Page images
PDF
EPUB

vocation, conservé la qualité de fille adoptive de James Margnat et de Françoise Tixier, elle ne pourrait, d'après l'affirmation faite par celle-ci devant le juge de paix de son domi ́cile, en exécution de l'art. 4 de la loi du 25 germinal an 11, exercer, sur sa succession, que le tiers des droits qu'elle aurait eus à prétendre, si elle eût été sa fille légitime, et que telle est la disposition formelle de l'art. 5 de Ja même loi; 30 qu'au surplus, la réduction des avantages conférés à un second époux, n'est prononcée par la loi du 17 nivôse an 2, qu'en faveur des enfans naturels et légitimes. Marie Faur réplique 10 que l'adoption est, de sa nature, un contrat irrévocable, et qu'elle est implicitement déclarée telle par la loi 34 D. de adoptionibus, qui dit : Quæsitum est si tibi filius in adoptionem hac lege sit datus, nt post triennium, putà, eumdem mihi in adop tionem des, an actio ulla sit? Et Labeo putat nullam esse actionem: nec enim moribus nos

tris convenit filium temporalem habere; qu'à la vérité, l'art. 2 de la loi du 25 germinal an 11 permet à ceux qui, avant le Code civil, ont eté adoptés en minorité, de renoncer à leur adoption ; mais que de là même il résulte que l'adoption ne peut pas être révoquée par l'adoptant; et que c'est ce qu'établissait clairement M. Berlier, conseiller d'Etat, en présentant, au nom du gouvernement, les motifs de cette loi au corps législatif: « L'adoptant » (disait-il) n'aura point à se plaindre de cette disposition, car elle était dans l'opinion com» muneet dans les projets du temps. Cette heu>> reuse combinaison qui fait de l'adoption un » contrat entre majeurs, bien qu'elle tire son >> origine des services rendus à un mineur,n'exis>> tait point encore. Elle n'avait même pas été >> aperçue, et l'on ne voyait, dans l'adoption » conférée à un mineur, qu'un acte qui, parfait » et irrévocable de la part de l'adoptant, res»tait néanmoins sujet à la ratification de l'a» dopté, à l'époque de sa majorité »; 2o quela faculté de réduire l'adopté à un tiers des droits d'un enfant naturel et légitime, moyennant l'affirmation prescrite par l'art. 4 de la même loi, ne peut avoir lieu, suivant le même article, que dans le cas où l'adoptant n'a pas déterminé, par l'acte d'adoption, les droits que l'adopté pourrait exercer dans sa succession; que Françoise Tixier n'a donc pas pu user de cette faculté, puisqu'en adoptant Marie Faur, elle lui avait expressément conféré tous les droits que la loi pourrait un jour accorder aux enfans adoptifs; 30 que les enfans adoptifs sont investis, et par l'art. 3 de la loi du 25 germinal an 11, et par l'art. 350 du Code civil, des mêmes droits que les enfans naturels et légi

times; qu'ils ont, par conséquent, celui de faire réduire à l'usufruit de la moitié des biens, les avantages faits à un second époux.

Sur ces debats, arrêt de la cour d'appel de Riom, qui,

« Attendu que l'adoption était irrévocable de sa nature, même avant la promulgation du Code civil, et que Françoise Tixier n'a pas pu, par une affirmation que l'art. 4 de la loi transitoire du 25 germinal an 11 ne l'autorisait pas à faire dans les circonstances où elle se trouvait, déroger au reglement qu'elle avait fait par l'acte d'adoption même, des droits de successibilité de ses enfans adoptifs ;

» Déclare Marie Faur investie du droit d'hérédité appartenant aux enfans nés de mariage; réduit à l'usufruit de la moitié des biens de James Margnat, les avantages faits par son testament à Françoise Tixier; condamne Guil. laume Savouroux à la restitution des fruits de l'autre moitié, à partir de l'ouverture de la succession ; et ordonne qu'il sera procédé, par des experts, à l'opération du partage ».

Guillaume Savouroux se pourvoit en cassa. tion, et présente ainsi ses moyens :

« 10 L'adoption n'était pas connue dans no tre ancienne législation. La loi du 18 janvier 1792 en décréta bien le principe, mais elle n'en régla point les effets, et conséquemment n'en determina point l'irrévocabilité; car l'adoption n'est pas irrévocable de sa nature; c'est une institution purement civile, dont les résultats varient selon les temps, les lieux et les mœurs la loi seule règle ces résultats. A Rome même, l'adoption était révocable; elle l'était par le moyen de l'émancipation; elle n'était pas une imitation parfaite de la nature, puisque Justinien, par la loi pénultième, C. de adoptionibus, n'accorda le droit de puissance paternelle qu'à ceux qui adoptaient leurs descendans, et le refusa à ceux qui adoptaient des étrangers.

