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tions, donations et legs faits aux églises cathédrales » n'a pu vouloir dire que cette acceptation serait faite au nom des menses épiscopales, puisqu'au moment où a été promulgué ledit décret, les menses épiscopales, créées par le décret du 6 novembre 1813, n'existaient pas encore. Il est sous-entendu, dit ironiquement M. Grousseau, dans l'article 113 du décret du 30 décembre 1809 et par suite dans l'article 3 de l'ordonnance du 2 avril 1817, qui n'en est que la copie, que l'acceptation des dons et legs adressés aux cathédrales aura lieu au nom des fabriques des dites cathédrales. D'où incapacité pour les évêchés de recevoir des dons et legs pour les cathédrales.

Loi du 24 juillet 1873. - La loi du 24 juillet 1873 a autorisé l'archevêque de Paris, tant en son nom qu'en celui de ses successeurs, c'est-à-dire l'archevêché, à acquérir le terrain nécessaire à la construction de l'église du Sacré-Cœur, et à ses dépendances, soit à l'amiable, soit, s'il y avait lieu, par la voie de l'expropriation.

Les partisans à outrance du principe de spécialité ont vivement critiqué cette loi qui attribue à la mense épiscopale la propriété inaliénable et imprescriptible de cette Eglise.

En face de cette loi, la jurisprudence actuelle du Conseil d'Etat est placée dans placée dans une alternative genante; en effet, de deux choses l'une, ou bien le pouvoir législatif de 1873 a méconnu le principe de spécialité de la mense; ou bien, et c'est là notre opinion, il a reconnu au diocèse de Paris la personnalité civile.

D'après l'article premier, l'église du Sacré-Cœur « sera construite exclusivement avec des fonds provenant de souscriptions ».

Depuis l'avis du 21 juillet 1880, la section de l'Intérieur a déclaré que les ressources déjà recueillies par l'archevêché étaient suffisantes pour assurer l'édification du monument et que, dès lors, il ne convenait pas de permettre qu'elles fussent augmentées au moyen de dons et legs (1).

Le même avis du 21 juillet 1880, trouve également que la dotation de la chapelle de Lourdes est suffisante et que l'on doit refuser à la mense épiscopale de Tarbes, qui en est propriétaire, l'autorisation d'accepter les libéralités qui lui sont adressées dans l'intérêt de cette chapelle (2).

Ainsi qu'on a pu le voir, si l'on destine une libéralité à la mense épicopale, il faut uniquement borner ses préoccupations au bien-être matériel du prélat, au soin de sa table, à la splendeur de son palais ou aux agréments de sa maison de campagne (3).

Faites une donation ou un legs à votre évêque, << pour favoriser les vocations religieuses dans le diocèse », ou « pour fonder des bourses dans le séminaire », ou « pour encourager ou perfectionner l'éducation catholique dans le diocèse », ou encore, pour les prètres àgés et infirmes, si l'établissement de la caisse de retraite n'est pas légalement reconnu;

(1) Ainsi la section de l'Intérieur a émis l'avis que l'archevêque de Paris ne fût pas autorisé : 1o à accepter le legs de 30.000 francs de Me Damème, pour l'œuvre du vœu national au Sacré-Cœur ; 2° le legs d'une somme de 300 francs, fait par la demoiselle Petit à l'Eglise du Sacré-Cœur à Montmartre. (Avis du 21 juillet 1880).

(2) Refus d'autoriser l'évêché de Tarbes à accepter le legs de 300 francs fait par M Petit, à la basilique de Lourdes. (Avis du 21 juillet 1880).

