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dure, le ministère public est partie en cause; il est saisi, et la femme assignée en divorce est en même temps, et par voie de conséquence inévitable, appelée à répondre et à se défendre contre les réquisitions que le ministère public devra formuler plus tard. Elle a deux adversaires à combattre, deux actions à soutenir en même temps pour le même fait. Seulement ces deux actions sont jointes et confondues au lieu d'être intentées séparément et devant des juges différents.

En portant le débat devant un tribunal civil, ou, pour parler plus correctement, devant un tribunal mixte, c'est-à-dire civil et répressif en même temps, le mari a épuisé son droit de plainte. Il a usé en même temps de toutes les prérogatives que la loi lui accordait.

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4:

Ainsi que le proclame un arrêt de la cour royale de Poitiers du 24 mars 1842 (Pasic., 1842, t. 2, p. 541), « le mari, pour la répression et réparation du délit d'adultère qu'il impute à sa femme, a plusieurs voies « de droit ouvertes. La demande en sépa«ration de corps pour cause d'adultère autorisée par l'article 308 du code civil; la «citation en police correctionnelle aux ter«mes de l'art. 182 du code d'instruction << criminelle, et pour se dispenser d'agir «comme partie civile, de concourir et d'as"sister à l'action, la dénonciation de l'adul«tère de sa femme au ministère public. Le << ministère public concourt à l'action civile, "comme partie publique et nécessaire, aux «termes de l'art. 308 du code civil, qui dis«pose que la femme, contre laquelle la sé

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paration de corps sera prononcée pour « cette cause, sera condamnée par le même jugement, et sur la réquisition du minis«tère public, à la reclusion. Il résulte au « moins implicitement de la lettre et de l'esprit de ces dispositions que le délit « d'adultère n'a pas besoin d'être dénoncé << au ministère public par le mari, qui est partie civile; que son action et les débats devant les tribunaux, auxquels le minis"tère public est obligé de concourir, sont la dénonciation la plus formelle et la plus authentique qu'il puisse formuler. »

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Or, aux termes de l'article 336 du code pénal, le ministère public ne peut poursuivre l'adultère devant les tribunaux correctionnels que sur la plainte du mari. Et si cette. plainte a été portée devant un tribunal civil et correctionnel à la fois, elle ne peut plus l'être derechef devant un tribunal simplement correctionnel. L'officier du ministère public près de la juridiction correctionnelle n'a plus d'action, non-seulement parce que

le mari a épuisé son droit de plainte et ne peut plus revenir à une autre voie que celle qu'il a choisie, mais parce que l'officier du ministère public près du tribunal civil est déjà saisi de l'action publique, et qu'ainsi il ne peut pas plus y avoir lieu à poursuivre correctionnellement, qu'il n'y aurait lieu de poursuivre la répression d'un crime ou d'un délit devant le juge du lieu où il a été commis, quand cette poursuite est déjà entamée devant le juge du domicile de l'accusé ou du lieu où il se trouve et vice versâ (art. 23, 29, 30 et 65 du code d'instruction criminelle).

Il serait absurde de prétendre que l'on pùt poursuivre en même temps devant le tribunal civil l'application de l'art. 508 du code civil, et devant le tribunal correctionnel l'application de l'art. 337 du code pénal. C'est l'un ou l'autre qui doit être appliqué. Ce ne peut être tous les deux : car on ne peut être ni condamné ni poursuivi deux fois pour le même fait et dans le même but.

La possibilité de jugements contraires, les frais doublés, la difficulté de la réconciliation rendue plus grande, contrairement au vœu de la loi, un double scandale, et le défaut complet d'intérêt, tant de la part du mari que de la part de la partie publique. sont autant de raisons qui doivent faire considérer comme impossible la coexistence et la poursuite simultanées de deux actions ayant le même objet, la même cause et le même résultat probable.