» On ne peut argumenter de la loi 34, D. de adoptionibus. Cette loi dit que, si un fils vous avait été donné en adoption, à condition qu'après un certain temps, par exemple, après trois ans, vous me le donneriez en adoption, je n'aurai point d'action contre vous, parceque, comme dit Labéon, nos mœurs ne nous permettent pas d'avoir un fils pour un certain temps. Il résulte seulement de cette loi, que l'adoption ne pouvait être faite à temps, et non qu'elle fût irrévocable, ce qui est trèsdifférent.

>> Si l'adoption n'est pas, de sa nature, essentiellement irrevocable, peut-on, sans aller contre l'intention du législateur, la déclarer telle, malgré son silence? Non, certes, car

tout fait présumer que le législateur, en décrétant purement et simplement l'adoption, sans l'assujetir à aucune forme, à aucune con. dition, n'a voulu que faire l'essai d'une institution qui n'avait jamais existé en France, et dont les avantages étaient incertains. Les formalités nombreuses et imposantes dont le Code civil a environné la même institution, en sont une preuve suffisante; car, pourquoi le législateur l'aurait-il soumise à tant de conditions? Si, sous le règne de la loi du 18 janvier 1792, l'absence de ces mêmes conditions n'avait pas été nuisible, si l'essai fait par le législateur avait eu d'heureux résultats, devait on, sans nécessité, multiplier les formes et les obstacles?

» La sévérité du législateur est presque toujours une preuve de sa sagesse; et lorsque cette sévérité succède à sa facilité, c'est que celle-ci n'a pas été sans inconvéniens. On a senti, en rédigeant le Code, qu'il avait été dangereux d'admettre une institution seulement en principe, et saus en régler les effets; qu'en séparant le principe du mode d'execution, on s'était engagé dans des embarras d'où l'on ne pouvait plus sortir. Le seul moyen de réparer les maux inséparables des adoptions trop inconsidérément faites, c'est d'en admettre la Révocation.

>> L'adoption n'est point une imitation exacte et parfaite de la nature; elle est seulement une transmission de nom et de biens. Cette transmission est irrévocable, d'après le Code civil, parcequ'elle est préparée par des liaisons anterieures, ou motivée par la reconnaissance de l'adoptant; parcequ'elle ne peut avoir lieu qu'entre des majeurs; parcequ'elle forme un véritable contrat, un lien de droit, vinculum juris; parceque les formalités, sans lesquelles elle ne peut avoir lieu, garantissent à la société que l'adoptant et l'adopté remplissent le vœu de la loi, que leur union n'est point contraire aux mœurs, qu'elle est un bienfait pour l'un et un bonheur pour l'autre. Il en était differemment sous l'empire de la loi de 1792. Sans liaisons antérieures, saus motifs de reconnaissance, par caprice, on pouvait adopter même les mineurs. Il est bien certain que ces derniers n'étaient pas liés irrévocablement; il est bien certain qu'ils n'avaient pu s'engager, qu'ils pouvaient renoncer à la faveur de l'adoption. Pourquoi l'adoptant n'aurait-il pas la même faculté, si l'adopté devient ingrat, indigne de ses bienfaits? L'adoption est-elle seulement établie en faveur de l'adopté? Le legislateur veut-il récompenser l'ingratitude?

» L'adoption est une faveur de la loi, commune à l'adoptant et à l'adopté ; elle les pro

tège également : elle a permis au mineur, devenu majeur, de renoncer à l'adoption ; la même faculté doit être accordée, à plus forte raison, à l'adoptant, si l'adopté, loin de répondre au bienfait de l'adoption, s'en montre indigne. Nous disons à plus forte raison, parceque c'est un principe non contesté que les droits sont d'autant plus grands, que les sacrifices l'ont été. L'adoptant a fait seul tous les sacrifices; c'est lui qui s'est établi le protecteur, le père de l'adopte; tout est bienfai sance et profit pour celui-ci. Si l'adopté peut renoncer à l'adoption, l'adoptant doit donc pouvoir la révoquer. Forcer une personne généreuse de vivre avec l'ingrat comblé de ses bienfaits, c'est un supplice affreux, qui n'est point entre dans la pensée du legislateur. Une donation entre-vifs est certainement un acte bien irrévocable; cependant elle est susceptible de Revocation dans le cas d'ingratitude. L'adoption n'est autre chose qu'une espèce de donation. Elle doit donc être également revocable dans le mène cas : Ubi eadem ratio, idem jus.

