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« Art. 913. Si le scellé n'a pas été apposé avant l'inhumation, le juge constatera, par son procès-verbal, le moment où il a été requis de l'apposer, et les causes qui ont retardé soit la réquisition, soit l'apposition. »>

Nous avons vu que la loi ordonne ou permet l'apposition des scellés lorsque l'absence ou l'incapacité des intéressés, ou l'impossibilité de surveillance de leur part laisseraient ouverture à des soustractions ou à des fraudes. Aussi, pour se conformer au vœu de la loi, doit-on faire l'apposition des scellés dans le plus bref délai après le décès. Si elle n'a pas lieu avant l'inhumation, le juge de paix doit mentionner les causes qui ont retardé la réquisition ou l'apposition, afin de mettre les parties intéressées ou même le ministère public sur la trace des fraudes que peut cacher ce retard.

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« Art. 914. Le procès-verbal d'apposition contiendra: - 1o la date des an, mois, jour et heure; - 2o le motif de l'apposition; 3o les noms, profession et demeure du requérant, s'il y en a, et son élection de domicile dans la commune où le scellé est apposé, s'il n'y demeure; - 4o s'il n'y a pas de partie requérante, le procès-verbal énoncera que le scellé a été apposé d'office et sur le réquisitoire ou sur la déclaration de l'un des fonctionnaires dénommés dans l'art. 911; -5° les comparutions et dires des parties; — 6° la désignation des lieux, bureaux, coffres, armoires, sur les ouvertures desquels le scellé a été apposé; -7° une description sommaire des effets qui ne sont pas mis sous les scellés; - 8o le serment, lors de la clôture de l'apposition, par ceux qui demeurent dans le lieu, qu'ils n'ont rien détourné, vu ni su qu'il ait été rien détourné directement ni indirectement; — 9o l'établissement du gardien présenté, s'il a les qualités requises; sauf, s'il ne les a pas ou s'il n'en est pas présenté, à en établir un d'office par le juge de paix. »

Toutes ces formalités se comprennent facilement à la lecture de l'article ; je me bornerai à faire deux observations, l'une sur le troisième, l'autre sur le neuvième paragraphe.

3o..... Élection de domicile... Le requérant doit faire élection de domicile dans la commune où le scellé a été apposé, afin de faciliter les demandes en mainlevée, si le scellé a été indûment apposé. Cette élection de domicile attribue, en effet, compétence au tribunal du lieu où le scellé a été apposé; le requérant sera assigné en mainlevée devant ce tribunal, et non devant celui de son domicile.

9°..... S'il a les qualités requises. Ces qualités consistent à être solvable et contraignable par corps (art. 596, 597, C. pr.). Toutefois, nous avons vu qu'on n'exigeait pas d'une manière bien rigoureuse la condition de solvabilité, à cause de la position des personnes parmi lesquelles on prend habituellement les gardiens.

1134. « Art. 915. Les clefs des serrures sur lesquelles le scellé a été apposé resteront, jusqu'à sa levée, entre les mains du greffier de la justice de paix, lequel fera mention, sur le procès-verbal, de la remise qui lui en aura été faite; et ne pourront le juge ni le greffier aller, jusqu'à la levée, dans la maison où est le scellé, à peine d'interdiction, à moins qu'ils n'en soient requis, ou que leur transport n'ait été précédé d'une ordonnance motivée. »

Le sceau demeure entre les mains du juge de paix, les clefs des serrures dans celles du greffier, de sorte qu'il faudrait l'accord frauduleux du juge de paix et du greffier, pour violer les scellés sans qu'il restât de traces apparentes de cette

violation. Il serait nécessaire, en effet, d'avoir les clefs pour ouvrir les portes des pièces ou des meubles, et le sceau pour replacer les scellés. Une telle collusion n'est pas probable.

Il est, d'ailleurs, interdit au greffier et au juge de paix d'aller dans le lieu où les scellés sont apposés jusqu'à leur levée, sous les peines et sauf les exceptions prévues par notre article.

