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condamnée en référé peut interjeter appel immédiatement; ainsi le dispose le § 3 de l'art. 809.

Enfin, troisième exception, elle se trouve dans la combinaison de l'art. 809 avec l'art. 443. Le délai ordinaire de l'appel est de deux mois; en matière de référé, et toujours à raison de l'urgence, le délai n'est que de quinzaine; c'est la disposition finale du § 3 de notre article.

De ce que, dans le cas d'appel d'une ordonnance sur référé, l'appel n'étant pas suspensif, l'exécution peut être poursuivie malgré l'appel, il s'ensuit qu'il n'y aura pas nécessité de faire statuer en appel, comme en première instance, par le président. Ici, il y a déjà une ordonnance intervenue, il y a déjà une décision du président, cette décision s'exécute; aussi n'est-ce pas devant le président de la cour impériale ou devant un seul conseiller, mais devant une chambre de la cour que l'appel du référé doit être porté, ainsi le décide le § 4: L'appel sera jugé sommairement et sans procédure. Sommairement, c'est-à-dire conformément à l'art. 463, et par conséquent à l'audience.

Du reste, si l'appel du référé est jugé par défaut, si l'intimé fait défaut sur l'appel du référé, comme nous ne sommes plus ici dans le cas du § 2, nous admettrons l'opposition. La loi déclare, dans le § 2, que les ordonnances sur référé ne sont pas susceptibles d'opposition, mais c'est là une disposition exceptionnelle, qui doit être renfermée dans ces termes. En principe, toute décision par défaut peut être attaquée par opposition, et, en conséquence, nous admettrons cette voie de recours contre l'arrêt rendu par défaut en cour impériale, et sur l'appel d'une ordonnance de référé.

1072. Les art. 810 et 811 sont très-simples.

« Art. 810. Les minutes des ordonnances sur référés seront déposées au greffe. »

C'est l'application du principe qui veut qu'on dépose au greffe les décisions émanées de l'autorité judiciaire.

Cependant, en cas d'absolue nécessité, il peut en être autrement; c'est cel que décide l'article suivant :

« Art. 811. Dans le cas d'absolue nécessité, le juge pourra ordonner l'exécution de son ordonnance sur la minute. »>

Remarquez d'abord que les ordonnances sur référés s'exécuteront en vertu d'une formule exécutoire comme en matière ordinaire; seulement il n'y aura pas lieu ici à ces significations de qualités nécessaires, aux termes des art. 142 et suivants, pour arriver à la rédaction des jugements ordinaires.

En principe, la partie au profit de laquelle est intervenue l'ordonnance la dépose ou la fait déposer au greffe, et, sur cette minute, qui doit rester au greffe, le greffier lui délivrera une expédition exécutoire, qui sera partie l'œuvre du juge, partie l'œuvre du greffier. Voilà la marche ordinaire ; cependant l'urgence est quelquefois assez forte pour ne pas permettre ce dépôt de la minute au greffe; c'est ce que suppose l'art. 811, en permettant au juge, dans les cas d'absolue nécessité, d'autoriser l'exécution du référé sur la minute, et, par conséquent, sans dépôt possible au greffe.

Non-seulement cela a lieu dans les cas indiqués par l'art. 811, c'est-à-dire dans les cas dont l'appréciation facultative est laissée au président ou au juge : mais il est de rares hypothèses dans lesquelles l'art. 810 est absolument inapplicable, dans lesquelles, de droit et sans décision spéciale à cet effet, le dépôt de la minute au greffe est impossible: ce sont quelques-uns des cas que j'ai déjà cités, et notamment ceux des art. 787, 922 et 944; dans ces trois cas, la minute de l'ordonnance de référé est transcrite sur le procès-verbal de l'officier ministériel ou de l'huissier.

