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casion de son service personnel; et c'est précisément la position que s'était faite, dans l'espèce de l'arrêt de 1845, le garde national vis-à-vis de son sergent-major.

Remarquons que, dans l'armée, la subordination est permanente; que l'uniforme est toujours porté; que la qualité est inséparable de la personne. Assimiler complétement la garde civique et l'armée sous ce rapport, comme le faisait la loi de 1835, était peu conforme à la réalité ; une restriction devait se faire; elle a été faite dans la loi de 1848 et dans les termes que vous connaissez; or, ces termes signifient, comme dans les constitutions de 1791 et de l'an 1, que les devoirs disciplinaires, imposés en tout temps à l'armée, n'existent pour la garde civique que relativement au service et pendant sa durée, ou, comme le dit l'ordonnance de 1816, à raison du service. Autrement dit : le garde civique n'est garde civique et il n'est soumis aux devoirs de subordination et de respect que pour ce qui concerne le service, et les conseils de discipline ne connaissent des infractions à la discipline que dans la limite des faits relatifs au service. Voilà l'interprétation juste, raisonnable, pratique et vraiment légale de la loi; voilà la vraie portée des mots ajoutés en 1848 dans l'article 89; voilà aussi pourquoi nous concluons au rejet du pourvoi, avec condamnation aux frais et à-l'amende.

ARRÊT.

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LA COUR; Sur le moyen déduit de la contravention à l'article 95 de la loi du 8 mai 1848, en ce que le conseil de discipline n'a pas été régulièrement composé et présidé :

Attendu que le conseil de discipline a été composé conformément à la loi;

Attendu que le jugement attaqué constate qu'au moment où le conseil entrait en séance, le major désigné pour le présider lui a fait parvenir un certificat du médecin de bataillon, constatant qu'il était malade et ne pouvait se rendre à la séance;

Attendu, dès lors, que le conseil a été régulièrement présidé par l'officier le plus élevé en grade.

Sur les divers moyens, consistant 1° dans la violation des articles 8, 18 et 98 de la constitution, en ce que le conseil de discipline était incompétent pour connaître d'un écrit publié par la voie de la presse; 2o dans la violation de l'article 11 du décret du 20 juillet 1851, en ce que le conseil de discipline n'a pas recherché si le demandeur était l'auteur de l'article incriminé; 3o dans la viola

tion des articles 89, 95 et 99 de la loi du 8 mai 1848, en ce que les injures n'ont pas eu lieu pendant le service:

Attendu que l'article 89 de la loi du 8 mai 1848 porte que les devoirs des officiers, sousofficiers, caporaux ou brigadiers et gardes, pendant la durée du service, sont les mêmes que dans l'armée;

Attendu que cette disposition implique pour les gardes le devoir d'obéir, en tout ce qui concerne le service, aux ordres de leurs chefs, et, par une conséquence nécessaire, l'obligation de s'abstenir, à l'occasion de ces ordres, de toute offense envers ceux dont ils émanent;

Qu'une offense de cette nature doit donc être considérée comme une infraction à la discipline; qu'elle peut même, selon les circonstances, et surtout lorsqu'elle est publique, présenter les caractères d'une insubordination grave;

Attendu que s'il en était autrement, les chefs de la garde civique pourraient, à raison du service, se trouver exposés à des attaques incessantes qui, en compromettant l'autorité du commandement, amèneraient la ruine de l'institution;

Attendu qu'il est indifférent que l'injure soit verbale ou qu'elle se produise par la voie de la presse;

Que les imputations renfermées dans un écrit imprimé peuvent constituer un acte d'indiscipline, alors même qu'on n'y rencontre pas les caractères d'un délit de presse;

Attendu, d'ailleurs, que l'action disciplinaire est indépendante de l'action criminelle;

Que les deux poursuites procèdent bien d'un même fait, mais d'un même fait envisagé sous des rapports différents et pouvant conduire à des condamnations d'une nature tout à fait distincte;

Qu'il suit de ces considérations que les articles cités de la constitution et de la loi du 50 juillet 1831 ne sont point applicables lorsqu'il s'agit d'une poursuite pour fait d'indiscipline, et qu'il appartient au conseil saisi de la prévention d'examiner si le garde inculpé s'est, comme auteur, éditeur ou distributeur d'un écrit imprimé, rendu coupable d'insubordination;

Attendu qu'il est constaté, en fait, que le demandeur, garde à la 3e compagnie du 1er bataillon de la garde civique d'Alost, s'est rendu coupable, par la voie d'un journal dont il est l'éditeur, d'injures graves et publiques envers le chef de ladite garde civique, à l'occasion et à la suite de faits personnels au

demandeur qui s'étaient passés à la revue du 30 septembre 1855;

Attendu qu'il résulte de ce qui précède que le conseil de discipline de la garde civique d'Alost, en se déclarant compétent et en condamnant le demandeur aux peines prononcées par la loi du 8 mai 1848, n'a contrevenu à aucun des textes cités à l'appui du pourvoi.

