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et c'est de cette loi qu'a été formé l'article 20 de l'ordonnance de 1673, suivant le même auteur.

» Mais dit-on, Savary et Jousse ont pensé que l'art. 20 devoit s'étendre aux avals, comme aux cautionne mens, en exécution de l'article 19.

» Nous verrons bientôt ces deux auteurs établir comme une maxime constante, que les cautions obligées par aval, sont libérées par le défaut de dénonciation du protêt à temps, de la part du porteur.

» L'art. 20 n'est pas limitatif du mode de libération des cautions; il n'est qu'indicatif: et ce qui mérite d'être observé, ce n'est qu'à compter du jour des dernières poursuites, qu'il fait courir les trois ans, du temps desquels il fait résulter la décharge des cautions. L'article suppose donc qu'il a déja été fait des poursuites contre les cautions; il suppose que le porteur s'est mis en règle à leur égard, en leur dénonçant le protêt; et, en les faisant assigner en garantie dans la quinzaine, il ne dispense pas le porteur de ces formalités envers elles, et laisse subsister en leur faveur, la fin de nonrecevoir qui résulte de l'omission de ces formalités.

» La même observation s'applique à l'art. 20. Cet article contient deux parties distinctes: il veut que les lettres ou billets de change soient reputés acquittés après cinq ans de cessation de poursuites, à compter du lendemain de l'échéance et du protêt, ou de la dernière poursuite. Il veut ensuite que les prétendus débiteurs soient tenus d'affirmer, s'ils en sont requis, qu'ils ne sont plus redevables. Cette deuxième partie ne peut s'entendre que des accepteurs et des tireurs de billets de change. Mais la première est commune à tous ceux qui interviennent dans le Contrat de Change. Jousse en fait la remarque par ces mots : Acquitter après 5 ans il ajoute, tant à l'égard du tireur et des endosde celui sur qui la lettre est tirée, que soit que le dernier l'ait acceptée ou non.

seurs,

» Ainsi, la prescription de cinq ans est établie en faveur des accepteurs, avec la différence que ces derniers sont tenus d'affirmer leur libération et les autres en sont exempts; mais, de ce que les tireurs et les endosseurs sont libérés par la prescription de cinq ans, s'ensuit-il qu'il ne le sont pa par le défaut de dénonciation du protêt Traité du Contrat de Change.

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dans la quinzaine? non. Il s'ensuit seulement qu'il existe en leur faveur deux sortes de prescriptions, l'une de quinzaine avec omission de dénonciation, l'autre de cinq ans.

» Reste à répondre à l'article 33. Pesons les termes dans lesquels il est conçu: Ceux qui auront mis leur aval sur des lettres de change, sur des promesses d'en fournir, sur des ordres ou des acceptations, ou autres actes de pareille qualité concernant le commerce, seront tenus solidairement avec les tireurs, prometteurs, endosseurs et accepteurs, encore qu'il n'en soit fait mention dans l'aval. Cet article ne dit pas que les donneurs d'aval ne pourront exciper du défaut de dénonciation du protêt dans la quinzaine; l'article 33 ne met aucun obstacle à ce que ce défaut procure au donneur d'aval le même avantage; ce n'est donc point dans cet article qu'on peut trouver cette solution, mais l'art. 32 en va fournir le principe.

A défaut (ce sont ses termes) de paiement d'un billet de change, le porteur fera signifier ses diligences à celui qui aura signé le billet ou l'ordre, et l'assignation en garantie sera donnée dans les délais prescrits ci-dessus pour les lettres de change.

» L'ordonnance ne veut pas dire que les diligences faites à défaut de paiement d'un billet de change, contre l'individu qui l'a créé et qui s'est obligé d'en acquitter la valeur, doivent être signifies sous peine de déchéance au même individu; ce seroit une absurdité de lui prêter cette intention. Le créeur d'un billet de change est à l'instar de l'accepteur, et il n'y a pas plus de diligence à faire contre l'un que contre l'autre, avant le dernier jour de la cinquième année.

:

» Que veut donc dire l'ordonnance, quand elle s'exprime ainsi à celui qui aura signé le billet? Que celui qui a mis son aval au bas de la signature du créeur celui qui a cautionné, par son aval, l'obligation personnelle et primitive du créeur, sera poursuivi en garantie dans la quinzaine, à défaut de paiement de la part du créeur; il est impossible de lui donner un autre sens.

» Aussi voyons nous que tel étoit l'usage du commerce, du temps de Savary. « Il est certain, dit-il, dans son Parfait Négociant, L. 3, Ch. 8, que pour établir la garantie

contre ceux qui donnent leur aval ou leur ordre, les porteurs doivent leur signifier les diligences. .... ( Et plus bas:) Il faut que les porteurs de billets fassent signi fier les diligences aux donneurs d'ordre et à ceux qui auront souscrit, ou donné leur aval, parce qu'ils sont aussi bien débiteurs du billet que ceux qui l'ont fait; (et plus bas encore). Le mot aval signifie faire valoir la lettre ou billet; c'est-à-dire, les payer, en cas qu'ils ne soient pas acquittés; c'est proprement une caution. >>

Savary ne borne pas ce qu'il dit aux avals mis sur les billets de change; mais il l'étend aux avals mis sur les lettres de change, et il est impossible d'établir une différence entre les uns et les autres.

» C'est ce qu'il confirme encore plus positivement dans son quatre-vingt-quatrième parere; voici l'espèce où se présente la question qu'il avoit à résoudre.

