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ceux qui feront comme nous éprouveront sans doute les pages brillantes, et contenues cependant, que l'auteur a consacrées à cette touchante figure du quinzième siècle, Jeanne-d'Arc. Il est, selon nous, difficile de mieux accorder avec les lumières de notre temps, les détails que nous donne sur la mission de Jeanne, l'ingénieux historien; se contentent d'être vrai il est toujours lumineux sans cesser d'être attachant : nous citerions volontiers, si le cadre dans lequel nous sommes retreint le permettait, quelques-unes de ces belles pages, au risque inême de devancer le plaisir du lecteur.

Oui, nous ne craignons pas de le dire; c'est la une œuvre qui restera, parce qu'elle est judicieusement pensée et chaudement écrite. Nous avons cru remarquer aussi que dans ce volume M. Michelet jugeait de plus haut les choses, ce qui est tout naturel, les années devant toujours ajouter à un si beau talent; ainsi nous ne croyons pas que rien puisse infirmer l'esquisse qu'il fait du quinziême siècle ; ce siècle y apparait ce qu'il est en effet, une époque de dé generation, poussée cependant par une autre qui s'avance et doit tout régénérer. Nous ne doutons pas que le volume que l'auteur doit prochainement consacrer à ce terrible niveleur, Louis XI, ne place son nouvel historien au nombre des grands penseurs, comme son pays l'a déjà placé au nombre de ses brillants et plus aimables écrivains.,

L'histoire de notre temps nous est racontée par un homme qui a presque droit de dire, quorum pars.. fui..... M. Louis Blanc est un correct et souvent profond écrivain ; il ne lui manque que de faire oublier un peu... le journaliste.

Dans le champ des fictions romanesques nous trouvons Mathilde, par M. Eugene Sue: il nous semble que l'auteur veut relier le passé du roman à son avenir; faire marcher de front la fiction et la réalité, le terrible de Mistriss Radcliff avec le réel introduit par l'école moderne: chose louable sans doute; car telle est notre nature, que nous avons de tout temps eu besoin de nous élever par l'imagination audessus des misères de notre condition. Mais cette fiction elle-même, tant cette

même nature est inflexiblement logique, cette fiction ne nous plaît qu'autant qu'elle est dans les limites du possible, qu'elle est vraisemblable. C'est pourquoi nous restons froids devant la poésie héroïque, nous attachant uniquement aux révélations qui font péné trer dans les profondeurs du cœur humain. Nous dirons donc à l'auteur de Mathilde, parce qu'il est un de ces hommes avec lesquels il faut compter que sa réalité y ressemble trop peu; qu'en général il outre les caractères, comme l'auteur de la Peau de Chagrin outre les choses, et l'auteur d'Indiana les situations. Une fois ces réserves faites, nous avouerons que Mathide est une lecture attachante; qu'on y rencontre de charmants détails; qu'il s'y trouve des pages si bien frappées qu'elles parlent aux yeux, comme ces toiles où de grands peintres ont jeté des pensées immortelles... témoin le chapitre intitulé: La Femme et la Belle-Mère; la vérité y est saisissante, et le style (autre mérite de M. Sue) est presque toujour pur, quoique chaud et coloré; témoin encore cet autre chapitre que l'auteur a intitulé, une Retraite et qui n'a que l'inconvénient de finir comme les beaux rêves du fénérateur d'Horace

Le docteur Herbeou, de M. Jules Sandeau, serait un livre original si Indiana n'existait pas : Riquemont c'est Delmare; le bon docteur, Ralph, et la jeune femme, l'héroïne du livre de Georges Sand. Aussi bien l'auteur de ce roman intéresse beaucoup lorsqu'il ne s'écarte pas de son modele; mais on s'égare avec lui dės qu'on le suit dans le dénouement. Ce-. pendant il faut reconnaître que le docteur Herbeau intéresse par quelques détails de la vie de province; et encore faut-il que l'auteur ne se laisse pas aller à certaines exagérations qui lui viennent trop souvent, ce qui est d'ailleurs, selon nous, le cachet de la littérature contemporaine.

Une Chaîne, par M. Scribe, et un Mariage sous Louis XV, par Alexandre Dumas, sont les deux grands événements de l'année pour le théâtre. La dernière de ces deux pièces est le revers de la Surprise de l'Amour de Marivaux; M. Dumas place après le mariage ce que son modèle fait se passer avant; et

la donnée ne laisse pas d'être piquante: comme il arrive aux amants de Marivaux, deux jeunes époux, mariés de la veille et presque sans se connaître, se trouvent amenés, par un concours de circonstances bien imaginées, à s'aimer d'un amour qu'ils n'avaient pas d'abord soupçonné. Le Mariage sous Louis XV a eu un grand nombre de représentations; c'est que là, comme ailleurs, comme dans Mademoiselle de Belle Isle, M. Alexandre Dumas a répandu à pleines mains de l'esprit, de l'intérêt et même du style sans être pour cela un grand peintre de caractères: M. Dumas n'aurait pas le temps; et dès lors aussi sans qu'il soit parvenu a sculpter de ces traits qui s'incarnentsi bien dans les mémoires, qu'ils en deviennent partie intégrante, comme il arrive aux maîtres de la scène.