(3) Projet de décret et note (Ass. gén.), 8 février 1894, autorisant une mense épiscopale, à conserver en nature, un immeuble qui lui était légué pour servir de maison de campagne aux évêques. (Legs, dame veuve Provost.)

on refusera à l'évèque l'autorisation d'accepter vos libéralités, parce que la « mense épiscopale est instituée uniquement en vue de l'amélioration matérielle du sort des titulaires successifs. >>

Mais, dira le Conseil d'Etat, les intérêts de l'ordre temporel qui se rapportent au culte (1), ne sont-ils pas confiés à l'Etat, qui entretient les cathédrales; aux communes, propriétaires des églises paroissiales, succursales, chapelles, annexes; aux fabriques, chargées aussi de les entretenir et de pourvoir aux frais des cérémonies religieuses? Ceux qui ont trait aux besoins personnels des ecclésiastiques ne sont-ils pas confiés à l'Etat, qui salarie les prêtres; aux chapitres, qui gèrent les biens des menses canoniales; aux curés et desservants, qui jouissent des biens des menses curiales; aux évèques, qui ont l'usufruit des menses épiscopales; aux administrateurs des caisses de retraites pour les prètres àgés et infirmes; aux communes, qui fournissent les presbytères; aux séminaires, qui pourvoient au recrutement du clergé?

C'est vrai, mais ces établissements sont loin de suffire à tous les intérêts religieux du diocèse : un cas pris au hasard nous le montrera.

Pourquoi nos évêques ne seraient-ils pas autorisés à recevoir, comme dons et legs, des bourses en faveur des professeurs des grands et petits séminaires, qui, pour se préparer à l'enseignement d'une façon fructueuse, suivraient les cours des Facultés libres catholiques ou même des Collèges de Rome? Les aspirants au ministère évangélique sont bien autorisés à faire leurs études réglemen

(1) G. TISSIER, op. cit., t. I, p. 183.

taires à la Faculté suisse de Genève, bien qu'elle ne soit pas un établissement français. Depuis 1872, la Faculté de Genève a même été provisoirement autorisée à conférer le grade de bachelier en théologie, afin de ne pas forcer les candidats à se présenter à Montauban (1).

Le clergé protestant est donc traité plus favorablement que le clergé catholique au point de vue de l'enseignement supérieur.

Les deux séminaires protestants de Paris et de Montauban reçoivent du budget, le premier 14.000 francs et le second 12.500 francs. De plus l'Etat entretient une Faculté de théologie protestante à Paris et une autre à Montauban.

Il est d'autres cas où on a appliqué avec trop de rigueur le principe de la spécialité aux menses épiscopales. Pourquoi, par exemple, ne pas donner encore à l'évêque capacité de recevoir des dons et legs pour venir aux secours des fabriques pauvres, pour la prédication de missions et pour une foule d'œuvres qui intéressent soit l'entretien des ministres, soit les besoins du culte catholique ?

(1) Le séminaire israélite reçoit toujours une allocation annuelle de 22.000 francs, alors que toutes les subventions ont été supprimées pour les séminaires catholiques.

CHAPITRE CINQUIÈME

JOUISSANCE ET ADMINISTRATION DES BIENS

DE LA MENSE

Les archevêques et évêques ont l'administration des biens de la mense, ainsi qu'il est expliqué aux articles 6 et suivants du décret du 6 novembre 1813. Ce décret les assimile, en qualité d'usufruitiers et d'administrateurs des biens de la mense archiépiscopale et épiscopale, aux titulaires des cures. « L'évèque, dit un arrêt de 1888 (1), lorsqu'il est en pleine possession de son siège et des biens de la mense, est à la fois l'usufruitier et l'administrateur du patrimoine de la mense. »

Suivant les articles 6 et 29 du décret du 6 février 1813, les titulaires exercent les droits d'usufruit réglés par les dispositions des articles 582 et suivants du Code civil, sauf quelques modifications.

Avant

I. Procès-verbal de prise de possession. la prise de possession, le juge de paix dresse un procès-verbal contenant la description de tous les effets mobiliers et immobiliers, titres, papiers et documents. Le nouveau titulaire signe le procèsverbal, avec promesse de jouir des biens en bon père de famille, de les entretenir avec soin, et de s'opposer à toute usurpation ou détérioration (2).

(1) Limoges, 13 août 1888.

(2) Art. 7 et 46 du décret de 1813.

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