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Allard à cinq jours de prison; le condamne, en outre, aux frais taxés, etc. »

Pourvoi par le garde Allard, qui propose trois moyens de cassation.

Premier moyen.

1° Violation de l'article 480 du code de procédure civile, no 3 et 4; 2o de l'art. 95 de la loi du 8 mai 1848; 3o des art. 99 et 100 de la même loi; 4o enfin des art. 145 et 165 du code d'instruction criminelle.

Le demandeur n'avait été cité à comparaître devant le conseil de discipline que comme prévenu d'avoir, nonobstant de nombreux avertissements, négligé de se pourvoir de l'équipement, contravention prévue et punie par les articles 64 et 95 de la loi du 8 mars 1848, et cependant le conseil de discipline l'a condamné comme coupable de ne s'être pas procuré un uniforme, contravention prévue par l'art. 63 de la même loi et sur laquelle il n'avait pas été appelé à se défendre.

Second moyen.

Contravention à l'arti

cle 480, no 5. du code de procédure civile et à l'article 97 de la constitution qui exigent que les jugements soient motivés, et aux articles 90 et 100 de la loi du 8 mai 1848.

Dans des conclusions par écrit et qui font partie du dossier, le demandeur avait demandé au conseil de discipline de l'admettre à prouver qu'avant le mois de novembre 18:55 il ne faisait point partie du contrôle de la garde civique de Saint-Josse-ten-Noode et qu'il n'a été porté sur le contrôle de la 4o compagnie que le 8 novembre.

De ces faits devrait résulter une exception péremptoire contre la poursuite s'ils venaient à être établis; ils ont été même reconnus vrais à l'audience par l'officier rapporteur.

Or, le conseil de discipline ne les a pas rencontrés, et il a implicitement rejeté l'offre de preuve du demandeur sans énoncer aucun motif pour justifier ce rejet.

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traventions en matière de garde civique. Il inquait Mangin, Traité de l'action publique, no 462, et trois arrêts de cassation de France des 6 mars, 9 mai 1835 et 6 août 1856 (1). M. l'av. gén. Faider a conclu à la cassation. Cette affaire, a-t-il dit, offre plusieurs irrégularités. La citation porte prévention: 1o d'avoir négligé de se pourvoir de l'équipement prescrit; 2o d'avoir manqué à trois exercices. Le jugement par défaut du 10 octobre 1855, en reproduisant le double chef de prévention, considérant que le prévenu est un garde très-récalcitrant et qu'il y a lieu d'appliquer une peine sévère, le condamne à trois jours d'emprisonnement. Le sieur Allard ayant formé opposition, présenta, en termes de défense, des moyens qui rencontraient directement les deux chefs de prévention. Au reproche d'avoir négligé de se pourvoir de l'équipement prescrit, il répondait qu'il était armé et équipé depuis longtemps à Tournai où il soutenait avoir conservé une résidence; au reproche d'avoir manqué à trois exercices, il répondait d'abord qu'il n'avait pas reçu de convocations, ensuite que, faisant partie de la garde civique de Tournai, l'une de ses deux résidences habituelles et la plus populeuse des deux, il n'était pas astreint au service à Saint-Josse-ten-Noode. Il offrait, d'ailleurs, de prouver qu'avant le mois de novembre 1835 il n'était pas inscrit au contrôle de la compagnie.

Dans cet état de la cause, le conseil a prononcé contradictoirement, le 19 décembre 1855, le jugement allaqué. - Les deux chefs de prévention sont reproduits dans l'expédition du jugement; le conseil saisi, en premier lieu, de la prévention dirigée contre le demandeur d'avoir négligé de se pourvoir de l'équipement, a condamné le demandeur pour ne pas s'être pourvu d'un uniforme, et de ce chef il lui inflige une amende de 75 fr. - Or, ceite amende est comminée par l'article 65 de la loi, et l'article 65 n'est ni invoqué, ni mentionné, ni inséré dans le jugement, ce qui, aux termes de l'article 163 du code d'instruction criminelle, combiné avec l'article 100 de la loi sur la garde civique, est un chef de nullitė; et, d'une autre part, en condamnant à l'amende pour défaut d'uni

