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porter des bateaux moyens; ensuite les Brassos, où l'on fait déjà le commerce par eau avec la Nouvelle-Orléans, au moyen de bateaux qui sortent dans le golfe du Mexique ; le rio Trinite colorado et enfin le rio del Norte. On peut envoyer, par le canal de çes rivières, un produit immense et très-varié à un entrepôt commun, tel que l'île de Galveston, ou s'arrêtent les bâtimens à trois mâts qui ne peuvent remonter les rivières à cause du banc de sable sur lequel il n'y a que 10 à 12 pieds d'eau.

La ville la plus importante de la province du Texas est San Antonio de Bejar, sur un affluent du rio du même nom. Cette partie est entièrement habitée par les Espagnols. Le terrain y est magnifique, et toutes les habitations arrosées à volonté par des conduits artificiels, qui font circuler dans tous les champs et jardins les eaux du rio et de plusieurs fontaines. Le principal commerce de ces provinces est celui des mules, que l'on fait passer aux ÉtatsUnis, et qui se vendent principalement dans la Louisiane, la Georgie et la Virginie. Ces pays, n'ayant jamais été parcourus par un voyageur savant, sont encore presque inconnus.

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M. Robert Owen, dans son Mémoire adressé à la république mexicaine et au gouvernement de l'État de Coahuila et Texas, cherche à démontrer que, par sa position comme par la nature du climat, du sol et de la population, ce pays est le plus favorable à l'établis– sement d'une espèce de gouvernement modèle, spécialement pour les peuples des deux Amériques, L'indépendance du Texas doit être garantie par le Mexique, les États-Unis et la Grande-Bretagne, afin d'y former une société dont le grand objet sera l'amélioration de la condition humaine. Ce projet s'appuie sur les considérations suivantes : que ce pays, formant les limites du Mexique et des États-Unis servira de barrière, et empêchera les différends entre les deux nations; qu'une nouvelle société y fera fleurir les arts et la paix, et sera préférable, dans l'intérêt de la république mexicaine, à une population sans connaissances ni moralité, etc., etc.

D'après les journaux de New York, du 1er septembre, le capitaine Austin a obtenu le privilége de la navigation du Rio-Grande del Norte, et il a commencé son premier voyage sur un bateau à vapeur jusqu'à Chihuahua, capitale de l'État de ce nom, distance d'environ 600 milles. On peut aller de la Nouvelle-Orléans à Matamores ou Refugio, sur le Rio del Norte, en trois ou quatre jours, et de là à Chihuahua, par la vapeur, dans le même espace de temps. L'Ariel, qui a quitté New-York à cet effet, est muni d'une machine de la force de trente-six chevaux, porte environ 100 tonneaux, fait II milles 1⁄2 par heure, et ne tire que 3 à 4 pouces d'eau. Quand les eaux sont hautes, un pareil bâtiment peut s'avancer sans obstacle jusqu'à 15 lieues de Santa-Fé. Ainsi, un voyage, qui jusqu'à présent a toujours demandé deux mois, pourra être achevé en quinze jours. W.

OBSERVATIONS Sur diverses parties de la côte et de l'intérieur du Pérou, extraites des Mémoires du général Miller, au service de la république péruvienne. 2 vol. in-8°. Londres 1828.

La côte du Pérou est une langue de terre déserte et sablonneuse d'environ 500 lieues, sur une largeur qui varie de 7 à 50 lieues, suivant que les chaînes des Andes qui l'entourent s'approchent ou s'éloignent de l'Océan pacifique. Le sol en est très-inégal, et semblerait avoir été couvert autrefois par les eaux qui l'arrosent; dans certaines parties, le sable s'est amoncelé en masses qu'on pourrait appeler des montagnes, si le voisinage des Cordilières permettait cette comparaison. Ce désert est coupé par des rivières et des ruisseaux qui sont distans l'un de l'autre de 20 à 90 milles, et dont les bords sont peuplés en proportion de la facilité qu'on y trouve pour faire de l'eau. Dans la saison des pluies, les grosses rivières débordent considérablement, et sont traversées sur des radeaux connus

sous la dénomination de balsa. Quelques-unes ont leur embouchure dans la mer; mais la plupart des petits affluens servent à arroser quelques parties cultivées, ou vont se perdre dans l'immensité de ces solitudes, que les pluies ne rafraîchissent jamais. Là, aucune trace d'animal vivant ne se laisse apercevoir; à peine rencontre-t-on quelques vestiges d'une pauvre végétation; et un ruis– seau, apparaissant à de longs intervalles, est bientôt épuisé, après un cours d'une centaine de pas. Les bords rudes et escarpés des rivières ne permettant pas d'en détourner les eaux pour arroser les terres, toute cette contrée reste inculte. Aussi, nul voyageur ne s'aventure sans guide au milieu de ces steppes abandonnées, où les seules indications sont quelques ossemens épars çà et là, appartenant à des bêtes de somme qui ont péri dans le trajet. Enfin d'énormes colonnes de sable, soulevées par le vent, causent une telle incommodité, qu'on ne peut avancer avec le visage décou

vert.

