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tion, exigée de celui-ci par l'article 1454 da code civil, soit conçue dans les termes consacrés par cette disposition. Notre législation n'est pas esclave des mots; elle s'attache à la pensée. Le point de savoir si l'acte d'achat dont il s'agit contient une semblable déclaration était donc une question d'interprétation, une question de fait qui entrait dans les attributions souveraines de la cour d'appel, et la décision affirmative qu'elle a rendue échappe au contrôle de la cour de cassation..

Vainement, le pourvoi impute-t-il encore à cette décision de contrevenir aux art. 1541 et 1353 du code civil; ce n'est qu'accessoirement qu'elle se fonde sur des circonstances concomittantes; sa base principale consiste dans l'interprétation de l'acte, dans la recherche de la volonté du mari Collard.

Quant à la question relative au gain de survie, la cour d'appel ne l'a pas jugée d'après les règles que le code civil établit pour distinguer les biens en meubles et en immeubles, mais, encore une fois, en recherchant quelle a été à ce sujet l'intention des époux Collard dans leur contrat de mariage, et en interprétant cette convention, et d'après l'ensemble de ses stipulations et des circonstances concomittantes, elle n'a ni violé ces règles, ni porté atteinte à la force du contrat, ni aux dispositions des articles 1341 et 1353 du code civil.

M. l'avocat général Delebecque a dit sur le 'pourvoi :

D'après le premier moyen de cassation, il faudrait, pour qu'il y eût remploi d'un propre du mari, qu'il fût expressément déclaré que l'acquisition est faite pour tenir lieu de remploi. Mais, a dit la cour d'appel de Liége dans l'arrêt attaqué, la loi n'exige point de termes sacramentels, il suffit que les expressions de l'acte et les circonstances de la cause ne laissent aucun doute sur l'intention du mari de faire un remploi. La cour, invoquant alors les expressions et les circonstances, en induit que telle a été l'intention du mari.

Certes, en proclamant qu'il ne faut pas de termes sacramentels pour manifester l'intention de faire remploi, la cour de Liége n'a pu contrevenir à l'article 1434; notre droit n'a rien qui le rapproche du droit formulaire, et quand la loi exige une déclaration formelle, expresse, elle a soin de s'en expliquer clairement.

S'il en est ainsi, la volonté, qui ne doit pas ètre manifestée expressis verbis, peut être reconnue à d'autres signes; ces signes on les

reconnaîtra dans l'ensemble de l'acte, dans la combinaison de ses dispositions, dans la situation respective des parties; ce seront là les éléments que les juges du fond auront à consulter, et c'est ce que la cour de Liége a exprimé en employant les termes généraux circonstances de la cause.

Dès qu'il n'y a plus de termes sacramentels, dès que l'intention peut être autrement manifestée, on peut reconnaître l'existence de la manifestation dans les probabilités qui se présentent et qui constituent alors essentiellement des présomptions. On ne peut

donc prétendre que la cour de Liége a contrevenu dans l'espèce aux articles 1341 et 1353. On présume toujours, c'est-à-dire qu'on a recours à des présomptions humaines, toutes les fois qu'on interprète et qu'on a le droit d'interpréter un acte par la recherche de l'intention des parties.

Pothier, en son Traité de la communauté, n° 198, n'exigeait pas la double déclaration requise par l'article 1434.

Lors des travaux préparatoires, l'art. 1434, dont la rédaction n'a pas subi de changements, n'a été l'objet d'aucune observation. De nombreux auteurs (1) ont suivi la manière de voir de Pothier, ils l'ont considérée comme adoptée par les auteurs du code.

Mais Troplong (commentaire, art. 1434, n° 1119), enseigne qu'il faut la double décla ration. « La vérité est, dit-il, que l'ancienne jurisprudence exigeait au contraire les deux déclarations, et que c'est en vue de cette doctrine d'autrefois que l'article 1434 a été rédigé tel qu'il est. » Il invoque Lebrun et Duplessis, qu'avaient invoqués avant lui et dans le même sens Rodière et Pont, no 504. Il faut reconnaître que cette appréciation a pour appui la lettre de la loi.

