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protêt à la veuve et aux héritiers de Pierre Semm, décédé à la fin du mois de prairial de la même année, et peu de temps après il les assigne au tribunal de commerce de Bedfort, tant en reconnoissance de la signa ture du défunt, qu'en remboursement de la valeur des deux lettres de change.

» Ceux-ci avant de défendre au fonds, soutiennent que Meyer-Gotschler est non recevable, 1. parce que le protet a été fait tard; 2°. parce qu'il est nul, soit pour n'avoir été fait que par un notaire, soit à raison de ce qu'une des deux lettres de change n'y est pas transcrite en entier; 3.o parce qu'il n'a pas été dénoncé à JeanJacques Semm, dans le délai de quinzaine; mais seu lement quatre ans et dix mois après la date.

»Leg brumaire an 9, jugement quidéboute la veuve et les héritiers Semm de leurs exceptions, et ordonne aux parties de plaider au fonds, à l'effet de quoi Meyer Gotschler comparoîtra en personne. Le 7 pluviôse an 9, Meyer Gotschler ne comparaissant pas, jugement par defaut qui le déboute du bénéfice de celui du 9 brumaire et des fins de la demande.

» Meyer-Gotschler forme opposition à ce jugement; et le 9 ventôse suivant, il en intervient un autre qui, en donnant acte à la veuve et aux héritiers de JeanJacques Semm de la déclaration par lui faite à l'audience, qu'il n'avoit jamais été en relation de commerce avec celui-ci, les condamne néanmoins au paiement de 15,000 francs qui forment le montant des deux lettres de change.

» APPEL, tant comme de nullité qu'autrement. Pour justifier leur appel comme de nullité, la veuve et les héritiers Semm exposent que, devant le tribunal de commerce, ils s'étoient renfermés dans leurs exceptions; qu'ainsi on ne pouvoit les condamner régulièrement qu'après leur avoir ordonné de plaider au fonds, et que d'ailleurs, même après ce préliminaire, on n'auroit encore pu les condamner que par défaut.

» Quant à leur appel simple, ils le fondent sur les mêmes exceptions qu'ils avoient proposées avant le jugement du 9 brumaire an 9, sauf qu'ils ne parlent plus de celle qu'ils avoient fait résulter de la prétendue nullité du protêt, et ils en apportent une autre qu'ils tirent de la prescription

de notification d'icelui à Pierre-Semm dans les délais voulus par les articles 4 et 13 du même titre, étoient obligés de prouver que Violand étoit redevable dudit Semm, ou avoit provision au temps où les traites dont il s'agit avoient dû être protestées, et que les juges ont décidé en fait que la veuve et les héritiers Semm n'avoient aucunement fait cette preuve, ce qui les rendoit nonrecevables à exciper de l'inobservation desdits deiais. La Cour rejette, etc. (V. Question de Droit de M. Merlin, au mot Endossement, p. 396.)

XXVII I.

De la prescription de la lettre de change.

Lorsque, cinq ans après l'échéance, le débiteur d'une lettre de change reconnoît par une simple lettre missive, qu'elle n'est pas acquittée, la prescription peut-elle être opposée à la demande en paiement?

M. Merlin traite cette question dans son ouvrage intitulé Questions de Droit, au mot lettres de change, p. 575, et il se décide pour l'affirmative, en ajoutant que l'article 21 du titre 5 de l'ordonnance de 1673 ne fait pas résulter du laps des 5 ans une prescription proprement dite; il n'en fait résulter qu'une présomption de paiement. C'est ce qu'indiquent, 1.° les termes dont se sert l'article: seront réputés acquittés après 5 ans ; 2.° l'obligation que l'article impose aux prétendus débiteurs d'affirmer, lorsqu'ils en sont requis, même après les 5 ans, qu'ils ne sont plus redevables.

C'est aussi ce qu'enseignent Catelan, dansson Recueil d'Arrêts, t. 2, 1.7, chap. 25; et Jousse, sur l'art. cité de l'ordonnance de 1673.

Et c'est ce qui a été jugé par arrêt rendu en la grandchambre du parlement d'Aix, le 12 juillet 1783, en faveur de la dame Mignen Duplanier, contre le sieur de Nitry.

Cet arrêt confirme une sentence des juges consuls de Marseille qui avoit condamué Nitry, par corps, au paiement d'une lettre de change tirée par lui à Marseille, sur son frère, établi en Amérique depuis environ 22 ans, parce qu'il n'en avoit pas fait les fonds

à l'échéance, et qu'il avoit reconnu la dette par une lettre écrite au mari de la dame Duplanier, quatre ans avant la demande judiciaire.

Nitry s'est pourvu en cassation contre cet arrêt, et le Conseil en a demande les motifs. Mais d'après l'envoi qui en a été fait, et la connoissance de la lettre missive qui avoit été dissimulée, un arrêt du mois de décembre 1784 a débouté le demandeur de sa requête en cassation. X X I X.

Des avals et de la caution.

1.o Celui qui a mis son aval sur une lettre de change, peut-il opposer au porteur qui ne lui en a pas siguifié le protêt dans le terme prescrit par l'article 13 du titre 5 de l'ordonnance de 1673, la fin de non-recevoir établie par l'article 15 du même titre de cette ordonnance?

Q

2. Le peut-il, lorsqu'il a donné son aval par un titre séparé de la lettre de change?

3. Lorsque, par l'acte contenant son aval, il s'est, en termes exprès, obligé solidairement à acquitter la lettre de change, comme s'il en étoit endosseur?

