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Déc. 1804.

Napoléon

saisit la couronne des mains

du Pape

avait ceint la couronne des Césars, c'est-à-dire un simple laurier d'or. On admirait sa tête, belle sous ce laurier d'or, comme une médaille antique. Entré dans l'église, au son d'une musique retentissante, il s'agenouilla, et se rendit ensuite au fauteuil qu'il devait occuper avant de se mettre en possession du trône. Alors commença la cérémonie. On avait déposé sur l'autel la couronne, le sceptre, l'épée, le manteau. Le Pape fit sur le front de l'Empereur, sur ses bras, sur ses mains, les onctions d'usage, puis bénit l'épée qu'il lui ceignit, le sceptre qu'il remit en sa main, et s'appro– cha pour prendre la couronne. Napoléon observant ses mouvements, et comme il l'avait annoncé, terminant la difficulté sur les lieux mêmes, saisit la et la pose sur couronne des mains du pontife, sans brusquerie, mais avec décision, et la plaça lui-même sur sa tête. L'acte, compris de tous les assistants, produisit un effet inexprimable. Napoléon prenant ensuite la couronne de l'Impératrice, et, s'approchant de Joséphine prosternée devant lui, la posa avec une tendresse visible sur la tête de cette compagne de sa fortune, qui en ce moment fondait en larmes. Cela fait, il s'achemina vers le grand trône. Il y monta suivi de ses frères, qui soutenaient les pans du manteau impérial. Alors le Pape se rendit, suivant l'usage, au pied du trône pour bénir le nouveau souverain, et chanter ces paroles qui avaient retenti aux oreilles de Charlemagne dans la basilique de Saint-Pierre, quand le clergé romain l'avait soudainement proclamé empereur d'Occident: VIVATIN ÆTERNUM SEMPER AUGUSTUS.

sa tête.

A ce chant, les cris de Vive l'Empereur, mille fois répétés, se firent entendre sous les voûtes de NotreDame; le canon y joignit ses éclats, et apprit à tout Paris l'instant solennel où Napoléon était définitivement consacré, d'après toutes les formes convenues chez les hommes.

L'archichancelier Cambacérès lui apporta ensuite le texte du serment, un évêque lui présenta l'Évangile, et, la main sur le livre des chrétiens, il prêta ce serment qui contenait les grands principes de la Révolution française. Puis fut chantée une grand' messe pontificale, et la journée était fort avancée lorsque les deux cortéges regagnèrent les Tuileries, à travers un concours immense de peuple.

Telle fut cette auguste cérémonie, par laquelle se consommait le retour de la France aux principes monarchiques. Ce n'était pas un des moindres triomphes de notre Révolution, que de voir ce soldat sorti de son propre sein, sacré par le Pape, qui avait quitté tout exprès la capitale du monde chrétien. C'est à ce titre surtout que de pareilles pompes sont dignes d'attirer l'attention de l'histoire. Si la modération des désirs, venant s'asseoir sur ce trône avec le génie, avait ménagé à la France une liberté suffisante, et borné à propos le cours d'entreprises héroïques, cette cérémonie eût consacré pour jamais, c'est-à-dire pour quelques siècles, la nouvelle dynastie. Mais nous devions passer par d'autres voies à un état politique plus libre, et à une grandeur malheureusement trop restreinte.

Il y avait quinze ans que la Révolution avait

Déc. 1804.

Déc. 1804.

commencé. Monarchie pendant trois ans, république pendant douze, elle devenait maintenant monarchie militaire, fondée toutefois sur l'égalité civile, sur le concours de la nation à la loi, et sur la libre admission de tous les citoyens à ces grandeurs sociales rétablies. Ainsi avait marché en quinze ans la société française, successivement défaite et refaite, avec la promptitude ordinaire aux passions populaires.

FIN DU LIVRE VINGTIÈME.

LIVRE VINGT ET UNIÈME.

TROISIÈME COALITION.

