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Mais cet examen appartient plutôt au législateur qu'au juge.

Le juge doit interpréter la loi suivant l'esprit du législateur et s'il paraît certain que celui-ci n'a entendu régir qu'un ordre restreint d'intérêts, il doit se renfermer dans les mêmes limites.

Or, quelque généraux que soient les termes du code, quelque respectable que soit l'autorité de l'arrêt de cassation de la cour de Liége du 18 mai 1828 (Recueil de Liége, vol. 11, p. 175), nous croyons que l'interprétation de l'arrèt attaqué est la seule qu'on puisse admettre aujourd'hui.

Cette interprétation, qu'a admise la cour de cassation de France (30 juin 1827 [Sirey, 1827, 1, 458]), a été acceptée par les auteurs, et elle ne semble pas faire doute (1).

Cette interprétation est confirmée par l'argument tiré de l'art. 245 du code pénal, expliqué d'ailleurs par Noailles (Locré, XV, 359). Elle est confirmée encore par l'argument tiré de l'art. 248, relatif au recèlement des criminels (Rauter, no 393).

Elle est conforme d'ailleurs au système d'extradition réglé par le décret du 25 octobre 1811 (Répertoire de Merlin, vo Extradition).

Le pourvoi argumente des lois de 1791 et de l'an ; mais ces lois, considérées d'ailleurs comme incomplètes, n'en disent pas plus que le code pénal, qui a des termes également généraux, mais pro subjectâ materiâ.

Le pourvoi argumente encore de quelques dispositions de la loi du 1er octobre 1833 (art. 3 et 7), qui règlent la liberté provisoire du détenu étranger et la prescription de l'action publique d'après la loi belge en cas d'extradition, et il soutient que, pour apprécier la gravité du crime commis à l'étranger, il faut aussi consulter la loi belge. Nous ne pouvons admettre cet argument: des dispositions expresses dirigent le juge dans les cas prévus par les articles 3 et 7, tandis que la loi est muette sur le cas spécial qui nous occupe en ce moment.

Il faut donc en revenir au principe fondamental de l'arrêt de la cour de cassation de France qui rappelle qu'une loi pénale ne saurait être étendue à des cas qu'elle n'a pas expressément prévus et réglés.

D'après ces considérations, le ministère public a conclu au rejet du pourvoi.

(1) Chauveau, vol. 2, 2o part., p. 276; Rauter, n 391.

ARRÊT.

LA COUR; Sur le moyen de cassation consistant dans la violation des art. 257 et 235 du code pénal, en ce que l'arrêt attaqué a décidé que les peines portées par ces articles ne sont pas applicables au cas où le détenu évadé par la négligence de son gardien est un étranger arrêté en vertu de la loi sur les extraditions;

Attendu que les articles 237 et suivants du code pénal ne prononcent des peines contre ceux qui, préposés à la conduite, au transport ou à la garde des détenus, ont, par négligence ou connivence, favorisé leur évasion, que dans certains cas spécialement déterminés et pour chacun desquels ils graduent la peine d'après l'importance de la cause de la détention que subissait la personne évadée; que ces cas sont exclusivement: 1o ceux où l'évadé était, soit prisonnier de guerre, soit prévenu ou condamné à raison de délits de police ou de crimes simplement infamants (art. 238); 2o ceux où les détenus évadés ou l'un d'eux étaient prévenus, accusés ou condamnés à raison d'un crime de nature à entraîner une peine afflictive à temps (art. 239); el 3o ceux où les évadés ou l'un d'eux sont prévenus, accusés ou condamnés à raison d'un crime de nature à entraîner la peine de mort ou des peines perpétuelles (art. 240);

Attendu que ces articles ne prévoient pas les cas où les évadés étaient détenus pour toute autre cause; qu'ils ne prononcent nommément aucune peine pour les cas où les personnes évadées étaient condamnées pour contraventions de simple police, détenues pour dettes ou arrêtées en vertu de la loi sur les extraditions;

Attendu que les art. 237 et 239, dont l'application a été requise contre le défendeur devant la cour de Bruxelles, subordonnent cette application à la double condition que le détenu évadé soit prévenu, accusé ou condamné à raison d'un crime, et que ce crime soit de nature à entraîner une peine afflictive à temps, ce qui ne peut s'entendre que d'un fait qualifié crime par la loi belge et d'une peine afflictive à temps prononcée pour ce crime par la même loi;

