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tionnel qui se perçoit du moment où il y a transmission ou mutation de propriété, à quelque titre que ce soit, est un impôt qui ne peut atteindre les propriétés situées hors du territoire sur lequel il est établi; que si l'on a cru devoir, pour donner une date légale aux actes passés en pays étranger ou dans les colonies, les assujettir à des droits d'enregistrement, il n'était pas nécessaire que ce droit fût de 4 pour cent, comme pour les actes de même espèce passés en France (1). »

En 1806, deux autres difficultés surgissent. On se demande d'abord si les actes passés en France pour des immeubles situés en pays étranger ou aux colonies doivent profiter des dispositions de l'avis du conseil d'Etat du 10 brumaire an XIV?

Le ministre des finances décide cette question affirmativement: il pense que le principe admis par l'avis du conseil d'Etat du 10 brumaire an xiv est applicable aux actes passés dans le même cas devant des notaires ou autres officiers publics de France.

Le conseil d'État se range à cette manière de voir.

Le principe appliqué est donc toujours celui-ci il n'y a pas mutation d'une chose située dans le territoire, il ne reste donc à appliquer qu'un droit d'acte, et ce droit ne peut être proportionnel.

On se demande, en second lieu, si l'avis du 10 brumaire an XIV est applicable aux actes passés en France, ou dans les pays étrangers et les colonies, pour des propriétés mobilières existant en pays étrangers ou dans les colonies?

Quant aux mutations mobilières proprement dites, la solution, semble-t-il, devait être la même, puisqu'il y a mutation aussi bien pour des propriétés mobilières que pour des propriétés immobilières. Mais ici le ministre des finances, dont la solution est admise par le conseil d'Etat, subordonne cette solution à des réserves, à des explications qui sont loin de jeter du jour sur la matière.

Il croit qu'on doit étendre la même disposition (de l'avis du 10 brumaire an XIV) aux actes passés en forme authentique seulement

(1) Après la publication de la loi du 22 frimaire an vi dans les colonies, publication faite en l'an xu, les colonies et la France continentale ont été considérées comme constituant un même territoire; d'où il résultait qu'il ne fallait pas un double enregistrement (cour de cassation de France, 24 janv. 1827) (Sirey 1827, 1, 182).

dans les pays étrangers et les colonies, actes contenant obligation ou mutation d'objets mobiliers:

Lorsque les prêts et placements auront été faits et les livraisons promises ou effectuées en objets de ces pays, et stipulées payables dans les mêmes pays et dans les monnaies qui y ont cours.

Ces diverses énonciations manquent de précision et de clarté; elles confondent les mutations et les obligations, et nous devons chercher à nous rendre compte de ce que l'on a voulu réellement exprimer.

Quand il y a mutation d'objets mobiliers, le droit de mutation et ainsi le droit proportionnel n'est pas dù, lorsque :

«Les livraisons promises ou effectuées en objets de ces pays sont stipulées payables daus les mêmes pays et dans les monnaies qui y ont cours. »>

Cela posé, si l'on passait acte en France de la vente d'un mobilier garnissant un hôtel situé à Vienne, dont on autoriserait l'acheteur à se mettre en possession, la vente étant faite moyennant 100,000 florins de Vienne, voilà un cas pour lequel le droit de mutation ne pourrait être perçu en France (2).

L'avis du ministre des finances, approuvé par le conseil d'Etat, est formel et précis: si le prix avait été stipulé payable en France et en monnaie de France, on n'était plus dispensé de l'obligation de payer le droit proportionnel. Alors, en effet, il s'agissait d'un acte qui devait être exécuté, accompli dans l'empire français. L'impôt devait naturellement frapper un acte ainsi fait en terme d'exécution convenue.

Mais quelque restrictifs que paraissent, au premier aspect, les termes de l'avis du conseil d'Etat de 1806, quelque tourmentée que paraisse sa rédaction, il en résulte cependant que cet acte législatif et interprétatif se rapporte aux propriétés mobilières, terme générique sous lequel tombent nécessairement les créances, car on y rappelle les prêts et placements, ce qui a évidemment application à des opérations sur des valeurs en argent.

