats ne doivent jamais perdre de vue qu'en accordant trop facilement des pensions alimentaires à des majeurs, et surtout en fixant ces pensions à des sommes trop considérables, ils favoriscraient la paresse et l'indépendance des enfants,et porteraient atteinte à la morale publique.

En général, les secours dont les enfants ont besoin, doivent consister dans une pension alimentaire. Mais « si la personne qui doit fournir » les aliments, justifie qu'elle ne peut payer la pen»sion alimentaire, le tribunal pourra, en con»> naissance de cause, ordonner qu'elle recevra » en sa demeure, qu'elle nourrira et entretiendra » celui auquel elle devra des aliments». Art. 210. La demande des père et mère qui offrent de recevoir, nourrir et entretenir dans leur demeure l'enfant à qui ils doivent des aliments, est toujours favorable. Le Code laisse aux tribunaux à prononcer si les offres du père ou de la mère doivent les dispenser de payer la pension alimentaire. Art. 211(2).

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(1) Voy. deux arrêts de la cour impériale de Rennes, des 12 juin et 24 décembre 1810, rapportés dans le Journal des arrêts de cette cour, tom. 1, pag. 218 et 251.

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(2) Les mauvais traitemens des père et mère suffiraient-ils pour autoriser les enfants à demander que les aliments leur soient fournis hors de la maison paternelle? Sont-ils recevables à prouver ces mauvais traitemens par temoins? Cela dépend des circonstances. Voy. Maleville, sur l'art. 211; aussi la question a été jugée diversement. Un arrêt de la cour d'Aix, du 3 août 1807, a jugé l'affirmative. Sirey, an 1808, 2′′,

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Il est à remarquer que cet article ne laisse la même faculté aux tribunaux, relativement aux enfants qui offriraient de recevoir, nourrir et entretenir dans leur demeure leur père ou leur mère. La cour impériale de Besançon a donc bien jugé en décidant, par un arrêt du 20 juillet 1808, que de pareilles offres ne devaient pas être admises (1). Il faudrait, pour les faire admettre, des causes extrêmement fortes (2).

L'obligation de fournir des aliments est solidaire de sa nature, parce qu'ils sont destinés à faire subsister celui auquel on les fournit. Celui qui les doit, concurremment avec d'autres personnes, ne peut demander à ne payer que sa portion de la pension alimentaire, sauf à celui qui réclame, à se faire payer le surplus par les autres co-débiteurs; car, si l'un d'eux était insolvable, l'autre n'en devrait pas moins la totalité des aliments.

Ainsi, le père et la mère doivent être condamnés de les fournir solidairement, lorsqu'il séparation de biens.

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Ainsi, entre plusieurs enfants, l'obligation de fournir des aliments à leur père est solidaire ; chaque enfant est tenu de les fournir en entier, saufson recours contre ses frères et sœurs, chacun pour leur quote-part, s'ils en ont le moyen: le

part,, page 109. Un arrêt de la cour de Nimes, du 12 fructidor'an XII a jugé la négative. Sirey, an XIII, 2o. part., pages 13 et 14.

(1) Rapporté par Sirey, an 1809, 2o. part., pag. 161.
(2) Foy. le Nouveau Denisart, vo. Aliments, §. 4, n°-4«

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