Une Chaîne est le roman d'Adolphe transporté au théâtre, et rien ne prouve mieux, à notre avis, qu'il est des sujets qui n'y tiendront jamais leur place qu'autant qu'à l'imitation de la nature, on voilera ce qui doit toujours l'être. Quoi ! dans la vie privée, une femme si éprise qu'elle soit d'ailleurs, se murera toujours derrière sa naturelle pudeur, et vous voulez qu'au théâtre cette même femme n'ait plus aucune retenue; qu'elle nous dise, qu'elle nous crie pour ainsi dire à chaque instant « Je suis adultère. Il faut un public bien patient ou bien indifférent pour que, cinq actes durant, cette pauvre jeune coupable puisse impunément le procla mer ainsi tout haut. Chose singulière, ou plutôt chose bien compréhensible dans nos mœurs, qui veulent avant tout qu'on se sauve du ridicule, M. Scribe, d'ordinaire si habile, met en effet toute sa dextérité à garer la dignité du mari; en quoi M. Scribe est, il faut le reconnaître, plus habile que jamais ; mais il ne fait rien absolument rien,pour tirer le rideau sur cette femme ! C'est que l'auteur de tant de jolies pièces, tant de fois jouées, connaît son temps, son

parterre; temps et parterre chez lesquels le sens naturel s'est émoussé. Et puis là, comme dans le Mariage sous Louis XV, une aimable interprète (mademoiselle Plessis) sait unir à un talent qu'on ne saurait méconnaître, un don naturel, une beauté hors ligne, qui chez cette jeune artiste devient presque un autre talent. — Cependant le répertoire tragique a eu aussi sa pièce nouvelle ne pouvant employer le ressort qui fait mouvoir Polyeucte. M. Soumet a par cela mème manqué son Gladiateur: il en fallait faire un chrétien et un martyr.

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L'Odéon fait de louables efforts pour devenir en effet un second Théâtre fran çais; Un Jeune Homme, par M. Camille Doucet; Un Voyage a Pontoise, par MM. Gustave Vaez et Royer, voila, si notre mémoire nous sert fidelement, les deux productions à succès de son année théâtrale. La première de ces deux pièces ne marque pas d'une manière profonde; il s'agit d'un jeune homme entraîné par de perfides conseils. La donnée n'est pas neuve, mais la leçon est utile et elle se donne au public de l'Odéon. — Ajoutez à cela des vers faciles, gracieux, et cela suflira pour justifier tout l'ouvrage. Quant au Voyage à Pontoise, bien qu'il rappelle Le Voyage à Dieppe, il témoigne chez les auteurs, d'une certaine experience de la société ; mais pourquoi s'arrêtent-ils à la superficie? pourquoi ne pénétrer pas plus avant? et surtout pourquoi enchevêtrer leur action dans une foule d'incidents qui ne ressemblent en rien à cette réalité que le théâtre doit cependant rendre sans la copier précisément? C'est, au surplus, le travers de l'époque : il n'est plus d'action assez simple; on tient à égarer le spectateur dans une forêt d'énigmes; cela a pu réussir à M. Eugène Scribe, parce que, doué d'un sens exquis, les incidents frisent presque toujours le possible; il faut donc faire comme lui.

V. R. D.

NÉCROLOGIE,

QU

LISTE DES PRINCIPAUX PERSONNAGES MORTS EN 1841.

Le signe † vent dire mort; le signe ? que la date précise n'est pas connue.

JANVIER.

1er. Le baron Jacob de Hirsh, riche capitaliste, à Munich, le 25 décembre, âgé de 67 ans.

2. La baronne de Feuchères, †à Londres, âgée de 50 ans.

5. Kurruck-Sing, roi de Lahore, † le 5 novembre 1840.

6. M. A. de Ramalnelle, secrétaire du conseil général de la Banque de France, à Paris, âgé de 60 ans.

8. Le baron Bignon, pair de France, †à Paris; il était né en 1771.

... Le colonel Galalent, ancien député du Gers, † à Paris.

... Le baron Frain, ancien préfet des Ardennes, † à Paris.

11. Le comte Hulin, lieutenant-général en retraite, à Paris, âgé de 82

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Jonction du Rhin au Danube, † âgé de

43 ans.

25. M. A. Croizette, auteur dramatique, ancien régisseur du Vaudeville, † à Versailles, âgé de 75 ans.

28. Le général Comtellary, † à Paris.

FÉVRIER.

4er. Le baron de Cardeneau, maréchal-de-camp, ancien député, †à Thill.

M. F. J. Noël, préfet du HautRhin de 4800 à 1802, âgé de 85 ans, à Paris.

2. M. le baron Grenier, pair de France, à Riom, né à Brioude en 4753.

Ann hist, pour 1841. A pp.