Dans l'art. 786, en matière de contrainte par corps, le président statue, comme je l'ai déjà dit, sans assignation préalable, par une ordonnance de référé qui est consignée sur le procès-verbal de l'huissier et exécutée sur-lechamp, article 787. Dans cas, l'art. 810 est inapplicable, et l'art. 811 inutile. Il en est de même dans les cas des art. 922 et 944 (apposition de scellés et confection d'inventaire); dans ces deux cas, l'ordonnance sur référé, à propos des difficultés que soulèvent ces opérations, est consignée directement sur le procèsverbal du juge de paix ou du notaire, et exécutée immédiatement.

QUARANTE-HUITIÈME LEÇON

DEUXIÈME PARTIE

DU CODE DE PROCÉDURE.

1073.* Le livre 1er de la deuxième partie du Code de procédure contient douze titres relatifs à des sujets fort différents. Toutes ces dispositions sont le complément ou la mise en action de principes posés dans le Code Napoléon, il est inutile de chercher entre elles un lien qui n'existe pas. L'orateur du tribunat disait expressément : « La seconde partie (du Code de procédure) traitera « des procédures particulières qu'exigent quelques matières du droit civil, << éparses et indépendantes les unes des autres. »

LIVRE I

TITRE I

DES OFFRES DE PAIEMENT ET DE LA CONSIGNATION (C. D.).

Lorsque le créancier ne veut pas recevoir ce qui lui est offert par le débiteur, ou lorsqu'il n'est pas en mesure de recevoir ce qui lui est dû, il est juste que le débiteur puisse néanmoins se libérer. L'art. 1257 (C. N.) suppose que les offres réelles auront lieu quand le créancier refusera de recevoir le paiement. Mais pourquoi le créancier le refuserait-il? Parce que la somme offerte lui paraît in

suffisante, ou parce que le débiteur exige dans la quittance des conditions que le créancier n'accepte pas.

Le débiteur qui veut se libérer doit encore avoir recours aux offres réelles et à la consignation, sans que le créancier refuse de recevoir, lorsque les créanciers du créancier ont formé des saisies-arrêts entre les mains du débiteur.

Si le créancier n'accepte pas les offres qui lui sont faites par le débiteur, ce dernier consigne la somme ou la chose offerte, et le tribunal statue sur la nullité ou la validité des offres.

Le débiteur doit faire des offres réelles, c'est-à-dire présenter matériellement au créancier la chose ou la somme offerte, et être prêt à la lui remettre si ses offres sont acceptées.

On vous enseignera dans les cours du Code Napoléon quels sont le caractère et les effets des offres de paiement et de la consignation, et à quelles conditions les offres et la consignation sont jugées valables (art. 1257 et suiv.). Le Code de procédure, dans le titre qui nous occupe, complète les dispositions du Code Napoléon, en déterminant certaines conditions du procès-verbal d'offres, et en indiquant la procédure à suivre pour faire statuer sur la validité des offres et de la consignation.

Nous nous bornerons à l'explication des points réglés par le Code de procédure.

1074. « Art. 812. Tout procès-verbal d'offres désignera l'objet offert, de manière qu'on ne puisse y en substituer un autre ; et, si ce sont des espèces, il en contiendra l'énumération et la qualité. »

Le procès-verbal d'offres est fait ordinairement par un huissier. Toutefois, on reconnaît généralement que les notaires pourraient aussi dresser ces sortes de procès-verbaux ; l'art. 1258, no 7 (C. N.), exige seulement que ce soit un officier ministériel ayant caractère pour ces sortes d'actes.

Je vous renvoie aux explications qui vous seront données sur l'art. 1258, pour les questions de savoir à qui les offres doivent être faites, à la requête de quelles personnes, en quel lieu, etc.