Et quand on remarque les réserves ou con

(2) Le 25 juillet 1820, l'administration portait la décision suivante :

Le droit proportionnel n'est pas exigible sur un acte passé en forme authentique en pays étranger et portant vente d'un navire des PaysBas, lorsque le prix est stipulé payable dans le pays étranger et dans les monnaies y ayant cours. La perception doit se borner au droit fixe.

ditions apposées à l'exemption du droit proportionnel, on est conduit à penser que par ces conditions on a voulu exprimer que l'acte devait se rapporter à une négociation, à des faits convenus, accomplis, exécutés en pays étranger; et nous voyons alors le conseil d'Etat se laisser dominer par l'ancienne pratique de la ferme domaniale.

En effet, on a bien dit que le contrôle ou l'enregistrement avait pour but d'assurer l'existence des actes et de leur conférer date certaine, mais ce but, indiqué dans la loi de 1790, rappelé dans l'avis du conseil d'Etat du 10 brumaire an xiv, ne peut pas être sérieusement invoqué, lorsqu'il s'agit d'actes authentiques passés à l'étranger, dont l'existence et la date étaient ainsi assurées.

Ce qu'on voulait éviter dans l'ancienne législation fiscale, c'est que l'on fraudât l'impôt en allant passer, dans ce but, des actes à l'étranger; nous avons vu dans quelles circonstances la fraude était présumée. C'est alors que deux personnes, non domiciliées dans un pays ou dans une province où le contrôle n'était pas établi, allaient dans cette province ou à l'étranger passer un acte qu'il fallait exécuter dans le royaume de France; cette manière d'appliquer l'ancienne législation ne devait pas échapper au ministre des finances et au conseil d'Etat de 1806.

Quand l'acte devait naturellement se faire à l'étranger, parce que l'opération devait s'y entamer et s'y accomplir, l'idée de fraude devait disparaître, et ce qu'on avait proclamé pour le cas de mutation immobilière, il fallait le proclamer pour tout acte relatif à des propriétés mobilières, c'est-à-dire ne pas assujettir au droit proportionnel les actes ainsi naturellement passés en pays étranger, produits dans le royaume accidentellement, sans qu'ils dussent y recevoir, naturellement aussi, leur exécution proprement dite.

Tel nous parait être le sens de la réserve explicative consignée dans la deuxième partie de l'avis du conseil d'Etat du 15 novembre 1806.

Nous avons dit précédemment que l'expression propriétés mobilières dont on s'est servi dans cet avis devait être prise dans son acception la plus étendue, et c'est en effet ainsi que l'administration, dans le royaume des Pays-Bas et depuis en Belgique, l'avait entendue.

«L'acte fait à l'étranger et portant donation d'une créance provenant d'une vente d'immeubles situés en France où demeurent les débiteurs et où l'action hypothécaire doit

être exercée, ne donne lieu qu'au droit fixe de 1 franc 70 cent.» (21 janv. 1840 [Journ., n° 2078]).

Le 16 janvier 1825, l'administration décidait déjà qu'un acte passé en forme authentique en pays étranger, portant obligation d'une somme reçue et remboursable dans ledit pays et en monnaie y ayant cours, quoique portant affectation d'hypothèque sur des immeubles situés en Belgique, n'est passible que d'un droit fixe.

S'il en est ainsi dans ces deux espèces, comment en serait-il différemment pour la quittance qui est le dernier acte d'une opération faite en pays étranger et relative à un immeuble situé à l'étranger?