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2. M. le comte A. de La Rochefoucauld, pair de France, † à Paris.

M. le inaréchal duc de Bellune, pair de France, à Paris, né à la Marche en 1766.

18. M. Leblond-Plassan, contreamiral, à Bordeaux.

Cb. William Paterson, amiral anglais, en Angleterre, âgé de 85 ans. 19

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ville, âge de 91 ans.

10. M. Thomas Barnes, principal
rédacteur du Times, à Londres, age
de 56 ans.

16. Le général comte de Latour-
d'Auvergne, ancien député, chevalier
de Saint-Louis, commandant de la Le-
ion-d'Honneur, à Castelnaudary.

M. Michel-François Xavier De-
camps, ami de Mirabeau, a Paris, àgé
de 75 ans.

19. Mariana-le-Galsa, célèbre pro-
fesseur de botanique. ¦ à Madrid.

23. Julien-Ursin Niemowilz, ilusue

8. M. Salomon du Chatelier, éve Polonais, à Paris, âge de 84 au>.
que d'Evreux, en cette ville.

20. Mlle Necker de Saussure, auteur
de l'Education progressive, † à Genève,
âgée de 76 ans.

23. Me la maréchale Clausel, à Au-
terive.

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M. Doublat, (Ernest), ancien re-
ceveur général des Vosges, a Au-
trey.

24. M. Charles-François Oudot, an-
cien conseiller à la cour de cassation,
conventionnel, †à Paris, âgé de 86

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25. M. Jacques Souberbielle, mem-
bre des 500, frere de M. Souberbielle,
célèbre lithotomiste, à Paris, âgé de
78 ans.

29. Le marquis de Grammoat, †à
son château de Villersexel.

26. Ernest de Schiller, le plus jeune
fils du grand poète, à Cologue, âgé
de 45 ans.

29. M. Jobert Lucas, messager d'Etat
à la Chambre des Députés, à Paris.

JUIN.

2. Lerouge, ex-dé putéconseiller a
la cour royale de Di jon, à Châlons.
4. Le duc de Doudeauville, i à
Paris.

Le médecin James Woodward, †
aux Etats-Unis, à Cincinati.

8. M. le baron d'Hannencourt, an-
cien officier de l'empereur, † à Fontai-
nebleau, âgé de 80 ans.

22. Le marquis de Geamboni, † ágé
de 78 ans.

JUILLET.

3. M. Wittmann, peintre distingué, t
à Strasbourg.

5. Gustave Muel, maître de forges, t
à Sionne.

5. M. Vrignoud, contre-amiral, ¦ à
Brest.

16. Lareine Frédérique-Louise-Caro-
line-Sophie-Alexandrine, née duchesse
de Mecklembourg.

23. Belmas, évêque de Cambrai, a
succombé dans la nuit.

AOUT.

17. Le docteur Forget, chirurgien-
major du corps des sapeurs.

SEPTEMBRE.

44. Bertin, rédacteur en chef du Journal des Débats, † âgé de 74 ans. Me Jubault, née d'Allercymble, vient de mourir.

OCTOBRE.

3. Henri V, prince de Monaco, duc de Valentinois, pair de France, † le 3 octobre, à Paris.

4. Lafargue, avocat, †à Paris.

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Manseau, docteur de l'hôpital de Saint-Méry, le 2 octobre, à Paris.

24. Louis Michel, sergent-major du 6 régiment d'infanterie, † le 2 septembre 4844.

24. Grillat, ancien receveur des Finances, à Paris, le 24 octobre 1841. 45. Ferrot Ferdinand, peintre, † å Saint-Pétersbourg.

29. Shelltz, lieutenant général, † le 27 courant.

30. Ropine Louis de Saint-Marie, chevalier de Saint Louis, † le 23 septembre, dans son château de SaintMartin, âgé de 67 ans.

NOVEMBRE.

4. Le comte de Celles, ancien préfet sous l'empire et beau-frère du maréchal Gérard, le 2 novembre.

6. Vatin, doyen des notaires de France, †à 91 ans.

... François-Claude-Antoine Lochèze, chevalier de la Légion-d'Honneur, ancien maire de Montbrison, † le 23 de ce mois, âgé 67 ans.

14. Delly, professeur au collége royal de Besançon, † à Besançon, le 10 novembre 1841.

12. Audouin, membre de l'Académie des Sciences, à Paris, le 12 novem. bre.

17. Picot, ancien rédacteur, † à Paris, le 12 novembre.

21. Dubois, ancien doyen, †à Paris.

DECEMBRE.

4. Ferlet, pair de France, vicomte, † le 30 novembre.

6. Lefebvre, ancien secrétaire gé néral du ministère des Finances, + le 6 décembre 1841, âgé de 78 ans.

19. Frayssinous, évêque de Hermopolis, premier aumônier du roi Charles X, † le 12 décembre 1844, âgé de 78 ans.

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