Attendu que le fait de banqueroute fraudu leuse commis dans les Pays-Bas par Francke, habitant de ces pays,, qui s'est évadé par la négligence du défendeur, n'est pas qualifié crime par la loi belge, et que, d'après cette loi, ce fait ne peut donner lieu à l'application d'aucune peine en Belgique;

Attendu que la convention d'extradition

conclue entre la Belgique et les Pays-Bas, le 25 octobre 1845, non plus que la loi sur les extraditions du 1er octobre 1853, ne qualifie crime le fait de banqueroute frauduleuse commis dans les Pays-Bas et ne détermine la nature de la peine applicable à ce fait;

Attendu qu'aucune peine ne peut être prononcée qu'en vertu de la loi; que les lois pénales sont de stricte interprétation, et que si, d'après l'art. 3, § 3, de la loi du 1er octobre précitée, l'étranger arrêté en Belgique et dont l'extradition est demandée par son gouvernement, peut réclamer la liberté provisoire, et si le juge belge, saisi de sa réclamation, doit, dans ce cas, qualifier le fait commis en pays étranger comme il le serait d'après la loi belge, s'il avait été commis en Belgique, cette disposition exceptionnelle introduite en faveur de la liberté ne peut être invoquée pour étendre, par analogie, l'application de la loi pénale à un cas qu'elle n'a pas expressément prévu;

Par ces motifs, rejette le pourvoi.

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blics (en séance publique du conseil communal), en imputant au sieur Charles-Joseph Raimond Lor, bourgmestre dudit Ath, des faits qui, s'ils existaient, l'exposeraient à des poursuites criminelles ou correctionnelles, ou même l'exposeraient seulement à la haine des citoyens.

"Lesdites calomnies étant contenues en certain écrit en date du 29 novembre 1854, lequel est signé par les demandeurs et qu'ils ont tous déclaré bien connaître. >>

La cour d'appel, en annulant un jugement d'incompétence rendu sur cette poursuite par le tribunal de Tournai, avait, par arrêt du 26 avril 1856, ordonné qu'il serait procédé devant elle à l'instruction et au jugement de la cause, et, le 14 juin, statuant au fond par défaut, elle avait prononcé en ces termes :

<< Attendu que les prévenus se sont rendus coupables de calomnie envers le sieur Lor, bourgmestre d'Ath, dans l'exercice de ses fonctions, à la séance publique du conseil communal de cette ville, du 29 novembre 1855, en imputant entre autres audit sieur Lor, dans un écrit lu en leur présence à cette séance à haute voix par le prévenu Deneubourg, en son nom et au nom des autres prévenus, ainsi que tous l'ont reconnu dans l'instruction et devant la cour:

«Que le gouvernement a dû être induit « en erreur par des rapports faux, menson«gers, injurieux pour les électeurs qui ont « honoré les prévenus de leurs suffrages, hu<<miliants pour les élus, en faisant supposer « que nul d'entre eux n'avait ni les connais"sances ni l'honorabilité nécessaires pour

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remplir les fonctions de bourgmestre et « dont l'auteur, tout le monde en a la con«viction, ne saurait être que celui sur lequel est tombé le choix du gouverne

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<<ment. »

« Attendu que ces imputations faites méchamment et dont la preuve légale n'est pas rapportée, exposeraient, si elles existaient, tout au moins le sieur Lor au mépris ou à la haine de ses concitoyens;

<< Attendu que les prévenus se sont aussi rendus coupables du délit d'outrages par paroles tendant à inculper son honneur ou sa délicatesse envers le même sieur Lor, bourgmestre d'Ath, dans l'exercice de ses fonctions, à la séance publique du conseil communal d'Ath, du 29 novembre 1835, en imputant au sieur Lor: « qu'il n'a jamais « été un homme de paix ; qu'il est sans fixité « dans ses opinions politiques; qu'il a toujours été antipathique à la population;

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« qu'il ne peut jamais devenir un homme | solidairement et par corps aux frais des « de paix, lui qui a été le confident, sinon

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l'inspirateur des articles violents écrits par

« M. Taintenier contre le bourgmestre M. De«lescluse; qu'il a suscité des tracasseries au « bureau de bienfaisance qui ne sont pas « encore terminées, par les conseils qu'il a « donnés à feu M. Masson, en lui impútant, a contrairement à la vérité : « qu'avant le «2 novembre 1855 il n'avait pris part à

« aucune souscription ouverte par l'auto« rité en faveur des pauvres. »