M. l'avocat général Faider a conclu au rejet du pourvoi.

Il a rappelé que la doctrine sur laquelle le tribunal correctionnel et la cour d'appel de Bruxelles se sont trouvés d'accord est incontestable et qu'elle a toujours reçu la consécration des auteurs et des arrêts. Le mari peut user des deux droits que lui départissent d'une part l'article 229 du code civil, d'autre part, l'article 356 du code pénal en poursuivant le divorce pour adultère, il peut déposer entre les mains du ministère public sa plainte en vue de faire poursuivre le délit commis par sa femme; il peut ainsi faire établir judiciairement, par la voie correctionnelle. la preuve de l'infidélité de son épouse et faire servir cette preuve pour obtenir le divorce. Nul conflit n'est à craindre entre les deux juridictions, car du moment que le tribunal correctionnel, devant lequel l'action publique a la priorité sur l'action en divorce pendante devant le tribunal civil, aura prononcé la peine d'emprisonnement contre l'épouse infidèle, il va de soi, en

présence de la maxime non bis in idem, que le juge civil n'aura plus à prononcer celle même peine. D'une autre part, l'action correctionnelle est le seul moyen d'atteindre le complice, et ce serait le cas d'appliquer la maxime ne continentia causæ dividatur. Ces principes sont consacrés par la jurisprudence et la doctrine (Par., cass., 22 août 1816, approuvé par Merlin, Questions de droit, vo Adultère, § 4; Chauveau, ch. 50, § 2; Par.,cass., 22 juin 1850, approuvé par Dalloz, Recueil périod., 1850, 1, 208; par Bedel, de l'Adultère, p. 91; par Nypels sur Hélie, de l'Action pub. et civ., no 1032 2o).

ARRÊT.

LA COUR; Vu les art. 298 du code civil, 171 du code de procédure civile, 336 et 557 du code pénal, invoqués à l'appui du pourvoi ;

Attendu qu'en principe l'action publique en répression des délits est indépendante de l'action civile que les parties exercent dans leur intérêt privé ;

Que si par exception, relativement au délit d'adultère, l'action publique ne peut, aux termes de l'art. 336 du code pénal, être mise en mouvement que sur la plainte du mari outragé, il suffit que, comme dans l'espèce, cette plainte existe et n'ait pas été suivie de pardon, pour que le ministère public soit autorisé à poursuivre la répression du délit devant le tribunal correctionnel, nonobstant l'action en divorce intentée par le mari devant la juridiction civile;

Que vainement, pour empêcher les poursuites correctionnelles, la demanderesse excipe de la litispendance, en se fondant sur ce que le ministère public serait partie devant les deux juridictions à l'effet de requérir la peine d'emprisonnement prononcée tant par l'art. 298 du code civil que par l'article 557 du code pénal, car la litispendance suppose l'identité de demandes et des parties devant les deux tribunaux, ce qui n'existe pas au cas actuel, où l'époux de la demanderesse, seul partie principale au procès civil ayant pour objet direct le divorce, n'est nullement partie au procès correctionnel pour délit d'adultère, poursuivi par le ministère public tant contre la femme que contre son complice;

Attendu que ces considérations repoussent également l'objection tirée de la maxime electâ unâ viâ, non datur recursus ad alteram invoquée par le pourvoi, cette maxime n'ayant effet que lorsque de deux voies ou

vertes à une partie pour l'exercice de ses droits, l'emploi qu'elle fait de l'une emporte renonciation à l'autre, ce qui ne se rencontre pas dans l'espèce;

Attendu que s'il est incontestable, comme le dit la demanderesse, qu'on ne peut, pour le même fait, la condamner deux fois à l'emprisonnement devant deux juridictions différentes, il n'est pas moins certain que ce résultat ne peut arriver à son égard 1o parce qu'aux termes de l'art. 3 du code d'instruction criminelle l'action en divorce doit rester en suspens tant qu'il n'aura pas été prononcé définitivement sur l'action publique par le tribunal correctionnel, et 2o parce qu'en vertu de la règle non bis in idem, l'art. 298 du code civil ne peut recevoir d'exécution, si la peine d'emprisonnement a déjà été prononcée correctionnellement pour le même fait;

Qu'il résulte de tout ce qui précède que l'arrêt dénoncé, en déclarant non fondée la fin de non-recevoir que la demanderesse a opposée à l'action du ministère public, n'a contrevenu à aucune loi ;

Par ces motifs, rejette le pourvoi, condamne la demanderesse à l'amende de 150 fr. et aux dépens.

