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d'immeubles. Il s'agit spécialement ici des formes à suivre pour la vente des immeubles dotaux sous le régime dotal.

Sous ce régime, les immeubles constitués en dot sont inaliénables, même du consentement commun des deux époux (art. 1554, C. N.), à moins que le contrat de mariage ne contienne une convention contraire (1557, C. N.). Cette règle souffre cependant quelques exceptions, et notamment dans les cas énumérés par l'art. 1558 du Code Nipoléon.

Dans ces diverses hypothèses exceptionnelles, la femme qui voudra aliéner un immeuble dotal adressera au tribunal une requête, afin d'être autorisée à procéder à la vente de cet immeuble pour celle des causes de l'art. 1558 qu'elle déterminera. Le tribunal, après examen, accordera ou refusera l'autorisation par un jugement rendu en audience publique, sur les conclusions du ministère public (art. 83, 6o). Si la vente est autorisée, il y sera procédé avec toutes les formes que nous avons déjà vues pour les ventes des biens immeubles appartenant à des mineurs. Cette assimilation apporte une dérogation à l'art. 1558 du Code Napoléon, qui exigeait trois affiches préalables avant la vente, tandis que les art. 958 et 969, maintenant applicables à la vente des immeubles dotaux, n'indiquent qu'une apposition d'affiches, à moins qu'une plus grande publicité ne paraisse nécessaire (art. 961, C. pr.).

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TITRE X

DU CURATEUR A UNE SUCCESSION VACANTE (C. D.).

1175. « Art. 998. Lorsque, après l'expiration des délais pour faire inventaire et pour délibérer, il ne se présente personne qui réclame une succession, qu'il n'y a pas d'héritier connu, ou que les héritiers connus y ont renoncé, cette succession est réputée vacante; elle est pourvue d'un curateur conformément à l'art. 812 du Code Napoléon.

*Cet article, qui reproduit littéralement dans sa première phrase l'art. 811 du Code Napoléon, a pour objet de déterminer dans quel cas la succession est réputée vacante. Une controverse s'est élevée sur la portée des termes des articles 811 (C. N.,) et 998 du Code de procédure, et sur la question de savoir quand la succession est réputée vacante.

Voici, je crois, le véritable sens de ces articles. La loi suppose que, dans les trois mois et quarante jours qui suivent l'ouverture de la succession, il ne se présente personne pour la réclamer; telle est l'idée qui sert de point de départ à la présomption de vacance de succession. Personne ne se présente, pas même I'État qui est appelé en dernier lieu (1). L'exposé des motifs de M. Treilhard est formel à cet égard: «Mais il peut arriver qu'il ne se présente pour recueil« lir une succession ni parent, ni enfants naturels, ni époux survivant, ni << même l'État. La succession est alors vacante. »>

Toutefois ce fait que personne ne se présente ne suffirait pas pour que la succession fût vacante. Il y a, en effet, des ayants droit qui n'ont pas besoin de se

(1) Si l'État se présente, la succession ne peut être réputée vacante. Cass., 17 août 1840. Journal du Palais, t. II de 1840, p. 452. Reunes, 7 juillet 1851 (Dall., 1852, 5, 518).

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présenter, parce qu'ils sont investis de la succession, même à leur insu ; je veux parler des héritiers. Aussi la loi ajoute-t-elle, comme seconde condition de la présomption de vacance de succession, qu'il n'y a pas d'héritier connu, ou que les héritiers connus ont renoncé. Cette renonciation sera ordinairement la cause de la vacance de la succession. Elle n'est sans doute vacante que parce qu'elle est mauvaise. Et quelle est la conséquence de la vacance de la succession? C'est la nomination d'un curateur pour administrer les biens dans l'intérêt des créanciers.