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«En lui reprochant : « qu'il était libéral en « 1856, catholique en 1845, conservateur « en 1848, etc., et qu'à défaut d'autre cou«leur à arborer, il s'est présenté aux élec«teurs de 1851 comme l'homme de tout le monde, en dehors de tous les partis politi<«< ques; » et en lui reprochant : « qu'il est « venu occuper un siège à l'hôtel de ville « avec la certitude que sa présence va exci«ter de profondes défiances; renouveler les « scènes regrettables de 1850, raviver cette <«< irritation passionnée et troubler le calme « si nécessaire à la maturité des délibéra«<tions; »

« Attendu que cet écrit a été transcrit, sur la décision prise par les prévenus en ladite séance du conseil communal, en leur qualité de conseillers communaux, dans le procès-verbal qui a été tenu dans cette séance, en substituant au mot mensonger, prononcé à la séance publique du conseil communal, le mot inexact;

«Attendu que les prévenus n'ont pas comparu à l'audience de ce jour, sur l'ordre qui leur avait été donné à l'audience d'hier;

«La cour, statuant par défaut, déclare J. B. Delescluse, J. B. Thémon, Ed. Delmotte, Ph. Deblois, Ant. Desmet - Patte, F. Deneubourg et Ed. Thémon-Dessy coupables de calomnie et d'outrages par paroles envers un bourgmestre dans l'exercice de ses fonctions, délit ci-dessus spécifié ; et vu les articles 367, 368, 371, 374, 222, 223, 52 et 55 du code pénal; 194 et 565 du code d'instruction criminelle et 15 du décret du 20 juillet 1831, lus à l'audience par M. le président et conçus comme suit:... condamne J. B. Delescluse, J. B. Thémon, Ed. ThémonDessy à un emprisonnement de trois mois; dit que tous les trois, à l'expiration de leur peine, seront interdits pendant cinq ans des droits mentionnés en l'art. 42 du code pénal; condamne Fr. Deneubourg à deux mois d'emprisonnement et Ed. Delmotte, Ph. Deblois et Ant. Desmet-Patte à un mois d'emprisonnement; condamne tous les prévenus

deux instances. »

Tous les condamnés, ayant formé opposition à cet arrêt, prirent, devant la cour, les conclusions suivantes :

<< Attendu que les imputations du chef desquelles les inculpés, tous conseillers communaux de la ville d'Ath, sont prévenus de calomnie et d'outrage envers le sieur Lor, bourgmestre de la même ville, résultent d'un écrit qui n'est autre qu'un acte émané du conseil communal d'Ath régulièrement constitué;

« Qu'en effet, dans la séance publique de ce conseil, dùment convoqué et réuni, en date du 29 novembre 1855, l'écrit dont il s'agit a été lu par l'un des conseillers, tant en son nom qu'au nom de tous ses collègues présents, et qu'il a été relaté dans le procèsverbal de la séance, procès-verbal ultérieurement approuvé en séance du 21 décembre suivant;

<< Attendu qu'aux termes de la loi du 24 décembre 1789, celui qui se croit personnellement lésé par quelque acte d'un corps municipal doit recourir, pour obtenir droit, à l'autorité administrative supérieure et que c'est à elle seule qu'il peut exposer ses sujets de plainte ;

<< Attendu que, par application de cette disposition légale, il a toujours été jugé en France que les tribunaux sont incompétents pour connaître de la plainte de celui qui se croit lésé par un acte émané d'un corps municipal; que spécialement il a été décidé qu'il en doit être ainsi en matière de calomnie et de diffamation;

«Attendu que l'article 60 de la loi du 14 décembre 1789, ou tout au moins le principe qu'il énonce, n'a cessé d'être applicable en Belgique; que, loin de l'abroger, les dispositions de la loi communale du 30 mars 1856 lui ont donné une consécration nouvelle;

«Attendu que, dans le système contraire. quiconque, à tort ou à raison, se croirait lésé par un acte émané d'un conseil communal, aurait nécessairement le droit d'attraire devant les tribunaux de répression tous les membres de ce conseil présents à l'adoption de l'acte dénoncé ;

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la séparation des pouvoirs consacré par la loi constitutionnelle;

«Par ces motifs, plaise à la cour recevoir l'opposition formée par les prévenus sous la réserve expresse de tous droits et moyens contre l'arrêt prononcé par défaut à leur charge le 14 juin 1856, et statuant sur ladite opposition, dire et déclarer pour droit que la cour est incompétente pour connaitre de la prévention dirigée contre les prévenus, avec décharge de tous frais. »

A la suite de ces conclusions, arrêt du 26 juillet, ainsi conçu : "Vu l'opposition...