Ce n'est pas ainsi que l'entend l'administration. Elle pense, dans sa décision du 15 octobre 1852, qu'il faut prendre à la lettre les expressions de l'avis du 15 nov. 1806, dont la deuxième partie, celle dont il s'agit, n'a à ses yeux qu'un caractère exceptionnel. Mais tel ne peut pas être le sens de cet acte législatif; s'il s'agissait là d'une exception, qui ne serait pas écrite à l'article 25 de la loi du 22 frimaire, l'avis du conseil d'Etat n'interpréterait pas, il modifierait la loi du 22 frimaire en vi; or, tel n'était pas son pouvoir. La deuxième partie de l'avis du conseil d'Etat ne peut donc être considérée comme une disposition exceptionnelle. Cette disposition se résume à ceci : S'il y a lieu à enregistrement, ce sera sous la condition du droit fixe et non du droit proportionnel, quand une opération relative à des propriétés mobilières aura été faite, accomplie, terminée en pays étranger.

Il est vrai que la cour de cassation de Belgique, dans son arrêt du 6 avril 1843, semble avoir entendu d'une manière plus restrictive l'avis du conseil d'Etat.

On remarque, en effet, dans un de ses motifs, cette raison: « Attendu que cette quittance ne contient ni obligation ni mutation d'objets mobiliers... » ce qui porterait à penser qu'elle donne à ces mots objets mobiliers une portée exclusive d'une somme d'argent prêtée, opération que l'on ne qualifie nulle part de mutation. Dans cette manière de voir, la cour pouvait se borner à cette appréciation; mais elle a soin, dans le même considérant, de s'arrêter à d'autres motifs qu'elle ne présente pas dans un ordre subsidiaire seulement et en quelque sorte surabondamment. Ces motifs ont donc pour elle une importance en quelque sorte décisive, et l'on ne peut uniquement s'attacher au début de ce considérant.

La cour n'a pas pensé qu'il suffisait de dire: « Les quittances ne contiennent ni obligation ni mutation d'objets mobiliers. » Elle a pensé qu'il fallait rattacher la quittance à la cause de la dette qui était éteinte. Elle a dit : « La cause de la dette éteinte était la vente d'un charbonnage situé en Belgique, » A aucun titre, les avis du conseil d'Etat n'ont donc alors d'application possible, parce que toute l'affaire ne s'est pas consommée à l'étranger.

La cour aurait-elle décidé de même, s'il se fùt agi d'un charbonnage situé en France? L'insistance que l'on remarque dans l'arrêt sur cette circonstance de la situation de l'immeuble vendu, porte à supposer que la solution eût alors été toute différente.

La cour a clairement établi que pour apprécier la quittance, il fallait la rattacher à la cause de l'obligation qu'elle éteignait; et en effet, si l'on n'admet pas cette proposition, comme le mot quittance ou libération ne se rencontre pas dans l'avis du 13 nov. 1806, il faudrait dire que jamais un acte de libération passé à l'étranger ne peut échapper à l'impôt proportionnel, ce qui est évidemment inadmissible. Concevrait-on, en effet, que l'obligation de fournir une somme, le prêt, le placement d'une somme d'argent, pourrait échapper, sous certaines conditions, à l'impôt proportionnel, alors que jamais la quittance, attestant la réception de cette même somme au temps convenu pour la libération, ne pourrait échapper à cet impôt ! N'est-il pas cent fois évident que là où il y a dispense de l'impôt proportionnel pour l'obligation, il y a mème dispense pour la libération, toujours assimilée dans la loi fiscale à l'obligation mème?

La quittance est l'attestation de l'extinction d'une obligation, c'est une dépendance de cette obligation; là où l'obligation échapperait à l'impôt, comprend-on que l'extinction de l'obligation n'y échapperait pas?

Dans l'espèce du procès, il y a eu vente d'un hôtel situé à Paris et dette du prix, exigible à Paris; si l'acte de vente avait porté quittance, la quittance ne pouvait donner matière à la perception du droit proportionnel; le fait d'extinction se serait confondu avec l'obligation mème de payer le prix, obligation sans laquelle il n'y aurait pas eu vente, obligation essentielle pour ce contrat.

On ne pouvait alors exiger que le droit de mutation; et comme dans l'occurrence l'immeuble vendu était situé à l'étranger, le droit de mutation n'était pas exigible; il fallait faire application de la règle écrite dans l'avis du 10 brumaire an xiv.

