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ou à sa résidence. La saisie-revendication, au contraire, a trait à quelques meubles seulement, qu'on cherche chez une personne non obligée envers le saisissant. Une telle recherche peut nécessiter une perquisition domiciliaire, que la loi n'a pas dû permettre trop facilement sous le prétexte, peut-être frivole ou injuste, que tel meuble volé, perdu (art. 2279, C. N.), ou affecté au paiement d'un loyer (art. 2102, 1o, C. N. et 819, C. pr.), se trouve chez telle ou telle personne désignée. Aussi, notre article exige-t-il, à peines de dommages-intérêts, que cette saisie soit autorisée par une ordonnance du président du tribunal.

1091. « Art. 827. Toute requête à fin de saisie-revendication désignera sommairement les effets. »

La désignation des effets éclairera le juge sur la portée de l'autorisation qui lui est demandée, et fera connaître à celui chez qui la perquisition doit être faite quel est le but que se propose le revendiquant; car la requête doit indiquer aussi la cause de la saisie-revendication.

• Art. 828. Le juge pourra permettre la saisie, même les jours de fête légale. »

On a considéré qu'il pouvait y avoir urgence a faire cesser une détention mal fondée, qui peut compromettre ou rendre illusoire le droit de propriété ou le droit de gage du revendiquant.

« Art. 829. Si celui chez lequel sont les effets qu'on veut revendiquer refuse les portes ou s'oppose à la saisie, il en sera référé au juge; et cependant il sera sursis à la saisie, sauf au requérant à établir gardien aux portes. >>

Comme garantie contre une perquisition arbitraire, la loi donne à celui chez qui la saisie-revendication est autorisée le droit de faire surseoir à la saisie en introduisant un référé devant le président du tribunal. Mais aussi, pour que ce référé ne devienne pas un moyen de gagner du temps et de faire disparaître les objets qu'on veut revendiquer, le requérant peut établir gardien aux portes, jusqu'à ce qu'il ait été statué sur la continuation des poursuites.

1092. « Art. 830. La saisie-revendication sera faite en la même forme que la saisieexécution, si ce n'est que celui chez qui elle est faite pourra être constitué gardien. »

Si ce n'est que celui chez qui elle est faite pourra être constitué gardien. Ces mots présentent quelque obscurité. Nous avons déjà dit, sur l'art. 821, qui, dans la saisie-gagerie, permet d'établir le saisi gardien, qu'il n'est pas très-facile d'expliquer la portée d'une telle disposition. Si l'art. 821 existait seul, on pourrait dire qu'il contient une redondance, qu'il n'est qu'une application de l'art. 598 in fine. Si les art. 821 et 823 ne devaient pas se combiner avec notre art. 830, on n'hésiterait pas à dire, comme je l'ai déjà fait sur l'art. 823, que l'art. 821 permet de constituer le saisi gardien dans la saisie-gagerie, par opposition à l'article 823, qui le défend dans la saisie foraine.

Mais l'art. 830 va plus loin: il permet de constituer le saisi gardien dans la saisie-revendication, à la différence de la saisie-exécution. Or, l'art. 598 le permet positivement dans cette dernière saisie. Plusieurs auteurs, pour donner un sens à l'art. 830, ont cherché une différence entre la garde confiée au saisi en ma

tière de saisie-revendication et de saisie-gagerie, en vertu des art. 821 et 830, et la garde confiée au saisi en matière de saisie-exécution. Mais, comme je l'ai dit sur l'art. 821, ils ne sont pas d'accord sur la différence. Les uns la font consister en ce que la garde confiée en vertu des art. 821 et 830 pourrait être imposée au saisi malgré lui; les autres, en ce qu'elle pourrait être confiée au saisi sans consulter le saisissant. Je ne vois pas plus de raisons pour modifier l'art. 598 dans le premier sens que dans le second, chacune de ces interprétations me paraît divinatoire; je serais plutôt tenté de croire que les rédacteurs du Code de procédure, en rédigeant l'art. 830, avaient oublié l'innovation introduite par l'art. 598, qui permet, contrairement à l'ancien droit, de confier la garde au saisi lui-même.