« Vu les conclusions...

« Attendu que les faits de la prévention sont prévus et punis par le code pénal et que le code d'instruction criminelle en règle le mode de poursuite aussi bien en ce qui concerne les fonctionnaires, que relativement aux autres citoyens;

« Attendu qu'aux termes de l'article 24 de la constitution, nulle autorisation préalable n'est nécessaire pour exercer des poursuites contre les fonctionnaires publics et qu'elle établit d'ailleurs en principe la séparation des grands pouvoirs qui émanent de la nation;

«Attendu qu'il suit de ce qui précède que les lois invoquées par les prévenus sont abrogées et que la cour est compétente pour connaître de l'action dirigée contre eux;

«Par ces motifs, se déclare compétente et, vu son arrêt en date du 14 juin 1856, ordonne qu'à l'audience du 31 juillet prochain les prévenus présentent tous leurs moyens, même au fond, pour être statué par elle comme il appartiendra. »

Pourvoi en cassation fondé sur la violation de l'article 60 de la loi du 14 décembre 1789, des articles 86 et 87 de la loi communale du 30 mars 1836, de l'article 15, titre II, du décret des 16-24 août 1790, de la loi du 16 fructidor an III, ainsi que sur la violation du principe constitutionnel de la séparation des pouvoirs, et sur la fausse application de l'article 24 de la constitution.

Les demandeurs, disait-on, sont prévenus de s'être rendus coupables du délit de calomnie, le 29 novembre 1855, en la séance publique du conseil communal d'Ath, dans un acte authentique et public ou dans un écrit, en imputant au sieur Lor, bourgmestre d'Ath, des faits qui, s'ils existaient, l'exposeraient à des poursuites criminelles ou correctionnelles ou seulement à la haine ou au mépris de ses concitoyens; lesdites calomnies

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contenues dans un écrit en date du 29 novembre 1855, signé par les prévenus.

D'avoir infligé, auxdits jour et lieu, par paroles, audit sieur Lor, alors dans l'exercice de ses fonctions de bourgmestre, ou à l'occasion de cet exercice, des outrages tendant à inculper son honneur ou sa délicatesse.

En fait, l'écrit incriminé n'est autre, en réalité, qu'un acte du conseil communal d'Ath. Le conseil avait été régulièrement convoqué au 29 nov. 1855. Il était réuni en séance publique. Les formalités ordinaires pour l'ouverture de la séance dûment remplies, le plus jeune des conseillers, M. Deneubourg, demande la parole et commence, en son nom et au nom de tous ses collègues présents, la lecture d'un écrit où, tout d'abord, il est dit que c'est le conseil communal de la ville d'Ath qui, justement froissé de l'arrêté du gouvernement qui nomme, hors de son sein, le bourgmestre Lor, éprouve l'impérieux besoin de protester contre une nomination si exceptionnelle.

Arrivé à la fin du premier paragraphe, dénoncé comme calomnieux, M. Deneubourg est interrompu par le bourgmestre qui proteste contre les derniers mots de ce paragraphe et demande qu'ils soient actés au procès-verbal.

Le conseil déclare, à l'unanimité, que M. Deneubourg parle au nom de tous les conseillers présents et que l'écrit dont il donne lecture est signé d'eux et sera transcrit au procès-verbal.

M. le bourgmestre, après avoir déclaré qu'il en fera tel usage qu'il jugera convenable, rend la parole à M. Deneubourg qui continue et achève la lecture de l'écrit dénoncé.

Le procès-verbal de la séance du 29 novembre relate en entier, avec les incidents de la discussion, l'écrit dont il s'agit, et, à la séance suivante, en date du 21 décembre, ce procès-verbal est lu et approuvé dans la forme voulue.

Au surplus, la cour d'appel de Bruxelles (chambre correctionnelle) a constaté ellemême, dans son arrêt par défaut en date du 14 juin 1856, que l'écrit reproché aux prévenus a été transcrit, sur la décision prise par les prévenus, le 29 novembre 1855, à la séance du conseil communal, en leur qualité de conseillers communaux, dans le procès-verbal qui a été tenu à cette séance.

Donc, l'objet de la prévention, le corps du délit est un acte adopté en séance du conseil communal d'Ath par les conseillers commu

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naux présents, agissant en cette qualité, acte qui a été transcrit au procès-verbal de la séance et consigné au registre des délibérations du conseil communal d'Ath.