Mais la quittance a été donnée séparément, en dehors de l'acte même de vente. Si cela avait eu lieu pour un prix de vente provenant d'une mutation d'un bien situé en Belgique, le droit de quittance était exigible, mais pourquoi? parce que l'obligation éteinte dépendait d'un acte de mutation assujetti à l'impôt proportionnel.

L'acquéreur devait un prix de vente pour laquelle il avait dû payer 4 pour cent; quand il se libérait de cette obligation il pouvait avoir à payer un droit proportionnel pour sa libération. Rien dans la loi et dans la nature des choses ne s'opposait à ce qu'il en fût ainsi.

Si le prix du bien vendu en France et situé en France avait été payé en Belgique et que ce fait fùt constaté devant un notaire belge, il n'y aurait plus besoin de rattacher l'extinction de l'obligation à l'obligation même; il suffirait que l'acte eût été fait en Belgique pour qu'il tombat nécessairement sous l'application de l'article 4 de la loi du 22 frimaire an vII.

Mais lorsque le payement, fait et attesté à l'étranger, se rattache à une dette qui, par sa nature, échappait à l'impôt, comprend-on que la cause du payement soit exempte du droit proportionnel et que le payement même y soit assujetti?

Votre arrêt de 1845 atteste que vous n'admettiez pas cette contradiction.

Il faut donc entendre l'avis du 10 brumaire an xiv avec toute sa portée; quand il dispense de l'impôt proportionnel les actes de mutation passés à l'étranger pour des biens immeubles situés à l'étranger, il entend nécessairement parler, non-seulement de la mutation même, mais des suites nécessaires de cet acte, alors que ces suites sont attestées par des actes authentiques passés à l'étranger.

A ce dernier point de vue, nous faisons dépendre la solution de la difficulté d'une large entente de l'avis du conseil d'Etat du 10 brumaire an XIV.

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ARRET.

LA COUR: Sur le moyen de cassation déduit de la violation des articles 4, 25 et 69 de la loi du 22 frimaire an vit, combinés avec les avis du conseil d'Etat des 10 brumaire an XIV et 12 décembre 1806, en ce que le jugement attaqué a décidé qu'un acte de quittance passé devant notaire en pays étranger et mentionné dans un acte passé en Belgique n'était passible que du droit fixe :

Attendu que l'acte dont il s'agit, qui a été passé à Paris, le 18 août 1851, devant deux

notaires, contient quittance d'une somme de 200.000 francs due par la dame de Fresne de ladite ville à la baronne Goethals, de Bruxelles, pour prix d'un hôtel situé et vendu à Paris, et que cette quittance a été mentionnée dans un acte passé le 21 du même mois, devant le notaire Richard, à Arlon, à l'effet de constater le remploi de la somme payée, les époux Goethals s'étant mariés sous le régime dotal;

Attendu que l'article 25 de la loi du 22 frimaire an vii, qui soumet à la formalité de l'enregistrement les actes passés en pays étranger, dès qu'on en fait usage en Belgique, soit par acte public, soit en justice, ne décide rien sur la nature et la quotité du droit et se réfère, par conséquent, à cet égard aux autres dispositions de la loi ;

Attendu qu'aux termes de l'article 4, le droit proportionnel est établi pour les obligations, libérations, condamnations, ... transmissions de propriété, d'usufruit ou de jouissance de biens meubles et immeubles, tandis que, d'après l'article 5, le droit fixe s'applique aux actes qui ne renferment pas de semblables stipulations ou dispositions;

Attendu que l'article 4, en frappant les opérations qu'il énumère d'un impôt proportionné à leur importance, n'a pu avoir en vue que celles qui se font, en tout ou en partie, dans l'intérieur du pays, et non celles qui se passent complétement dans les pays étrangers où l'empire de la loi ne peut s'étendre;