Tout ce qui n'est pas défendu par la loi, est permis. La loi du 18 janvier 1792 n'ötait pas à l'adoptant la faculté de révoquer l'adoption. Donc il pouvait la révoquer.

» Ces conséquences sont forcées. On ne peut les rejeter sans rejeter les principes eux-mê

mes.

» La loi du 18 janvier 1792, en ne déterminant, ni les formes dans lesquelles devait se faire l'adoption, ni ses effets, l'a laissée dans la classe des contrats ordinaires. Elle est donc, comme eux, soumise aux mêmes conditions pour acquérir l'indissolubilité. Ainsi, les adoptions faites par contrat de mariage, etaient indissolubles, parceque ce contrat imprime le sceau de l'irrevocabilité à toutes les conventions qu'il renferme.

» Dans l'espèce, on n'a employé aucune des formalités qui rendent les actes indissolubles. On a donc pu valablement révoquer l'adoption.

» La loi du 25 germinal an 11 appose, diton, le sceau de l'irrévocabilité à toutes les adoptions antérieures, en n'accordant qu'à l'individu adopté en minorité, la faculté d'y renoncer. Si ces adoptions étaient irrévocables, pourquoi cette loi venait-elle les déclarer telles, du moins à l'égard de l'adoptant? On ne déclare point irrévocable, un acte qui l'est par sa nature, ou en vertu d'une loi précédente. Le législateur ne fait rien d'inutile, et une pareille declaration le serait étrangement. Il faut nécessairement conclure de là, que la loi transitoire n'a rendu irre

vocables, de la part de l'adoptant, que les adoptions encore existantes au moment de sa publication; mais qu'elle n'a pu faire revivre celles déjà révoquées : autrement, ce serait lui donner un effet rétroactif.

>> On avait dit au conseil d'état, pour faire rejeter l'adoption, qu'elle n'était pas dans nos habitudes, parceque, depuis que les lois s'en étaient occupées, il n'en avait été fait qu'un très-petit nombre. La réponse du tribun Gary vient à l'appui du système de la révocabilité: cet argument perd sa force, disait-il, si l'on se souvient que toutes les lois qui ont traité de l'adoption, n'ont fait qu'en établir ou en rappeler le principe, sans en déterminer les effets. Faut-il s'étonner, après cela, que peu de gens se soient empressés de rechercher un titre dont les obligations et les droits étaient inconnus? Les hommes sages ne prennent point d'engagement, quand ils en ignorent l'étendue.

» Si les obligations et les droits que pouvait faire naître l'adoption étaient inconnus, si les hommes sages en ignoraient l'étendue, peut-on, sans la plus grande témérité, dire que l'adoption établie par la loi du 18 janvier 1792, était irrévocable? Peut-on, sans s'ériger en législateur, suppléer jusque-là au silence de la loi ?

» 20. La disposition de l'arrêt attaqué, qui prononce la réduction des avantages testamentaires faits par la dame Savouroux à son second mari, est en opposition manifeste avec les art. 13 et 14 de la loi du 17 nivôse an 2: ces articles n'autorisent la réduction qu'en faveur des enfans nés du mariage ou d'une 1 précédente union. Les enfans adoptifs ne sont ni l'un ni l'autre. Les art. 13 et 14 de la loi du 17 nívóse an 2 leur sont étrangers.

» 30. Dans la supposition où la réduction pourrait avoir lieu, les fruits ne seraient dus que du jour où la loi du 25 germinal an 11 a donné ouverture au droit de l'enfant adoptif. L'arrêt a donc violé l'art. 57 de la loi du 17 nivòse an 2.

» 4°. La déclaration faite dans l'acte d'adoption, et qui conférait à Marie Faur tous les droits hereditaires que la loi accorderait aux enfans adoptifs, ne spécifiait pas ce que l'adoptant avait voulu donner et n'avait pu empêcher Françoise Tixier d'expliquer son intention, conformément à l'art. 4 de la loi

transitoire.

