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évite à tous des procès qui souvent mangeraient l'héritage. M. Berlier examine ensuite une objection d'une autre nature, déduite de l'intérêt des mariages, et fondée sur la répugnance qu'on aura de donner à un parent son bien pour le voir passer dans une famille étrangère.

:

Vaine terreur, dit M. Berlier; ou du moins elle sera plus que balancée par l'espoir de voir le donataire obtenir des enfans auxquels il transmettra le bénéfice du don sans altération d'un autre côté, si le donateur a quelque crainte, il pourra stipuler le retour; et même, s'il est ascendant, il pourra s'en dispenser, puisqu'à ce titre, et d'après ce qui doit être proposé, il devra, à défaut de descendans du donataire, succéder à celui-ci dans les biens venant de lui.

L'expérience, d'ailleurs, répond mieux que tous les raisonnemens à l'objection qui est faite se mariait-on moins, et les donations en faveur des mariages étaient-elles plus rares en pays de droit écrit, où la règle paterna paternis était inconnue, que dans les pays où elle était admise?

M. Berlier termine en observant que le système proposé par la section, et qui n'est que le maintien de la nouvelle législation en ce point, a pour lui l'avantage d'une épreuve de neuf années, et l'assentiment de presque tous les tribunaux consultés : ce qui n'est pas un faible argument en sa faveur, surtout quand on considère à quelle rigueur on est disposé aujourd'hui envers tout ce qui fut fait à cette époque. M. PORTALIS dit qu'il n'admet avec aucune modification la règle paterna paternis.

Celui qui succède devient propriétaire; il peut donc disposer. S'il en était autrement, la propriété ne serait plus dans l'individu, elle serait dans la famille entière. Lorsque l'héritier dissipe, sa famille perd les biens sans retour; elle ne peut pas avoir plus de prétention à la propriété, par cela seul que le possesseur des biens n'a pas été un dissipateur. La présomption de l'affection doit sans doute être consultée, mais dans le propriétaire actuel seulement.

Au surplus, les considérations qui ont fait supprimer le système des propres doivent aussi faire écarter la règle paterna paternis.

Les articles 16 et 17 sont adoptés.

Les articles 18, 19, 20, 21 et 22 sont adoptés.

La section II est soumise à la discussion.

Elle est ainsi conçue :

SECTION II.

-

De la Représentation.

73438

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Art. 23. « La représentation est une fiction de la loi, dont 739

l'effet est de faire entrer les représentans dans la place,

« dans le degré et dans les droits du représenté. »

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Art. 24. « La représentation a lieu à l'infini, dans la ligne 740 directe descendante.

« Elle est admise dans tous les cas, soit que les enfans du

défunt concourent avec les descendans d'un enfant prédé

« cedé, soit que tous les enfans du défunt étant morts avant

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lui, les descendans desdits enfans se trouvent entre eux en degrés égaux ou inégaux,

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Art. 25. « La représentation n'a pas lieu en faveur des as- 741 cendans; le plus proche, dans chacune des deux lignes, "exclut toujours le plus éloigné. »

Art. 26. En ligne collatérale, la représentation est ad- 74a «mise dans les cas qui suivent :

☐ 1°. Si le défunt laisse des frères qu sœurs et des neveux «ou nièces, ou, à leur défaut, des descendans d'eux, à - quelque degré qu'ils puissent êtrę;

« 2o. Si un cousin germain laisse des cousins ou cousines germains et des enfans au premier degré d'un cousin ger« main prédécédé.

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Art. 27. « Dans ces cas, le neveu ou la nièce, ou, à leur Ib. défaut, leurs descendans, viennent par représentation du

frère décédé, concurremment avec les frères survivans.

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743

741

739 à 741

742

« par représentation de leur père, concurremment avec le cousin germain survivant. »

Art. 28. « Dans tous les cas où la représentation est admise, le partage s'opère par souche: si une même souche a produit plusieurs branches, la subdivision se fait aussi « par souche dans chaque branche, et les individus de la « même branche partagent entre eux par tête. »

Art. 29.

« On ne représente pas les personnes vivantes, <«< mais seulement celles qui sont mortes naturellement ou civilement; mais on peut représenter celui à la succession duquel on a renoncé. »

་་

Les articles 23, 24 et 25 sont adoptés.

Les articles 26 et 27 sont discutés.

LE CONSUL CAMBACÉRÈS dit que, d'après ces articles, le petit-neveu se trouverait exclu lorsque le défunt ne laisserait point de frère.

M. BERLIER trouverait injuste de ne point établir dans ce cas même la représentation entre le neveu et le petit-neveu. Il lui semble que la représentation ne cesse d'être favorable que dans les cas où la généalogie serait très-difficile à établir; ce qui ne saurait être pour le degré dont il s'agit.