Lorsque les scellés sont apposés après décès, il faut prendre des précautions pour ne pas placer sous le scellé le testament olographe que le défunt a pu laisser. Aussi, tout testament ou tout papier cacheté, après avoir été l'objet de certaines constatations et formalités ayant pour but d'en assurer l'intégrité et la conservation, doit être remis au président du tribunal civil de l'arrondissement (art. 916). Si ces papiers appartiennent à des tiers et ne concernent pas la succession, le président du tribunal fera appeler les tiers et ouvrira ces papiers cachetés en leur présence ou les remettra sans les ouvrir. Si, au contraire, ce papier est un testament, le président en fera l'ouverture, s'il est sous enveloppe, et, dans tous les cas, en ordonnera le dépôt entre les mains d'un notaire (article 918, 919, 920).

Au moment de l'apposition des scellés, les personnes qui se croient légataires peuvent même requérir le juge de paix de faire la perquisition du testament (art. 917).

1135. Art. 921. Si les portes sont fermées, s'il se rencontre des obstacles à l'apposition des scellés, s'il s'élève, soit avant, soit pendant le scellé, des difficultés, il y sera statué en référé par le président du tribunal. A cet effet, il sera sursis, et établi par le juge de paix garnison extérieure, même intérieure, si le cas y échet, et il en référera surle-champ au président du tribunal. Pourra néanmoins le juge de paix, s'il y a péril dans le retard, statuer par provision, sauf à en référer ensuite au président du tribunal. >>

Au moment où le juge de paix se présente pour apposer les scellés, il trouve les portes fermées, ou bien il se rencontre des obstacles à l'apposition des scellés; de quels obstacles la loi veut-elle parler? Par exemple, le juge de paix trouve sur les lieux une personne qui prétend que les meubles sur lesquels porteraient le scellé lui appartiennent et non à la succession; ou les personnes qui sont sur les lieux affirment que déjà l'inventaire a été fait, auquel cas les scellés ne peuvent plus être apposés (art. 923).

En présence de ces obstacles matériels comme la fermeture des portes, ou juridiques, comme les prétentions que je signalais à l'instant, que doit faire le juge de paix? Si le retard dans l'apposition des scellés offrait des dangers pour les intéressés, il statuera lui-même provisoirement sur la difficulté ; en d'autres termes, il est laissé à sa prudence de s'arrêter devant l'obstacle qui se présente, ou de passer outre malgré cet obstacle; dans ce dernier cas, il doit en référer au président du tribunal.

Si, au contraire, il n'y a pas péril dans le retard, il doit s'arrêter devant l'obstacle qu'il rencontre, jusqu'à ce que le président du tribunal civil d'arrondissement ait statué en référé sur la difficulté. Mais, comme ce délai pourraît être mis à profit par ceux qui auraient l'intention de soustraire des meubles ou papiers de la succession, le juge de paix, s'il le croit convenable, établira garnison extérieure et même intérieure, c'est-à-dire qu'il placera, soit à la porte, soit

même dans l'intérieur de l'appartement, des personnes chargées d'empêcher la soustraction d'aucun des meubles ou papiers.

«Art. 922. Dans tous les cas où il sera référé par le juge de paix au président du tribunal, soit en matière de scellé, soit en autre matière, ce qui sera fait et ordonné sera constaté sur le procès-verbal dressé par le juge de paix; le président signera ses ordonnances sur ledit procès-verbal. »>

Cet article n'exige aucune explication.

1136. « Art. 923. Lorsque l'inventaire sera parachevé, les scellés ne pourront être apposés, à moins que l'inventaire ne soit attaqué, et qu'il ne soit ainsi ordonné par le président du tribunal.

« Si l'apposition des scellés est requise pendant le cours de l'inventaire, les scellés ne seront apposés que sur les objets non inventoriés. »

Quand l'inventaire est terminé, il est évident que l'apposition des scellés manquerait complétement d'utilité. En effet, les meubles et les papiers décrits dans l'inventaire, dont la minute reste chez le notaire, ne peuvent plus disparaître impunément.