Du 30 janvier 1856. 2e ch. M. De Sauvage.

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Prés.

Rapp. M. Marcq. Concl. conf. M. Faider, avocat général. Pl. M. Bonnevie.

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1o La tentative de viol n'est punissable qu'autant que le jury ait constaté l'existence des circonstances prévues par l'art. 2 du code pénal. (Loi du 15 juin 1846, art. 3 et 6, § 1er; code pénal, art. 2.)

20 Est non purgée l'accusation dans laquelle l'arrêt de renvoi et l'acte d'accusation comprenant les circonstances de la tentative, et, de plus, une accusation d'attentat à la pudeur consommé ou tenté avec violence, ces circonstances et ce chef d'accusation n'ont pas été soumis au jury. (Code d'instruction criminelle, art. 557.)

(LOOF, DIT VALCKE, C. LE MIN. PUB.)

Loof, dit Valcke, condamné le 5 déc. 1855 par la cour d'assises de la Flandre occidentale à sept années de travaux forcés sur les

réponses affirmatives du jury aux deux questions de savoir: 1o S'il était coupable d'avoir, à Tieghem, le 27 août 1855, commis une tentative de viol sur la personne de Rosalie N...; 2° Si la prénommée Rosalie N... était, au temps de cette tentative, âgée de moins de quinze ans? s'est pourvu en cassation contre cet arrêt sans indiquer aucun moyen mais M. le conseiller rapporteur a signalé à la cour la différence qui existait entre la première question posée au jury et l'arrêt de renvoi ainsi que l'acte d'accusation qui l'un et l'autre énuméraient les éléments légaux de la tentative comme résultant de la procédure.

M. l'avocat général Faider, qui portait la parole, a estimé que l'arrêt dénoncé ne pouvait échapper à la censure de la cour. Il a pensé, en rappelant d'ailleurs une jurisprudence constante sur ce point, que le viol, par son but comme par son caractère et ses éléments, devait toujours être distingué des autres attentats à la pudeur; que le viol est un crime déterminé, défini, et que les principes de la tentative ordinaire doivent s'y appliquer précisément parce que le code n'apporte à ces principes aucune dérogation; que le crime qualifié d'attentat à la pudeur consommé ou tenté avec violence offre, au contraire, des éléments variables et indéterminés à l'égard desquels le législateur a dù s'en rapporter à l'appréciation du jury. En posant les questions comme il a cru devoir le faire, le président des assises a donc méconnu le sens pratique de la loi et il s'est écarté, en la violant, de l'arrêt de renvoi et de l'acte d'accusation qui avaient formulé dans les termes légaux la qualification du crime reproché au demandeur en cassation.

ARRÊT.

LA COUR ; Attendu qu'en règle générale, et à moins d'une exception formelle écrite dans la loi, la tentative d'un crime n'est punie comme le crime même que lorsqu'elle réunit les caractères de l'article 2 du code pénal;

Que si pareille exception existe dans l'article 2 de la loi du 15 juin 1846, pour l'attentat à la pudeur tenté avec violence, il n'en est pas de même pour la tentative du crime de viol, tentative qui n'est punissable que par l'application de l'art. 2 du code pénal;

Attendu que le viol est un crime sui generis, dont les éléments ne sont pas les mèmes que ceux des autres attentats à la pudeur, et qu'il n'appartient qu'au jury de décider en

fait si ce qu'il a qualifié de tentative de viol, sans qu'il se soit exprimé sur aucune des circonstances prévues par l'art. 2 du code pénal, constitue ou non l'attentat à la pudeur, consommé ou tenté avec violence;