Que doit-on offrir? D'après l'art. 1258, 3o (C. N.), le débiteur doit offrir la totalité de la somme exigible, les arrérages ou intérêts dus, les frais liquidés et une somme pour les frais non liquidés, sauf à la parfaire. L'art. 812 du Code de procédure ajoute de nouvelles conditions relativement à la désignation de la chose offerte. Si l'objet offert ne consiste pas en argent, le procès-verbal doit en faire une désignation tellement précise, qu'il ne puisse s'élever aucune difficulté sur l'identité de l'objet; il ne faut pas que le créancier puisse appliquer l'offre et la consignation à un objet, et le débiteur à un autre.

S'il s'agit de choses qui se comptent, se pèsent, se mesurent, le procès-verbal doit mentionner le nombre, le poids, la quantité.

Si le débiteur fait offrir une somme d'argent, le procès-verbal doit contenir l'énumération et la qualité des espèces, indiquer, par exemple, non-seulement quel est le montant des offres, mais combien de pièces d'or, combien de pièces d'argent de 5 fr., de 2 fr., de 1 fr., etc., ont été offertes. L'offre d'une somme en billets de banque ne serait pas valable; ces billets n'ayant pas cours forcé, le créancier aurait le droit de refuser les offres ainsi faites. Un décret du 15 mars

1848 avait obligé l'État et les particuliers à recevoir les billets de la Banque de France comme monnaie légale; ils pouvaient alors figurer parmi les choses offertes; le procès-verbal devait constater le nombre et la valeur des billets offerts. Mais ce décret a été abrogé par la loi du 6 août 1850. Les billets de banque n'ont plus cours forcé, et le créancier n'est pas tenu de les accepter.

1075. « Art. 813. Le procès-verbal fera mention de la réponse, du refus ou de l'acceptation du créancier, et s'il a signé, refusé ou déclaré ne pouvoir signer. »>

Si le créancier accepte les offres au moment où elles sont faites, son acceptation est constatée sur le procès-verbal, et la déclaration d'acceptation vaut quittance pour le débiteur. Si le créancier sait signer, il devra apposer sa signature au bas de cette déclaration; l'huissier aurait le droit de considérer le refus de signer, de la part du créancier qui le peut, comme un refus de donner quittance, et, par conséquent, comme un refus des offres. Si le créancier ne sait ou ne peut signer, la déclaration de l'huissier sur le procès-verbal suffira.

Le refus du créancier qui n'accepte pas les offres réelles est également consigné sur le procès-verbal; mais, dans cette hypothèse, le refus, par le créancier, de signer la mention de sa réponse inscrite sur le procès-verbal ne produira aucun effet. La déclaration de l'huissier suffit pour constater le refus; le créancier ne peut, en refusant de signer, empêcher l'effet des offres et de la consignation qui les suivra. L'huissier laisse d'ailleurs au créancier une copie du procès-verbal d'offres, afin qu'il puisse à loisir examiner les offres sous le rapport du fond et de la forme, et en peser les conséquences.

Les offres peuvent être faites au domicile du créancier, s'il n'est pas présent lorsque l'huissier se présente pour les faire. Il est vrai qu'alors l'huissier ne pourra constater la réponse du créancier. Néanmoins les offres sont faites tant en absence que présence. L'art. 1258 6o (C. N.) suppose qu'elles ont lieu à domicile aussi bien qu'à la personne. D'ailleurs on ne peut laisser au créancier la faculté d'empêcher les offres en se cachant. La personne trouvée au domicile du créancier, sa femme, ses domestiques, ou toute autre personne mentionnée dans l'article 68, répondra vraisemblablement à l'officier ministériel qu'elle n'a pas mission de recevoir les offres. L'officier ministériel consigne cette réponse sur son procès-verbal, déclare qu'il la considère comme un refus, et se retire, en laissant à la personne qui lui a répondu une copie du procès-verbal qu'elle devra remettre au créancier. Si le créancier a l'intention d'accepter, dès que la copie lui sera parvenue, il ira trouver l'officier ministériel, lui déclarera son acceptation et empêchera ainsi la consignation, si elle n'a pas encore eu lieu.