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trine a été constamment suivie en France; quant à la cour de cassation de Belgique, elle n'a pas varié sur ce point. Voy. Bull, et Jurisprudence du XIXe siècle, 1838, 1, 122, et la note relative à la jurisprudence française; 1844 (id., 1, 459 ) ; 1850 (Bull. et Pasic., 1, 59); 1851 (id., 1, 80 et 116).

forme, le jugement ne statue pas sur le chef de prévention d'avoir négligé de se pourvoir de l'équipement, c'est-à-dire des armes et des accessoires que la loi distingue soigneusement de l'uniforme et qu'il est impossible de confondre avec lui. De ce chef encore

il y a nullité du jugement, puisque la prévention n'est pas purgée. Or, s'il y a lieu de casser de ce chef, il faut casser le jugement tout entier, car les moyens de défense du prévenu sont, suivant ses conclusions, communs aux deux chefs de prévention, et il est impossible de les diviser; en effet, s'il est vrai que le demandeur, comme il a offert de le prouver, a réellement deux résidences alternatives, l'une à Tournai et l'autre à Saint-Josseten-Noode, et s'il a le droit d'invoquer l'article 8 de la loi, il n'est pas plus tenu de se pourvoir de l'équipement à Saint-Josse-tenNoode que de se rendre aux exercices, aux revues et aux inspections d'armes dans cette commune. Les moyens de la défense comme les considérants du jugement s'appliquent aux deux faits; s'il y a une peine à prononcer pour négligence de se pourvoir de l'équipement comme pour ne pas s'être rendu aux exercices, c'est évidemment parce qu'il sera établi que le demandeur n'a pas réellement une résidence à Tournai, et dans ces termes la prévention ne doit pas être divisée et elle doit être renvoyée tout entière à un nouveau conseil de discipline. - D'après ces considérations, nous concluons à ce qu'il plaise à la cour casser le jugement attaqué, ordonner la restitution de l'amende et renvoyer l'affaire devant un conseil de discipline composé d'autres juges.

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ARRÊT.

LA COUR; Sur le moyen de cassation puisé dans la violation des articles 1er du code d'instruction criminelle, 95 et 95 de la loi du 8 mai 1848, en ce que le conseil de discipline a condamné le demandeur comme coupable d'une contravention pour laquelle il n'avait été cité ni poursuivi par la partie publique :

Attendu que, par l'exploit de citation du 6 oct. 1855, le demandeur n'avait pas été cité comme prévenu d'avoir omis de se pourvoir d'un uniforme, contravention prévue et punie par l'article 63 de la loi du 8 mai 1848, mais sous la prévention d'avoir négligé de se pourvoir de l'équipement malgré les nombreux avertissements lui adressés à ce sujet, ce qui ne pouvait constituer qu'une contravention prévue et punie par les articles 64 et 93 de la même loi;

Attendu que l'action publique n'appar

tient qu'aux fonctionnaires auxquels l'exercice en est confié par la loi; que l'article 95 de la loi du 8 mai 1848 a établi auprès des conseils de discipline de la garde civique des officiers rapporteurs chargés d'exercer les fonctions du ministère public; que c'est à ces officiers seuls qu'appartient le droit de saisir les conseils de discipline de la connaissance des contraventions qu'ils leur défèrent en matière de garde civique, et que ces conseils ne peuvent se saisir d'office de la connaissance d'une contravention sur laquelle le prévenu n'a pas été appelé à se défendre par la partie publique ;

Attendu qu'il résulte de ce qui précède que le conseil de discipline de la garde civique de Saint-Josse-ien-Noode, en condamnant le demandeur à une amende de 75 fr. comme coupable d'une contravention à l'article 65 de la loi du 8 mai 1848 pour laquelle il n'avait pas été cité, a commis un excès de pouvoir et contrevenu expressément aux articles 1er du code d'instruction criminelle et 95 de la loi du 8 mai 1848 et 13 juillet 1853.

