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dont le lourd fardeau retombait en grande partie sur l'Eglise.

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I. Instruction chrétienne. L'Eglise, à travers les àges, a dû souvent fournir à la fois le personnel enseignant et la plus grande partie des ressources qui permettaient d'élever presque gratuitement l'enfance et la jeunesse (1).

Sans remonter au Concile de Vaison, en 529, à la suite duquel se sont élevées un grand nombre d'écoles épiscopales pour le recrutement du clergé séculier, arrêtons-nous un instant à Charlemagne.

Encouragés par l'exemple du souverain, les évèques ne purent faire moins que d'exhorter leur clergé à exécuter fidèlement les capitulaires de 804 et 805 (2).

Les écoles des villes et villages, à l'ombre des églises, se répandirent peu à peu sur tout le territoire français. Comme l'a dit le chef de l'école positiviste, Auguste Comte : « Le catholicisme a été le promoteur le plus efficace du développement popu laire de l'intelligence humaine (3). »

De tout temps, et surtout au dix-septième siècle, les évèques ont suscité la création des collèges et des écoles rurales et surveillé l'éducation qu'on y donnait.

Une simple page de M. l'abbé Sicard (4), suffira pour nous montrer les services pécuniaires rendus par les évèques à l'instruction publique en France.

<< Pendant trente ans, le cardinal de Bissy s'est appliqué à subvenir à tous les besoins spirituels et

(1) ALLAIN : l'Instruction primaire en France avant la Révolution, in-12, p. 21, Paris, 1831.

(2) BALUZE, t. I, pp. 417 et 421.

(3) Cours de philosophie positive, t. V, p. 258, 1864.

(4) Les évêques avant la Révolution, p. 442.

temporels de son troupeau et a pourvu à l'instruction de la jeunesse des deux sexes. C'est aux évêques que la ville d'Agde doit son collège et son hôpital. En plein dix-huitième siècle, Paul de Ribeyre consacre 25.000 francs aux bâtiments de son collège de Saint-Flour. Les lettres patentes adressées à M. de Choiseul, archevêque de Cambrai, en ordonnant la réunion du collège et du séminaire, signalent les libéralités qui lui ont été faites par les archevêques de ce diocèse. A Bayonne, Mgr Druillet relève le collège en décadence. A Soissons, M. de Litz-James n'a épargné ni ses soins, ni son argent pour son collège, étendant sa sollicitude sur l'établissement fondé à Château-Thierry. M. de Bourdeilles, son successeur, suit les mêmes traditions. Il fait doter largement l'enseignement secondaire avec les ressources provenant de la succession des Célestins. A Belley, deux évêques, qui remplissent presque à eux seuls le siège de cette ville au dix-huitième siècle, se signalent par leurs libéralités. Le premier, M. Jean de Caulet, donne 54.000 francs pour l'établissement d'un collège et d'un séminaire; l'autre, M. de Balore, achève de pourvoir par des fondations à l'existence de cet établissement. Certains prélats font mieux encore; une mention spéciale est due à M. de la Marche, dernier évèque de Saint-Pol-de-Léon, qui båtit à ses frais un vaste et beau collège, assez ample pour recevoir les élèves des contrées voisines, y ajoute un petit séminaire pour l'éducation gratuite des écoliers se destinant au sacerdoce, et dote les deux maisons de revenus suffisants. Ce fut une dépense de 400.000 francs. >>

Au dix-septième siècle, Mgr Langlois, évêque de

Sées, fonde dans la capitale, au voisinage de la Sorbonne, l'établissement portant à son fronton, le nom de collège de Sées (1).

On pourrait ainsi multiplier les exemples et montrer quelle sollicitude l'épiscopat a montré pour l'éducation et l'instruction de la jeunesse, et quelle précieuse réserve leur fournissaient les revenus des menses épiscopales pour accomplir ces actes de générosité.

II. Soulagement des pauvres. Un budget qui, plus encore que celui de l'instruction publique, incombait presque exclusivement, à l'Eglise, était celui de la charité. Sous ce rapport le clergé de France n'a jamais manqué à sa mission. En élevant des hôpitaux, des refuges, des asiles de tout genre, selon les besoins des temps, les évêques ont, durant quatorze cents ans, créé le capital et assuré le service gratuit de la charité.

« Il n'était pas un progrès (2) pouvant améliorer la condition matérielle ou normale de leurs ouailles, qu'ils ne fussent prêts à appuyer de leur crédit ou de leur bourse.

On ignore généralement que c'est aux évèques que l'on doit, sous l'ancien régime, le fonctionnement de nos assurances contre l'incendie, sous forme de contribution à une quête annuelle.

A la fin du dix-huitième siècle, nous voyons les évèques secondant Turgot pour la fondation de bureaux ou d'ateliers de charité, afin de supprimer le plus possible la mendicité. On secourt les pauvres en nature et à domicile et l'on procure du travail

(1) DUMAINE, Vie de Mgr d'Aquin, p. 188, Paris 1902.

(2) SICARD, Op. cit., p. 475.

aux indigents. Tels furent ces nobles prélats en qui le cœur du gentilhomme venait imprimer un nouvel élan et je ne sais quoi de chevaleresque à la charité de l'évèque. »

§ 4. Dépenses de l'évêque pour l'entretien de sa table et de sa maison.

Lorsque les autres obligations de la mense et les devoirs de leur charge pastorale étaient remplis, les évèques pouvaient user de leurs revenus pour l'entretien de leur table et les dépenses de leur maison. Quelques prélats ont pu à juste titre, ètre accusés de prodigalité dans le luxe, d'amour exagéré du jeu, des chevaux et de la chasse; quelques-uns ont fait construire des palais trop somptueux, ont eu un train de maison trop princier, une domesticité trop nombreuse; à d'autres, on a pu reprocher leur avarice ou leur népotisme. Mais, en général, si l'on étudie les biographies particulières et les travaux d'histoire locale, on en conclura que la grande majorité des évêques, utilisant généreusement les richesses de leur mense, ont été les pères de leur peuple, et ont étendu leur sollicitude sur tous les besoins de leurs diocèses.

CHAPITRE CINQUIÈME

LES MENSES ÉPISCOPALES ET LA RÉGALE

Tous les auteurs qui ont traité de cette matière, en particulier Guyot (1), ont donné de la régale la même définition :

« C'est un droit en vertu duquel le roi jouit tant des fruits temporels des évèchés qui viennent à vaquer, que de la collation des bénéfices non cures, c'est-à-dire autres que ceux à charge d'àmes, que l'évêque aurait eu le droit de conférer, si le siège était rempli. »

Faisons d'abord l'historique du droit régalien, nous verrons ensuite comment il a été exercé sur les menses épiscopales.

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Son origine est

I. Origine du droit de régale. fort ancienne et assez obscure. Les uns le font remonter au Concile d'Orléans, le concédant à Clovis, vainqueur d'Alaric; d'autres au pape Adrien l'accordant à Charlemagne après l'extermination des Ariens. Nous préférons nous attacher à l'idée de M. Luchaire (2), qui voit dans la régale une pratique

(1) Répertoire de jurisprudence.

(2) Op. cit., pp. 52 et suiv.

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