Attendu que ce principe est formellement reconnu par l'avis du conseil d'Etat du 10 brumaire an xiv, qui porte que le droit proportionnel est un impôt qui ne peut atteindre les propriétés situées hors du territoire sur lequel il est établi, et que dès lors on ne peut exiger que le droit fixe sur des actes passés en pays étranger et qui transfèrent la propriété ou l'usufruit d'immeubles situés en pays étranger;

Attendu que si le conseil d'Etat, qui avait pour mission d'interpréter et non de modifier la loi, ne s'est prononcé que sur les mutations d'immeubles, les seules sur lesquelles il avait été consulté, le principe sur lequel repose la décision n'est pas moins général et doit s'appliquer aux cas analogues et notamment au cas de l'espèce où il s'agit d'un acte authentique passé en pays étranger et contenant quittance du prix d'un immeuble situé et vendu en pays étranger;

Attendu, au surplus, que le conseil d'Etat, consulté de nouveau sur la question de savoir si l'avis du 10 brumaire an XIV était appli

PASIC., 1856. 1re PARTIE.

cable aux actes passés dans l'intérieur du pays ou dans les pays étrangers, pour des propriétés mobilières existantes en pays étranger, a reconnu, par son avis du 15 novembre 1806, approuvé par décret impérial du 12 décembre suivant, que le principe admis par son premier avis devait être étendu aux actes passés en forme authentique seulement dans les pays étrangers, contenant obligation ou mutation d'objets mobiliers, lorsque les prêts ou placements auront été faits et les livraisons promises ou effectuées en objets de ces pays et stipulés payables dans les mêmes pays et dans les monnaies qui y ont cours;

Attendu qu'en supposant que les mots obligation et mutation d'objets mobiliers dont se sert cet avis ne comprennent pas explicitement les actes de quittance, il appert de l'ensemble du décret et notamment des termes généraux dans lesquels la question avait été posée, que ces mots n'ont pas été employés d'une manière limitative, mais uniquement par opposition aux mutations d'immeubles; que cela résulte à l'évidence des seules réserves que le conseil d'Etat ajoute à sa décision et qui n'ont point pour but de restreindre la généralité du principe qu'il proclame, mais seulement, d'une part, d'empêcher la fraude que les contractants pourraient commettre en datant faussement d'une localité étrangère les actes sous seing privé passés dans le pays, et, d'autre part, d'assurer le payement de l'impôt proportionnel sur les conventions qui doivent recevoir leur exécu tion, au moins en partie, dans l'intérieur du pays;

Attendu qu'il suit de ces considérations que le tribunal d'Arlon, en décidant que l'acte dont il s'agit dans l'espèce n'était passible que du droit fixe, a fait une juste application des textes cités à l'appui du pourvoi.

Sur le moyen tiré de la violation des articles 4 et 69. § 2, no 11, de la loi du 22 frimaire an vII, en ce que le jugement n'a pas ordonné le payement du droit de 50 centimes par 100 francs sur l'acte passé à Arlon devant le notaire Richard, qui, en mentionnant la quittance délivrée à Paris, fait preuve par lui seul de la libération de la débitrice :

Attendu que par la contrainte décernée le 20 avril 1853, conformément à l'article 64 de la loi de frimaire an vii, et qui seule servait de base à la poursuite, l'administration n'avait réclamé le droit de quittance que sur l'acte passé à Paris ;

Attendu que si dans le cours de l'instance l'administration a soutenu subsidiairement que le droit réclamé était dû sur l'acte passé

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à Arlon, le tribunal ne devait et ne pouvait statuer sur une demande dont il n'avait pas été régulièrement saisi ;

Attendu, d'ailleurs, que l'acte passé à Arlon, le 21 août 1851, qui n'a mentionné la quittance délivrée à Paris qu'à l'effet de constater le remploi de la somme qui en avait fait l'objet, n'avait ici pour but ni pour effet de constater la libération d'une dette qui avait été éteinte dès le 18 du même mois;

Par ces motifs, rejette le pourvoi; condamne l'administration demanderesse à une indemnité de 150 francs envers les défendeurs et aux dépens.

