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Ils se

sidérés comme neutres, ainsi que tout leur personnel. — Ils seront respectés et protégés par les belligérants. feront reconnaître en hissant avec leur pavillon national le pavillon blanc à croix rouge. La marque distinctive de leur personnel dans l'exercice de ses fonctions sera un brassard aux mêmes couleurs. Leur peinture extérieure sera blanche avec batterie rouge. Ces navires porteront secours et assistance aux blessés et aux naufragés des belligérants, sans distinction de nationalité. Ils ne devront gêner en

aucune manière les mouvements des combattants. Pendant et après le combat, ils agiront à leurs risques et périls. Les belligérants auront sur eux le droit de contrôle et de visite; ils pourront refuser leur concours, leur enjoindre de s'éloigner, et les détenir si la gravité des circonstances l'exigeait. Les blessés et les naufragés recueillis par ces navires ne pourront être réclamés par aucun des combattants, et il leur sera imposé de ne pas servir pendant la durée de la guerre. » Cette reconnaissance officielle et internationale des Sociétés de secours ne laisse pas que d'être assez surprenante: leur assistance est rejetée sur terre, où ellés ont rendu de grands services, et admise sur mer, où elles n'ont pas fait encore leurs preuves. Quoi qu'il en soit, c'est un triomphe partiel qui se complétera forcément, suivant l'espoir exprimé par M. Moynier (1). Seulement, il faut assimiler les navires hospitaliers des Sociétés de secours aux bâtiments de commerce servant à l'évacuation des blessés, quant aux effets de la neutralité qui les couvre, et étendre la disposition de l'art. 10 aux blessés et aux naufragés recueillis par ces navires hospitaliers; sans cela, «<les navires des Sociétés se trouveraient dans un état d'infériorité vis-àvis des bâtiments de commerce, ou même des hôpitaux de l'État, infériorité qui rendrait leur concours peu enviable pour les gouvernements, puisque tous les hommes recueillis et soignés à leur bord seraient forcément perdus pour les armées (2). »

L'art. 14 reconnaît à chaque belligérant le droit de suspendre la Convention à l'égard de son adversaire, dans le cas où il s'élève « une forte présomption que celui-ci pro

(1) Moynier, op. cit., p. 265; Cf. p. 157-158.

(2) Id., ibid., p. 269.

fite du bénéfice de la neutralité dans un autre intérêt que celui des blessés ou des malades; si cette présomption devient une certitude, la Convention peut même lui être dénoncée pour toute la durée de la guerre. » Il est difficile de dire ce qui constitue une forte présomption de fraude : cette présomption devra reposer sur des indices d'une gravité sérieuse, sur des faits fréquemment réitérés: le belligérant a pour s'éclairer le droit de visite, et c'est ce qui le rendrait inexcusable s'il suspendait ou dénonçait la Convention à la légère. Le gouvernement français cite, comme permettant d'invoquer l'art. 14, le cas où l'un des belligérants, sous le prétexte de transport de blessés, neutraliserait sous son pavillon une intercourse commerciale importante, qui pût influer d'une manière notoire sur les chances ou sur la durée de la guerre (Note précitée du 26 février 1869). 206. E). Navires de cartel. - Sont aussi exempts de capture les navires employés à l'échange des prisonniers, ou chargés de porter à l'ennemi des propositions de paix ou d'exécuter des stipulations arrêtées entre les deux belligérants. Ces navires, munis d'un pavillon parlementaire, sont connus sous le nom de navires de cartel. Les navires de cartel et leur équipage ont droit à des égards particuliers; ils sont protégés dans l'accomplissement de leur mission et dans leur voyage de retour, eundo et redeundo. Mais ils ne doivent être impliqués dans aucune opération commerciale; ils ne peuvent avoir à bord ni marchandises, ni munitions de guerre, ni armes autres qu'un canon pour faire des signaux. A ces conditions, ils sont reconnus inviolables et considérés comme neutres; toutefois l'accès des ports de guerre et des arsenaux militaires peut leur être interdit, suivant les exigences de la guerre. Les navires de cartel peuvent être des bâtiments de commerce ou appartenir à la marine militaire : dans l'un et l'autre cas, leurs prérogatives sont les mêmes; elles ont été spécialement affirmées dans les décisions des tribunaux anglais, et notamment dans les jugements de Sir W. Scott (1).

207. F). Paquebots-poste.

On a enfin proposé

(1) Phillimore, Comm., III, 2o éd., 1873, § 112-113, p. 181-183; Calvo, Droit int., III, 3e éd., 1880, p. 321-322, § 2118-2119. The Carolina, 6 Rob., p. 336; the Daifjie, 3 Rob. p. 141; la Gloire, 5 Rob., p. 192.

mais cela n'est pas encore admis de soustraire au droit de prise les paquebots-poste. Il est inutile d'insister, dans nn siècle de relations internationales, sur la faveur que méritent ces organes de la vie intellectuelle et morale de l'humanité, comme on a pu les appeler.

Dès 1833, une convention du 14 juin conclue entre la France et la Grande-Bretagne stipulait que les paquebots employés au transport des dépêches entre les deux pays, de Douvres à Calais, seraient reçus dans les ports de France et d'Angleterre comme vaisseaux de guerre et jouiraient des honneurs et des priviléges que réclament les intérêts et l'importance générale du service qui leur est confié; qu'ils ne pourraient être détournés de leur destination spéciale, c'est-à-dire du transport des dépêches, par quelque autorité que ce soit, ni être sujets à embargo ou arrêt de prince (art. 5). Aux termes de la même convention, « en cas de guerre entre les deux nations, les paquebots-poste des deux offices continueront leur navigation sans obtacle ni molestation, jusqu'à notification de la cessation de leur service faite par l'un des deux gouvernements; auquel cas il leur sera permis de retourner librement et sous protection spéciale dans leurs ports respectifs. » (art. 13) (1).