Mais si ces auteurs exigent, conformément au texte même de l'article 1454, la double déclaration, ils n'exigent pas que cette déclaration soit faite en termes formels ou sacramentels. - Pont, Rodière et Troplong invoquent comme favorable à leur thèse l'arrêt de rejet du 23 mai 1838, qui, tout en proclamant la nécessité de la double déclaration, reconnait, comme l'a reconnu plus tard la cour de Liége, que la loi ne prescrit aucuns termes sacramentels. La cour de Metz avait vu une déclaration de remploi, suffisamment claire, dans les circonstances

(1) Duranton, no 428; Zachariæ, Taulier, t. 5, no 109; Odier, t. 1, no 525; Toullier, t. 12, n° 356.

suivantes : « Le mari avait acheté différents immeubles, en payement desquels il consentait délégation sur une somme plus forte qui lui était due par un tiers, pour prix d'autres immeubles propres à ce mari. Le pourvoi dirigé contre cet arrêt a été rejeté par la section des requêtes.

La cour de Liége a donc pu dire en principe : « La loi n'exige pas de termes sacramentels; il suffit que les expressions de l'acte et les circonstances de la cause ne laissent aucun doute sur l'intention du mari de faire un remploi (1).

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Et lorsque, appréciant l'acte dans sa portée, la cour d'appel a reconnu cette intention dans les circonstances de la cause, elle n'a fait en cela, comme la cour de Metz, qu'user de son droit d'appréciation et d'interprétation.

Le premier moyen ne nous paraît pas fondé.

Rappelons, en ce qui touche au deuxième moyen, que, dans l'espèce, les propres du mari, aliénés pendant le mariage, n'ont pas été remplacés par l'acquisition d'immeubles à titre de remploi, à concurrence du prix des aliénations.

Cet excédant du prix, non employé el el versé dans la communauté, conservait-il sa nature mobilière, à ce point qu'il dut faire partie du gain de survie, assuré à l'épouse survivante? Telle était la question soumise au juge du fond.

La cour d'appel a pensé : « que les époux ou leurs représentants ont droit à prélever sur les biens de la communauté la valeur de leurs propres qui ont été aliénés pendant le mariage et pour lesquels il n'a pas été fait emploi. »

Pour le décider ainsi, la cour d'appel, par la combinaison des clauses du contrat, a recherché l'intention des parties contractantes. Elle s'est donc déterminée par une décision en fait, qui échappe au contrôle de la cour de cassation, parce qu'elle n'a pu contrevenir par là aux articles 1341 et 1353, articles relatifs au mode de prouver les obligations et sans application lorsqu'il s'agit de l'interprétation d'une convention dont l'existence n'est pas mise en question.

ARRÊT.

LA COUR; A l'égard du moyen de cassation tiré 1o de la violation des articles 1433,

(1) Brux., 11 juin 1834 (Pasic. belge, à sa date).

1434, 1455 et 1401, no 3, du code civil, en ce que l'arrêt, en statuant sur l'appel incident, a décidé que l'acquisition dont il s'agit constitue un remploi au profit du mari Collard, quoique celui-ci n'eût pas ajouté à la déclaration qu'elle était faite des deniers provenus de l'aliénation de ses biens personnels, qu'elle devait lui tenir lieu de remploi; 2o de la violation des articles 1341 et 1353, même code, en ce que, pour constater cette double déclaration, l'arrêt a eu recours à des présomptions humaines, tandis que la valeur de l'objet litigieux, excédant 150 fr., ne comportait pas ce genre de preuve;

Attendu qu'en interprétant l'acte d'acquisition dont il s'agit, en recherchant ainsi quelle a été l'intention qui a inspiré au mari Collard la déclaration qu'il y a faite et en s'aidant à cet effet des éclaircissements que les circonstances dans lesquelles l'acquisition avait eu lieu étaient de nature à lui fournir, l'arrêt déféré a constaté que cette déclaration renferme les deux éléments requis par l'article 1434 du code civil, à savoir que l'acquisition se faisait des deniers provenus de l'aliénation d'immeubles qui étaient personnels au mari Collard et pour lui tenir lieu de remploi ;

que semblable déclaration n'a pas besoin d'être énoncée en termes sacramentels; qu'il suffit qu'elle indique l'origine des deniers employés pour payer le prix et la volonté de faire un remploi de manière à ne laisser aucun doute à cet égard;

Qu'il s'ensuit que la vérification de l'existence de la déclaration dans les deux éléments exigés par l'article 1454 est souveraine, et que, dans cet état de choses, l'arrêt déféré n'a pu contrevenir ni à cette disposition ni à aucune autre de celles invoquées à l'appui de la première partie du moyen.