Attendu que l'arrêt attaqué, en condamnant le demandeur Joseph Loof aux peines comminées par les art. 2 et 6, § 1er, de la loi du 13 juin 1846, alors qu'il n'a été déclaré coupable que d'une tentative de viol non caractérisée comme le veut l'art. 2 du code pénal, a expressément contrevenu audit article 2, ainsi qu'aux art. 2 et 6, § 1er, de la loi du 13 juin 1846;

Et attendu, en outre, que d'après l'arrêt de renvoi, comme d'après le résumé de l'acte d'accusation, le demandeur Joseph Loof était accusé :

1° De tentative de viol sur Rosalie Verschelde, âgée d'environ cinq ans, laquelle tentative, manifestée par des actes extérieurs et suivie d'un commencement d'exécution, n'a été suspendue ou n'a manqué son effet que par des circonstances indépendantes de la volonté de l'auteur;

2o Au moins de tout autre attentat à la

pudeur, consommé ou tenté avec violence sur la même Rosalie Verschelde;

Que le jury n'a pas été interrogé sur les différentes circonstances de la tentative de viol, non plus que sur l'attentat à la pudeur tenté avec violence; et qu'il n'a pas répondu aux trois dernières questions concernant l'attentat à la pudeur consommé avec violence;

Que l'accusation n'a donc pas été purgée: ce qui constitue une violation de l'art. 357 du code d'instruction criminelle;

Par ces motifs, casse et annule l'arrêt rendu par la cour d'assises de la Flandre occidentale le 3 déc. 1855, ainsi que les questions posées au jury et ce qui s'en est suivi; ordonne que le présent arrêt sera transcrit sur les registres de la cour prémentionnée, et que mention en sera faite en marge de l'arrêt annulé, et après en avoir spécialement délibéré en la chambre du conseil, conformément à l'art. 450 du code d'instruction criminelle, renvoie la cause devant la cour d'assises de la Flandre orientale, pour être soumise à de nouveaux débats, sur le pied de l'arrêt de renvoi du 28 sept. 1855 et de l'acte d'accusation dressé en conséquence. Du 4 fév. 1856. - 2e ch. Prés. M. De Sauvage. Rapp. M. Marcq. Concl. conf. M. Faider, avocat général.

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1o Les actes de concession de mines de fer ne peuvent légalement comprendre le minerai en couches ou en filons, dont l'exploitation est possible à ciel ouvert sans établissement de puits, galeries et travaux d'art, et ne doit pas empêcher avant peu d'années l'exploitation avec puits et galeries. (Loi du 21 avril 1810, art. 68.)

90 En le décidant ainsi, le juge ne se met pas en contradiction avec l'article 7 de la loi du 21 avril 1810 qui proscrit la divisibilité des mines.

5o On ne peut considérer comme dénué de motifs à cet égard l'arrêt qui, en repoussant l'interprétation restrictive que donnait l'appelant au dispositif du jugement à quo, s'appuie sur des considérations puisées dans les titres et dans la loi pour fixer l'étendue des droits des parties. (Constitut., art. 97.)

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Par arrêté royal du 5 janvier 1829, Louis de Cartier d'Yves, auteur des demandeurs en cassation, obtint la concession de la mine de fer gisant sous les territoires des communes de Gourdinne, de Berzée et autres communes.

En vertu de cette concession, les demandeurs prétendirent avoir droit à la mine de fer qui se trouve dans le périmètre de leur concession, aux minières et minerais exploitables à ciel ouvert, à bras d'homme et sans travaux d'art.

Cette prétention donna lieu à des discussions extrajudiciaires et à une tentative infructueuse de conciliation à la suite de laquelle les propriétaires superficiaires, défendeurs au pourvoi, assignèrent de Cartier et consorts devant le tribunal de Dinant.