Sur le moyen de cassation puisé dans la violation de l'article 97 de la constitution, en ce que le conseil de discipline a écarté, sans énoncer aucun motif, l'offre faite par le demandeur de prouver certains faits d'où devait résulter une exception péremptoire contre la poursuite:

Attendu que, par des conclusions prises à l'audience et déposées sur le bureau du conseil de discipline de la garde civique, le demandeur avait conclu à être admis à prouver qu'il n'avait été inscrit au contrôle de la garde et de la 4o compagnie que depuis le 8 novembre 1855; que dès lors il n'avait pu être convoqué aux exercices des 13 et 27 mai et 5 juill. 1855 et n'avait pu se rendre coupable d'aucune contravention en n'assistant pas auxdits exercices;

Attendu que le conseil de discipline a écarté implicitement ces conclusions et n'a donné aucun motif de ce rejet, en quoi il a contrevenu expressément à l'article 97 de la constitution;

Par ces motifs, casse et annule le jugement rendu, le 19 décembre 1855, par le conseil de discipline de la garde civique de SaintJosse-ten-Noode; ordonne que le présent arrêt sera transcrit sur le registre du conseil de discipline de la garde civique de SaintJosse-ten-Noode et que mention en sera faite en marge du jugement annulé; renvoie la cause et les parties devant le même conseil composé d'autres juges pour y être statué

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JURÉS. SERMENT DE NE COMMUNIQUER AVEC

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PERSONNE. RAPPEL PAR LE PRÉSIDENT. TÉMOIN PARENT. FEMME de l'accusé. AUDITION. POUVOIR DISCRETIONNAIRE. MINISTÈRE PUBLIC.-PAROLE DONNÉE POUR DEVELOPPER L'ACCUSATION. LISTE DES TÉMOINS ÉPUISÉE.

1o Lorsqu'un témoin cité à la requête de l'accusé n'a pas été notifié au ministère public et que l'accusé y renonce sans que, de son côté, le ministère public requière son audition comme témoin, si cette personne est ensuite entendue en vertu du pouvoir discrétionnaire du président, elle ne doit ni ne peut prêter serment. (Code d'instr. crimin., art. 269 et 315.)

2o Lorqu'une affaire portée devant la cour d'assises nécessite plusieurs séances, le président de la cour d'assises n'est pas tenu de rappeler aux jurés, à la fin de chacune de ces séances, le serment par eux prêté de ne communiquer avec personne jusqu'après leur déclaration. (Code d'instruct. crimin., art. 353 et 312.)

3o L'audition de la femme de l'accusé, à titre de renseignement et saus prestation de serment, n'est pas une cause de nullité de la procédure (1). (Code d'instr. crimin., articles 156 et 322.)

4° La loi n'exige pas qu'il soit constaté que, quand la parole a été donnée au ministère public pour développer les moyens de l'accusation, tous les témoins étaient entendus. (Code d'instruct. crimin., art. 335.)

(MOLLENICKS, G. LE MINISTÈRe public.)

Mollenicks, condamné par arrêt de la cour d'assises de Bruxelles à la peine de mort pour

(1) Jurisprudence constante. Voy. Bull. et Jur, du XIXe siècle, 1839, 1, p. 181 et 546; 1841,

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crime d'assassinat, s'est pourvu en cassation. Six moyens étaient proposés. Premier moyen. Violation des art. 269, 517, 515 et 324 du code d'instr. crim., en ce que le témoin Martin Vanden Branden, régulièrement cité à la requête de l'accusé, et à l'audition duquel ce dernier a renoncé sans opposition de la part du ministère public, a été entendu sans prestation de serment et à titre de renseignement.