Sur le moyen déduit de la contravention aux articles 162, 194 et 163 du code d'instruction criminelle et 100 de la loi du 8 mai 1848, en ce que le demandeur a été condamné aux dépens, sans que le texte de la loi appliquée ait été transcrit ou mème mentionné dans le jugement:

Attendu que l'article 162 du code d'instruction criminelle, en exigeant, à peine de nullité, que le texte de la loi appliquée soit inséré dans le jugement de condamnation, a entendu parler de la loi qui prononce la peine;

Attendu que les dépens ne peuvent être considérés comme une peine;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ; Par ces motifs, rejette le pourvoi; condamne le demandeur à l'amende et aux dépens.

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(1) Relativement à l'art. 941 du code civil, la cour de cassation de France a décidé par deux arrêts que le créancier chirographaire pouvait se prévaloir du défaut de transcription de la donation.

En sens contraire: Marcadé sur l'article 941; Coin-Delisle sur le même article, nos 9 et 14; Grenier, Hypoth., no 560; Toullier, t. 3, nos 230 et suiv.; Beaudot, nos 1159 et suiv.; Grenoble, 17 juin 1822 (Pasic. fr., à sa date); Amiens,

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«La cession d'une créance privilégiée ou hypothécaire inscrite, de même que la subrogation à un droit semblable, ne pourra « être opposée au tiers, si elle ne résulte « d'actes énoncés en l'art. 2 (2), et s'il n'est «<fait, en marge de l'inscription, mention de «la date et de la nature du titre du ces«sionnaire, avec indication des noms, pré« noms, professions et domiciles des par❝ties. »

Que faut-il entendre par tiers? Ce terme s'applique-t-il seulement à l'individu qui prétend un droit réel sur l'immeuble grevé d'inscription, ou bien aussi au simple créancier chirographaire du propriétaire dépossédé par une cession ou une subrogation?.

Telle était la question soumise à la cour de cassation. Il ne paraît pas qu'elle ait été discutée devant le tribunal d'Arlon, et ce tribunal ne l'a pas jugée d'une manière explicite; mais sa décision implique nécessairement l'extension de l'art. 5 à l'individu qui n'a qu'un droit purement personnel. Son jugement a été rendu dans l'espèce suivante :

Le 13 juin 1847, les deux sœurs Feyder font procéder à la vente de divers immeubles par le ministère du notaire Reuter que le cahier des charges autorise spécialement à toucher, sous sa quittance, le prix des adjudications.

Jean-Baptiste Simon se rend acquéreur d'une prairie pour une somme de 800 francs. A la transcription de l'acte, inscription est

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prise d'office au profit des venderesses, le 10 juillet 1847.

Simon ne paye pas le prix à l'époque fixée, et par acte notarié du 16 mai 1855, revend la prairie, alors transformée en jardin, à Augustin Richard, pour 800 francs que l'acquéreur s'oblige à payer dans la quinzaine aux créanciers inscrits.

Mais Pierre Étienne et la veuve Rocour, créanciers chirographaires de Simon, font pratiquer entre les mains de Richard une saisie-arrêt sur cette somme et obtiennent un jugement qui ordonne à celui-ci de payer aux saisissants moyennant la preuve de l'extinction de la créance privilégiée et l'exhibition de la mainlevée de l'inscription.

Pour remplir ces conditions, les saisissants font, par exploit du 6 juin 1853, assigner les sœurs Feyder au tribunal d'Arlon, concluant à ce qu'elles soient condamnées à donner mainlevée de l'inscription, attendu que la créance leur avait été intégralement remboursée par le débiteur ou par un tiers.