Le 6 août 1853, ce tribunal porta un jugement dont le dispositif est ainsi conçu :

« Le tribunal, ouï M. Herman, substitut du procureur du roi en ses conclusions, et sans avoir égard aux moyens et exceptions des défendeurs, déclare que l'acte de concession des mines de fer que les auteurs des défendeurs ont obtenue par arrêté du 5 janvier 1829, sur les territoires de Thy-le-Château,

Berzée et Gourdinne, n'a pas compris ni pu comprendre les minières et minerais de fer exploitables à ciel ouvert, qui se trouvaient ou se trouvent encore dans le périmètre de cette concession, lesquels n'ont pas cessé de faire partie de la propriété de la surface; déclare en conséquence que c'est sans droit, titre et qualité que les concessionnaires de la mine, tant par eux-mêmes qu'avec les personnes avec lesquelles ils ont traité, se sont permis d'exploiter ou faire exploiter à leur profit les minières et minerais de fer gisants dans les propriétés des demandeurs, sises à Thy-le-Château et exploitables à ciel ouvert, à la faveur de cette concession restreinte au seul objet sur lequel elle pouvait porter, c'est-à-dire, la mine de fer, et d'en disposer à l'exclusion des demandeurs, les condamne à cesser lesdites exploitations; déclare de ce chef le présent jugement exécutoire par provision nonobstant appel et sans caution; et avant de statuer sur le surplus des conclusions des demandeurs, leur ordonne d'établir, par tous moyens de droit, quelle est la quantité de minerai qui aurait été illicitement exploitée par les défendeurs ou leurs auteurs ainsi que la hauteur des dommages qu'ils prétendent avoir éprouvé; condamne les défendeurs aux dépens. »

Appel fut interjeté de cette sentence par les de Cartier.

Devant la cour de Liége, les appelants prirent les conclusions suivantes :

« A ce qu'il plaise à la cour, statuant sur l'appel du jugement du 6 août 1855, dire pour droit 1° que ledit jugement n'exclut de la concession que le minerai de fer d'alluvion exploitable à ciel ouvert: 2o qu'il n'y a de minerai exploitable à ciel ouvert que celui qui peut s'exploiter au moyen d'une tranchée ouverte dans le sol pour mettre le minerai à découvert; 5o que par suite il est reconnu que toute la mine de fer par couches et filons est concédée aux appelants, sans distinction basée sur la profondeur à laquelle les couches et filons peuvent se porter dans leur allure; 4o qu'il en est ainsi notamment des couches du bois de Jets, de Faux et de Gourdinne, qui sont désignés sur le plan de la concession et de toute autre couche et de tout autre filon dont l'existence serait reconnue dans les limites de la concession; 5° que toute extraction de mine de fer par couches et filons faite par les appelants ou par personnes nanties de leur autorisation est déclarée licite par le jugement à quo;

"Pour autant que de besoin réformer le jugement susdaté dans le sens de l'interpré

tation susmentionnée, et décharger les appelants de toute condamnation qui aurait été prononcée contre eux de ce chef; le réformer encore en ce qu'il a exclu de la concession le minerai de fer d'alluvion exploitable à ciel ouvert; dire pour droit, au contraire, que la concession comprend même les gites de minerai de fer d'alluvion exploitable à ciel ouvert qui auraient existé ou qui existeraient dans le périmètre de la concession; décharger les appelants de toute condamnation prononcée contre eux de ce chef, en leur donnant acte de ce qu'ils dénient d'avoir exploité du minerai de fer d'alluvion; très-subsidiairement, déclarer que les appelants ne doivent ancune restitution du chef de l'exploitation antérieure au procès, à raison de leur bonne foi; dans tous les cas, ordonner la restitution de l'amende, condamner les intimés aux dépens des deux instances; très-subsidiairement encore, et pour le cas où le fait serait méconnu par les intimés, ordonner une expertise à l'effet de vérifier s'il n'est pas vrai qu'une galerie d'écoulement, qui aurait eu son débouché dans la vallée de l'eau d'Heure au niveau de ses plus hautes eaux, conformément au cahier des charges, n'aurait démergé la concession qu'à une profondeur moyenne de 25 mètres; et ce afin d'apprécier d'autant mieux la portée des articles 1 et 2 du cahier des charges auquel l'arrêté de concession se réfère; dépens en ce cas réservés. >>

