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avoir, c'est une protection de la loi en faveur du commerce; elle l'a prononcée en haîne du tort que le porteur de la lettre de change protestée fait à ses garants, en ne les mettant pas à même d'exercer leur recours contre leurs arrières garants; en ne leur fournissant pas le titre qui pourroit fonder ce recours; en les exposant par-là à toutes les chances d'insolvabilité qui peuvent survenir dans l'intervalle: car, sans cette dénonciation, ils ne pourroient ni agir, ni prouver à leur cédant, ni à l'accepteur le defaut d'acquit de la lettre à son échéance; et s'ils n'en ont pas. la preuve en main, ils ne pourront réussir dans leur action récursoire. C'est pour l'avantage du garant que la dénonciation du protêt doit être faite dans la quinzaine du protêt; c'est en sa faveur que l'ordonnance la requiert: donc, au lieu de la regarder comme odieuse, on doit au contraire accueillir comme très-favorable, la fin de non-recevoir que la loi fait résulter d'une semblable négligence.

» Mais, si cette fin de non-recevoir est favorable, pourquoi en interdire l'usage aux endosseurs fictifs?

» C'est aller contre la maxime qui veut que foute fiction ait, dans le cas pour lequel elle a été introduite, les mêmes effets que la vérité. Cette maxime s'applique avec bien plus de force aux fictions conventionnelles, aux fictions qui ont fait partie des conditions sous lesquelles une obligation a été contractée, et celles sans lesquelles, peut-être, cette obligation n'existeroit pas.

» Par l'acte du 6 frimaire an 6, Leleu oncle s'est rendu garant du paiement desdites lettres de change, et ne l'a voulu qu'à condition qu'il seroit considéré comme endosseur de ces effets, et que les lois de l'endossement lui seroient applicables;, si cette condition ne convenoit pas à Lanfrey, il falloit qu'il s'opposât à ce qu'elle fût insérée dans l'acte: il ne l'a pas fait; donc il a accepté cette garantie, telle qu'elle est conçue, et qui fait loi entr'eux: vouloir aujourd'hui séparer la condition qui y a été apposée et vouloir traiter Lelea comme endosseur et garant pur et simple, c'est diviser un contrat, qui, par le concours des volontés respectives a été rendu indivisible; c'est violer

change, les toutes trouvées dans celle dont il s'agit. 1. Elle est tirée de place en place, de Francfort à Strasbourg.

2. Elle a été qualifiée de lettre de change, reconnue telle par Mock, puisqu'il lui a donné même qualification dans le protêt fait à sa requête.

3.° Quoiqu'il n'y ait que deux personnes, on y en trouve véritablement quatre; car Schrick est en même temps le tireur et l'accepteur; et Mock le donneur de valeur et le porteur.

D'où il suit que le billet en question est une lettre de change bien caractérisée et assortie de toutes les formes prescrites par les lois, et que le tribunal de Colmar, en refusant d'accueillir la prescription, est contrevenu au texte formel de l'article 21 du titre 5 de l'ordonnance de 1673.

JUGEMENT du tribunal de cassation.

Considérant qu'un des caractères de la lettre de change est qu'elle soit payable par un autre que le tireur, vers lequel autre le porteur puisse poursuivre l'acceptation; que dans l'espèce, Schrick, qui a souscrit le billet en question, s'est obligé de payer lui-même, et n'a indiqué personne à qui il décernât le mandat de payer pour lui; que la circonstance que le billet a été souscrit à Francfort, et qu'il contient promesse de payer à Strasbourg, n'a pu faire de ce billet une lettre de change; ou il faudroit dire, que tous les billets payables ailleurs qu'au lieu où ils ont été souscrits, sont des leftres de change;

Considérant encore, que le billet en question n'est point un billet de change, puisqu'il ne contient aucune des énonciations qu'exige l'article 28 du titre 5 de l'ordonnance de 1673;

· Considérant enfin, que l'omission des énonciations exigées par l'ordonnance, l'empêche bien d'être billet de change, mais le laisse dans la classe des obligations ordinaires, le tribunal rejette, etc.

(

14 Thermidor an II.

1.o L'effet de commerce que le tireur exprime payable à son ordre, dans une place indiquée est-il lettre de change, après l'endossement du tireur, ou au profit du tireur?

2.° Les endosseurs sont-ils, comme les tireurs, tenus en cas de défaut du protét, ou de dénonciation du protét, de garantir le cessionnaire auquel ils transportent la lettre de change, qu'à l'époque de son échéance celui sur lequel elle étoit tirée, avoit provision ou étoit redevable?

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3.o Est-on recevable, après le délai pour la cassation, proposer de nouveaux moyens dans un mémoire ampliatif du premier?

Telles sont les trois questions jugées pour l'affirmative dans la cause suivante.

S... tire à Ostende deux effets de commerce, l'un de 6000 fr., l'autre de 2000 fr. sur L. R. payables, dit-il, à mon ordre, à Paris, le 5 brumaire an 7, chez G.... et D.. valeur en compte. Ces effets sont endossés par S.... et ils sont passés successivement à l'ordre de B., B.... Lievens, Merck, V.... et C....