On ne peut, disait le demandeur, faire aucune distinction entre les témoins à charge et ceux à décharge (cass., 21 juillet 1836). A défaut d'opposition de la part du ministère public, à l'audition d'un témoin à décharge dont le nom ne lui a pas été notifié, ce témoin doit être entendu, à peine de nullité, sous la foi du serment et non à titre de simple renseignement, peu importe que l'accusé ait renoncé à son audition. (Cass., 13 janvier 1820; 25 nov. 1815; 30 juin 1850; 30 juin 1857 [t. 1er, 1838, p. 358]; 14 mars 1833; 4 avril 1855; 30 avril 1819; 28 mars 1844 [t. 2, 1845, p. 414]; 16 sept. 1850; 3 sept. 1835; 13 mai 1856; 21 juillet 1836 [t. 1er, 1837, p. 461]; 5 nov. 1836, [t. 1er, 1837, p. 240]; 1er avril 1857 [t. 1er, 1838, p. 548]; 15 juillet 1842 [t. 2, p. 218]; 17 mai 1844 [t. 1er, 1845, p. 62]; 17 sept. 1854; 16 déc. 1830; 26 déc. 1811; 16 janv. 1812; 24 avril 1812; 4 juin 1812; Carnot, sur l'article 317 [t. 2, p. 487, no 2]; Morin, Dictionnaire de droit criminel, vo Témoin, p. 710; De Serres, Manuel des cours d'assises.)

Or, le ministère public, loin de s'être opposé à l'audition du témoin Vanden Branden, a requis lui-même cette audition, après que l'accusé y avait renoncé.

Et la simple renonciation à l'audition d'un témoin ne le dépouille pas de son caractère de témoin, quand même l'accusé, après l'avoir fait citer régulièrement, aurait demandé qu'il déposât à titre de simple renseignement, si le ministère public ne s'est pas opposé à son audition comme témoin assermenté. Son témoignage étant acquis tant à l'accusation qu'à la défense, il ne peut perdre la qualité de témoin qu'autant qu'une incapacité légale lui surviendrait (cass., 13 brum. an vin; 17 septembre 1856); qu'autant qu'une décision de la cour d'assises l'en dépouillerait (cass. belge, 5 janvier 1831, Descamps, et 6 février 1852, Faure; Legraverend, t. 2, 1842, p. 622); par conséquent est nul l'arrêt

1, p. 154,554 et 562; 1842, 1, 72, 577; 1844, 1, 19; 1848, 1, 395; Pasic., 1851, 1, 581.

de condamnation, si, dans ce cas, le témoin a été entendu sans prestation de serment et à titre de renseignement. (Voy. les mêmes arrêts des 13 brum. an vi et 17 sept. 1836, ainsi que les arrêts précités. Voy. aussi cass., 12 déc. 1840 [t. 2, 1842, p. 622]; 11 nov. 1830, De Lannoy; 9 mai 1822, Chambor; 14 janvier 1842, t. 1er, p. 678, Chamboulive, et De Serres, loc. cit.)

Deuxième moyen. Violation des articles 353 et 312 du code d'instr. crim., en ce que lorsqu'une affaire est de nature à occuper plusieurs séances de la cour d'assises, le président doit, à peine de nullité, rappeler aux jurés, à la fin de chaque séance, et au moment où la cour se sépare, le serment solennel qu'ils ont prêté au commencement de la première audience de ne communiquer avec personne (Legraverend, t. 2, p. 187, et cass., 12 avril 1832).

Les procès-verbaux ne constatent pas l'accomplissement de cette formalité substantielle, et leur silence sur une formalité prescrite par la loi donne droit de conclure qu'elle n'a pas été remplie.

Ainsi décidé par de nombreux arrêts cités au répertoire général du Journal du Palais, v Cour d'assises, t. 4, ch. 18, p. 855.

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Tous les arrêts qui ont décidé que les personnes mentionnées en l'article 322 du code d'instr. crim. peuvent être entendues aux débats en vertu du pouvoir discrétionnaire du président, sont motivés sur ce que l'article 269 du même code autorise, d'une manière générale et sans restriction, les présidents des cours d'assises à faire appeler aux débats, pour déposer sans prestation de serment, toutes les personnes qu'ils supposeraient pouvoir donner quelques renseignements utiles à la manifestation de la vérité.