En droit, les demandeurs soutiennent que les tribunaux sont incompétents pour connaître de l'action dirigée contre eux, et qu'en jugeant le contraire, l'arrêt dénoncé a violé expressément l'article 60 de la loi du 14 décembre 1789 et par suite les articles 86 et 87 de la loi communale du 50 mars 1856, et implicitement le principe constitutionnel de la séparation des pouvoirs et les lois qui le consacrent, en appliquant faussement, au surplus, l'article 24 de la constitution.

Il n'eût guère été difficile de diviser le moyen présenté; mais toute l'argumentation reposant en définitive sur 1 incompétence du pouvoir judiciaire dans l'espèce, cette division aurait eu pour effet d'obliger à de fréquentes répétitions qu'on a voulu éviter.

Aux termes de l'article 60 de la loi du 14 décembre 1789, le citoyen qui croit être personnellement lésé par quelque acte d'un corps municipal, pourra exposer ses sujets de plainte à l'autorité administrative supérieure qui y fera droit.

On sait que la publication partielle de la loi du 14 décembre 1789, relative à la constitution des municipalités, a été ordonnée, en Belgique, pour les articles 1, 14, 15, 50, 51, 59, 60 et 61, par arrêté des représentants du peuple, en date du 18 frimaire an iv.

Déjà Loyseau, dans son traité intitulé Des offices, livre V, chapitre 7, no 51, avait dit : « Les actes que font les échevins étant actes de gouvernement et non de justice, doivent être expédiés sommairement et en forme militaire, sans qu'il soit besoin de les verbaliser au long et y garder la procédure et formalité de la justice contentieuse; et s'ensuit aussi que de ces actes, il ne doit point y avoir d'appel pour ce que l'appel n'a lieu proprement qu'ès actes de justice contentieuse; mais il se faut pourvoir contre iceux par voie de plainte qu'on peut faire aux supérieurs et principalement au roi et à son conseil; et il faut, en ce cas, si le roi l'ordonne, que les échevins viennent rendre raison de ce dont on se plaint d'eux. »

Ainsi, bien avant que le principe eût été formulé en disposition législative, on reconnaissait que, par la nature des choses, le pouvoir judiciaire est incompétent pour connaître des griefs que peut infliger à un citoyen personnellement un acte émané d'un

conseil municipal et que c'est aux supérieurs qu'il se faut pourvoir par voie de plainte, comme s'exprime Loyseau.

Le président Henrion de Pansey, dans son traitė Du pouvoir municipal, ch. 20, fait observer que les officiers municipaux peuvent choquer des intérêts individuels de deux manières par des délibérations collectives, et par des actes d'exécution et de simple régie.

« La défense, ajoute-t-il, est également autorisée dans les deux cas; mais comme dans l'un la réclamation doit être portée devant l'administration supérieure, et que dans l'autre c'est aux tribunaux ordinaires qu'il appartient de statuer, ce que nous avons à dire à cet égard fera la matière de deux chapitres différents. >>

Dans le chapitre suivant, il commence par rappeler qu'il a étendu aux délibérations des municipalités la règle qui défend aux tribunaux de s'immiscer dans la connaissance des actes administratifs. « Il en doit être ainsi, » dit-il, et il cite Loyseau à l'appui de son opinion. « Enfin, ainsi le veut la loi » et il cite l'article 60 de celle du 14 décembre 1789.

Puis il poursuit en ces termes : « Peutêtre n'est-il pas inutile d'appeler un moment l'attention sur la différence qui existe entre cet article et le 61° de la même loi. Aux termes de ce dernier, si l'administration supérieure croit que la plainte est fondée, elle doit la renvoyer devant les tribunaux : elle n'a pas le droit de la juger. Au contraire, l'article 60 l'autorise à faire droit sur les réclamations qui sont portées devant elle, après avoir vérifié les faits et pris l'avis du souspréfet.

« Le motif de cette différence s'aperçoit aisément.

« Dans l'article 60, le législateur n'a en vue que le préjudice que peuvent occasionner à des tiers les délibérations d'un corps municipal, préjudice qui peut être réparé par une délibération qui annule la première. L'objet de l'article 61 est d'une tout autre gravité; il y est question de délits ou de crimes qui ne peuvent être jugés et punis que par des cours d'assises ou des tribunaux de police correctionnelle. »

Enfin, dans le chapitre 22, M. Henrion de Pansey insiste encore sur la distinction à faire entre les officiers municipaux délibérant collectivement sous la présidence du maire, et ce même fonctionnaire ou ses adjoints agissant comme chargés de tous les

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