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elle n'est exigible que le lendemain 11, parce que la jour de l'échéance n'est point compté, ce jour ne finissant qu'à minuit, suivant la manière de compler le jour en France; et par conséquent le porteur de la lettre ne peut avant le 11 en demander le paiement, ni intenter aucune action contre celui qui a accepté la lettre, ou contre celui sur qui elle est tirée. Il en est de même des billets. La raison en est qu'en matière de paiement, le jour du terme n'est point compris dans le délai accordé; suivant cette maxime de Droit: Dies termini non computantur in termino. L. qui hoc anno 52 ff. de vubor obligat.: Ainsi jugé par arrêt du 23 mars 1656, rapporté par addition aux liv. 8 du Journ. des audiences.

» Au reste cette règle n'a plus lieu à l'égard des 10 jours de grâce accordés pour le paiement des lettres de change acceptées, échues à jour certain; car, les 10 jours passés, il n'est plus temps d'agir.

» La quatrième manière dont se payent les lettres de change est à tant de jours de vue, v.gr., 8, 10 ou 15 jours de vue, plus ou moins. Le temps pour pouvoir exiger le paiement de ces sortes de lettres, ne court que du fendemain du jour où elles ont été présentées et acceptées.

» Enfin il y a encore une cinquième manière dont on se sert pour le paiement des lettres de change; c'est quand elles sont payables à Lyon au temps de foires, que l'on appelle paiemens, qui se tiennent 4 fois l'année, de 3 mois en 3 mois savoir, aux Rois, à Pâques, au mois d'Août, et à la Toussaint. Ces paiemens doivent être faits le premier jour non férié de chacun de ces 4 paiemens, suivant l'article premier du réglement fait pour la ville de Lyon, en date du 2 juin 1667.

Lorsqu'il arrive du changement dans les monnoies, les paiemens qui se font dans le royaume, en espèces des lettres de change tirées sur des particuliers, doivent se faire en espèces au cours du jour auquel se fait le paiement, à moins que, par la lettre de change ou billet, il n'ait été stipulé qu'elle seroit payable en espèces, au cours du jour où elle ont été tirées; ou du moins il faut, si l'on veut payer en

nouvelles espèces, y ajouter le plus ou le moins de valeur, eu égard au changement arrivé par l'augmentation ou diminution de la monnoie.

» Mais il faut observer qu'il est défendu aujourd'hui dans le royaume, de trafiquer, vendre et acheter des lettres de change, ou autres papiers, qu'en espèces de celles qui ont cours au temps de la négociation. (Edit du mois de février 1756. Arrêt du Conseil du 27 dudit mois).

» Et si elle a été recue en deniers, marchandises ou autres effets. La valeur des lettres de change peut se payer de plusieurs manières.

» La première est en deniers, ce qu'on exprime aussi par ces mots: valeur reçue comptant. Car il n'y a aucune différence entre ces deux manières de s'exprimer, ainsi qu'il a été jugé par arrêt du 15 juin 1684, rendu sur l'appel d'une sentence des JugesConsuls de Paris, en date du 12 mai 1681.

» La deuxième manière de stipuler la valeur payée des lettres de change, est en marchandises ou autres effets.

» La troisième manière est en valeur en compte, qui est à-peu-près la même que celle reçue comptant. Quoique l'ordonnance ne parle point de cette troisième manière d'exprimer la valeur reçue pour les lettres de change, néanmoins elle est d'un usage fréquent dans le commerce.

» Comme les étrangers ne sont pas soumis à l'ordonpance, on voit souvent de leurs lettres de change qui n'expriment que valeur recue, sans dire en quelle nature d'effets, ou même valeur d'un tel, sans dire reçue. »

On sent combien ce commentaire de M. Jousse est applicable, sous tous les rapports, à l'article 110 du nouveau Code de commerce.

Mais rappellons actuellement les termes mêmes de l'art. 110 du Code de Commerce.

,,,

«La lettre de change est tirée d'un lieu sur un autre. -Elle est datée.

» Elle énonce la somme à payer. -Le nom de celui, qui doit la payer. -L'époque et le lieu où le paiement doit s'effectuer. La valeur fournie en espèces, en marchandises, en compte, ou de tout autre manière.

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-Elle est à l'ordre d'un tiers ou à l'ordre du tireur lui même. Si elle est par première, deuxieme, troisième, quatrième; car elle l'exprime ».

Cette disposition, qui paroit avoir pour fondement T'article premier du titre 5 de l'ordonnance de 1673, va encore plus loin; elle s'étend à trois points sur lesquels les rédacteurs de notre ancienne ordonna uce du commerce 'avoient pas porté directement leur regard.

1.o Tirée d'un lieu sur un autre ceci n'avoit point été prevu par l'ordonnance de 1673, quoiqu'il fût devenu pour la jurisprudence une disposition du Droit

commun.