1093. « Art. 831. La demande en validité de la saisie sera portée devant le tribunal du domicile de celui sur qui elle est faite; et, si elle est connexe à une instance déjà pendante, elle le sera au tribunal saisi de cette instance. »

Cet article ne présente pas de difficulté; seulement, je vous prie de remarquer, avant de quitter cette matière, que le saisissant, par la saisie-revendication et le jugement qui la valide, ne se propose pas toujours, comme dans les autres saisies, de parvenir plus ou moins directement à la vente de l'objet saisi, pour se faire payer sur le prix, mais souvent de rentrer dans la possession ou dans la détention de l'objet frappé par la saisie-revendication. Ainsi, celui qui fait saisirrevendiquer un meuble, dont il se prétend propriétaire, a l'intention de garder ce meuble et non de le faire vendre; mais le bailleur, en faisant saisir-revendiquer les meubles qui garnissaient la maison louée et qui ont été déplacés sans son consentement, veut sans doute les faire saisir-gager ou saisir-exécuter plus tard, et se faire payer sur leur prix. *

TITRE IV

DE LA SURENCHÈRE SUR ALIENATION VOLONTAIRE (C. D.).

1094. * La surenchère est l'offre d'une somme supérieure au prix d'une vente ou d'une adjudication; elle a pour but de provoquer une nouvelle vente aux enchères. Nous avons vu qu'après une adjudication sur saisie immobilière, toute personne pouvait, dans les huit jours, provoquer une nouvelle mise aux enchères en faisant une surenchère d'un sixième (art. 708).

Le droit de surenchérir peut être également exercé à la suite d'une aliénation volontaire. Le débiteur a pu vendre l'immeuble à l'amiable pour un prix inférieur à sa valeur. Il ne serait pas juste que les créanciers fussent privés d'une partie de la valeur de la chose hypothéquée, par la volonté de leur débiteur. Aussi la loi leur permet-elle de surenchérir; la surenchère leur est même facilitée, puisqu'il suffit d'offrir un dixième en sus du prix stipulé dans le contrat (art. 2185, C. N.).

Il est possible que les créanciers n'aient pas connaissance de l'aliénation volontaire de l'immeuble qui leur est hypothéqué. Tant que le nouvel acquéreur ne se fait pas connaître, il reste soumis au droit de suite des créanciers hypothé

caires. Mais si l'acquéreur ne veut pas rester sous le coup des poursuites hypothécaires, il aura recours à la purge, dont certaines formalités (les notifications prescrites par l'art. 2183, C. N.) mettent les créanciers hypothécaires en demeure de former leur surenchère.

L'immeuble peut être grevé d'hypothèques qui n'ont rang que par leur inscription, et d'hypothèques qui se conservent indépendamment de l'inscription, comme celles du mineur, de l'interdit et de la femme mariée (art. 2135, C. N.). Pour ces dernières, les art. 2193 et suiv. (C. N.) règlent le mode de purge qui doit être spécialement employé à leur égard. Sur cette purge, la femme, le mineur ou leurs mandataires ont le droit de surenchérir.

La purge des priviléges et hypothèques inscrits et la surenchère sur aliénation volontaire avaient déjà été réglées par les art. 2181 et suiv. du Code Napoléon. Dans le titre qui nous occupe, les rédacteurs du Code de procédure ont ajouté quelques dispositions sur les formalités de la purge, réglé les formes de la revente aux enchères provoquée par la surenchère; ils avaient même posé dans les art. 834 et 835 des règles de droit fort importantes, qui interprétaient ou plutôt modifiaient le système hypothécaire du Code Napoléon. Mais ces deux articles ont été abrogés par la loi du 23 mars 1855.

D'après l'art. 2187 du Code Napoléon, la vente par suite de surenchère sur aliénation volontaire devait se faire dans les mêmes formes que la vente sur saisie immobilière. Le législateur de 1841, en modifiant les règles de la saisie immobilière, a voulu tenir compte des différences qui existent entre ces deux sortes de

ventes.

Le législateur a révisé en même temps les autres dispositions de procédure contenues dans ce titre et tranché quelques questions sur lesquelles des difficultés s'étaient élevées.

L'art. 2 de la loi du 2 juin 1841 porte en conséquence : « Les art. 832, 833, « 836, 837 et 838 du titre IV du livre Ier de la deuxième partie du Code de pro« cédure civile, relatifs à la surenchère sur aliénation volontaire, seront rem« placés par les dispositions suivantes. » Suit le texte des nouveaux art. 832, 833, 836, 837 et 838. On n'avait laissé intacts que les art. 834 et 835, abrogés aujourd'hui par l'art. 6 de la loi du 23 mars 1855.