Si la succession a un représentant, héritier ou successeur irrégulier, elle n'est pas vacante; il n'y a donc pas lieu à nommer un curateur pour l'administrer. Remarquons bien les expressions de la loi : Lorsqu'il ne se présente personne qui réclame une succession, qu'il n'y a pas d'héritier connu, ou que les héritiers connus y ont renoncé, cette succession est réputée vacante. Il est possible qu'il y ait des héritiers qui, sans avoir renoncé, ne soient pas connus; dans ce cas la succession est réputée, mais n'est pas réellement vacante. La présomption de vacance cessera le jour où cet héritier, inconnu jusqu'alors, se présentera ou sera connu. Mais si, en effet, il n'y a personne qui veuille prendre la succession, s'il n'y a pas d'héritier, ou si tous les héritiers ont renoncé, la succession est réellement vacante. Seulement on peut se tromper sur l'existence des héritiers; et, quant à la procédure, les héritiers inconnus sont pour les créanciers comme s'ils n'étaient pas. Aussi, soit dans une succession réellement vacante, soit dans une succession réputée vacante, il n'y a toujours personne qui représente ostensiblement la succession; il y a lieu, par conséquent, à faire nommer un curateur à la succession vacante pour la représenter et l'administrer dans l'intérêt des ayants droit, soit des héritiers ou autres successeurs, s'il s'en présente plus tard, quand la succession était à tort réputée vacante, soit, dans tous les cas, dans l'intérêt des créanciers.

Ou que les héritiers connus y ont renoncé. La renonciation d'un héritier annule à son égard les effets de la saisine que la loi lui avait déférée ; et au même moment la loi investit de cette succession ou de cette part répudiée les cohéritiers du renonçant, ou les héritiers du degré subséquent, s'il n'avait pas de cohéritiers. Contre la saisine des héritiers du degré subséquent, après la renonciation des héritiers du degré qui précède, on objecterait vainement les dispositions de l'article 790 du Code Napoléon, qui permet au renonçant d'accepter encore la succession tant qu'elle n'a pas été acceptée par d'autres héritiers. Cet article ne fait, suivant moi, qu'accorder une faveur au renonçant.

Il semble bien résulter de ce qui précède que, tant qu'il y a des héritiers connus à un degré quelconque, et qu'ils n'ont pas encore renoncé, la succession ne peut légalement être réputée vacante, et qu'il n'y a pas lieu à lui nommer un curateur. Il faut que les héritiers connus y aient renoncé (art. 811, C. N., et 998 Pr.). Cependant, dans l'opinion la plus accréditée, on décide que, quand les héritiers connus du premier degré ont renoncé, les créanciers peuvent faire nommer un curateur à la succession présumée vacante, sans avoir besoin d'interpeller les héritiers du degré subséquent sur la question de savoir s'ils acceptent ou non, quoique ces héritiers soient, d'ailleurs, connus des créanciers (1). Le

(1) C. d'Aix, 17 décembre 1807 (Dall., Rép., vo Succession, no 976).

motif de cette décision est tout entier contenu dans cette phrase d'un des partisans de l'opinion que j'indique : « On n'en finirait pas s'il fallait attendre « que tous les parents qui peuvent être appelés en différents ordres, les uns « après les autres, se fussent expliqués, ou s'il fallait agir contre les uns et les « autres successivement pour les forcer à s'expliquer. Que de frais inutiles pour « la succession ! »>

Je ne méconnais pas les inconvénients qu'on signale dans le système que je soutiens, c'est-à-dire les lenteurs et les frais qu'il peut occasionner, quoique peut-être ces inconvénients soient exagérés. Mais ces considérations ne sauraient prévaloir contre le texte précis des art. 811 du Code Napoléon et 998 du Code de procédure.

1176. La succession vacante ou réputée telle devra être pourvue d'un curateur, qui sera nommé par le tribunal de première instance dans l'arrondissement duquel la succession est ouverte, sur la demande des personnes intéressées, ou sur la réquisition du procureur impérial (art. 812, C. N.).

