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LIVRE PREMIER.

DES PERSONNE S

TITRE PREMIER.

De la Jouissance et de la Privation des Droits civils.

[ Décrété le 17 Ventôse an XI. Promulgué le 27 du même mois. ]

CHAPITRE PREMIER.

De la Jouissance des Droits civils.

Article 7. L'EXERCICE des droits civils est indépendant de la qualité de Citoyen, laquelle ne s'acquiert et ne se conserve que conformément à la loi constitutionnelle.

Article 8. Tout Français jouira des droits civils.

Leg. 17, ff. de statu hominum.

Article 9. Tout individu né en France d'un étranger, pourra, dans l'année qui suivra l'époque de sa majorité, réclamer la qualité de Français; pourvu que, dans le cas où il résiderait en France, il déclare que son intention est d'y fixer son domicile; et que, dans le cas où il résiderait en pays étranger, il fasse sa soumission de fixer en France son domicile, et qu'il l'y établisse dans l'année, à compter de l'acte de sou

mission.

BACQUET, du droit d'aubaine, chap. 37, 38 et 39. = SOEFVE, tom. I, art. 2, chap. 72 et 87. Journal des audiences, arrêts des 28 août 1630, 25 février 1647,9 mars 1468.

Article 10. Tout enfant né d'un Français en pays étranger, est Français.

Tout enfant né, en pays étranger, d'un Français qui aurait perdu la qualité de

*

Français, pourra toujours recouvrer cette qualité, en remplissant les formalités prescrites par l'article 9.

Argum. cx leg. 19, ff. de statu hominum. Et leg. 24, eod.

Article 11. L'étranger jouira en France des mêmes droits civils que ceux qui sont ou seront accordés aux Français par les traités de la nation à laquelle cet étranger appartiendra.

BACQUET, du droit d'aubaine, chap. 7, n°. 2 et 4. Ordonnance des 2 mars 1431 et 1495, art. 88. Edit de Henri II, d'octobre 1554. Ordonnance de Blois, art. 357. (1)

=

Article 12. L'étrangère qui aura épousé un Français, suivra la condition de son mari.

Anc. cout. de Bourgogne, tit. 9, art. 7.

Article 13. L'étranger qui aura été admis par le Gouvernement à établir son domicile en France, y jouira de tous les droits civils, tant qu'il continuera d'y résider. (2)

Article 14. L'étranger, même non résidant en France, pourra être cité devant les tribunaux français, pour l'exécution des obligations par lui contractées en France

(1) La faculté de disposer et de recevoir par testament est du droit civil; c'est pourquoi, à Rome, l'étranger en était incapable. Leg. 1, in pr., ff. ad leg. falcid. Leg. 6, §. 2, ff. de hæredib. inst. Leg. 1, cod. eod. = ULPIAN, fragment, tit. 22, § 2.

Il faut remarquer que l'authentique Omnes cod. comm. de successionib., n'a pas dérogé à ce droit, comme quelques auteurs paraissent le penser. Cette authentique n'est point tirée des Novelles de Justinien, mais d'une constitution de Frédéric II, De statut. et consuetudinib., §. 10, qui ne fait point partie du corps de droit.

La plupart de nos coutumes déclaraient les étrangers incapables de recevoir par testamens. Châlons, art. 14; Laon, art: 9; Rheims, art. 34.

Mais ils pouvaient donner et recevoir entre-vifs. Rheims, art. 540; Laon, art. 8; Châlons, art. 14.

La succession de l'étranger appartenait au roi. Rheims, art. 342; Vitry, art. 72; Laon, art. 10; Châlons, art. 14.

Droit d'aubaine aboli par l'Assemblée Nationale, décret du 6 août 1790.

(2) L'autorisation du Gouvernement a le même effet que les lettres de naturalisation que le roi accordait aux étrangers dans l'ancienne monarchie.

avec un Français ; il pourra être traduit devant les tribunaux de France, pour les obligations par lui contractées en pays étranger envers des Français.

Cet article est contraire à la maxime reçue dans la procédure civile. Vid. Leg. 2, cod. de jurisdictione omnium judicum et de foro competenti. Lege 3, cod. ubi in rem actio exerceri debeat. Comment les étrangers doivent être cités en jugement. Voy. Ordonnance de 1667, tit. 2, art. 7. .

Article 15. Un Français pourra être traduit devant un tribunal de France, pour des obligations par lui contractées en pays étranger, même avec un étranger.

Article 16. En toutes matières, autres que celles de commerce, l'étranger qui sera demandeur, sera tenu de donner caution pour le paiement des frais et dommagesintérêts résultant du procès, à moins qu'il ne possède en France des immeubles d'une valeur suffisante pour assurer ce paiement.

Institut. de satisdationibus. Leg. unic., cod. eodem titulo. Leg. 46, §. 2, ff. de procuratoribus. Toto titulo, ff. judicatum solvi.

Coutume d'Abbeville, locale de Ponthieu, art. 37. BACQUET, du droit d'aubaine, chap. 17, mos. 1, 3 et 4.

CHAPITRE II

De la Privation des Droits civils.

SECTION PREMIERE.

De la Privation des Droits civils par la perte de la qualité de Français.

Article 17. La qualité de Français se perdra, 1o. par la naturalisation acquise en pays étranger; 2°. par l'acceptation non autorisée par le Gouvernement, de fonctions publiques conférées par un gouvernement étranger; 3°. par l'affiliation à toute corporation étrangère qui exigera des distinctions de naissance; 4°. enfin, par tout établis sement fait en pays étranger, sans esprit de retour.