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« Art. 924. S'il n'y a aucun effet mobilier, le juge de paix dressera un procès-verbal de carence. S'il y a des effets mobiliers qui soient nécessaires à l'usage des personnes qui restent dans la maison, ou sur lesquels le scellé ne puisse être miş, le juge de paix fera un procès-verbal contenant description sommaire desdits effets. »

Qui dressera ces procès-verbaux de carence ou de description sommaire ? Comme ces actes ont pour but de suppléer les inventaires dans les cas déterminés par notre article, il semblerait logique d'en confier la rédaction aux notaires, qui ont le droit exclusif de faire les inventaires. Aussi la loi du 27 mars 1791 (art. 10), décidait-elle que « la confection des inventaires, procès-verbaux « de description et de carence à l'ouverture des successions, n'appartiendrait << point au juge de paix, mais aux notaires. >>

Mais le Code de procédure, dans notre art. 924, a changé cette disposition, et a remis aux juges de paix la confection des procès-verbaux de carence ou de description sommaire. Ce changement s'appuie sur une raison d'économie; on n'a pas voulu qu'il fût nécessaire, dans les successions peu opulentes, d'appeler simultanément le juge de paix et le notaire. Quand il n'y aura lieu qu'à un procès-verbal de carence ou à un procès-verbal de description sommaire, l'intervention du juge de paix suffira. Cette intervention sera aujourd'hui d'autant moins onéreuse pour la succession, que la loi du 21 janvier 1845 a supprimé tous les droits et vacations précédemment accordés aux juges de paix.

« Art. 925. Dans les communes où la population est de vingt mille âmes et au-dessus, il sera tenu, au greffe du tribunal de première instance, un registre d'ordre pour les scellés, sur lequel seront inscrits, d'après la déclaration que les juges de paix seront tenus d'y faire parvenir dans les vingt-quatre heures de l'apposition : 1o les noms et demeures des personnes sur les effets desquelles le scellé aura été apposé; 2o le nom et la demeure du juge qui a fait l'apposition; 3o le jour où elle a été faite. »

Ces formalités ont pour but de donner de la publicité à l'apposition des

scellés afin que les intéressés puissent former opposition à ce que le scellé soit levé hors de leur présence.

Dans les villes au-dessous de vingt-mille âmes, ces formalités n'ont pas paru nécessaires. La loi a supposé que, dans les petites villes, l'apposition des scellés serait assez notoire pour parvenir à la connaissance de tous les intéressés.

Ajoutons, en terminant, que la loi prononce des peines sévères contre ceux qui violeraient le secret des scellés. Le bris de scellés constitue, suivant la gravité des faits et la qualité des personnes, tantôt un crime et tantôt un délit, qui tombent sous l'application des art. 249 et suivants du Code pénal. *

TITRE II

DES OPPOSITIONS AUX SCELLÉS (C. D.).

1137.* Cet intitulé : Des oppositions aux scellés, est un peu trop elliptique et pourrait vous induire en erreur sur la portée qu'il faut lui donner. Il ne s'agit pas de s'opposer à l'apposition des scellés; la loi suppose, au contraire, que les scellés sont déjà apposés, et permet de former opposition à ce que les scellés soient levés hors de la présence de l'opposant, ou, au moins, sans qu'il ait été appelé.

Toute personne ayant intérêt ou prétendant avoir intérêt a le droit de former cette opposition. Ainsi ce droit appartient d'abord aux personnes indiquées par le no 1 de l'art. 909, comme prétendant droit dans la succession ou dans la communauté. Quant aux créanciers de la succession, ils n'ont pas besoin de justifier des conditions de l'art. 909, 2o, pour s'opposer à la levée des scellés. On leur permet de former cette opposition même sans titre exécutoire ni ordonnance du juge (art. 821, C. N.). L'allégation, même non prouvée, de la qualité de créancier suffit pour permettre de s'opposer à la levée des scellés; on jugera plus tard le fondement de la prétention, si elle est contestée; mais l'opposition sera admise provisoirement.

