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publication et une seule adjudication. La loi de 1842 a ainsi abrégé les délais et diminué les frais par la suppression de deux publications et de l'adjudication provisoire. Nous verrons les motifs et la portée de ces changements au titre de la Saisie immobilière, où nous retrouverons des dispositions identiques.

Les art. 643 et 614 règlent la publication, la décision des contestations soulevées par les dires et observations des parties consignés sur le cahier des charges, la fixation du jour de l'adjudication et de l'intervalle qui doit séparer la publication de l'adjudication.

Les art. 645, 646 et 647 traitent de la publicité à donner à la vente pour attirer les enchérisseurs. Notons en passant la disposition de l'art. 646 qui ordonne l'insertion dans un journal désigné par la cour impériale conformément à l'art. 696. Cette disposition a été abrogée par le décret du 8 mars 1848. Aujourd'hui l'insertion est faite dans les journaux désignés par le préfet (art. 23, décret du 7 février 1852). Nous y reviendrons sur l'art. 696.

L'art. 648 renvoie à un grand nombre d'articles relatifs aux enchères et à l'adjudication, et l'art. 649 aux articles relatifs à la folle enchère. Voyez l'explication des art. cités dans les art. 618 et 649.

Remarquons seulement que notre titre ne parle pas de surenchère et ne renvoie pas aux art. 708, 709 et 710, qui traitent de cette matière. Il en faut conclure qu'après l'adjudication d'une rente par suite de saisie, la surenchère n'est point admise.

L'art. 650 établit une grande simplicité et une extrême rapidité dans la procédure et dans le jugement des demandes en nullité de la saisie d'une rente (comparez l'art. 650 avec les art. 728 et 729, C. pr.). La loi distingue deux sortes de nullités, les unes concernant la procédure antérieure, les autres la procédure postérieure à la publication du cahier des charges. Lisons à cet égard l'art. 650.

Art. 650. La partie saisie sera tenue de proposer ses moyens de nullité contre la procédure antérieure à la publication du cahier des charges, un jour au moins avant le jour fixé pour cette publication, et contre la procédure postérieure, un jour au moins avant l'adjudication : le tout à peine de déchéance. Il sera statué par le tribunal, sur un simple acte d'avoué, et, si les moyens sont rejetés, il sera immédiatement procédé, soit à la publication du cahier des charges, soit à l'adjudication. »

L'art. 651 établit encore une simplification empruntée à la procédure de saisie immobilière (art. 731 et 732). Les explications de ces deux derniers articles, auxquels je vous renvoie, peuvent servir de commentaire à l'art. 651.

Je vous renvoie également à l'article 730, 2° et 3°, pour l'explication de l'article 652, qui simplifie encore la procédure, en supprimant complétement l'appel contre certains jugements.

L'article 653 décide à qui appartiendra la poursuite de la saisie des rentes en cas de concours de deux créanciers qui ont saisi la même rente. Les dispositions de la loi à cet égard sont assez claires pour n'exiger aucun développement.

Art. 654. La distribution du prix sera faite ainsi qu'il sera prescrit au titre de la distribution par contribution, sans préjudice néanmoins des hypothèques établies antérieurement à la loi du 11 brumaire an VII. »

Sans préjudice des hypothèques. Cette dernière disposition est transitoire. Avant

la loi de brumaire, les rentes foncières et quelquefois les rentes constituées pouvaient être hypothéquées. Si une de ces rentes, établie avant l'an VII, et grevée d'hypothèques avant cette époque, était saisie et vendue aujourd'hui, le prix en serait attribué, par préférence, aux créanciers ayant des hypothèques antérieures au 11 brumaire an VII (1er novembre 1798); le surplus serait distribué par contribution entre les créanciers chirographaires.

« Art. 655. Les formalités prescrites par les art. 636, 637, 639, 641, 642, 643, 644, 645, 646, et 651 seront observées à peine de nullité. »

Les articles énumérés dans notre art. 655 sont à peu près tous ceux qui contiennent l'énonciation de formalités. L'art. 650 fixe, en outre, un délai pour proposer la nullité, et, comme sanction de l'observation de ce délai, prononce la déchéance. Enfin, quatre autres articles, les articles 638, 647, 648 et 649 renvoient à de formalités du titre de la Saisie-arrêt et de la Saisie immobilière; il faudra rechercher dans ces titres quelles sont les formalités dont l'omission entraîne nullité. L'omission de ces formalités entraînera également nullité dans la procédure de saisie des rentes.