Celui qui veut faire nommer un curateur à la succession vacante présente une requête au tribunal, et, sur cette requête, le tribunal nomme le curateur. Toutefois, les autres parties intéressées à cette nomination auraient le droit d'intervenir; alors s'engagerait, en cas de contestation, une instance sur laquelle le tribunal statuerait dans les termes ordinaires.

« Art. 999. En cas de concurrence entre deux ou plusieurs curateurs, le premier nommé sera préféré, sans qu'il soit besoin de jugement. >>

On suppose qu'une partie intéressée ayant déjà fait nommer un curateur à la succession vacante, une autre partie intéressée en a fait nommer un second, soit par une autre chambre du même tribunal, soit par la même chambre qui n'était peut-être pas composée des mêmes juges, ou qui a cru qu'il s'agissait d'une autre succession vacante. Quoi qu'il en soit, la première nomination infirme d'avancet outes les autres.

a Art. 1000. Le curateur est tenu, avant tout, de faire constater l'état de la succession par un inventaire, si fait n'a été, et de faire vendre les meubles suivant les formalités prescrites aux titres de l'Inventaire et de la Vente du mobilier. »

Le premier soin du curateur doit être de faire dresser l'inventaire des meubles et l'état des immeubles; cet inventaire et cet état seront un jour la base du compte qu'il devra rendre de sa gestion.

Si fait n'a été. Il est possible, en effet, que les héritiers connus, dont la renonciation a laissé la succession vacante, n'aient renoncé qu'après avoir fait faire inventaire.

Il fera ensuite vendre le mobilier dans les formes prescrites par les art. 945 et suiv. (C. pr.).

Peut-être, pour liquider la succession et payer les créanciers ou les légataires, est-il nécessaire de vendre les immeubles ou les rentes de la succession: on suivra les formes indiquées par l'art. 1001.

« Art. 1001. Il ne pourra être procédé à la vente des immeubles et rentes que suivant les formes qui ont été prescrites au titre du Bénéfice d'inventaire. >>

Voyez les art. 987, 988 et 989 et les articles auxquels ils renvoient.

L'art. 813 du Code Napoléon vous fera connaître quels sont les pouvoirs donnés par la loi au curateur à une succession vacante.

Il y a cependant quelques différences entre l'administration de l'héritier bénéficiaire et celle du curateur à une succession vacante. Ainsi le curateur est tenu de faire vendre les meubles, et de verser à la caisse des dépôts et consignations les deniers provenant de la vente des biens ou trouvés dans la succession (art. 813, C. N. et ordonnance du 3 juillet 1816, art. 2, n. 13).

« Art. 1002. Les formalités prescrites pour l'héritier bénéficiaire s'appliqueront également au mode d'administration et au compte à rendre par le curateur à la succession vacante. »

L'héritier bénéficiaire qui administre sa propre chose est intéressé à l'administration, en ce sens que ce qui restera après le paiement des dettes et des legs lui appartiendra. Mais, si les dettes et les legs absorbent l'actif de la succession, il administre gratuitement, sauf à Jui à se débarrasser même de cette administration en abandonnant tous les biens de la succession aux créanciers et aux légataires (art. 802, C. N.). Le curateur à la succession vacante n'aura jamais droit à aucune portion de la succession, même si l'acquittement des charges n'absorbe pas tout l'actif; mais il reçoit un salaire.

Quant au compte de sa gestion, le curateur à la succession vacante le rendra comme l'héritier bénéficiaire (art. 995), c'est-à-dire suivant les formes prescrites aux art. 527 et suiv. Le curateur à la succession vacante rendra son compte soit aux créanciers, soit à tous ceux qui feraient cesser la vacance présumée de la succession, en la réclamant à titre de successeurs réguliers ou irréguliers. *

CINQUANTE-TROISIÈME LEÇON

LIVRE III

TITRE UNIQUE

DES ARBITRAGES.