Et quant à la seconde partie :

Attendu que si l'arrêt a eu recours à de simples présomptions, ce n'est point à l'effet de trouver en dehors de l'acte la preuve d'une déclaration qu'il devait contenir, mais pour établir, par l'interprétation de l'acte luimême, qu'il avait été satisfait aux deux conditions exigées par l'article 1434 du code civil.

Relativement au moyen de cassation déduit 1o de la violation des articles 527, 528, 529, 555, 1433, 1470 et 1134 du code civil, en ce que l'arrêt déféré, en statuant sur l'appel principal, a décidé que la récompense du prix de la vente d'immeubles propres au mari Collard n'était pas comprise dans le gain de

survie des effets mobiliers acquis à la femme; 2o de la violation des articles 1541 et 1553 du code civil, en ce que cette décision se fonde sur des présomptions humaines au delà des limites dans lesquelles ce genre de preuve est circonscrit par la loi, la valeur de l'objet litigieux excédant 150 fr.;

Attendu que la question qui était soumise à la cour d'appel, et qu'elle a décidée, n'était pas de savoir si le droit de récompense dont il s'agit constitue un droit mobilier ou immobilier dans le système du code civil sur la distinction des biens, mais au contraire quel caractère les époux Collard lui avaient attribué dans leurs stipulations anténuptielles pour régler leurs droits respectifs, et qu'en interprétant ces stipulations comme elle devait le faire, elle a vérifié que dans l'intention des contractants ce droit constitue un droit immobilier et par conséquent ne fait pas partie du gain de survie acquis à la femme;

Que cette interprétation étant souveraine, dans la situation qu'elle établit, l'arrêt n'a contrevenu à aucun des textes cités par la première partie du moyen.

En ce qui concerne la seconde :

Attendu que ce n'est encore qu'accessoirement que la cour d'appel a recherché quelle a été à ce sujet l'intention des époux Collard dans l'acte d'acquisition prérappelé ; que sa constatation repose principalement sur l'interprétation du contrat de mariage lui-même, et que dès lors elle n'a pas commis la contravention que le pourvoi lui reproche;

Par ces motifs, rejette le pourvoi; condamne le demandeur à l'amende de 150 fr., à une indemnité de la même somme et aux dépens de cassation, au profit des défendeurs.

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Le 25 novembre 1855, eut lieu à Hasselt une inspection d'armes de la garde civique dont les trois défendeurs, Mulkers, Creten et Noyen faisaient partie.

Trois rapports furent dressés le même jour par l'officier d'armement, indiquant, comme ayant manqué à cette inspection, vingt-quatre gardes, nommément les trois défendeurs en cassation.

Ces rapports étaient visés par le major du bataillon qui avait renvoyé devant le conseil de discipline dix-huit de ces gardes seulement, y compris les défendeurs, les six autres étant indiqués dans la colonne d'observations comme malades, absents ou estropiés.

Des dix-huit individus poursuivis devant le conseil, quinze, qui ne figuraient plus au procès, firent valoir des moyens d'excuse qui furent accueillis ; ils furent d'ailleurs acquittés, ainsi que les trois défendeurs, par le motif que la contravention n'était pas légalement constatée, l'officier d'armement n'ayant pas qualité pour dresser les rapports invoqués. Ce jugement était ainsi conçu :

« Attendu que l'infraction dont il s'agit n'a pu être constatée que par des appels et contre-appels faits dans chaque compagnie et par l'officier qui la commande;

«Attendu que le rédacteur des rapports versés au dossier n'étant investi d'aucune délégation à cet effet, n'avait aucune qualité légale pour dresser les rapports dont il s'agit; d'où il suit que les pièces produites ne présentent pas le caractère de rapports ou procès-verbaux dans le sens de la loi;

« Attendu que l'officier rapporteur, faisant fonctions de ministère public, n'a administré ni offert d'administrer aucune autre preuve à l'appui de la prévention;

« Considérant que les prévenus, quoique dùment assignés, ne sont pas comparus ni personne en leur nom;

Vu les articles 149 et 159 du code d'instruction criminelle, ainsi conçus...;

«Par ces motifs, dit que la contravention imputée aux prévenus n'est pas légalement constatée; donne défaut...; annule et met à néant les rapports versés au dossier ainsi que tout ce qui s'est ensuivi; partant acquitte lesdits prévenus de la contravention mise à leur charge. »

Le même jour le conseil statua contradictoirement par les mêmes motifs à l'égard de Mulkers et Creten.