« Il nous a toujours semblé, dit Carnot, sur l'article 322 du code d'instr. crim., que c'est donner trop d'extension à ces termes toutes personnes qui se lisent en l'art. 269 du code d'inst. crim., que d'en faire une aussi large application, le législateur n'ayant pu vouloir blesser toutes les règles du bon sens, de la morale publique et de la justice en autorisant l'appel des parents à déposer dans les procès de leurs parents » (et que dire d'une femme qui vient en pleine cour d'assises réclamer en quelque sorte la tête de

son mari!)« lorsque l'exception sort de la nature même des choses, elle n'a pas besoin de se trouver écrite dans la loi. »

Ajoutez aux paroles de Carnot que l'article 322 du code d'inst. crim. est une véritable exception à la règle tracée par l'article 227. Si telle n'eût pas été l'intention formelle du législateur, la disposition de cet article 227 eût suivi et non précédé celle de l'article 522.

Carnot s'élève avec une grande force contre cette jurisprudence qui permet au président, en vertu de son pouvoir discrétionnaire, d'entendre, à titre de renseignement, l'une des personnes mentionnées en l'article 322.

Dans le procès criminel de Mollenicks, la déposition de la femme n'a-t-elle pas pénétré le public d'un sentiment d'indignation et de profond dégoût? N'est-ce pas à cette déposition inouïe, révoltante, que Mollenicks doit en partie sa condamnation à la peine capitale? « On a beau dire que le jury n'est pas tenu de s'en rapporter aux déclarations des personnes appelées aux débats pour y donner de simples renseignements, car le jury n'est pas tenu non plus de s'en rapporter aux déclarations des témoins assermentés; mais si le jury n'est pas tenu de s'y rapporter, rien ne peut mettre obstacle à ce qu'il s'y rapporte. Si c'est d'ailleurs une chose inutile, pourquoi violenter les termes de la loi pour lui faire dire une chose aussi contraire à la morale publique? car il n'est pas moins immoral d'appeler aux débats le fils contre le père, le père contre le fils, le mari contre la femme, la femme contre le mari, pour y donner des renseignements que pour y faire une déposition assermentée; c'est toujours appeler en témoignage le fils contre. le père, le père contre le fils, le mari contre la femme, la femme contre le mari; c'est toujours mettre le fils, le père, la femme, le mari, entre la conscience et les liens de famille; c'est toujours les mettre dans l'alternative forcée d'en imposer à la justice, ou de conduire leur père, leur fils, leur époux à l'échafaud» (Carnot sur les articles 322, 156 et 269 du code d'instr. crim.); c'est fournir quelquefois à ces haines ardentes, implacables, qui surgissent au sein du foyer domestique, la triste occasion de les assouvir impunément; car, dégagés de tout serment, à l'abri des peines que la loi porte contre le faux témoin, déposant à titre de simple renseignement, un frère irrité contre son frère, un père contre son fils, une femme contre son mari, pourront, sans crainte aucune, donner un libre cours à leurs sentiments de

rivalité, de jalousie, d'animosité, de vengeance. L'affaire Mollenicks en offre un triste et frappant exemple.

Quatrième moyen (1).— Violation des articles 395, 396, 397, 599, 594, 400, 401 du code d'instr. crim., et de l'article 8 de la loi du 15 mai 1838, en ce que le jury de jugement n'a pas été légalement formé.

Il résulte des pièces de l'instruction qu'au jour indiqué pour l'ouverture de la session du quatrième trimestre de 1835, la liste des jurės titulaires se composait de trente, plus quatre jurės supplémentaires; que, par arrêt en date du 12 novembre 1855, six jurés ont été dispensés, de façon que la liste a été réduite à vingt-quatre jurés effectifs, et que c'est cette liste ainsi réduite qui a été notifiée à l'accusé avec la mention en marge des jurės dispensés.

com

Ne fallait-il pas, à peine de nullité, pléter, aux termes de l'article 395 du code d'instr. crim., le nombre de trente jurés? Cela parait évident.