Premier frimaire an 7, protêt qui n'est dénoncé, que long-temps après aux différens endosseurs.

Merck actionne en garantie Lievens, seul resté solvable.

21 Germinal an 9, jugement rendu par le tribunal d'Anvers, qui, attendu 1.° que le protêt n'avoit pas été fait en temps utile; 2." que le proiêt ne pouvoit être suppléé par des lettres d'avis; 3.2 que même, en cas de protêt légal, la demande récursoire de Merck contre Lievens, ne seroit pas recevable, parce qu'elle n'avoit pas été faite dans le délai prescrit par la loi, déclare Merck non-recevable.

JUGEMENT rendu par le tribunal d'appel de Bruxelles par lequel, Attendu que le sens de l'article 16 du titre 5 de l'ordonnance de 1673, ne comprend pas les premiers endosseurs qui sont en-même-temps tireurs ou

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qui ont déterminé le tribunal de la Seine, celui de la Section civile de cassation et celui d'appel.

» Un autre point de vue, sous lequel Lanfrey, trouve les jugemens des tribunaux de la Seine et d'Orleans, en contracdition avec la loi c'est, dit-il, que l'obligation imposée par la loi à ceux qui auront mis leur aval sur des lettres de change, ou autres acles concernant le commerce, est d'être tenu solidairement avec les accepteurs, encore qu'il n'en soit pas fait mention; c'est que les obligattons des accepteurs ne sont prescrites que par cinq ans, et à la charge d'affirmer la libération; c'est que celles des cautions donnees pour l'évenement des lettres de change, durent au moins trois ans ; c'est qu'enfin, l'article 23 contient le principe applicable à cette obligation, et que les articles 20 et 21, ne permettoient pas d'admettre une prescription de quinzaine contre un garant d'accepteur, ou une caution de la sûreté des traites.

Cette partie de defense de Lanfrey, est un tissu d'erreurs condamnées par le texte même de l'ordonnance de 1673, et par l'usage universel du com

merce.

»Ne voyons plus dans cet acte que la clause portant que le present engagement servira d'aval.

» On sera du moins forcé de couvenir avec les tribunaux de la Seine, d'Orléans, et le jugement de cassation du 14 germinal an 9, qu'on doit considérer comme un aval effectif, l'engagement que Leleu a contracté par l'acte du 6 frimaire an 6. Il est reconnu que les avals ne se donnent plus sur des lettres de change auxquels ils servent de cautionnement, mais par des actes séparés. Cet usage étoit déjà établi dans les dix dernières années du dix-septième siècle, ce qu'on peut voir dans le quatorzième Parere du Receuil de Savary : L'usage n'est plus de mettre l'aval au bas de la signature de celui qui tire une lettre de change, parce que les cambistes ont trouvé qu'il nuisoit à la négociation des lettres.

» Où est-il écrit que le signataire d'un aval ne peut pas, comme le simple endosseur, se prévaloir contre le porteur, du défaut de dénonciation de protêt ?

» Cela est écrit, dit-on, dans les articles 20, 21 et 23

du titre 5 de l'ordonnance de 1673; dans l'article 20, en ce qu'il fait durer trois ans l'obligation de ceux qui ont cautionné l'événement des lettres de change; dans l'article 21, en ce qu'il fait durer cinq ans l'action en parement contre l'accepteur; dans l'article 33, en ce qu'il déclare le donneur d'aval solidairement tenu avec les accepteurs, tireurs et endosseurs.

» C'est abuser étrangement de ces trois articles que d'en tirer une pareille conséquence; l'article 20 n'a rien de commun avec les cautionnemens qualifiés d'aval, il n'est relatif qu'aux cautionnemens fournis pour l'événement des lettres de change adirées ; et pour s'en convaincre, il suffit de le rapprocher des deux articles qui le précédent

» L'article 18 porte: la lettre payable à un particulier, et non au porteur, ou à ordre, étant adirée, le paiement pourra en être poursuivi et fait en vertu d'une deuxième lettre, sans donner caution.

» L'article 19 ajoute: Au cas que la lettre adiree soit payable au porteur ou à ordre, le paiement n'en sera fait qué par ordonnance du juge et en baillant caution de garantir le paiement qui en sera fait: precaution sage; parce que, comme l'observe Jousse, Si la lettre est payable au porteur, elle peut tomber entre les mains d'un inconnu, qui dira en devoir fourni la valeur, et que, si elle est à ordre, on peut supposer que celui qui la reçoit a passé son ordre à quelqu'un qui en viendra demander le paiement. C'est à la suite que l'article 20 continue en ces termes : Les cautions baillées pour l'évenement des lettres de change, seront déchargées de plein droit, sans qu'il soit besoin d'aucuns jugement, procédure ou sommation, s'il n'en est fait aucune demande pendant trois ans, à compter du jour des dernières poursuites,

» Le mot événement restreint évidemment l'art. 20, aux lettres de change adirées; il ne s'occupe que des cautions baillées par le porteur pour la sûreté de l'accepteur, ce qui est encore plus sensible par les iermes suivans: Sans qu'il soit besoin d'aucuns jugement, procédure ou sommation. Ce n'est que dans les articles 32 et 33 qu'il est question des donneurs

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