Reuter intervient dans l'instance. Il dit que Simon, acquéreur primitif, n'ayant pas acquitté le prix au terme convenu, il a, lui notaire, intéressé au payement de la dette, satisfait de ses deniers les venderesses en 1848, 1849 et 1852, et en conséquence leur a été subrogé de plein droit dans le bénéfice de l'inscription hypothécaire de 1847.

Sur interpellation, les sœurs Feyder déclarent avoir été désintéressées par le notaire Reuter, et pour le surplus s'en rapporter à justice.

Le tribunal, par jugement du 14 août 1854, admet comme constants les payements faits par Reuter aux sœurs Feyder, et la subrogation opérée de plein droit à son profit, à concurrence des sommes payées avant la nouvelle loi hypothécaire du 16 décembre 1851 : mais il décide que les quittances de ces payements n'ayant pas acquis date certaine avant cette loi, ne sont pas opposables aux tiers; et que, depuis la même loi, la subrogation à un droit hypothécaire ne pouvant résulter que d'un titre revêtu de formalités qui manquent aux actes invoqués par Reuter, celui-ci n'est pas fondé dans sa prétention. Par suite il condamne les sœurs Feyder à donner mainlevée ainsi qu'aux dépens, et Reuter à les indemniser de ces condamnations.

Ce jugement est de la teneur suivante : «En droit la subrogation légale invoquée par le notaire Reuter est-elle suffisamment établic vis-à-vis des demandeurs? Dans la négative, y a-t-il lieu d'ordonner la main

levée de l'inscription d'office du 10 juillet 1847? Quid des dépens? Parties ouïes. Les défenderesses au principal et en intervention, et le demandeur en intervention par Me Rolens, avocat, assisté de Me Simons, avoué, et les demandeurs au principal et défendeurs en intervention par Me Maguette, avocat, assisté de Me Netzer, avoué;

« Oui le ministère public en ses conclusions conformes par M. Dumont, substitut du procureur du roi;

« Attendu que les défenderesses originaires ont reconnu qu'antérieurement à la présente instance, elles avaient été désintéressées par Je notaire Reuter et qu'elles se sont rapportées à justice sur le mérite de l'action leur intentée ;

«Attendu que le fait du payement par le notaire Reuter n'étant pas contesté, celui-ci est fondé à intervenir dans la présente instance; que se prévalant d'une subrogation légale, c'est à lui à établir qu'il a rempli toutes les formalités prescrites à ces fins;

« Attendu qu'aux termes de l'art. 5 de la loi du 16 décembre 1851, toute cession et subrogation, pour avoir effet à l'égard des tiers, doit résulter d'actes authentiques, que par la généralité de ses termes et l'identité de ses motifs, cette disposition parait s'appliquer à la subrogation légale, aussi bien qu'à la subrogation conventionnelle;

«Attendu que c'est donc au demandeur en intervention à établir, soit qu'il a rempli les formalités prescrites par cette disposition, soit à justifier que par des payements effectués antérieurement, la subrogation légale lui était acquise avant la mise en vigueur de la loi nouvelle;

« Attendu que le sieur Reuter était créancier de l'acquéreur pour les frais d'acte du jour de la vente; qu'il résulte également des pièces du dossier que la plus forte partie des sommes dues aux défenderesses originaires avaient été payées par lui antérieurement à la nouvelle loi hypothécaire, et que payant un créancier privilégié qui lui était préférable, la subrogation légale lui était acquise à l'égard des défenderesses;

«Attendu néanmoins que ces quittances, n'ayant pas date certaine, ne peuvent être opposées à des tiers; que rien ne justifie donc, à leur égard, que les payements allégués aient été effectués sous le régime de la loi ancienne et que le demandeur en intervention ne justifie pas qu'il ait rempli les formalités prescrites par la loi nouvelle ;

Par ces motifs, le tribunal condamne les

défenderesses à donner mainlevée de l'inscription privilégiée du 10 juillet 1847; dit que faute de ce faire dans la huitaine de la signification du présent jugement, la radiation de ladite inscription sera faite sur le vu du présent jugement, et condamne les défenderesses aux dépens; reçoit la partie Reuter intervenante en cause; la condamne à tenir quittes et indemnes les défenderesses originaires, des condamnations prononcées contre elles et aux dépens envers toutes les parties, liquidés à 145 francs 19 centimes, dont distraction au profit de Me Netzer, qui affirme en avoir fait l'avance. >>

Pourvoi par les héritiers du notaire Reuter, dirigé tant contre Etienne et la veuve Rocour que contre les sœurs Feyder.

