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comprenaient dix prévôtés sous le règne de PhilippeAuguste.

En 1131, à Sées, en Normandie, l'évêque Jean de Neuville, vassal du roi d'Angleterre, abandonna à son chapitre un certain nombre de biens et la plus grande partie des oblations de l'église cathédrale, se réservant les étoffes d'or et d'argent offerts à l'autel, ainsi que la cire du Jour de la Purification, des Cendres et du Jeudi Saint. Ce fut au moment où il institua à la place des treize chanoines séculiers, trente-six chanoines réguliers obéissant à la règle de saint Augustin. Une bulle de confirmation fut accordée en 1199, par le pape Innocent III (4).

Dans certains diocèses la séparation des deux menses est plus ou moins absolue; dans tous il existe un terrain sur lequel les droits du chapitre et ceux de l'évèque restent pour ainsi dire confondus : la cathédrale. C'est ce que nous aurons l'occasion de constater dans le chapitre des charges de la mense épiscopale.

(1) Gallia christiana, t. XI, p. 177

CHAPITRE DEUXIÈME

COMPOSITION DE LA MENSE ÉPISCOPALE

Si l'on veut se rendre compte exactement de la composition des anciennes menses épiscopales, il faut étudier les cartulaires, les pouillés ainsi que les comptes des décimateurs et receveurs des anciens évèchés. Là sont mentionnés les biens-fonds, maisons, terrains, vicomtés, baronnies dépendant de l'episcopatus. On y trouve, également catalogués, les redevances, cens, dimes, que les terres, paroisses, prieurés, abbayes, devaient payer chaque année à l'évêque. Le Cartulaire de Notre-Dame de Paris, publié par Guérard, renferme les documents les plus intéressants et les plus instructifs sur la mense épiscopale de Paris. Le Cartulaire de la cathédrale de Grenoble, publié par M. Marion en 1869, renferme le grand pouillé de l'évêché de Grenoble de 1497; c'est l'un des plus curieux que l'on connaisse; il est divisé en huit chapitres. Le premier chapitre donne le dénombrement de toutes les paroisses groupées par archiprètrés, ainsi que celui des abbayes, prieurés, monastères d'hommes et de femmes, chapelles, hôpitaux, léproseries, commanderies existant dans le diocèse de Grenoble.

Les listes des paroisses qui appartiennent de plein droit à la collation de l'évèque, et de celles dans lesquelles l'évèque perçoit la dime en totalité ou en

partie, sont contenues dans le cinquième et le sixième chapitre.

Le septième chapitre mentionne les prieurs et les curés qui doivent des pensions et cens annuels à la mense épiscopale avec l'indication de la nature des redevances et le terme des échéances. Enfin le huitième et dernier chapitre présente, dans un tableau d'ensemble, la somme intégrale des revenus de l'évêché de Grenoble. Le total monte à la somme de 10.331 florins, 5 gros, 3 quarts.

En consultant le Cartulaire de l'abbaye de Redon, on trouve dans les pouillés postérieurs à 1516, d'utiles renseignements sur les évêchés de Bretagne, qui ainsi que ceux de Provence et des provinces nouvellement annexées, n'étaient pas soumis au concordat de Léon X et de François Ier. On remarque que pour ces contrées, le pape a continué de suivre les règles de la Chambre Apostolique, sauf pour la nomination aux évèchés. Le Saint-Siège s'y est réservé la collation d'une foule de bénéfices et la présentation à un grand nombre de cures. L'étude des pouillés du diocèse de Lyon (Cartulaire de l'abbaye de Savigny), montre que dès le treizième siècle on évaluait, en argent et non en nature, les parées et les procurations, pour droit de visite.

Par la comparaison de tous ces cartulaires, pouillés et autres documents, il est facile d'arriver à conclure, ainsi que l'a fait M. Achille Luchaire, que la mense épiscopale se compose :

1° De propriétés urbaines comprenant un ensemble de maisons et de terrains qui forment une partie plus ou moins grande de la cité, siège de l'évèché.

2 De possessions rurales disséminées dans le

diocèse, administrées par des baillis, des prévots et des maires.

30 Des terres et des fiefs situés parfois dans les diocèses voisins.

4o D'abbayes ou églises placées dans une situation de dépendance particulière, avec les revenus qui y sont attachés.

50 De fiefs comprenant des villages, des terres, des châteaux et des églises avec leurs menses, des moulins, des dimes, des cens et des rentes, des octrois et droits de toute espèce, des tituli de fonctions ecclésiastiques.

6o Du quart des dîmes et oblations des paroisses, eulogies, synodalia, relevationes, paraveredi, parata, procurations ou impôts pour droit de visite, amendes, compositions, droits de justice, droits de collation des bénéfices, annates et déports (1).

Prenons maintenant comme exemple la mense épiscopale de Paris. Déjà au concile d'Aix-laChapelle, en 817, elle devait être classée par les églises riches, c'est-à-dire, parmi celles possédant en moyenne un revenu de 800.000 francs de notre monnaie. Depuis, ses biens n'ont fait qu'augmenter grâce à la générosité des fidèles et aux privilèges

(1) Annates ne signifie autre chose que le revenu d'une année; dès le douzième siècle, il y avait en France des évêques qui, par une coutume ou un usage particulier, recevaient les annates des bénéfices dépendant de leur évêché.

Le déport était une espèce d'annates que les évêques, en quelques provinces de France, notamment en Normandie, prenaient sur le revenu d'un bénéfice vacant de droit ou de fait. Le père Thomassin en son traite de la Discipline, partie IV, livre IV, chapitre xxxII, rapporte que le Concile de Latran condamne l'avarice de certains évêques qui mettaient les églises en interdit après la mort des curés et refusaient d'accorder l'ins titution aux nouveaux pasteurs, avant qu'ils n'eussent payé une certaine

somme.

qui lui ont été accordés par les rois. On voit dans une charte de 1330 (1), que l'évêque était vicomte de Paris et de la vicomté. On prétendait qu'il avait cinquante deux mille feux sous sa juridiction et haute justice.

Voici au douzième siècle, la composition du patrimoine de la mense épiscopale de Paris, d'après le Cartulaire de Notre-Dame, publié par Guérard :

10 Propriétés urbaines. — Il y avait à Paris mème, beaucoup de terres, maisons et autres possessions qui faisaient partie de la mense épiscopale. Il suffit de mentionner parmi les plus importantes, l'ile Notre-Dame, dite depuis ile Saint-Louis, le grand Pont, construit par Charles le Chauve, sur la terre de Saint-Germain-l'Auxerrois, la rue en face menant à cette église, le petit Pont, au moins en partie, et les vastes terrains appartenant à la même église de Saint-Germain qui s'étendaient depuis son enceinte jusqu'au Roule et jusque auprès de Montmartre, la terre de Térouenne, où sont les Halles, une partie du Champeau, entre la rue Saint-Honoré et l'église Saint-Eustache, la Ville-l'Evêque, dont le nom est resté à une rue tracée sur son emplacement, le Monceau-Saint-Gervais, situé sur le côté opposé, quatre arpents de vignes, dans le faubourg SaintGermain, et beaucoup d'autres biens qu'il serait trop long d'énumérer.

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(1) Cartulaire de Notre-Dame-de-Paris, préface LXXXIII.

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