Cette faculté de former opposition sans intérêt prouvé n'entraînera-t-elle pas des inconvénients? En fait, l'idée de s'opposer à la levée des scellés ne viendra guère à l'esprit de ceux qui n'ont et ne croient avoir aucun intérêt. Mais une personne peut se croire créancière, sans l'être effectivement; et souvent il importera peu que les scellés soient levés et l'inventaire dressé en présence d'une personne de plus ou de moins. Plus il y a de témoins, et plus la sincérité de l'inventaire est assurée.

Toutefois, s'il n'y avait d'opposition que de la part de personnes sans intérêt ou sans droit, ou si les héritiers étaient intéressés à ne pas admettre ces personnes dans les secrets de la succession, le tribunal pourrait prononcer la mainlevée de semblables oppositions et décider que les scellés seraient levés et l'inventaire dressé hors de leur présence.

Les art. 926 et 927 tracent les formes des oppositions à la levée des scellés.

« Art. 926. Les oppositions aux scellés pouront être faites, soit par une déclaration sur le procès-verbal des scellés, soit par exploit signifié au greffier du juge de paix. »

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De ces deux manières, la première a l'avantage de ne point entraîner de frais.

« Art. 927. Toutes oppositions à scellé contiendront, à peine de nullité, outre les formalités communes à tout exploit: 1° élection de domicile dans la commune ou l'arrondissement de la justice de paix où le scellé est apposé, si l'opposant n'y demeure pas ; 2o l'énonciation précise de la cause de l'opposition. »

Les deux conditions exigées par notre article ont pour but de faciliter la de mande en mainlevée des oppositions mal fondées. Il faut que les héritiers connaissent le motif de l'opposition pour l'apprécier et la contester au besoin. D'au tre part, la demande en mainlevée sera portée non pas au tribunal du domicile réel de l'opposant, qui est peut-être fort éloigné, mais au tribunal du domicile élu, c'est-à-dire au tribunal de l'arrondissement où le scellé est apposé ⚫.

TITRE III

DE LA LEVÉE DU SCELLÉ (C. D.).

→ 1138. * Les scellés restent placés sur les meubles et effets de la succession, jusqu'à ce que le juge de paix les enlève dans les formes prescrites par la loi, et sur la réquisition des personnes mentionnées dans l'art. 930.

La levée des scellés doit-elle être faite dans un certain délai ? Et d'abord peutelle être reculée indéfiniment? La loi n'a pas fixé de maximum de délai, parce que les héritiers, les légataires ou les créanciers ont un intérêt évident à provoquer la levée des scellés le plus tôt possible, et ne manqueront jamais de le faire. Toutefois, quand il s'agit de scellés sur les biens appartenant à un mineur ou à un interdit, le tuteur doit requérir la levée des scellés dans les dix jours de sa nomination (art. 451 et 509, C. N.).

Les scellés apposés après décès doivent nécessairement être maintenus pendant un minimum de délai déterminé par les art. 928 et 929.

« Art. 928. Le scellé ne pourra être levé et l'inventaire fait que trois jours après l'inhumation, s'il a été apposé auparavant, et trois jours après l'apposition, si elle a été faite depuis l'inhumation, à peine de nullité des procès-verbaux de levée de scellés et inventaire, et des dommages et intérêts contre ceux qui les auront faits et requis: le tout, à moins que, pour des causes urgentes et dont il sera fait mention dans son ordonnance, il n'en soit autrement ordonné par le président du tribunal de première instance. Dans ce cas, si les parties qui ont droit d'assister à la levée ne se sont pas présentées, il sera appelé pour elles, tant à la levée qu'à l'inventaire, un notaire nommé d'office par le président. »

L'utilité d'un délai entre l'apposition et la levée des scellés après décès a été depuis longtemps comprise. Pothier nous apprend qu'un arrêt de règlement du 8 juin 1693 avait défendu de lever les scellés mis sur les effets d'un défunt plus tôt que vingt-quatre heures après l'enterrement fait publiquement. M. de Lamoignon, dans son réquisitoire sur cet arrêt, en donnait pour raison qu'il fallait laisser aux créanciers le temps de s'opposer à ce que les scellés fussent levés hors de leur présence. Un autre arrêt de règlement du 17 juin 1733 ordonna qu'à l'avenir les scellés ne pourraient être levés et l'inventaire commencé, soit

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