Pourvoi par l'officier rapporteur.

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Attendu que cet article ni aucun autre de la loi ne désigne le grade ou la qualité que doit avoir l'officier chargé de ces rapports pour constater légalement l'absence des gardes aux convocations;

Attendu que, dans l'espèce, les rapports faits par l'officier d'armement, qui désigne les gardes qui ont manqué à l'inspection d'armes qui a eu lieu à Hasselt le 25 novembre 1855, rentrent dans ses attributions; qu'il en résulte que le conseil de discipline, en refusant d'ajouter foi au contenu desdits procès-verbaux jusqu'à preuve contraire, a contrevenu à l'article 99 de la loi du 8 mai 1848;

Par ces motifs, casse et annule le jugement contradictoire rendu, le 22 fév. 1856, par le conseil de discipline de la garde civique de Hasselt, en cause de l'officier rapporteur contre Guillaume Mulkers et Jean Creten, et 2o le jugement par défaut rendu le même jour par le même conseil, en cause de l'officier rapporteur contre Frédéric Noyen; ordonne que le présent arrêt sera transcrit sur les registres de la garde civique de Hasselt et que mention en sera faite en marge des jugements annulės; renvoie les deux causes devant le même conseil de discipline composé d'autres juges; condamne les défendeurs aux dépens.

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Par arrêt de la cour d'appel de Bruxelles, chambre des mises en accusation, en date du 2 janvier 1856, Jean Janssens, âgé de 45 ans, né et demeurant à Budingen, garde particulier assermenté, avait été renvoyé devant la première chambre de ladite cour, pour avoir, de 1852 à 1855, en sa qualité d'officier de police judiciaire et fonctionnaire public, exigé et reçu de diverses personnes, des sommes de 2, 3 et 4 francs, pour s'abstenir de dresser procès-verbal contre elles du chef soit de maraudage, soit d'autres délits ruraux faits qui rentrent, ajoutait l'arrêt, dans l'application de l'art. 174 du code pénal, qui punit de la reclusion, comme coupable de concussion, tout fonctionnaire public qui exige ou qui reçoit ce qu'il sait n'ètre pas dù. L'arrêt constatait ensuite l'existence des circonstances atténuantes, tirées de la modicité des sommes exigées et reçues ce qui autorisait le renvoi du prévenu devant la juridiction correctionnelle, aux termes des articles 3 et 4 de la loi du 15 mai 1849.

Mais par arrêt du 25 janvier 1856, la cour d'appel, première chambre, s'est déclarée d'office incompétente, par les motifs sui

vants :

« Attendu qu'il résulte des dépositions des témoins produits par le ministère public et entendus à l'audience du 14 janvier courant, que le prévenu Janssens, garde champêtre particulier, né et demeurant à Budingen, aurait, pendant les années 1852, 1855, 1854 et 1855, à Budingen, exigé et reçu de l'argent de diverses personnes, surprises en délits ruraux ou forestiers sur des propriétés dont la garde lui était confiée, pour ne pas constater à leur charge des délits par eux commis;

<< Attendu que ce fait est prévu par l'ar

et Jur. du xixe siècle, 1840, 1, 438). (3) Voy. conf. cass. de Belg., 14 janvier 1856 (Bull, el Jur, du xixe siècle, 1836, 1, 68).

ticle 177 du code pénal et peut donner lieu à l'application de la peine du carcan comme peine principale et de l'amende;

<< Attendu que la peine du carcan est une peine infamante comminée en matière criminelle et dont l'application ne peut être faite par les tribunaux correctionnels, aux termes de la loi du 15 mai 1849;

"Par ces motifs, la cour, statuant d'office, se déclare incompétente, renvoie la cause devant qui de droit. »>

Pourvoi par le ministère public qui se fonde sur la fausse application de l'art. 177 du code pénal.