M. REGNAUD (de Saint-Jean-d'Angely) partage cet avis. S'il est juste, dit-il, d'admettre le petit-neveu à la représentation, son droit ne doit pas dépendre de la circonstance qu'il existe un frère du défunt : cette circonstance, au contraire, ne doit pas faire admettre le petit-neveu, s'il n'est pas juste en soi qu'il vienne par représentation de son père.

M. EMMERY dit que l'esprit de la section a été d'appeler les neveux et les petits-neveux indistinctement, quand il existerait un frère du défunt ; qu'il lui aurait paru inhumain, quand il n'existe que des neveux, d'exclure les petits-neveux, par la raison que leur père est décédé.

M. REGNAUD (de Saint-Jean-d'Angely) dit que la rédaction ne rend pas cette idée.

M. PORTALIS observe que la représentation n'est qu'une fiction de la loi.

On conçoit facilement, dit-il, que lorsque deux frères du défunt laissent des enfans, ces neveux viennent également à à la succession; mais les principes de la représentation ne permettent pas d'établir le même concours entre les neveux d'une part et les petits-neveux de l'autre. Ce ne sont pas, en effet, des vues d'humanité qui ont fait rétablir la représentation; ce sont des vues d'ordre, réglées sur les affections présumées du défunt. Or, les lois supposent que, dans le degré de petit-neveu, le lien de la parenté ne subsiste presque plus, puisqu'elles n'admettent pas à ce degré la récusation des juges. Ainsi, c'est une idée peu naturelle de priver d'une portion de la succession le neveu du défunt, objet immédiat de ses affections, pour gratifier de cette part un individu que le défunt a peut-être connu à peine. L'ordre des affections ne doit pas être calculé arbitrairement, mais d'après des présomptions raisonnables. Or, on sait que les relations de parenté, dans certains degrés éloignés, deviennent si étendues et si générales, qu'elles ne peuvent plus être des motifs d'affection. L'avis de la section paraît donc devoir être adopté : les raisons par lesquelles on l'a combattu militeraient également en faveur de la représentation à l'infini.

M. BERLIER dit que, lorsqu'il s'agira de la succession des cousins, on pourra examiner s'il convient d'étendre la représentation jusqu'à ce degré, de manière que l'enfant du cousin germain concoure, par représentation de son père, avec le cousin germain lui-même : mais il s'agit en ce moment de la succession dévolue à des frères ou descendans de frères.

N'admettra-t-on, selon le droit romain, que le neveu du preinier degré, à concourir avec le frère du défunt ; et à défaut de frère, ce neveu exclura-t-il les petits-neveux et arrière-petits-neveux descendant d'autres frères du défunt? Telle est la question qui, malgré l'autorité du droit romain,

ne saurait être résolue affirmativement, sans perpétuer une grande injustice.

Si la distribution des biens ab intestat a pour base l'affection présumée du défunt, il faut accorder l'effet avec la cause. Or, voyons ce qui se passe dans les familles; voilà la vraie règle à suivre en cette matière.

Un homme a un neveu, fils de son frère Jean, un petit-neveu descendant de son frère Paul, et, si l'on veut encore, un arrière-petit-neveu descendant de son frère Philippe : ces divers enfans n'auront-ils pas le plus souvent recueilli et partagé les caresses du défunt? n'est-ce point là, par rapport à un homme sans enfans, l'image de la primitive famille, et le tableau vivant qui lui rappelle tous ses frères?

Dans ce cercle très-étroit de personnes aussi intimement liées, la représentation n'est-elle pas un droit tracé par la nature elle-même?

M. Berlier finit en observant que le tribunal d'appel de Lyon a émis son vœu pour que, dans les successions devolues à des frères et descendans de frères, tous ces descendans fussent admis à la représentation. L'opinant partage

entièrement cet avis.

LE CONSEIL adopte en principe que les enfans des frères du défunt succèdent par représentation à l'infini.

LE PREMIER CONSUL dit que la disposition qui vient d'être adoptée ne paraît pas devoir être étendue aux cousins germains. Ils sont chefs de familles distinctes et séparées, et ne se connaissent que comme individus.

M. TRONCHET dit que le droit commun bornait la représentation à l'oncle et au neveu, qu'on vient d'y déroger peutêtre avec raison pour le petit-neveu, mais que cette dérogation ne paraît pas avoir été étendue jusqu'aux cousins.

M. TREILHARD dit qu'il ne pense pas que la dérogation doive s'étendre aux cousins; et que, sur ce point, il n'a jamais partagé l'avis de la section.

LE CONSEIL rejette le n° 2 de l'article 26, et adopte en

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