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Séjour du Pape à Paris. Les Soins de Napoléon pour l'y retenir. flottes n'ayant pu agir en décembre, Napoléon emploie l'hiver à organiser l'Italie. Transformation de la République italienne en un royaume vassal de l'Empire français. - Offre de ce royaume à Joseph Bonaparte, et refus de celui-ci.—Napoléon se décide à poser la couronne de fer sur sa tête, en déclarant que les deux couronnes de France et d'Italie seront séparées à la paix.- Séance solennelle au Sénat. — Second couronnement à Milan fixé au mois de mai 1805.- Napoléon trouve dans sa présence au delà des Alpes un moyen de mieux cacher ses nouveaux projets maritimes. Ses ressources navales se sont accrues par une soudaine déclaration de guerre de l'Angleterre à l'Espagne. Forces navales de la Hollande, de la France, de l'Espagne. Hésitation Projet d'une grande expédition dans l'Inde. d'un moment entre ce projet et celui d'une expédition directe contre l'Angleterre. Préférence définitive pour ce dernier. - Tout est préparé pour exécuter la descente dans les mois de juillet et d'août. Les flottes de Toulon, de Cadix, du Ferrol, de Rochefort, de Brest, doivent se réunir à la Martinique, pour revenir en juillet dans la Manche, au nombre de soixante vaisseaux. Le Pape se dispose enfin à retourner à Rome. Ses ouvertures à Napoléon avant de le quitter. Réponses sur les divers points traités par le Pape. Déplaisir de celui-ci, tempéré toutefois par le succès de son voyage en France. Départ du Pape pour Rome, et de Napoléon pour Milan. Dispositions des cours de l'Europe. - Leur tendance à une nouvelle coalition. État du cabinet russe. Les jeunes amis d'Alexandre forment un grand plan de médiation européenne.-Idées dont se compose ce plan, véritable origine des traités de 1815. M. de Nowosiltzoff chargé de les faire agréer à Londres. Accueil qu'il reçoit de M. Pitt. Le plan de médiation est converti par le ministre anglais en un plan de coalition contre la France. Retour de M. de Nowosiltzoff à Pétersbourg. Le cabinet russe signe avec lord Gower le traité qui constitue la troisième coalition. La ratification de ce traité est soumise à une condition, l'évacuation de Malte par l'Angleterre. Afin de conserver à cette coalition la forme préalable d'une médiation, M. de Nowosiltzoff doit se rendre à Paris pour traiter avec Napoléon. Inutiles efforts de la Russie pour amener la Prusse à la nouvelle coalition. Efforts plus heureux auprès de l'Autriche, qui prend des engagements éventuels. Russie se sert de l'intermédiaire de la Prusse, afin d'obtenir de Napoléon des passe-ports pour M. de Nowosiltzoff. Ces passe-ports

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Janv. 1805.

Distribution des aigles

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pour sa personne.
nais déclaré vice-roi.

-

Enthousiasme des Italiens

· Couronnement à Milan. - Eugène de Beauhar- Fêtes militaires et visites à toutes les villes. Napoléon invinciblement entraîné à certains projets par la vue de l'Italie. Il projette d'expulser un jour les Bourbons de Naples, et se décide immédiatement à réunir Gênes à la France.-Motifs de cette réunion. Constitution du duché de Lucques en un fief impérial, au profit de la princesse Élisa. — Après un séjour de trois mois en Italie, Napoléon se dispose à se rendre à Boulogne, afin d'exécuter la descente. Ganteaume à Brest n'a pu trouver un seul jour pour mettre à la voile.-Villeneuve et Gravina, sortis heureusement de Toulon et de Cadix, sont chargés de venir débloquer Ganteaume, pour se rendre tous ensemble dans la Manche.— Séjour de Napoléon à Gênes.— Son brusque départ pour Fontainebleau. — Tandis que Napoléon prépare la descente en Angleterre, toutes les puissances du continent préparent une guerre formidable contre la France. La Russie, embarrassée par le refus de l'Angleterre d'abandonner Malte, trouve dans la réunion de Gênes un prétexte pour passer outre, et l'Autriche une raison pour se décider sur-le-champ. Traité de subside. -Armements immédiats obstinément niés à Napoléon. — Celui-ci s'en aperçoit, et demande des explications, en commençant quelques préparatifs vers l'Italie et sur le Rhin.—Persuadé plus que jamais qu'il faut aller couper à Londres le nœud de toutes les coalitions, il part pour Boulogne. Sa résolution de s'embarquer, et son impatience en ́attendant la flotte française - Mouvement des escadres. Longue et heureuse navigation de Villeneuve et de Gravina jusqu'à la Martini

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que. neuve.

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Premières atteintes de découragement chez l'amiral Ville- Brusque retour en Europe, et marche sur le Ferrol pour débloquer ce port. Bataille navale du Ferrol contre l'amirał Calder. - L'amiral français pourrait s'attribuer la victoire, s'il n'avait perdu deux vaisseaux espagnols. Il a rempli son but en débloquant le Ferrol, et en ralliant deux nouvelles divisions française et espagnole. Au lieu de prendre confiance, et de venir débloquer Ganteaume pour se rendre avec cinquante vaisseaux dans la Manche, Villeneuve déconcerté se décide à faire voile vers Cadix, en laissant croire à Napoléon qu'il marche sur Brest. — Longue attente de Napoléon à Boulogne. Ses espérances en recevant les premières dépêches du Ferrol. Son irritation lorsqu'il commence à croire que Villeneuve a marché vers Cadix. Violente agitation et emportement contre l'amiral Decrès. Nouvelles positives des projets de l'Autriche. Brusque changement de résolution. - Plan de la campagne de 1805. Quelles étaient les chances de succès de la descente, manquée par la faute de Villeneuve.— Napoléon tourne définitivement ses forces contre le continent.

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Trois jours après la cérémonie du sacre, Naà l'armée. poléon voulut distribuer à l'armée et aux gardes

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