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1095. « Art. 832. Les notifications et réquisitions prescrites par les art. 2183 et 2185 du Code Napoléon seront faites par un huissier commis à cet effet, sur simple requête, par le président du tribunal de première instance de l'arrondissement où elles auront lieu; elles contiendront constitution d'avoué près le tribunal où la surenchère et l'ordre devront être portés. L'acte de réquisition de mise aux enchères contiendra, avec l'offre et l'indication de la caution, assignation à trois jours devant le tribunal, pour la réception de cette caution, à laquelle il sera procédé comme en matière sommaire. Cette assignation sera notifiée au domicile de l'avoué constitué; il sera donné copie, en même temps, de l'acte de soumission de la caution et du dépôt au greffe des titres qui constatent sa solvabilité. - Dans le cas où le surenchérisseur donnerait un nantissement en argent ou en rentes sur l'État, à défaut de caution, conformément à l'art. 2041 du Code Napoléon, il fera notifier avec son assignation copie de l'acte constatant la réalisation de ce nantissement. Si la caution est rejetée, la surenchère sera déclarée nulle et l'acquéreur maintenu, à moins qu'il n'ait été fait d'autres surenchères par d'autres créanciers.

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Après les notifications faites par l'acquéreur qui veut purger conformément à

l'art. 2183 du Code Napoléon, tout créancier inscrit peut requérir une nouvelle mise aux enchères, en formant une surenchère (1) dans le délai et avec les conditions fixées par l'art. 2185. Notre art. 832 a soumis la surenchère à quelques formalités dont le Code ne parlait pas et que nous devons examiner.

Les notifications à fin de purge et les réquisitions de mise aux enchères seront faites par un huissier commis par le président du tribunal. Cette disposition a pour but de mieux garantir la remise des copies des notifications aux créanciers inscrits et de celle de la réquisition de mise aux enchères à l'acquéreur. On comprend combien il est important que le créancier connaisse une notification qui fait courir le délai dans lequel il doit former sa surenchère, et que l'acquéreur soit averti d'une surenchère qui rend sa propriété incertaine.

Elles contiendront constitution d'avoué. On gagnera ainsi du temps. En effet, l'acte de réquisition de mise aux enchères doit contenir une assignation pour la réception de la caution. Cette assignation sera directement signifiée au domicile de l'avoué constitué par l'acquéreur dans sa notification à fin de purge (2o alinéa de l'art. 832). Quant à la surenchère, comme elle contient une assignation, elle doit contenir une constitution d'avoué, aux termes de l'art. 61 (C. pr.).

Près le tribunal où la surenchère et l'ordre devront être portés, c'est-à-dire près le tribunal de la situation de l'immeuble.

Notre art. 832 (2o alinéa) déroge donc à l'art. 2185 en ce que la réquisition de mise aux enchères doit être faite par acte signifié à l'avoué de l'acquéreur à peine de nullité (art. 838) (2), tandis que l'art. 2185, 1°, ordonnait de faire cette signification à domicile; mais les autres dispositions de l'art. 2185 demeurent entières. Ainsi la surenchère doit être d'un dixième du prix stipulé au contrat ou déclaré par le nouveau propriétaire (art. 2185, 2o). Les nos 3 et 4 de l'art. 2185, relatifs à la signification de la surenchère au précédent propriétaire, débiteur principal, et à la forme de cette signification, recevront encore leur application. C'est par exploit d'huissier que cette signification sera faite à l'ancien propriétaire qui n'a pas encore d'avoué. La surenchère n'est pas signifiée aux autres créanciers inscrits. Une telle signification aurait entraîné des frais très-considérables.

Enfin l'art. 2185, 5o, exige du surenchérisseur l'offre d'une caution. Les quatre derniers alinéa de notre art. 832 développent cette dernière condition de la validité de la surenchère. L'acte de réquisition de mise aux enchères devra contenir non-seulement l'offre d'une caution, mais aussi l'indication de cette caution, ainsi qu'une assignation à trois jours pour la réception de la caution (3). Il contiendra aussi la copie de l'acte de soumission de la caution et du dépôt au greffe des titres qui établissent sa solvabilité. On procédera comme en matière sommaire.