Depuis cette date, un assez grand nombre de conventions postales ont été conclues, d'où résultent pour les paquebotsposte des franchises et des immunités qui n'appartiennent de plein droit qu'aux vaisseaux de guerre, de sorte que ces paquebots tendent à former, comme le dit M. Esperson, une classe mixte entre les vaisseaux de guerre et les navires marchands. On peut citer la convention postale du 24 septembre 1856 entre la France et l'Angleterre, et celle du 3 mai 1869 entre la France et l'Italie; l'art. 6 de cette dernière convention porte : « Les paquebots, quand ils sont propriété de l'État, ou même simplement affrétés ou subventionnés par l'État, sont réputés vaisseaux de guerre dans les ports des deux pays où ils font escale et où ils entreraient accidentellement (2). »

(1) Martens, N. R., XIII, p. 107; p. 109. Cette convention suppose que les paquebots-poste employés entre Douvres et Calais sont bona fide propriété de l'État (art. 5, initio).

(2) Esperson, Diritto diplomatico et giurisdizione internazionale ma

208. Au point de vue de la protection à accorder aux paquebots-poste ennemis, il nous paraît nécessaire de distinguer trois cas. Premier cas. Le paquebot-poste fait communiquer les deux pays ennemis. Dans ce cas, il semble difficile d'aller plus loin que l'art. 13 de la convention du * 14 juin 1833, qui déclare les paquebots faisant le service postal entre Douvres et Calais exempts d'embargo, d'arrêt de prince, de toute réquisition et de toute molestation, jusqu'à ce que l'un des deux belligérants notifie à l'autre son intention de faire cesser le service, et qui, dans ce cas, assure le retour des paquebots dans leurs ports respectifs. Deuxième cas. Le paquebot-poste fait le service du transport des dépêches entre un pays ennemi et un pays neutre. Il va de soi que chaque belligérant pourra empêcher le départ de ses propres paquebots. Mais chacun d'eux pourrat-il intercepter les paquebots-poste ennemis? Il ne pourra être question d'intercepter les paquebots neutres, puisque les communications entre neutres et belligérants sont licites, en principe, sauf les restrictions relatives au blocus, à la contrebande de guerre et à ses analogues: le droit de visite fournit aux belligérants un moyen de contrôle suffisant. Mais nul doute qu'il soit possible, d'après la pratique actuelle, d'intercepter et de saisir les paquebots ennemis. Il nous semble qu'il serait à la fois nécessaire et sans inconvénients sérieux de les neutraliser, c'est-à-dire de les mettre sur la même ligne que les paquebots neutres: pour les uns comme pour les autres, les intérêts légitimes seront suffisamment sauvegardés par l'exercice du droit de visite. Troisième cas. Les paquebots transportent les dépêches entre deux parties du territoire du même belligérant, par exemple, entre l'Angleterre et les Indes, la France et l'Algérie. Ici, il va encore de soi que ce belligérant peut, à son gré, faire cesser ce service. Et l'autre belligérant? Il y aura souvent un grand intérêt, et nous ne croyons pas qu'il puisse s'engager à respecter ce service. Nous concluons donc. qu'il serait désirable de voir intervenir des conventions qui

rittima, vol. II, parte II, 1877, p. 118. Cf. Cauchy, Droit marit. int., II, p. 428-132: cet anteur ne s'occupe des paquebots-poste qu'au point de vue de la neutralité, et propose de les affranchir de la visite, au moins lorsqu'ils font leur service entre deux ports neutres.

assurent l'inviolabilité des paquebots-poste ennemis faisant le service du transport des dépêches entre le pays de chaque belligérant et un pays neutre aux conditions et sous les réserves admises à l'égard des paquebots neutres (1).

II

Qui peut saisir la propriété privée ennemie

sous pavillon ennemi?

209. Le droit de prise, ou pour parler plus exactement, le droit de saisie, ne peut être exercé, en principe, que par les forces publiques ou les autorités publiques de chaque belligérant. Par autorités publiques, nous entendons ici les autorités maritimes (en France, préfets maritimes, chefs du service de la marine, commissaires à l'inscription maritime) et les employés de la douane (Custom-house, en Angleterre). En temps de guerre, les employés de la douane britannique ont l'habitude de soumettre à un examen rigoureux les papiers des navires qui abordent dans les ports anglais; ils frappent souvent des saisies sur lesquelles la cour d'Amirauté est appelée à se prononcer : par moment, leur zèle peut rivaliser avec l'activité des croiseurs; dans la guerre de Crimée, un assez grand nombre de navires ont été condamnés grâce à eux: il s'agissait surtout de navires originairement ennemis vendus à des neutres dans des conditions qui ne trouvaient pas plus grâce devant la cour d'Amirauté que devant la douane des ports du Royaume-Uni. 210. Mais la cheville ouvrière des captures maritimes, c'est la marine militaire. Autrefois, c'étaient les corsaires : il n'en est plus de même aujourd'hui. La course est interdite par le droit international européen, et le droit de faire des

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(1) Cf., pour la distinction des cas ici énoncés, Renault, De la protection internationale des câbles télégraphiques sous-marins, R. D. I., 1880, p. 271-75.-Il est remarquable que le Landrecht prussien de 1794, encore en vigueur, déclare (I, Tit. 9, Ab. V, § 214-213) libre la propriété des sujets ennemis confiée à des bateaux-poste et à des paquebots de l'État qui se trouve en guerre avec leur nation. Bulmerincq, Le Droit des prises marit., R. D. I., 1878, p. 235; Bluntschli, Beuter., p. 56, R. D. I., 1878, p. 536.

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