QUARANTE ET UNIÈME LEÇON

TITRE XI

DE LA DISTRIBUTION PAR CONTRIBUTION (C. D.).

888. Les créanciers ne font saisir et vendre les biens de leur débiteur que pour se faire payer sur le prix. De quelque saisie mobilière qu'il s'agisse, saisie-arrêt, saisie-exécution, saisie-brandon, saisie des rentes, les deniers qui sont versés par le tiers saisi dans la première, le prix payé par les adjudicataires des objets vendus par suite des autres saisies, doivent profiter aux créanciers du saisi. Si le produit de la saisie-arrêt ou le prix des ventes dans les autres saisies suffisent pour désintéresser tous les créanciers, chacun recevra ce qui lui est dû, et le surplus, s'il en reste, sera remis au saisi. Mais si le montant des créances dépasse le chiffre de la somme à distribuer, et malheureusement pour les créanciers, c'est le cas le plus ordinaire, on procède à une répartition de deniers au prorata des créances; ils sont distribués entre les créanciers au marc le franc, proportionnellement au chiffre de chaque créance respective. C'est cette distribution proportionnelle que le Code appelle distribution par contribution, et la pratique simplement contribution.

La contribution est donc en général la distribution proportionnelle des deniers provenant d'une saisie mobilière entre les créanciers chirographaires ou céduLaires (1) du saisi. Nous verrons plus tard que le prix des immeubles vendus sur

(1) Chirographaires et cédulaires sont synonymes. Ces mots indiquent les créanciers qui n'ont pas d'hypothèque ou de privilége. On appelle chirographum ou cedula l'écrit contenant la preuve d'une obligation. Rigoureusement, d'après l'étymologie, les créanciers qui

saisie immobilière se distribue, au contraire, par voie d'ordre entre les créanciers hypothécaires : ainsi le créancier hypothécaire le premier inscrit prend d'abord tout ce qui lui est dû, puis le second, et ainsi de suite jusqu'à ce que les fonds manquent. Les derniers inscrits peuvent ainsi ne toucher aucune partie de leur créance.

Quelquefois même le prix d'un immeuble peut être distribué par contribution entre les créanciers chirographaires, si, par exemple, cet immeuble n'était pas grevé d'hypothèques ; ou bien encore, s'il reste un reliquat du prix de l'immeuble après le payement intégral des créances hypothécaires, ce reliquat sera distribué par contribution entre les créanciers chirographaires du même débiteur. On peut encore, dans une certaine hypothèse, distribuer par contribution une partie du prix d'un immeuble vendu par suite de saisie; ainsi le montant d'une collocation dans un ordre sera distribué par contribution entre les créanciers chirographaires d'un créancier hypothécaire colloqué.

La contribution a donc pour but de distribuer le prix d'objets mobiliers, ou le prix d'un immeuble lorsqu'il n'existe pas de créanciers hypothécaires ou qu'ils ont été désintéressés, ou enfin le montant d'une collocation dans un ordre, mais seulement entre les créanciers chirographaires du créancier colloqué, d'où il suit qu'un créancier hypothécaire ne saurait figurer en cette qualité dans une contribution, qui ne peut comprendre que des créanciers chirographaires ou privilégiés.

En règle générale, tous les créanciers sont présumés simples chirographaires. Ceux qui se prétendent privilégiés sont tenus de prouver leur prétention, et ils ne peuvent la fonder que sur un texte formel de la loi. Si le privilége est justifié, le créancier privilégié vient prendre, par préférence aux autres, le montant intégral de sa créance. Il y a d'ailleurs des rangs entre les privilégiés; et, lorsque le premier privilégié absorbe la somme à distribuer, les autres créanciers, nonseulement chirographaires, mais même privilégiés postérieurs, ne reçoivent rien. Quant aux créanciers chirographaires, ils ne se partagent entre eux, au prorata de leurs créances, que ce qui reste de la somme à distribuer après le payement intégral des créances privilégiées.