4. Faut-il restreindre l'aval aux cautions données pour l'événement des lettres de change adirées ?

» Le 6 frimaire an 6, Lanfrey et. St.-Simon achètent par facture signée de lui seul, cependant faite triple, (une partie considérable de toiles, dont le prix fut fixée à 287,908 francs; sur cette somme, Saint-Simon paye comptaut à Lanfrey 25,000 fr. en espèces, et ajoute deux traites à court terme, fournies par Jean-Baptiste Leleu, montant ensemble à 100,000 fr.

» Pour les 162,908 fr. restant à payer, Saint-Simon remet à Lanfrey six lettres de change qui, réunies, s'élèvent à cette somme.

» Ces lettres sopttirees par Mouton de Saint-Quentin sur Saint-Simon lui-même, qui les accepte et en passe l'ordre à Lanfrey. Ce dernier donne quittance de tous ces objets, à Saint-Simon, au bas de la facture.

Cette facture ayant été faite triple, un des trois exem plaires fut remis à Jean-Baptiste Leleu, sur lequel étoit eerit, par Saint-Simon: La partie de toile mentionnée en la présente facture, ayaut été achetée de compte à demi, entre M. Jean-Baptiste Leleu et moi, je l'auto

rise par le présent à traiter pour la vente, pour le mieux de notre avantage. Signé, Saint-Simon.

» Le même jour, Jean-Baptiste Leleu et DominiqueCésar Leleu, son oncle, tous deux défendeurs, passent à Lanfrey, qui l'accepte, un acte dans lequel, après avoir énuméré les six traites du sieur Mouton, is s'expriment ainsi : « Reconnoissons que ces traites n'ont » été acceptées par le sieur Lanfrey, que sous notre » responsabilité et garantie solidaires; en consequence, » nous nous rendons, par ces présentes, garans et soli» daires du paiement desdites traites à leurs échéances, » et nous nous engageons sous ladite solidarité, de faire

personnellement les fonds pour l'acquit desdites» traites, sielles n'étoient pas acquittées à leurs échéances, >> aius et de la même manière que şi nous us étions en»dos: eurs desdites traites; au moyen de quoi le présent » engagement servira d'aval, et aura en justice la même » force que lesdites traites ».

>> Les six traites du sieur Mouton étoient payables; savoir: deux le 4 brumaire ; deux le 4 frimaire, et deux le 4 nivôse an 7, par St.-Simon qui les avoit acceptées.

» A l'échéance des deux premières point de paiement; en conséquence, protêt à la, requête de Bourgeois, porteur de l'ordre de Lanfrey.

» Dixjours après, Lanfrey écrità Jean-Baptiste Leleu que le sieur Bourgeois, que lui et ses associés avoient laissé protesfer les effets......échus le 4 de ce mois, et que cependant il lui avoit promis d'acquitter ses cngagemens avant le 15 du courant: Je vous déclare que j'ai donné ordre de dénoncer le protét aujourdhui si vous ne tenez pas parole, et ne satisfaites pas Bourgeois avant trois heures après midi de ce jour.

» Le lendemain, Leleu s'est abouché avec Lanfrey, et lui a souscrit, entr'autres, un billet à ordre de 8,000 f., payable le 29 du même mois, fixe.

» Le 29 brumaire arrivé, le billet est protesté, mais presqu'aussitôt acquitté par Leleu.

Le 4 pluviôse suivant, Leleu remet à Lanfrey douze nouvelles lettres de change tirées par Mouton de SaintQuentin la première de 7,000 fr., payable le 30 du nême mois; la seconde de 8,000 fr., payable, le 20

*

ventôse suivant; les autres de sommes graduellement plus fortes, payables du 20 germinal, même année, au 4 nivôse an 9.

» Six jours après, le ro pluviose an 7, lettre de Lanfrey à Jean Baptiste Leleu: (Mon conseil, dit-il, m'ayant » fait de justes observations sur le laps de temps qu'ont

à courir les lettres de change que vous m'avez resimises, je vous serai obligé de prier le sieur Leleu, » votre oncle, de se rendre demain matin à neuf heures » ou à une heure après midi, chez le sieur Hubert, > notaire, qui est chargé de lui soumettre ces observa

tions, et de prendre avec lui les arrangemens conve"nables pour me garantir l'assurance du paiement de

ces lettres de change. Je suis persuadé qu'il ne se > refusera pas à me procurer toutes les assurances, etc. On ignore si le rendez-vous a eu lieu; mais voici une deuxième lettre de Lanfrey à Jean-Baptiste Leleu du 27 pluviôse an 7. « J'ai été à quatre heures après midi » chez le sieur Hubert ; vous ne vous y êtes pas trouvé. "Je vous invite à vous y rendre demain matin à 9 » heures, j'y serai. Je vous prie de ne pas oublier » que votre traite de 7,000 fr. échoit après demain, » et que vous m'avez promis de m'en remettre de» main le montant, alors j'attendrai encore quelque » temps pour le reste ».

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»De ces deux lettres et de la remise faite JeanBaptiste Leleu à Lanfrey de douze nouvelles lettres de change, il en résulte une induction qui peut être de quelque importance dans la cause. C'est que Lanfrey considérait Jean Baptiste Leleu comme seul intéressé dans cette affaire avec Saint-Simon, et que DominiqueCésar Leleu oncle, n'étoit que le répondant de la vente, qu'il leur avoit faite de ses toiles, en frimaire an 6. Pourquoi s'adresse-t-il toujours directement à JeanBaptiste Leleu ? Pourquoi ne traite-t-il qu'avec lui? Pourquoi reçoit-t-il de lui seul les douze dernières lettres de change?

Il paroît qu'à l'échéance de la deuxième des douze nouvelles lettres de change échues le 20 ventôse an 9, Leleu n'a pas rempli ses engagemens, et que, dès lors, Lanfrey s'est borné à l'acte du 6 frimaire an 6 dont il étoit resté muni,

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