Les vaquianos ou guides se perdent souvent eux-mêmes, et à moins qu'un hasard ne les ramène dans la bonne route, ou ne leur fasse apercevoir quelque autre voyageur, ils périssent infailliblement, et leur sort est aussi ignoré que celui d'un navire englouti au milieu de l'Océan. Ces vaquianos sont cependant trèshabiles, et se règlent sur des signes qu'eux seuls peuvent connaître, tels que le cours des astres ou le souffle des vents. Malgré toutes les précautions, des détachemens et même des corps entiers se sont perdus pendant un temps considérable.

En 1823, les débris de l'armée du général Alvarado se rendant par mer des Puertos intermedios à Lima, l'un des bâtimens de transport, monté par trois cents hommes de cavalerie, fit naufrage à douze lieues au sud de Pisco et quatorze lieues ouest de l'Océan. Tous parvinrent à s'échapper, mais ils s'égarèrent en cherchant à gagner la ville, et restèrent perdus pendant trente-six heures. Dès que cet accident fut connu à Pisco, on envoya un régiment de cavalerie au secours des naufragés. Ces malheureux, commandés

par

le colonel Lavalle, qui survécut à ce désastre et en a raconté les détails, errèrent pendant plus de deux jours en proie à toutes les horreurs de la faim et de la soif; plusieurs d'entre eux périrent avant d'avoir pu atteindre quelques datiers qui annonçaient le voisinage d'une source; les autres, auxquels il restait à peine assez de force pour étancher la soif qui les dévorait, tombèrent au pied de ces arbres hospitaliers, où ils demeuraient étendus dans un morne et affreux désespoir. Les cavaliers de Pisco les aperçurent dans cet état, et parvinrent difficilement à leur administrer des secours efficaces. Plus d'un tiers avait déjà succombé,

On a vu des soldats tomber morts, en rendant le sang par le nez et les oreilles. Dans une marche de Arica à la vallée de Lluta (distance de quatre lieues seulement), un détachement de six cents hommes en perdit six de cette manière, et une quarantaine d'autres aurait eu le même sort, si l'on ne s'était hâté de le prévenir par d'abondantes saignées (1).

Sur la Puna (2).

Dans les régions montagneuses de l'intérieur, la nature offre des difficultés, qui, quoique d'un genre différent de celles éprouvées sur la côte, n'en sont pas moins dangereuses, surtout pour les mouvemens des troupes. Les huttes élevées pour servir de haltes dans ces districts immenses et inhabités, ne pouvant contenir qu'un petit nombre de soldats, les corps plus nombreux étaient obligés de bivouaquer dans des endroits où le thermomètre descend chaque nuit, pendant toute l'année, bien au-dessous de zéro, et monte souvent à midi jusqu'au 90o (Fahrenheit), (32°, 22 centig.), On peut se faire une idée de ce que doivent souffrir des gens accoutumés à la chaleur brûlante de Truxillo, Guayaquil, etc.

La difficulté de respiration, appelée en certains lieux la puna et

(1) Chap. XIX, vol. 2.

(2) Espèce de suffocation,

dans d'autres el siroche, était quelquefois si forte, que, dans une marche, des bataillons entiers tombaient comme par enchantement, et que, chez plusieurs individus, la vie n'était conservée que par la saignée de l'artère temporelle. Cette perte subite d'haleine est attribuée aux exhalaisons chargées de parcelles métalliques, qui, en entrant dans les poumons, causent une forte suffocation.

Dans certains momens de l'année, des orages accompagnés de grêle éclatent avec une violence sans égale, et le fluide électrique qui sillonne les pointes sourcilleuses des Cordillières offre un spectacle inconnu dans les autres parties du globe.

Une des marches les plus difficiles fut celle des patriotes en 1824. La division du général Cordova, se rendant de Cuzco à Puno, fut atteinte du mal connu des Péruviens sous le nom de surumpi; il est causé par l'action de la neige réfléchie par les rayons du soleil sur la vue, qu'elle obscurcit totalement; une tumeur se forme dans la prunelle de l'œil, occasionne des démangeaisons insupportables, et amène une cécité complète. Le seul remède est un emplâtre de neige; mais comme elle fond de suite, les tortures se renouvellent à chaque instant. A l'exception d'une vingtaine d'hommes et du guide, qui connaissaient des préservatifs, toute la division se trouvait aveugle, à une distance de trois lieues de toute habitation, et elle ne fut tirée de cette position qu'à l'aide d'une centaine d'Indiens qui servirent de chefs de file. Les traînards qui s'étaient écartés de la colonne périrent dans des précipices, ou furent dévorés par les bêtes féroces qui infestent ces montagnes (1).

Le climat du Potosi est désagréable. Le soleil est d'une force insupportable à midi, tandis qu'à l'ombre et pendant la nuit le froid y est très-vif, On fait quelquefois plus de trois lieues sans rencontrer aucune végétation, à l'exception d'une plante appelée quinuali, et qu'on dit être un remède contre la puna (2),

(1) Chap. XXVII.

(2) Chap. XXIX.

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