Du 15 décembre 1855. - 1re ch. Prés. M. de Gerlache, premier président. Rapp. M. Paquet. Concl. conf. M. Delebecque, premier avocat général. Pl. M. Allard § M. Mascar

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1o Il y a décision en fait quand le juge du fond détermine la portée d'un acte par lequel les parties, en désaccord sur les limites d'un terrain vendu, avaient pour but de fixer ces limites; on ne peut prétendre que par semblable interprétation ce juge aurait contrevenu à l'article 1154 du code civil. 2o Lorsqu'une des parties a été admise sans opposition à prouver par témoins que l'autre partie a empiété de plusieurs mètres sur sa propriété, si les témoins, également sans opposition, ont déposé de faits et circonstances propres à établir quelle était la volonté des parties dans l'acte de délimitation, le juge du fond a pu, sans contrevenir à l'article 1541, rejeter cette partie des lémoignages comme tendant à prouver outre et contre le contenu de cet acte. La défense portée à l'article 1541 du code civil ne tient-elle qu'à l'intérêt privé, d'où il résulterait que les parties pourraient dispenser le juge de s'y soumettre (1)? — Jugé négativement par la cour d'appel.

(1) Sur l'état de la doctrine et de la jurisprudence quant à cette question, voy. Gilbert, Code civil annoté, art. 1541, note 5 et 5 bis.

(SINDIC, C. DASNOY.)

Laurent Prosper Sindic, demandeur en cassation, et Nicolas-Dieudonné Dasnoy, défendeur, possèdent chacun un moulin à Chasse-Pierre, province de Luxembourg.

Ayant eu des difficultés au sujet des passages, entrées et communications entre ces deux moulins qui se trouvent à côté l'un de l'autre, ils passèrent, le 22 avril 1842, devant le notaire Poncelet de Florenville, un acte, par forme de transaction, par lequel Sindic abandonne et cède (ce sont les termes de l'acle) à Dasnoy, acceptant, contre la lairesse-mur du moulin de Dasnoy, conduisant au Trou-des-Fées, 1 mètre 45 centimètres de largeur, tout le long de la communication jusqu'au Trou-des-Fées, à charge par Dasnoy d'élever à ses frais... un mur....... pour séparation de communication.

L'acte ajoute: Attendu le litige possible de la propriété du lieu dit le Trou-des-Fées, il est expressément expliqué entre les parties que la communication dont mention ci-dessus n'est accordée que sur la propriété du cédant vers le Trou-des-Fées. Enfin le prix de la cession est fixé à la somme de 100 fr.

En exécution de cet acte, Dasnoy fit construire le mur de séparation de manière à englober dans sa propriété l'entrée de la grotte dit Trou-des-Fées. Sindic, prétendant, au contraire, qu'en suivant les limites tracées dans l'acte de cession, cette entrée aurait dù rester en dehors du mur de clôture, fit assigner Dasnoy devant le tribunal d'Arlon à l'effet d'entendre dire que c'est sans droit qu'il a construit une partie du mur de séparation sur la propriété de lui, Sindic, et se voir condamner à l'enlever et à le reconstruire dans les limites de son acte d'acquisition prérappelé, etc.

Le tribunal ordonna, par un premier jugement, la levée du plan des lieux litigieux.

Plus tard Dasnoy ayant persisté à soutenir qu'en construisant le mur dont s'agit, il s'était conformé aux termes de l'acte de vente du 22 avril 1842, Sindic offrit de prouver, par toutes voies de droit, même par témoins, que Dasnoy avait empiété de plusieurs mètres sur sa propriété. L'avoué de Dasnoy ayant déclaré qu'il n'avait rien à opposer à cette demande, le tribunal donna acte de ce consentement et admit la preuve offerte dans les termes que l'on vient de rappeler.

Après enquête et contre-enquête l'affaire fut reportée au tribunal qui, par jugement du 22 février 1854, donna gain de cause à

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