Vous trouverez l'énumération des priviléges sur les meubles et les règles qui les concernent dans les art. 2100, 2101 et 2102 (C. N.), dont les difficultés se rattachent à l'enseignement du Code Napoléon.

889. La distribution par contribution peut donner lieu à de grandes difficultés et soulever de nombreuses contestations. Les créanciers appelés à partager la somme à distribuer ont entre eux des intérêts opposés. Des prétentions mal fondées ou exagérées peuvent se produire. L'un demande ce qui ne lui est pas dû, l'autre plus qu'il ne lui est dû; celui-ci réclame une cause de préférence à laquelle il n'a pas droit. Tous ceux qui prétendent participer à la distribution ont intérêt et qualité pour contrôler mutuellement leurs prétentions respectives. prouvent leur créance par un écrit ou un billet du débiteur seraient seuls chirographaires ou cédulaires; mais le mot a reçu un sens plus étendu. Tout créancier qui ne peut faire valoir à l'appui de sa créance ni privilége ni hypothèque, qu'il prouve sa créance par écrit ou autrement, est chirographaire ou cédulaire, par opposition aux créanciers hypothécaires ou privilégiés.

Chacun cherche à se procurer la plus forte part possible, et poursuit ce but ou en défendant sa prétention ou en attaquant celle des autres. Ainsi, un créancier réclame une certaine somme, peut-être même un privilége; d'une part, il aura à se défendre contre les autres prétendant-droits qui veulent faire rejeter sa créance, en faire réduire le chiffre, ou la faire descendre au rang de créance chirographaire; d'autre part, il examinera les demandes des autres créanciers, contestera la validité ou le chiffre de leurs créances ou le privilége qu'ils réclament. Moins il y aura de priviléges et de créances, moins le chiffre de chaque créance sera élevé, et plus s'augmentera la part contributoire de chaque créance chirographaire.

Ceux qui se présentent à la contribution sont donc d'abord les créanciers privilégiés sur les meubles, et ensuite les créanciers chirographaires. Mais les créanciers hypothécaires peuvent-ils demander à être colloqués dans les contributions pour une part contributoire, non pas en qualité de créanciers hypothécaires, mais comme chirographaires? Peuvent-ils dire: « Notre hypothèque « nous donne un gage spécial sur un ou plusieurs immeubles déterminés, mais >> nous conservons notre droit de gage général sur tous les autres biens du dé<«<biteur. Nous sommes créanciers chirographaires indépendamment de notre «< qualité de créanciers hypothécaires qui nous donne une cause de préférence « sur le prix de tel ou tel immeuble; mais ce droit de préférence dans l'ordre « n'exclut pas notre droit de figurer dans la contribution ouverte sur le prix « des meubles. » D'un autre côté, ne paraît-il pas équitable de permettre à la masse des créanciers chirographaires d'écarter le concours des créanciers hypothécaires, en les renvoyant à l'ordre qui est ouvert ou qui s'ouvrira sur le prix des immeubles ?

En matière de faillite, dans les articles 552 et suiv. du Code de commerce, le législateur a résolu cette question de manière à garantir les droits des créanciers hypothécaires, sans nuire à la masse des créanciers chirographaires. Un exemple fera comprendre le mécanisme et l'utilité des opérations ordonnées par les articles précités. Paul tombe en faillite. Il a de nombreux créanciers. Trois d'entre eux seulement, Primus, Secundus et Tertius ont leurs créances garanties par des hypothèques. Le chiffre total du passif s'élève à un million; pour payer ce million, l'actif présente, d'une part, cent mille francs à distribuer par contribution entre tous les créanciers, et, d'autre part, un immeuble dont le prix sera absorbé par les créances hypothécaires. Je suppose que l'immeuble est vendu 250,000 francs, et que les trois créanciers hypothécaires ont le droit de réclamer chacun 100,000 francs, Primus ayant le premier rang, Secundus le second, et Tertius le troisième. Si l'ordre, c'est-à-dire la distribution du prix de l'immeuble par ordre d'hypothèque précède la contribution entre les créanciers chirographaires, comment les choses se passeront-elles ? Dans l'ordre ouvert sur les 250,000 francs, prix de l'immeuble, Primus obtiendra 100,000 francs, Secundus 100,000 francs, et il ne restera pour Tertius que 50,000 francs. Plus tard, quand la contribution s'ouvrira sur la somme de 100,000 francs à distribuer entre les créanciers chirographaires, Primus et Secundus, complétement désintéressés dans l'ordre, n'auront rien à demander; mais Tertius, qui n'a reçu dans l'ordre que 50,000 francs, moitié de sa créance, reste créancier chirographaire pour les autres 50,000 francs, et à ce titre, il prend dans la contribution une part