La requête concluait à la cassation, à la restitution de l'amende, ainsi que de tout ce qui aurait été payé en exécution du jugement attaqué, enfin au renvoi de la cause devant un autre tribunal.

L'exploit signifié avec ajournement à Malherbe, second époux de la veuve Rocour, annonçait en outre qu'il serait conclu à ce qu'il cut à autoriser sa femme, sinon à ce qu'elle serait autorisée par la cour à ester en jugement.

Le pourvoi était fondé sur un seul moyen de cassation qui se divisait en deux parties. Il se fondait sur la fausse interprétation et la violation de l'art. 5 de la loi du 16 décembre 1851, et sur la violation de l'article 1251, nos 1 et 3, du code civil.

Le moyen était résumé dans les deux propositions suivantes :

1o L'omission des conditions de publicité établies par l'article 5 pour les cessions et les subrogations n'est opposable que par les intéressés dont les droits sont de même nature que ceux assujettis par ledit article à ces conditions de publicité, en d'autres termes par les seuls intéressés qui ont des droits réels.

2o L'omission des mêmes formalités ne peut être opposée lorsqu'il y a fraude de la part du tiers, et, dans l'espèce, la fraude est manifeste.

Le jugement du 14 août 1854 a donc, sous un double rapport, appliqué faussement l'article 5 de la loi de 1851, et par voie de conséquence il a violé l'art. 1251 du code civil, en méconnaissant les droits qui en résultaient pour le notaire Reuter.

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qu'entre les parties la propriété se transfère par le seul consentement.

Ce système exposant l'acquéreur à des dangers, par suite des contrats antérieurs qu'il peut ne pas connaître, la loi du 11 brumaire an VII, pour l'en garantir, ordonna que tous les actes translatifs de droits immobiliers fussent transcrits sur des registres publics : jusque-là les contrats, quoique parfaits en euxmêmes, ne pouvaient être opposés aux tiers.

Le code civil ne conserva cette garantie qu'en matière de donation, de substitution et de purge; mais la loi du 16 décembre 1851 lui a rendu la généralité qu'elle avait sous la loi de brumaire et l'a même étendue.

Pour les actes constitutifs d'hypothèque, la transcription est remplacée par l'inscription. Ce sont deux formalités équivalentes, sinon identiques, ayant le même but, celui d'avertir les tiers; aussi les mêmes principes en régissent l'effet et l'application.

Mais quels sont les tiers dans l'intérêt desquels on exige la publicité? Evidemment les tiers qui auraient à souffrir du défaut de publicité. Or, il n'y a de préjudice possible que pour les tiers qui prétendent un droit réel : tels sont l'acquéreur d'un immeuble déjà aliéné par le vendeur; le prêteur à qui l'on donne une hypothèque primée par une autre. Ceux-là pourront opposer le défaut de publicité de la première vente, de la première bypothèque de l'immeuble sur lequel on leur a conféré un droit spécial.

Mais le créancier chirographaire, qui traite en considération de la personne et qui se fie à la foi du débiteur, ne peut se plaindre de la transmission occulte d'une chose sur laquelle il n'a aucune prétention. Si les biens de son débiteur lui servent de gage, ce n'est qu'aussi longtemps qu'ils appartiennent à celui-ci, qui est le maître d'en disposer à son gré.

Tels sont les principes consacrés par l'article 26 de la loi de brumaire an vi qui, évidemment, ne s'appliquait qu'aux tiers qui avaient acquis un droit réel sur l'immeuble avant la transcription d'une précédente alié

nation.

Le code civil, dans les dispositions exceptionnelles qui exigent la transcription, est beaucoup moins explicite. Ainsi l'art. 941 déclare que « le défaut de transcription pourra « être opposé par toutes personnes ayant in« térêt. »

Quelques arrêts et quelques auteurs ont étendu ces derniers mots au créancier chirographaire : mais une doctrine plus accrédi

tée et plus conforme aux principes généraux et au droit antérieur, malgré la latitude apparente du texte, en borne l'application aux tiers dont l'intérêt se fonde sur un droit réel: elle ne voit dans l'article 941 que le corollaire de l'article 939 où il ne s'agit que de biens susceptibles d'hypothèque.