1076. « Art. 814. Si le créancier refuse les offres, le débiteur peut, pour se libérer, consigner la somme ou la chose offerte, en observant les formalités prescrites par l'article 1259 du Code Napoléon. »

L'art. 1259, 3o, pouvait faire croire que les offres, et le refus de les accepter, et la consignation, étaient constatés par le même procès-verbal. La marche prescrite par le Code de procédure suppose, au contraire, qu'il y en aura deux : le procès-verbal d'offres et celui qui constate le dépôt.

Ce dépôt ou cette consignation se fait, à Paris, à la Caisse des dépôts et con

signations, et ailleurs, chez les receveurs généraux ou particuliers. C'est une sorte de séquestre. La loi n'a fixé, d'ailleurs, aucun délai entre les offres et la consignation.

Je vous renvoie, au surplus, comme notre article, aux dispositions de l'article 1259 du Code Napoléon.

1077. Art. 815. La demande qui pourra être intentée soit en validité, soit en nullité des offres, ou de la consignation, sera formée d'après les règles établies pour les demandes principales ; si elle est incidente, elle le sera par requête.

Les offres suivies de consignation libèrent le débiteur; la chose consignée est aux risques du créancier (art. 1257, C. N.), qui supporte même les frais des offres et de la consignation (art. 1260). Mais tous ces effets ne sont produits que si les offres sont valablement faites. Le débiteur a donc intérêt à faire juger la validité de ces offres et de la consignation qui les a suivies. Aussi, en fait, c'est par la demande en validité, formée par le débiteur contre le créancier qui a refusé d'accepter les offres, que le tribunal sera ordinairement saisi de la question de savoir si elles sont valables. Mais, si le débiteur ne formait pas cette demande, le créancier pourrait, de son côté, agir en nullité des offres et les faire déclarer insuffisantes.

Ces deux demandes peuvent être ou principales ou incidentes à un procès déjà pendant; elles suivront, d'après cette distinction, la marche d'une procédure principale ou incidente. La loi dit, pour les demandes incidentes, qu'elles se formeront par requête, c'est-à-dire par acte d'avoué à avoué, comme ces sortes de demandes (art. 337). Le mot requête indique seulement que cet acte, qui contient les moyens et les conclusions du demandeur en validité ou en nullité d'offres, pourra être grossoyé.

Si la demande est incidente, elle sera portée au tribunal saisi de l'instance principale. Si la demande est principale, je crois qu'elle sera soumise à la règle générale de compétence: Actor sequitur forum rei, écrite dans l'art. 59, premier alinéa. En conséquence, la demande en validité d'offres sera portée au tribunal du domicile du créancier, ou au tribunal du lieu convenu pour le paiement (1); la demande en nullité d'offres, au tribunal du domicile du débiteur. Cette solution est contestée pour la demande en nullité d'offres. Plusieurs auteurs pensent que la demande en nullité d'offres, comme la demande en validité, doit toujours être portée au tribunal du lieu où les offres ont été faites, c'est-à-dire du domicile du créancier, ou au tribunal du lieu convenu pour le paiement. Suivant ces auteurs, le créancier est toujours véritablement le défendeur; il s'oppose toujours aux offres qui lui sont faites et qu'il n'accepte pas, soit qu'il joue le rôle de défendeur, qui est son rôle naturel, comme dans la demande en validité, soit qu'il prenne l'initiative et joue le rôle de demandeur, comme dans la demande en nullité.

Le législateur aurait pu, sans doute, raisonner ainsi et admettre invariablement la compétence du tribunal du lieu où les offres ont été faites; mais il eût alors exigé du débiteur, dans l'un des actes qu'il signifie au créancier, une élection de domicile attributive de compétence dans le lieu où les offres sont faites.

(1) Cass., Rej., 13 janvier 1847 (Dall., 1847, 1, 285).

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