Les établissemens de commerce ne pourront jamais être considérés comme ayant été faits sans esprit de retour.

Argum, ex leg. 17 et 19, §. 4, ff. de captivis et postliminio reversis.= BACQUET, du droit d'aubaine, chap. 2.

Article 18. Le Français qui aura perdu sa qualité de Français, pourra toujours la

recouvrer en rentrant en France avec l'autorisation du Gouvernement, et en déclarantqu'il veut s'y fixer, et qu'il renonce à toute distinction contraire à la loi française.

Article 19. Une femme française qui épousera un étranger, suivra la condition. de son mari.

Si elle devient veuve, elle recouvrera la qualité de Française, pourvu qu'elle réside en France, ou qu'elle y rentre avec l'autorisation du Gouvernement, et en déclarant qu'elle veut s'y fixer.

Anc. cout. de Bourgogne, tit. 9, art. 7.

Article 20. Les individus qui recouvreront la qualité de Français, dans les cas prévus par les articles 10, 18 et 19, ne pourront s'en prévaloir qu'après avoir rempli les conditions qui leur sont imposées par ces articles, et seulement pour l'exercice des droits ouverts à leur profit depuis cette époque.

Article 21. Le Français qui, sans autorisation du Gouvernement, prendrait du service militaire chez l'étranger, ou s'affilierait à une corporation militaire étrangère, perdra sa qualité de Français.

Il ne pourra rentrer en France qu'avec la permission du Gouvernement, et recouvrer la qualité de Français qu'en remplissant les conditions imposées à l'étranger pour devenir citoyen; le tout sans préjudice des peines prononcées par la loi criminelle contre les Français qui ont porté ou porteront les armes contre leur patrie. Argum. ex leg. 19, §. 4, ff. de captivis et postliminio reversis.

SECTION II.

De la Privation des Droits civils par suite des Condamnations judiciaires.

Article 22. Les condamnations à des peines dont l'effet est de priver celui qui est condamné, de toute participation aux droits civils ci-après exprimés, emporteront la nort civile.

Leg. 2, ff. de pænis Ulpian. Fragment, tit. 10, §. 3.

i.

Article 23. La condamnation à la mort naturelle emportera la mort civile.

Leg. 29, ff. de pænis.

Article 24. Les autres peines afflictives perpétuelles n'emporteront la mort, civile qu'autant que la loi y aurait attaché cet effet.

Article 25. Par la mort civile, le condamné perd la propriété de tous les biens qu'il possédait ; sa succession est ouverte au profit de ses héritiers, auxquels ses biens sont dévolus, de la même manière que s'il étoit mort naturellement et sans testament. Il ne peut plus ni recueillir aucune succession, ni transmettre, à ce titre, les biens qu'il a acquis par la suite.

par

Il ne peut ni disposer de ses biens, en tout ou en partie, soit donations entrevifs, soit par testament, ni recevoir à ce titre, si ce n'est pour cause d'alimens. Il ne peut être nommé tuteur, ni concourir aux opérations relatives à la tutelle. Il ne peut être témoin dans un acte solennel ou authentique, ni être admis à porter témoignage en justice.

Il ne peut procéder en justice, ni en défendant, ni en demandant, que sous le nom et par le ministère d'un curateur spécial, qui lui est nommé par le tribunal où l'action est portée.

Il est incapable de contracter un mariage qui produise aucun effet civil.

Le mariage qu'il avoit contracté précédemment est dissous, quant à tous ses effets civils.

Son époux et ses héritiers peuvent exercer respectivement les droits et les actions auxquels sa mort naturelle donneroit ouverture.

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Leg. 10, cod. de bonis proscriptorum. Novell. 17, cap. 12. Novell. 134, cap. ultim. = Authentic. bona damnatorum. = Cod. de bonis proscriptorum.

Leg. 13, ff. de bonorum possessione. Leg. 1, cod. de hæredibus instituendis. Leg. 17, ff. de pænis. Leg. 12, ff. de jure fisci Leg. 15. Leg. 31, §. 4, ff. de donationibus. Leg. 15, ff. de interdictis et relegatis.

Leg. 8, §. 1, 2, 4, ff. qui testamenta facere possunt. Leg. 1, §. 2, ff. de legatis 3. Leg. 3, ff. de his quæ pro non scriptis habentur. Leg. 16, ff. de interdictis et relegatis. Leg. 10, ff. de capite minutis. Leg. 8, ff. de annuis legatis. Leg. 22, §. 5, ff. mandati. = Argum. ex lege 2, cod. de legitimis tutoribus.

Leg. 5, §. 5, ff. de testibus. = Institut de testamentis ordinandis, §. 6.
Ordonnance de Moulins, art. 28, Déclaration de 1659, art. 6.

Leg. 1, cod. de repudiis et judicio de moribus sublato. Leg. 5, § 1, ff. de bonis damnatorum. = Argument. ex lege 22, §. 7, f. soluto matrimonio. Leg 15, §. 1, ff. de donationibus inter

virum et uxorem.

Article 26. Les condamnations contradictoires n'emportent la mort civile qu'à compter du jour de leur exécution, soit réelle, soit par elligie.

Les lois romaines regardaient le condamné comme mort civilement dès l'instant de la condamnation. Leg. 10, §. 1. Leg. 29, ff. de pænis. Leg. 6, §. 6, ff. de injusto rupto et irrito facto

testamento.

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