Les défendeurs intimés conclurent à ce qu'il plut à la cour, sans avoir égard aux différents chefs de conclusions des appelants. confirmer le jugement dont est appel, et en l'interprétant, pour autant que de besoin dire pour droit que l'acte de concession du 5 janvier 1829 n'a pas compris ni pu comprendre les minières et minerais de fer exploitables à ciel ouvert, que ces substances soient à l'état d'alluvion, ou qu'elles se rencontrent à l'état de couches ou filons, et condamner les appelants à l'amende et aux dépens.

Le 29 mars 1855, la cour de Liége rendit l'arrêt suivant :

« Dans le droit, y a-t-il lieu de confirmer le jugement dont est appel?

« Considérant que l'article 69 de la loi du 21 avril 1810 est formulé en termes clairs et précis ; qu'il ne permet de concéder le minerai de fer d'alluvion et les mines en couches ou filons que dans les cas suivants : 1° si l'exploitation à ciel ouvert cesse d'être possible et si l'établissement de puits, galeries et travaux d'art est nécessaire; 2o si l'exploitation, quoique possible encore, doit

durer peu d'années et rendre impossible l'exploitation avec puits et galeries; qu'il est donc dans le vœu de la loi de réserver au maître du sol les substances ferrifères qui font partie intégrante de sa propriété, puisqu'on ne peut les extraire sans bouleverser le terrain qui les renferme ;

« Considérant que l'arrêté royal du 29 janvier 1829 concède les mines de fer dans le territoire qui y est désigné; que le cahier des charges prescrit de les exploiter par puits, galeries et travaux d'art ; que, par conséquent, la concession avait pour objet les gites renfermés dans le sein de la terre; que sans doute elle comprend comme accessoires les mines superficielles et les minerais; mais pour autant qu'elles se trouvent, soit alors, soit plus tard, dans les conditions de l'article 69 ci-dessus transcrit; que l'arrêté du 29 janvier sainement apprécié n'a pas d'autre portée; que s'il y avait doute, encore cette interprétation devrait prévaloir parce qu'elle s'accorde avec le respect dù à la loi et à la propriété; qu'il suit de là que le minerai qui a été extrait à ciel ouvert ou peut l'être sans travaux d'art, ne tombe pas sous la concession des appelants; qu'il n'y a certes rien d'incompatible entre l'exploitation de la superficie et celle du tréfonds; que la première est réglée et limitée par l'article 69 précité ; qu'en France, il est même d'usage de faire une réserve expresse à cet égard dans les actes de concession; que du reste les rapports qui existent entre deux propriétés supperposées entraînent nécessairement des obligations réciproques, sans lesquelles l'une serait asservie et sacrifiée à l'autre ;

« Considérant que les concessionnaires n'ont pu se faire illusion sur la teneur de leur titre; que les traités qu'ils ont faits avec des tiers pour exploiter le minerai de la surface témoignent de leur doute à ce sujet; que les appelants ne sauraient donc exciper de la bonne foi requise pour prescrire et faire les fruits siens;

«Par ces motifs, sans s'arrêter aux divers chefs des conclusions des appelants, met l'appellation à néant et ordonne que le jugement dont est appel sortira son effet; en déclarant, pour autant que de besoin, que la décision qui exclut de la concession le minerai de fer exploitable à ciel ouvert comprend la mine de fer en couches ou filons qui peuvent s'extraire de la même manière; condamne les appelants à l'amende et aux dépens dont distraction, etc. »

C'est contre cette décision qu'était dirigé le pourvoi.

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