Page images
PDF
EPUB

tacitè veniunt quæ sunt moris et consuetudinis. Au reste cela doit être restreint aux dettes de commerce; le créancier de toute autre dette ne peut pas tirer une lettre de change sur son débiteur, s'il n'y a consenti (X).

93. Le contrat de mandat qui intervient entre le tireur et la personne sur qui la lettre est tirée, qui a consenti, soit expressément, soit tacitement, qu'on tirât sur elle, n'est pas différent des autres mandats. Celui sur qui la lettre est tirée, qui est le mandataire, est obligé, actione mandati directâ, d'exécuter et accomplir le mandat dont il s'est chargé. C'est pourquoi si par une lettre il a écrit au tireur de tirer sur lui, il est obligé d'accepter la lettre de change qu'il a consenti qu'on tirât sur lui, et ensuite de l'acquitter à l'échéance; et faute de faire l'un ou l'autre, il est tenu envers le tireur son mandant, des dommages et intérêts que son mandant peut souffrir de l'inexécution de ce mandat, qui consistent à l'indemniser de tous les frais auxquels donneroient lieu les recours de garantie que le propriétaire de la lettre protestée et les endosseurs précédens ont contre lui.

*

94. Si celui sur qui la lettre est tirée n'avoit accepté le mandat que sous condition, putà, sous la condition que le mandant lui remettroit des fonds; en ce cas, le mandataire n'ayant point satisfait à la condition, et n'ayant point remis les fonds, le mandataire ne seroit point obligé d'exécuter le mandat, qu'il n'a accepté que sous cette condition; et il pourroit parconséquent ne point accepter les lettres tirées sur lui (XI).

95. Quand même ce mandataire auroit consenti qu'on tirât sur lui, sans apposer la condition que le tireur lui remettroit auparavant les fonds; néanmoins si depuis ce consentement il avoit paru quelque chan

* Cette décision ne peut plus avoir lieu; 1 parce qu'il n'y a plus d'acceptation conditionnelle (Art. 124 ); 2.° parce que l'acceptation, quelle qu'elle soit, suppose provision. (Art. 117.)

reçu du tireur des fonds pour accepter et acquitter ses lettres.

92. Il y a plus a plus tous les négocians avec qui j'ai conféré, m'ont assuré qu'il étoit d'un usage constant dans le commerce, qu'on négociant créancier d'un autre negociant d'une somme liquide pour une affaire de commerce, pouvoit, sans attendre un consentement exprès de son débiteur, tirer sur lui une lettre de change de cette somine; et que faute par lui de l'acquitter, il étoit condamné aux frais de protêt, de rechange, etc. de même que s'il eut consenti qu'on tirât sur lui. Cet usage m'a surpris; car les dommages et intérêts qui résultent du défaut de paiement de la dette d'une somme d'argent, se bornent aux intérêts de cette somme; les autres dommages et intérêts auxquels il est condamne faute d'acquitter la lettre tiree sur lui, tels que sont les frais de rechange, etc. ne peuvent naître que d'une autre obligation, qui est l'obligation du mandat qu'il a contractée en consentant qu'on tire sur lui une lettre de change de la somme qu'il doit, et en se chargeant de l'acquitter: il ne peut donc pas y être condamné, s'il n'a pas consenti qu'on tirât une lettre de change sur lui. Tout ce qu'on peut dire pour justifier cette jurisprudence des Consulats, c'est qu'étant d'usage dans le commerce qu'un négociant qui contracte envers un autre une dette d'une somme liquide pour une affaire de commerce, consente que son créancier la tire sur lui par une lettre de change; un négociant, en contractant une pareille dette, quoiqu'il ne se soit pas expliqué que son créancier pourroit tirer sur lui une lettre de change, est censé en être tacitement convenu, suivant cette règle de Droit: In contractibus

* Cet usage est devenu loi par l'art. 116 du Code de Commerce. Voyez le texte. }

Ainsi il y a provision dans les mains de celui sur qui la lettre de change est tirée, si à son échéance il doit au tireur une somme au moins égale au montant de la lettre de change, et il n'est pas nécesssaire dans ce cas qu'il y ait acceptation.

[ocr errors]

Dans tout autre cas il faut l'acceptation; ear alors l'ac¬ ceptation suppose la provision.

tacitè veniunt quæ sunt moris et consuetudinis. Au reste cela doit être restreint aux dettes de commerce; le créancier de toute autre dette ne peut pas tirer une lettre de change sur son débiteur, s'il n'y a consenti (X).

93. Le contrat de mandat qui intervient entre le tireur et la personne sur qui la lettre est tirée, qui a consenti, soit expressément, soit tacitement, qu'on tirât sur elle, n'est pas différent des autres mandats. Celui sur qui la lettre est tirée, qui est le mandataire, est obligé, actione mandati directâ, d'exécuter et accomplir le mandat dont il s'est chargé. C'est pourquoi si par une lettre il a écrit au tireur de tirer sur lui, il est obligé d'accepter la lettre de change qu'il a consenti qu'on tirât sur lui, et ensuite de l'acquitter à l'échéance; et faute de faire l'un ou l'autre, il est tenu envers le tireur son mandant, des dommages et intérêts que son mandant peut souffrir de l'inexécution de ce mandat, qui consistent à l'indemniser de tous les frais auxquels donneroient lieu les recours de garantie que le propriétaire de la lettre protestée et les endosseurs précédens ont contre lui.

