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trop long-temps tout le secret de ceux qui disposaient de la fortune publique. On aperçoit sous François Ier une lueur de système financier. Avant lui on n'était point dans l'usage des emprunts perpétuels, des créations de charges, des augmentations de gages, etc.; mais la fâcheuse situation des affaires, jointe au goût de dissipation, et à la munificence de ce prince, firent employer ces ressources d'une manière plus nuisible qu'utile à la prospérité de l'État.

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Sully a été le premier administrateur véritablement habile que la France ait produit, et qui étonna l'Europe par sa sagesse, l'efficacité et la douceur de ses mesures. Nous voyons ensuite Colbert, allant de pair avec lui, tout en suivant un autre plan, parce que les circonstances étaient changées l'un et l'autre avait raison dans son système.

Tout a marché au hasard sans véritables principes jusqu'au milieu du siècle dernier, que les économistes ont, en hésitant, ouvert la carrière financière. Il est évident que ce sont ces laborieux écrivains, qui, tout en se jetant dans des écarts, ont mis sur la voie des vrais principes, et ont donné naissance à la science de l'écono

mie politique. Cette science est-elle arrivée à son point de perfection? non sans doute; mais la voilà maintenant établie sur des bases invariables et incontestables.

C'est déjà un hommage rendu aux vrais principes, que d'avoir donné du développement au système des contributions indirectes, et de l'avoir régularisé : car, une nature d'impôt qui se répartit sur tout le monde, en raison de la consommation de chaque individu, et se paie à mesure, au moment même de cette consommation, et, en quelque sorte, sans que le contribuable s'en aperçoive, doit paraître préférable à tout autre impôt qu'il faut payer d'époque en époque, et qui, au-delà de certaines bornes, peut devenir le fléau de l'agriculture et de l'industrie : mais l'organisation de la perception présentait et présente encore bien des difficultés.

La partie des contributions indirectes la plus délicate, et qui exigerait dans son organisation les connaissances les plus étendues, une expérience consommée, et une impartialité à toute épreuve, ce sont les douanes: parce qu'elles se rattachent à la haute politique, et que la prospérité de l'industrie et du commerce en dépend.

Nous nous abstiendrons de traiter ces hautes questions de finances elles sont au-dessus de nos forces, c'est seulement aux hommes éclairés qui ont étudié, approfondi et dirigé ces branches importantes de l'administration publique, qu'il appartient d'indiquer les améliorations dont elles sont susceptibles.

La véritable conquête de notre époque, c'est la création du crédit public, s'il n'est pas porté au point où il peut arriver, au moins on est sur la bonne voie.

Autrefois on débattait sérieusement la question de savoir s'il vaut mieux, dans le besoin, mettre des impôts nouveaux que de faire des emprunts. Aujourd'hui, d'après les principes du crédit, il ne peut plus rester de doute, qu'il vaut toujours mieux emprunter qu'imposer, surtout lorsque, par l'effet d'une bonne administration, par une sage disposition des fonds publics, on pourra trouver dans l'économie sur les dépenses, dans des dispositions d'ordre et dans des moyens créés par le génie, des ressources propres à fournir aux intérêts annuels de l'emprunt et à son amortissement.

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L'heureuse invention du crédit, et de l'art de diriger les emprunts a pour résultat, non-seulement de partager le poids d'une dette accablante entre les générations actuelles et les générations futures, mais encore de faire jouir la génération présente d'une foule de créations utiles, qui devront augmenter la prospérité des générations à venir.

On ne saurait fournir un exemple plus frappant de ces bons effets, qu'en considérant la déplorable situation de la France en 1815, après deux invasions ruineuses, et obligée, par les traités faits avec les puissances étrangères, de leur payer des indemnités montant à sept cents millions: en y joignant les frais d'entretien des troupes étrangères pendant leur séjour sur notre territoire, et les dégâts qu'elles avaient occasionés dans toutes les parties du Royaume, on peut évaluer la somme totale de la perte que la France s'est trouvé supporter dans cette cruelle occurrence, à deux cents millions au-delà de ce qu'on évalue le numéraire qu'elle possède. Si l'on eût réparti cette somme énorme sur les Français par forme d'impôt, il est évident qu'ils se seraient

trouvés dans l'impossibilité absolue de la remplir:

au lieu qu'en créant, à l'ombre du crédit public des rentes et des emprunts, qui ont attiré l'argent des étrangers eux-mêmes, nous nous sommes trouvés au pair, sans secousse et sans que notre agriculture, notre industrie et notre com→ merce en aient souffert d'une manière par trop sensible.

Il est encore des gens qui répètent sans cesse qu'il ne faut pas qu'un État contracte des dettes: c'est une erreur de routine. Que l'on se garde de comparer la situation d'un Gouvernement å celle d'un père de famille un particulier est toujours moins riche de ce qu'il doit, puisqu'il faut en définitive qu'il paie. Un Gouvernement au contraire est, en quelque sorte, plus riche de tout ce qu'il doit, quand la prospérité règne dans son sein, et qu'il remplit scrupuleusement tous ses engagemens; ensuite, réunissant sous sa main une grande masse de capitaux, il est jusqu'à un certain point le maître de régler le crédit public, qui est le thermomètre de toutes les opérations dans l'intérieur, et par suite au dehors: son propre intérêt le porte toujours à diriger lé

le

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