1177. Le principe général de cette matière, comme la plupart des principes fondamentaux de la compétence et de l'organisation judiciaire actuelle, était écrit dans une loi déjà citée, la loi du 24 août 1790; cette loi, avant de poser les bases de l'organisation judiciaire nouvelle, consacrait, comme règle générale, la faculté pour les particuliers de soustraire aux juges publics la connaissance de leurs différends, pour les soumettre à des arbitres, c'est-à-dire à des particuliers ou à des juges de leur choix; les art. 1 et 2 du titre 1o de cette loi s'exprimaient ainsi :

« Art. 1er L'arbitrage étant le moyen le plus raisonnable de terminer les contestations entre les citoyens, les législatures ne pourront faire aucune dis

position qui tendrait à diminuer, soit la faveur, soit l'efficacité des compromis. »

« Art. 2. Toutes personnes ayant le libre exercice de leurs droits et de leurs actions pourront nommer un ou plusieurs arbitres pour prononcer sur leurs intérêts privés, dans tous les cas et en toutes matières, sans exception. »

Les articles suivants dans le même titre étaient purement relatifs à la procé dure à suivre dans la matière du compromis, et ne donnent à cet égard que des règles très-insuffisantes.

On voit par cette idée générale de l'arbitrage, que le nom d'arbitre est pris ici dans un sens propre, technique, et non pas dans ce sens détourné que lui a donné un texte déjà expliqué, l'art. 429 du présent Code. Vous avez vu que les tribunaux de commerce étaient autorisés à nommer un ou plusieurs arbitres pour l'examen des pièces, registres, papiers des parties, afin de tâcher de les concilier, sinon faire leur rapport. Ce sont là des arbitres improprement dits, en ce sens que leur avis est facultatif pour le tribunal; ces arbitres essaient une conciliation qui, en matière commerciale, n'a pas été tentée dès le début de l'instance, et, en cas de non-succès, soumettent au tribunal un avis qui n'a rien d'obligatoire. On les nomme aussi arbitres rapporteurs. Au contraire, les arbitres véritables, dont il est ici question, sont choisis par les parties, pour décider de leur différend, comme les juges pourraient le faire eux-mêmes, pour trancher le procès par un jugement, qui tantôt sera en dernier ressort, tantôt sujet à l'appel. * On désigne ces arbitres sous le nom d'arbitres juges, par opposition aux arbitres rapporteurs *.

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1178. Le droit de préférer à la juridiction normale, ordinaire, des tribunaux institués par la loi, la juridiction privée des arbitres, dérive tout entier du droit de s'obliger, ou du droit d'aliéner. On comprend aisément que, lorsqu'il s'agit d'un droit auquel il m'est permis de renoncer gratuitement, à plus forte raison m'est-il loisible, lorsque ce droit m'est disputé, d'en subordonner la conservation ou la perte à l'examen que devront faire des particuliers de mon choix. On comprend que, dans ce cas, pour éviter les frais, les lenteurs, les inconvénients même que la publicité peut me présenter, je puisse, quand je suis libre d'aliéner ce droit par ma volonté privée, je puisse, à plus forte raison, accorder le droit de l'examiner, de le débattre, à des arbitres tout à fait de mon choix. De là cette première idée écrite dans l'art. 1003, que toutes personnes peuvent compromettre sur les droits dont elles ont la libre disposition; que la capacité pleine et entière d'aliéner est une condition essentielle de la capacité de compromettre. Compromettre, vous voyez l'étymologie du mot promettre ensemble, convenir de se soumettre à la décision des arbitres choisis en commun. Le compromis, ou la convention par laquelle les parties soumettent une cause à des arbitres, n'est donc, au fond, qu'une obligation, qu'une aliénation, qu'une libération conditionnelle; chaque partie s'oblige d'avance à reconnaitre pour bonne la décision rendue par les arbitres choisis, sauf les voies de recours que la loi admet contre cette décision (art. 1023, 1026, 1027).

Les art. 1003 et 1004, s'attachant à cette première idée, vous indiquent dans quelles limites se renferme le droit de compromettre. Seulement, l'art. 1003 trace des limites qui tiennent un peu plus spécialement à la capacité des par

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