proportionnelle, concurremment avec les autres créanciers chirographaires. Supposons, au contraire, que la distribution par contribution précède la distribution par voie d'ordre du prix de l'immeuble, les trois créanciers hypothécaires se présenteront à cette contribution, et prendront une part contributoire comme les autres créanciers chirographaires. Ainsi, avec les chiffres que nous avons posés plus haut (100,000 francs de deniers à partager et un million de dettes), chaque créancier obtiendra un dixième de sa créance; Primus, Secundus et Tertius, créanciers chacun de 100,000 francs, toucheront donc chacun 10,000 francs dans cette contribution. Voyons maintenant quelles devraient être, au premier abord, les conséquences de la participation des créanciers hypothécaires à la distribution par contribution. Sur les 250,000 francs formant la somme à distribuer dans l'ordre ouvert postérieurement, il semble que Primus ne devrait prendre que 90,000 francs, en tenant compte des 10,000 francs qu'il a touchés dans la contribution. Secundus procéderait de la même manière et serait colloqué dans l'ordre pour 90,000 francs. Il resterait 70,000 francs pour Tertius.

Or, est-il juste que la répartition soit différente suivant que le prix des meubles est distribué avant celui des immeubles ou réciproquement ? Est-il juste que Tertius reçoive 70,000 francs dans l'ordre qui suit la contribution, tandis qu'il ne recevrait que 50,000 francs si l'ordre était ouvert le premier ?

Aussi, est-ce tout autrement que les art. 552 et suivants du Code de commerce ont réglé la manière de procéder en pareille circonstance. Nous avons vu, en reprenant toujours notre espèce, que Primus, Secundus et Tertius touchaient chacun 10,000 francs dans la contribution qui précédait l'ordre. C'est dans cette hypothèse que Tertius profiterait au détriment de la masse des créanciers. Mais, d'après les articles précités du Code de commerce, quand l'ordre s'ouvrira entre Primus, Secundus et Tertius sur les 250,000 francs, prix de l'immeuble hypothéqué, Primus sera colloqué, non pas seulement pour les 90,000 francs qui lui restent dus, mais bien pour 100,000 francs, et il rendra à la masse chirographaire les 10,000 francs qu'il a déjà touchés dans la contribution. Secundus sera de même colloqué pour 100,000 francs, et rendra à la masse chirographaire les 10,000 francs qu'il a reçus dans la contribution. Il ne restera plus sur le prix de l'immeuble que 50,000 francs pour Tertius; il devait donc figurer dans la contribution, mais pour 50,000 francs et non pour 100,000 francs; aussi il ne rendra à la masse chirographaire que 5,000 francs, part contributoire représentant les 50,000 francs qu'il touche dans l'ordre, et pour lesquels il ne devait pas figurer dans la contribution. Ces 25,000 francs restitués, par les créanciers hypothécaires, à la masse chirographaire, seront l'objet d'une nouvelle distribution par contribution; Tertius aura le droit de s'y faire colloquer pour ce qui lui reste dû, et obtiendra une part proportionnelle comme les autres créanciers chirographaires. Dans cette manière de procéder, il devient fort indifférent que l'ordre précède ou suive la contribution. La date respective des deux distributions n'aura aucune influence sur le chiffre de la part contributoire de chaque créancier dans la contribution, ni sur la somme que touchera le créancier sur qui les fonds manquent dans l'ordre.

Ce système doit-il être restreint aux distributions de deniers dans les ordres et contributions ouverts sur un failli? On a dit, pour soutenir l'affirmative, que

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