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SUR L'ORIGINE DES IMPOTS,

LA CRÉATION DES RENTES SUR L'ÉTAT

ET

LA FONDATION DU CRÉDIT PUBLIC.

L'ADMINISTRATION des finances peut être considérée comme la première et la plus importante des sciences en matière de Gouvernement; car, de la sagesse ou du désordre de cette administration, dépend le salut de l'État. Sully disait, en parlant de l'administration des finances : « C'est le point le plus essentiel et le plus inté>> ressant du Gouvernement: c'est par le moyen » des finances que l'on fait tout, sans elles on ne » saurait rien faire; c'est de là que dépend le >> soulagement ou l'accablement des peuples; c'est » de là que dérivent les bons ou les mauvais » succès des desseins, des entreprises; c'est ce qui cause la grandeur ou la ruine des Em» pires. » Partout où les finances sont bien ad

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ministrées, règnent la sécurité, la tranquillité. Les contributions y sont modérées, réparties avec équité et supportées par tous les citoyens dans la proportion de leurs facultés : les dépenses sont strictement mesurées sur les besoins réels, et un fonds de réserve est ménagé pour les cas d'événemens désastreux ou d'attaque imprévue.

Sous quelque point de vue que l'on fasse envisager un système de finances, en dernière analise les revenus publics ne peuvent être que le produit des contributions levées sur le peuple d'une manière plus ou moins gênante pour les contribuables, selon qu'elles sont plus ou moins bien réparties, plus ou moins sagement proportionnées à leurs moyens. La nature des impôts, et l'équitable mesure des dépenses qui les occasionent, fondée sur les besoins réels, ont une grande influence sur le travail, et par conséquent sur la richesse nationale, dont il est la

source.

En remontant aux temps anciens, on voit les taxes payées par les nations qui se rapprochent de l'origine de la civilisation, d'abord simples et peu considérables comme les Etats naissans dont elles avaient à soutenir la faiblesse, puis s'accroître

et se multiplier sous différens noms, à mesure que l'esprit de conquête s'introduit, ou dès que l'autorité, jalouse de ses droits, juge à propos de les étendre et de les maintenir.

Nous passerons sous silence ce qui concerne les Assyriens, les Babyloniens et même les Egyptiens, parce que ces temps reculés n'offrent pas de notions assez certaines. On a cependant lieu de conclure de la somptuosité des édifices destinés au service public, et de l'opulence qui se déployait dans les solennités chez ces peuples au rapport des historiens, que leurs finances étaient dans l'état le plus prospère. On y voit en même temps l'origine des subsides établis sur les peuples vaincus, et l'on reconnaît que, dès lors, les taxes étaient réglées au dixième du produit des terres.

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Chez les Hébreux le droit des rois était de prendre le dixième des moissons, des vendanges et des troupeaux; ce que l'on peut considérer comme l'origine de la dîme ecclésiastique.

Cette même taxe sur les terres se retrouve dans toutes les républiques de la Grèce : à Athènes, les citoyens étaient divisés en quatre classes, selon chacun retirait de ses biens: on payait au

ce que

trésor public la dixième partie de son revenu, indépendamment d'une taxe sur les marchan

dises.

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Les finances de la Grèce reçurent beaucoup d'accroissement lorsque Athènes en fut devenue la métropole, et surtout au moment où l'on reconnut la nécessité d'avoir toujours sur pied des forces à opposer aux Perses qui donnaient une inquiétude continuelle à ces contrées. Aristides ayant été choisi d'un consentement unanime pour régler le subside destiné à cette dépense extraordinaire, ce vertueux athénien en fit la répartition avec tant de sagesse, que cette contribution, également agréable à tous les confédérés, fut appelée le bonheur de la Grèce, premier et peutêtre unique exemple qu'un impôt ait obtenu les applaudissemens de ceux qui en supportaient le poids.

Mais c'est aux Romains, devenus conquérans, que l'Europe a dû les principes et la législation qu'elle a suivie en matière d'impôts. Quoique la plupart des historiens attribuent la décadencé de ce mémorable Empire à des causes qui semblent étrangères aux finances, cependant on ne peut guère se refuser à reconnaître que le faste, la

cupidité des fonctionnaires, les vexations, la tyrannie; en un mot, les désordres qui en furent la suite, y contribuèrent beaucoup, en causant un relâchement dans tous les liens de l'Etat, et un grand découragement parmi les peuples.

Jusqu'à la 350° année de la fondation de Rome, les soldats ne furent point soudoyés par la répu blique ; ils allaient à la guerre à leurs frais, et ce ne fut qu'au siége de Veïes que les troupes commencèrent à recevoir une solde, auparavant elles vivaient aux dépens du pays qu'elles occupaient.

Les armées étaient nombreuses, et néanmoins les impôts étaient modiques; mais il ne faut pas perdre de vue que les pays subjugués fournissoient des subsides considérables; qu'une partie des territoires conquis se vendait pour indemniser l'Etat des frais de la guerre; que les richesses de Carthage, de la Sicile et des villes de l'Asie, ainsi que les sommes immenses qui provinrent de la conquête de la Macédoine, de l'Espagne, de la Grèce, de l'Afrique, de l'Egypte, etc., etc., furent portées dans le trésor et suppléèrent aux contributions ordinaires.

Les tributs habituels, imposés alors sur tant

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