«Neanmoins la chambre du commerce de Paris, avoit sollicité la suppression de cette condition, en » demandant qu'il fût permis de tirer une lettre de » change du même lieu où elle étoit payable. La » chambre s'est demandée pourquoi des effets de com» merce de même nature et de même forme, n'a» voient pas les mêmes effets; si des lettres de change » tirées d'un lieu sur le même lieu, n'étoient pas tout » aussi naturelles, que celles tirées d'un lieu sur un

autre, tout aussi utiles, tout aussi commodes, sur» tout dans une ville, telle que Paris. Et convaincue » que la distinction qui se trouvoit établie entre l'une » et l'autre espèce ne pouvoit être attribuée qu'à un > respect servile pour l'ancienne Ordonnance, très-bien faite sans doute, mais susceptible d'amélioration, crut devoir faire disparoître cette distinction en ý » substituant cette disposition.

Le conseil d'état, sans avoir égard à ses observations, a persisté dans l'opinion qu'il avoit émise dans l'article 110.

M.Fournel, l'un des premiers jurisconsultes du bareau de la capitale, en donne les motifs dans son ouvrage sur le Code de commerce, (Art. 110; p. 81. ) « Dabord comment pourroit-on dire que la condition d'étre tirée d'un lieu sur un autre, devoit être attribuée au respect servile pour l'ancienne Ordonnance puisque l'ancienne Ordonnance n'a jamais prescrit ni même indiqué cette condition;

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Elle n'a été introduite dans le commerce, que

par la force d'une jurisprudence judicieuse et des autorités les plus imposantes, qui ont considéré la remise de place en place comme un caractère essentiel à la lettre de change, et partie intégrante de sa facture. »

et

En effet, ce contrat ayant été imaginé pour faciliter le transport des fonds d'une place à une au re, ne tenant inême sa faveur qu'à raison de ces avantages précieux, il cesseroit de remplir son objet, s'il eloit permis de l'employer d'individus à individus, résidant dans le même lieu; alors disparoitroît le caractère de la lettre de change pour ne laisser voir qu'un mandat ordinaire, qui ne seroit plus qu'un simple effet de commerce ordinaire.

Aussi tous les jurisconsultes se sont-ils réunis à exiger la remise de place en place, comme caractère distinctif de la lettre de change.

2.° Elle est datée. Nous l'avons déja dit: ceci est une disposition nouvelle qui n'étoit pas exigée par l'Ordonnance de 1673. L'omission de la date dans la lettre de change étoit une simple irrégularité qui n'en entraînoit pas la nullité.

3. Elle est à l'ordre d'un tiers, ou à l'ordre du sireur lui-même....

"On a contesté long-temps, dit encore M. Fournel, que la lettre de change pût étre tirée à l'ordre du tireur lui-même, parce que ce procédé faisoit disparoître la troisième personne qui est essentielle à la lettre de change. Les opinions sur ce point étoient partagées, et avoient introduit une diversité de jurisprudence.

» Le nouveau Code rend un vrai service au commerce, en faisant cesser cette incertitude.

"Au surplus, la disposition du Code n'établit pas l'intervention de la troisième personne qui se reproduit dans l'endossement, par l'ordre du tireur. »

1 V.

Des personnes qui interviennent dans la négociation d'une lettre de change.

Les lettres de change étant une invention de commerce, il semble dès-lors qu'il n'y a que les négocians,

banquiers, receveurs des finances, qui puissent en faire usage.

Néanmoins, des personnes d'une autre profession se permettent de tirer, d'endosser ou d'accepter des lettres de change. Les bienséances que sont tenues d'observer celles qui sont constituées en dignités, élevées à un rang honorable par leur place ou leur naissance, doivent leur interdire l'usage des lettres de change; elles peuvent seulement se permettre d'en être porteurs. Et si elles en tirent, eudossent ou acceptent quelquesunes, elles sont alors soumises à la jurisdiction des tribunaux de commerce, et à la rigueur des lois sur cette

matière.

Autrefois les ecclésiastiques ne pouvoient s'immiscer dans les négociations d'une lettre de change; ils étoient affranchis de la contrainte par corps; mais il en est autrement aujourd'hui. Les lois ni le Code civil ne les excepient pas; ils sont donc astreints à la règle générale; et c'est même dans ce cens qu'avoit été rédigée la loi du 15 germinal an 6.

Les mineurs, qui sont marchands ou banquiers de profession, peuvent figurer dans les lettres de change sans aucune espécance de restitution; c'est ce que porte l'art. 6 du titre premier de l'ordonnance de 1673, et l'art. 114 du Code de commerce.

Quant aux mineurs qui ne sont ni banquiers ni commerçans, les lettres de change qu'ils souscrivent sout nulles, (Art. 114 du Code de commerce.) L'ancienne jurisprudence étoit telle, qu'un mineur marié ne pouvoit valablement accepter ni endosser des lettres de change pour des sommes qui excédoient ses revenus, (Journal des audiences, arrêt du 19 avril 1717).

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Le mineur qui a souscrit une lettre de change dé. clarée nulle n'est pas pour cela dégagé à l'époque de sa majorité de l'obligation de reinbourser la valeur qui lui a été fournie ; s'il en étoit ainsi, la saine raison et la justice seroient également violees. La loi nouvelle autorise ce remboursement dans un cas ; c'est-à-dire qu'autant qu'il est prouvé que la valeur fournie a tourné au profit du mineur, (Art. 1312 du Cod. civ.).

Remarquons encore que la nullité qui est introduite par l'art. 214 du Code de commerce, ne peut être as

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