Au surplus, si le doute était possible sous le code civil, il ne l'est plus depuis que la loi de 1851 a rétabli le système de la loi de brumaire, et dans les mêmes termes pour ainsi dire.

La controverse était née des expressions du code civil: la loi de 1851 ne les a pas reproduites: la difficulté ne saurait donc revivre, et un créancier chirographaire n'a plus de prétexte pour relever le défaut d'une publicité à laquelle il n'a aucun intérêt.

Qu'on ne perde pas de vue que la loi de 1851 est une loi hypothécaire, qui n'avait pas à s'occuper des tiers dont les droits ne seraient que personnels; que l'on considère aussi que les articles 1 et 5 se trouvent au titre préliminaire intitulé de la Transmission des droits réels, et que la discussion de la loi prouve en effet que c'est des droits réels seulement que l'on a voulu s'occuper.

Dans l'espèce, de simples créanciers chirographaires saisissent le prix d'un immeuble vendu par leur débiteur, et hypothéqué à une créance passée par subrogation au notaire Reuter. Sans élever aucune prétention sur la créance cédée, ils soutiennent que la cession est, quant à eux, comme non avenue pour défaut de la mention marginale prescrite par l'article 5 de la loi hypothécaire de 1851.

Il est démontré qu'en général les créanciers chirographaires n'ont aucun intérêt à l'accomplissement de cette formalité, mais c'est dans l'espèce surtout qu'il leur est indifférent.

- L'inscription des sœurs Feyder subsistait toujours Etienne et la veuve Rocour étaient donc avertis de la charge qui grevait l'immeuble de Simon, et il ne leur importait nullement de savoir à qui l'hypothèque devait profiter, de savoir si la personne du créancier avait changé par l'effet d'une subrogation. Tout revient à décider s'il y a eu préjudice pour eux, car, comme on l'a dit dans la discussion de la loi, il n'y a, en cette matière, d'autres formalités substantielles que celle dont l'omission cause un tort réel aux personnes que la loi a voulu protéger.

Ce n'était pas la subrogation que Reuter opposait aux saisissants, mais l'inscription

même dont le bénéfice lui était acquis par la seule force de la loi.

Admettre indistinctement tous les tiers à exciper du défaut de mention prescrite par l'article 5, c'est mettre sur la même ligne les créanciers chirographaires et ceux dont le droit est garanti par une hypothèque.

Dans l'espèce il y a plus encore, et cela seul serait décisif. En opposant la libération acquise à Simon à l'égard des sœurs Feyder, Etienne et la veuve Rocour exerçaient le droit de leur débiteur et non un droit à eux propre. Or, il est incontestable que le débiteur cédé n'est pas un tiers dans le sens de l'article 5: et puisque Simon n'aurait pu se prévaloir de cet art. 5, ses créanciers n'étaient pas recevables à l'opposer de son chef.

La requête se terminait par cette considération que la nouvelle loi française du 23 mars 1855 sur la transcription décide formellement, en son article 3, la question dans le sens du pourvoi.

§ 2. Le défaut de transcription ne peut être opposé par les tiers que lorsqu'ils ont contracté sans fraude. Tel est le principe fondamental proclamé par l'article 1er de la loi de 1851.

On l'a déclaré dans la discussion de cette loi, l'acquéreur d'un immeuble qui, en traitant, aurait connaissance d'une aliénation antérieure, et qui exciperait ensuite de la non-transcription de celle-ci, serait repoussé par l'exception de dol. Le seul fait d'avoir connu l'acte, par quelque voie que ce soit, le constituerait en fraude, et il faudrait lui appliquer la décision de l'article 1141 du code civil sur la vente d'un objet mobilier faite successivement à deux personnes.

Il doit en être des mentions de cessions ou de subrogations comme des transcriptions. Ces formalités ont le même but, sont régies par les mêmes principes; elles forment un ensemble, un système complet en matière de transmissions immobilières. On ne peut admettre de différence entre elles sans rendre la loi illogique et contradictoire.

D'ailleurs les mesures de publicité établies par le législateur ne sont pas d'ordre public: son but est atteint si la mutation est connue par quelque autre moyen.

L'article 1690 du code civil, qui règle à l'égard des tiers l'effet du transport d'une créance, ne fait pas d'exception pour le cas de fraude cependant l'on s'est demandé s'il ne fallait pas tenir compte de la connaissance qu'un second cessionnaire aurait eue indi

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