L'arrêt de la chambre des mises en accusation de la cour d'appel de Bruxelles, en date du 2 janvier 1856, disait le demandeur, avait jugé que les faits imputés au garde particulier Janssens, consistant à avoir exigé et reçu de l'argent de diverses personnes surprises en délits, pour ne pas constater ces délits à leur charge, rentraient dans l'application de l'article 174 du code pénal, et constituaient le crime de concussion, puni de la peine de la reclusion: l'arrêt de la première chambre de la même cour, en date du 23 suivant, a jugė, au contraire, que ces mêmes faits rentraient dans l'application de l'article 177 et constituaient le crime de corruption, puni du carcan et d'une amende. Il y a pourvoi contre ce second arrêt, pour fausse application de l'article 177.

Les deux crimes de concussion et de corruption diffèrent par une circonstance essentielle la concussion exige la somme qu'elle perçoit; la corruption se borne à l'agréer, quand elle lui est offerte. (Voy. Chauveau et Hélie, Théorie du code pénal, no 1784.)

Concussio a concutere, dit Farinacius, question 3, no 43, hoc est intimorare, quando quis, in officio constitutus, aliquid à subditis extorquet metu, vi, minis vel persuasionibus, secretè vel expressè illatis; et le même auLeur ajoute corruptio, quando à spontè pecuniam dante, judex injustitiam facit; concussio, quando pecuniam non à spontè dante recœpit vel extorquet.

Ainsi, dans la concussion, l'initiative vient du fonctionnaire, en faisant abus de sa fonction et de son autorité, et c'est lui qui est l'agent actif; il exerce une pression. Dans la corruption, au contraire, le fonctionnaire reste passif, l'initiative et l'action viennent du corrupteur qui agit par offres ou promesses, dons ou présents sur le fonctionnaire, et qui le corrompt en les lui faisant agréer.

Si cette doctrine est vraie, les faits à charge du garde Janssens doivent constituer le crime de concussion et non celui de corruption.

Les expressions contenues dans les articles 174 et 177 sont en rapport avec cette doctrine. Les mots offres ou promesses, dons ou présents du premier de ces articles supposent un acte de libre volonté de la part de ceux qui font les offres, les promesses, les dons ou les présents: aucun de ces mots, ni l'idée d'un acte de libre volonté ne se trouvent dans la prévention telle qu'elle est formulée dans l'arrêt de la première chambre du 23 janvier dernier. Cette prévention est in terminis celle d'avoir exigé et reçu de l'argent, et ces mots erigé et reçu sont les expressions sacramentelles de l'article 174.

Dalloz, dans son Nouveau Répertoire de jurisprudence, vo Forfaiture, no 59, se demande comment il faut qualifier le fait d'un garde forestier qui surprend un particulier commettant un des délits à la surveillance desquels il est préposé, et qui le menace de dresser procès-verbal contre lui, s'il ne donne une certaine somme. « Le fait de ce garde forestier tient à la fois, dit-il, de la corruption et de la concussion. Il tient de la corruption, en ce que le devoir du garde était de constater le délit, de dresser procès-verbal; il a donc reçu de l'argent pour s'abstenir d'un acte qui rentrait dans l'ordre de ses devoirs. Mais il tient de la concussion, en ce que le fonctionnaire a demandé ce qui ne lui était pas dû, et même employé une sorte de contrainte morale, pour amener le délinquant à le lui donner. Quelle est donc la peine qui doit lui être appliquée? Nous croyons que c'est la peine de la concussion; et ce qui nous détermine, c'est que, dans l'hypothèse que nous avons supposée, le fonctionnaire ne cède point à une séduction pratiquée envers lui et qui est venue le chercher; mais commet, de son propre mouvement, une véritable exaction. La corruption suppose un corrupteur c'est là, à notre avis, un élément essentiel de ce crime; or, ici, où est le corrupteur? On ne peut point assurément donner ici ce nom au délinquant qui n'offre rien, qui ne propose rien, mais dont le rôle se borne à subir les conditions qu'on lui impose. »

Le crime de l'article 174 existe du moment où le fonctionnaire a exigé et reçu ce qu'il savait ne pas être dû : la circonstance, qu'il l'a fait pour s'abstenir d'un acte qui rentrait dans l'ordre de ses devoirs, est ici une circonstance extrinsèque qui n'empêche pas le fait de rentrer dans la disposition de l'arti

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