La solvabilité de la caution s'estime, d'ailleurs, conformément aux dispositions des art. 2018 et 2019 (C. N.). Toutefois l'art. 2041 du même Code permet à celui qui ne peut trouver de caution de donner un gage en nantissement. Sous l'em

(1) La surenchère ne peut être formée avant les notifications; C. de Limoges, 24 avril 1863 (Dall., 1863, 2, 173 et la note).

(2) C. de Paris, 6 mai 1844 (Dall., Rép. v° Surenchère, no 101).

(3) Ce délai de trois jours n'est pas considéré comme exigé à peine de nullité. Rej., 16 novembre 1853 (Dall., 1854, 1, 399).

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Cass.,

pire du Code de procédure de 1806, on avait douté que l'art. 2041 fût applicable à notre matière; en adoptant même l'affirmative, on se demandait quels équivalents pouvaient être admis. Le nouvel art. 832 a tranché cette question. Le surenchérisseur pourra donner, à défaut de caution, un nantissement en argent ou en rentes sur l'Etat. Le dépôt de cet argent ou des titres de rentes aura lieu à la Caisse des dépôts et consignations, conformément à l'ordonnance du 3 juillet 1816 (1).

Il résulte de la discussion sur cet article qu'on a voulu proscrire tout autre nantissement.

Enfin, le surenchérisseur, qui aura présenté une caution n'offrant pas les qualités requises, ne pourra, après le rejet de cette caution, en présenter une nouvelle; et, s'il n'y a pas d'autres surenchères formées par d'autres créanciers, l'immeuble, ne sera pas mis aux enchères, et l'aliénation amiable sera maintenue.

→ 1096. « Art. 833. Lorsqu'une surenchère aura été notifiée avec assignation dans les termes de l'art. 832 ci-dessus, chacun des créanciers inscrits aura le droit de se faire subroger à la poursuite, si le surenchérisseur ou le nouveau propriétaire ne donne pas suite à l'action dans le mois de surenchère, La subrogation sera demandée par simple requête en intervention, et signifiée par acte d'avoué à avoué. · Le même droit de subrogation reste ouvert au profit des créanciers inscrits, lorsque, dans le cours de la poursuite, il y a collusion, fraude ou négligence de la part du poursuivant. Dans tous les cas ci-dessus, la subrogation aura lieu aux risques et périls du surenchérisseur, sa caution continuant à être obligée. »

Les dispositions de l'art. 833 ont été introduites dans le Code de procédure par la loi du 2 juin 1841. Elles me paraissent être la conséquence et le développement du principe posé dans l'art. 2190 du Code Napoléon, qui ne permet pas au créancier surenchérisseur de se désister de sa surenchère au détriment des autres créanciers inscrits: le désistement du surenchérisseur n'empêche pas la mise aux enchères. Mais, sans se désister expressément, le surenchérisseur négligeait quelquefois de poursuivre sa surenchère. L'art. 833 donne aux autres créanciers inscrits le droit de se faire subroger à la poursuite, si le surenchérisseur ou l'acquéreur lui-même laissent écouler un mois sans donner suite à la surenchère, ou s'il y a, dans le cours de la poursuite, collusion, fraude ou négligence de la part du poursuivant. Le deuxième alinéa de l'art. 833 règle la forme de cette demande en subrogation.

Mais le surenchérisseur, contre qui la subrogation a été obtenue, ne se trouve pas libéré de l'offre qu'il a faite de porter le prix à un dixième en sus; autrement sa négligence ou sa fraude lui profiteraient. Aussi, lisons-nous, à la fin de l'art. 833, que la caution du surenchérisseur continue à être obligée, et que la subrogation a lieu aux risques et périls du suren chérisseur, c'est-à-dire « qu'il sera déclaré adjudicataire, si, au jour fixé pour l'adjudication, il ne se << présente pas d'autres enchérisseurs (art. 838, premier alinéa), » et que, faute par lui de payer le prix de cette adjudication, il sera poursuivi par la voie de la folle enchère.

Pour que la subrogation puisse produire ces effets, il faut que la surenchère (1) C. de Bourges, 17 mars 1852, et Pau, 11 août 1852 (Dall., 1853, 2, 71 et 110).

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