Si, pour une cause quelconque (Carnot sur l'article 395 du code d'instr. crim.), la liste des jurés se trouve réduite à moins de trente au jour indiqué pour l'ouverture de la session, il faut suivre ce qui est ordonné par l'article 395; cela résulte de ces mots dans tous les cas; de sorte qu'il ne peut s'élever, sous ce rapport, aucun incident capable de retarder la composition du tableau du jury. Pour savoir si la liste se trouve réduite à un nombre moindre que celui de trente, il faut commencer par prononcer sur les dispenses et les excuses qui ont été proposées, car la liste doit se composer au moins du nombre de trente jurés non dispensés et non excusés. Le jugement à porter sur les excuses et les dispenses est donc une opération préliminaire; elle doit se faire dans la chambre du conseil ; tous les juges de la cour d'assises doivent y prendre part, après avoir entendu le procureur général. »

Vainement dira-t-on qu'une liste de vingtquatre jurés effectifs a été notifiée à l'accusé la veille du jour déterminé pour la formation du tableau; qu'il est constaté par le procès-verbal que vingt-quatre jurés effectifs étaient présents lors du tirage au sort du jury de jugement, et que ce nombre est suffisant; que ces jurés sont les mêmes que ceux dont les noms ont été portés sur la liste signi

(1) Le conseil du demandeur avait, à l'audience, renoncé aux quatrième et cinquième moyens.

fiée à l'accusé, qu'à cet égard, il ne peut y avoir ni doute, ni équivoque, et que la loi n'exige pas autre chose, nous disons avec la loi, nous disons avec Carnot, que non-seulement la loi exige autre chose, mais ordonne à M. le président de la cour d'assises de compléter, dans tous les cas, le nombre de trente jurés, si, au jour indiqué pour l'ouverture de la session, il y a moins de trente jurés présents non excusés ou non dispensés; nous disons que lorsque la loi a fixé un nombre, il faut s'y tenir strictement, sans quoi tout devient arbitraire, et que prétendre que la loi n'exige autre chose que la notification aux accusés, dans le délai voulu, d'une liste de vingt-quatre jurés effectifs, c'est lui faire dire le contraire de ce qu'elle prescrit en termes clairs et précis, c'est violer un texte formel.

Et qu'on ne dise pas que l'inobservation de la formalité prescrite par l'article 395 du code d'instr. crim. n'a pu nuire à l'accusé. Il en résulte pour lui un immense préjudice, en ce sens que le nombre des jurés étant réduit à vingt-quatre, le droit de récusation se trouve ainsi singulièrement restreint, et que tels et tels jurés que l'accusé eùt indubitablement récusés ont été forcément acceptés par lui. L'affaire Mollenicks en offre encore un exemple frappant, car si le nombre de trente eût été complet, il serait resté dans l'urne huit noms au lieu de deux, après que l'accusé avait épuisé son droit de récusation, et, selon toute probabilité, les noms de MM. les avocats.... que la défense avait intérêt à écarter, et qui seuls restaient dans l'urne, n'auraient pas été désignés par le sort pour faire partie du jury de juge

ment.

L'article 595 du code d'instr. crim. a été introduit en faveur de l'accusé, de sa défense; il ne faut donc pas l'interpréter contre lui, et le restreindre sans nécessité.

Cinquième moyen.— Violation des mêmes articles, en ce que les jurés, dispensés ou excusés, n'étant plus censés faire partie de la liste, la notification de cette liste à l'accusé avec la mention qu'ils sont dispensés ne remplit pas le vœu de la loi, quand même ces dispenses seraient légales et que les accusés auraient connu, en temps utile, les noms des vingt-quatre jurés effectifs et ceux des jurés dispensés.

Les noms des jurés dispensés sont radiés de la liste avec leurs numéros; ils sont comme s'ils n'étaient pas. Donc peu importe à l'accusé que ces noms-là lui soient notifiés; mais ce qui lui importe beaucoup, c'est que

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