» Le 28 février 1684, billet de 2,309 francs créé par Guillaume à l'ordre de Thimothee. Le premier mars suivant, endossement de ce billet au profit de Charles. Le premier juillet, endossement de Charles, au profit de Jacques. Trois mois avant cet endossement, le premier avril 1684, Pierre avoit donné à Charles, sur un acte séparé, un aval ainsi conçu: : « Je déclare à M. Charles que, quoique je n'aie pas souscrit le billet de 2,309 fr., fait le dernier février par Guillaume, à l'ordre de Thimothée, qu'il a passé à l'ordre de M. Charles, de payer, etc.».

» A l'échéance du billet, Jacques qui en étoit le dernier porteur, n'a pu parvenir à s'en faire payer. Il l'a fait protester, mais il n'en a pas dénoncé le protet dans le terme fatal, à Pierre, donneur de l'aval: question de savoir si Pierre peut opposer la fin de non-recevoir à Jacques? voici la réponse de Savary. « Le soussigné estime que Jacques étoit tenu de faire dénoncer les poursuites qu'il a faites, tant contre Guillaume et Thimothée que contre Charles; car, encore que dans les affaires qui ne sont pas de commerce, quand deux personnes sont obligées solidairement, une seule pour le tout, sans division ni discussion envers une autre, qu'il soit loisible à cette personne de s'attacher seulement à l'un des co-obligés, et de le poursuivre en justice sans qu'il soit tenu de faire dénoncer ses diligences à l'autre co

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obligé; néanmoins, en matière de commerce de lettres de change, l'on en doit user autrement, parce que les marchands et négocians font souvent des affaires de commerce ensemble; et il se peut faire qu'un négociant qui aura passé son aval sur un billet d'un autre négociant, pour lui faire plaisir, devienne, depuis la passation d'icelui, par une autre négociation son debiteur, et de même des passeurs d'ordre: de sorte que si le porteur du billet n'est pas payé à l'échéance et qu'il fasse des diligences contre celui qui a fait le billet, s'il le fait dénoncer au donneur d'aval dans le temps porté par l'ordonnance, il donnera à celui au profit duquel est fait le billet, ou à celui qui sera porteur de son ordre, la somme qu'il lui doit, et l'emploiera au paiement du contenu au billet pour lequel il a fait son aval».

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» On voit que Savary regardoit l'ordonnance de 1673 comme muette sur l'obligation du porteur de dénoncer en temps utile, au donneur d'aval, le protêt de la lettre ou du billet de change non payé à son échéance, et que cependant il présente cette obligation comme constante et ne devant éprouver aucune contradiction. Nous devons ajouter que les commentateurs de l'ordonnance, ont pris soin de fonder cette maxime sur l'article 32 du titre 5 de cette même loi.

» Bernier est le premier qui ait apperçu le véritable sens de cet article. Voici comme il s'explique sur le mot (ou à celui qui aura signé le billet) «Il semble qu'il n'est pas absolument nécessaire de signifier ses diligences à celui qui aura signé le billet, parce qu'il est debiteur, et que cela doit être entendu à l'égard de ceux qui mettent leur aval».

» Jousse le dit encore plus affirmativement, en rappelant ces termes de l'article 32: à celui qui aura signé le billet ou l'ordre. Puis il ajoute : « c'est-à-dire, à ceux qui ont mis leur aval ou l'ordre sur le billet, et ceux qui l'ont souscrit, autre que celui qui l'a subi, et à qui ceite signification seróit inutile, étant lui-même débiteur ».

» Même langage de la part de Pothier, dans son Traité du Contrat de change, n.o 213. « Après avoir fait les diligencés contre le débiteur du billet de change, dans

les dix jours, à compter du lendemain de l'échéance, le porteur doit les signifier à celui qui aura signé le billet ou l'ordre ; c'est-à-dire aux endosseurs et cautions, et donner contre eux l'assignation en garantie dans les mêmes délais prescrits pour les lettres de change: c'est la disposition de l'article 32 ».

» Il y a environ 24 ans que le Garde des Sceaux, Miromesnil, nomma une commission pour réviser l'ordonnance de 1673. Cette commission étoit composée de trois intendans et de trois députés du commerce: elle rédigea un projet de Code destiné à remplacer l'ordonnance de 1673. Elle eut soin d'y insérer sur les avals deux dispositions fort importantes. La première, ren-, fermée dans l'article 31, titre 4, étoit copiée littéralement sur l'art. 33 du titre 5, qui déclare les donneurs d'avals solidairement responsables, avec les tireurs, endosseurs, prometteurs et accepteurs, du paiement des lettres de change. La seconde, venant à la suite, formoit l'art. 32, ainsi conçu: A défaut de paiement du contenu dans l'aval, ainsi que du contenu dans un billet de change, le porteur de l'engagement fera signi fier ses diligences à celui qui l'aura signé, et l'assignation en garantie sera donnée dans les délais ci-dessus, prescrits pour les lettres de change.

Le 13 germinal an 9, le Gouvernement nomme une commission pour rédiger un nouveau projet de Code de Commerce. Le 13 frimaire an 10, celte commission présente au Gouvernement le résultat de son travail : et voici ce que nous y lisons, sous le titre de la lettre de change, section de l'aval, art. 101: Le paiement d'une lettre de change, indépendamment de l'accepta tion et des endossemens, peut être garanti par la voie de laval.. Art. 102. Cette garantie est fournie par un tiers et par un acte séparé. Les effets de cette garantie sont déterminés par les conventions des parties. Art. 103. A défaut de paiement, et s'il n'y a pas de stipulation contraire, les poursuites contre le donneur d'aval doivent être faites dans les temps prescrits ci-après pour le paiement des lettres de change.

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» De deux choses l'une : ou le porteur, qui n'a pas connoissance de l'aval donné par acte séparé, se met en règle à l'égard de l'endosseur qui en est muni, en lui

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