*

94. Si celui sur qui la lettre est tirée n'avoit accepté le mandat que sous condition, putà sous la condition que le mandant lui remettroit des fonds; en ce cas, le mandataire n'ayant point satisfait à la condition, et n'ayant point remis les fonds, le mandataire ne seroit point obligé d'exécuter le mandat, qu'il n'a accepté que sous cette condition; et il pourroit parconséquent ne point accepter les lettres tirées sur lui (XI).

95. Quand même ce mandataire auroit consenti qu'on tirât sur lui, sans apposer la condition que le tireur lui remettroit auparavant les fonds; néanmoins si depuis ce consentement il avoit paru quelque chan

Cette décision ne peut plus avoir lieu; 12 parce qu'il n'y a plus d'acceptation conditionnelle ( Art. 124 ); 2.° parce que l'acceptation, quelle qu'elle soit, suppose provision. Art. 117.)

souffrir de cette insolvabilité, puisque son mandataire n'est pas en faute

On peut dire au contraire en faveur du tireur, qu'il ne faut pas confondre ce qu'il en a coûté au mandataire pour l'exécution du mandat, ex causâ mandati, avec ce qu'il lui en a coûté à l'occasion du mandat, non ex causâ mandati, sed tantùm occasione mandati. Ce qu'il en coûte ex causâ mandati, est tout ce qui tend à l'exécution du mandat. Par exemple, si je vous ai chargé d'aller visiter une terre que je voulois acquerir, les frais de voyage, les salaires que vous avez payés aux ouvriers dont vous vous êtes fait assister, et autres choses semblables, sont des déboursés qui tendoient à l'exécution du mandat dont je vous ai chargé, et qui sont faits ex causâ mandati: ce n'est que de ces choses que je suis censé, par le contrat de mandat intervenu entre nous, m'être obligé de vous rembourser. Mais si vous avez été attaqué en chemin par des voleurs qui vous ont volé, je ne suis pas obligé de vous indemniser de cette perte; car quoique ce soit à l'occasion de mon mandat dont vous vous êtes chargé, que vous l'avez soufferte, et que vous ne l'eussiez pas soufferte sans cela, néanmoins ce n'est pas pour l'exécution de mon mandat, mais seulement à l'occasion de ce mandat, qu'il vous en coûte ce qu'on vous a volé; c'est par un cas fortuit, dont on ne peut pas dire que j'ai voulu m'obliger de vous indemuiser, puisqu'il n'a pas même été prevu : Non omnia quæ impensurus non fuit, mandatori imputabit; veluti quod spoliatus sit à latronibus. nam hæc magis casibus quàm mandato imputari oportet; L. 26, §. 6, Mandat. Ces principes s'appliquent naturellement à l'espèce proposée. Lorsque le banquier sur qui j'ai tiré une lettre de change de cent livres, trompé par la falsification de la lettre, paie trois cent livres au porteur de la lettre, le paiement qu'il a fait de la somme de deux cents livres de plus qu'il n'est porté par la lettre n'est pas un paiement qu'il fasse ex causâ mandati, en execution du mandat dont je l'ai chargé; on peut seulement dire qu'il l'a fait à l'occasion du mandat : la falsification de la lettre, qui l'a induit en erreur, et

.

qui lui a causé la perte de la somme qu'il a induement payée, est un cas fortuit qui n'a ni éte ni pu être prévu, et dont on peut dire par-conséquent que j'aie voulu me charger de le dedommager.

Cependant si c'etoit par la faute du tireur que le banquier eût été induit en erreur, le tireur n'ayant pas eu le soin d'écrire sa lettre de manière à prévenir les falsifications; putà, s'il avoit écrit en chiffres la somme tirée par la lettre, et qu'on eût ajoute zero; le tireur seroit en ce cas tenu d'indemniser le banquier de ce qu'il a souffert de la falsification de la lettre, à laquelle le tireur par sa faute a donné lieu; et c'est à ce cas qu'on doit restreindre la decision de Scacchia.

La distinction que nous faisons entre le cas auquel un mandataire a souffert quelque dommage à l'occasion du mandat sans qu'il y eût eu aucune faute de la part du mandant, et celui auquel le mandant a donné occasion au dommage par sa faute, est fondée sur des textes de Droit. Paul, en la loi 26, §. 7, ff. Mandat. décide que si je vous ai chargé de m'acheter un certain esclave, et que cet esclave, après que vous l'avez acheté, et avant que vous me l'ayiez envoyé, vous a volé, je suis obligé de vous indemniser de cette perte que vous avez soufferte à l'occasion du mandat, dans le cas auquel j'aurois connu cet esclave pour être un voleur; parce que dans ce cas je suis en faute de ne vous avoir pas averti; mais que hors ce cas je ne suis point obligé de vous indemniser du vol que vous avez souffert à l'occasion du mandat, mais seulement de vous abandonner l'esclave pour le vol, de même que j'y serois obligé envers tout autre auquel il auroit fait quelque vol ou causé quelque dommage. Il est vrai qu'Africain, en la loi 61, aliàs 63, §. 5, ff. de Furtis, décide que vous êtes tenu de m'indemniser du vol, même dans le cas auquel vous n'auriez pas eu connoissance que cet esclave étoit voleur eliamsi ignoraverit is qui certum hominem emi mandaverit, furem esse, nihilominùs tamen damnum decidere cogetur. .. Mais c'est qu'Africain pensoit que méme en ce cas c'étoit la faute du mandant qui avoit donné lieu au dommage qu'avoit souffert le mandataire, et que le mandant étoit en faute de ne s'être

[ocr errors]
« PreviousContinue »