» 5o. Enfin, la dernière partie de l'arrêt attaque, qui ordonne que le partage de la succession sera fait par des experts, et non par un notaire, viole l'art. 828 du Code civil ».

Par arrêt du 26 avril 1808, au rapport de M. Coffinhal,

» Considérant, sur le premier moyen, que l'arret attaqué, en déclarant irrévocable, de la part des père et mère adoptans, une adoption faite en l'an 4, s'est conforme au principe du droit romain, d'après lequel on ne pouvait pas adopter pour un certain temps, par la même raison que ceux qui naissent de nous, sont également nos enfans pour toujours; qu'il s'est également conforme à l'art. 2 de la loi transitoire du 25 germinal an 11, lequel, n'accordant la faculte de renoncer à l'adoption, qu'aux enfans adoptés en minorité ou encore mineurs, la refuse aux adoptans, toujours majeurs que cette loi ayant pour objet de determiner le sort de toutes les adoptions, pour l'avenir et pour le passé, dont une loi du 16 frimaire an 3 s'était seulement occupée pour prescrire des actes conservatoires, il était impossible de ne pas lui donner un effet rétroactif, et de ne pas en appliquer les dispositions à celle dont il s'agit, à l'époque de laquelle l'adoption avait été solennellement consacrée par la convention nationale; et qu'elle a dû agir ainsi sur cette adoption, nonobstant la rétractation de James Margnat et Françoise Tixier, sa femme parceque le sort de la rétractation dependait de l'effet que lui donnerait la loi, laquelle l'a anéantie en refusant aux adoptans le droit de révoquer les adoptions; et cette Révocation n'avait pas été acceptée par Marie Faur; qu'ainsi, en appliquant à l'adoption de Marie Faur les dispositions de la loi du 25 germinal an 11, l'arrêt attaqué s'est parfaitement conforme aux principes;

» Considerant, sur le second moyen, qu'à la vérité, les art. 13 et 14 de la loi du 17 niyose an 2, sous l'empire de laquelle James Margnat est décédé, n'admettaient pour res triction au droit accordé à l'époux de dispo

ser

en faveur du conjoint survivant, de la totalité de sa fortune, que le seul cas où les époux auraient un ou plusieurs enfans de leur union ou d'un précedent mariage : mais que la loi transitoire ayant accorde aux enfans adoptifs tous les droits de successibilité qui appartiendraient à un enfant legitime, l'ellet de cette assimiliation a dû être d'etendre aux enfans adoptifs le droit de reduire à l'usufruit de la moitié, les avantages que James. Margnat avait accordés à Françoise Tixier, son épouse survivante;

» Considerant, sur le troisième moyen, que la restitution des fruits perçus jusqu'à concurrence de la moitié de l'usufruit, a pu être ordonnee, sans donner un effet rétroactif à

[ocr errors]

la loi du 25 germinal an 11, laquelle est nécessairement rétroactive, puisquelle règle l'effet des adoptions antérieures à sa publication; et sans contrevenir à l'art. 57 de la loi du 17 nivóse an 2, attendu que cet article n'est applicable qu'aux héritiers qui, en vertu de l'effet rétroactif de la même loi, auraient réclamé des successions ouvertes depuis le 14 juillet 1789, jusqu'à sa publication: » Considerant, sur le quatrième moyen, que la déclaration de Savouroux et sa femme, du sixieme jour complementaire an 11, an nonçait leur perseverance dans la Révocation faite de l'adoption, tandis qu'aux termes de l'art. 4 de la loi transitoire, ils devaient seulement affirmer devant le juge de paix, qu'ils n'avaient pas en l'intention de conférer aux enfans adoptifs tous les droits de successibilité qui appartiendraient à un enfant légitime; qu'ainsi, cet acte ne remplissant pas le vœu de la loi, il a pu être mis à l'écart, sans la violer; que d'ailleurs, James Margnat et sa femme avaient déclaré, dans les deux actes d'adoption, qu'ils assuraient a Marie Faur et à Tixier son co-adopté, les portions hereditaires que les lois existantes et celles à venir pourraient leur attribuer dans les biens qui leur appartiendraient à leur décès; qu'ainsi, ils n'étaient plus dans le cas prévu par l'art. 4 de la loi du 25 germinal an 11;

» Considerant, sur le cinquième moyen, pris de ce que l'arrêt attaque a renvoyé les parties devant des experts, et non pas devant un notaire, pour des opérations de partage, que l'art. 828 du Code civil est facultatif à cet égard; que d'ailleurs rien ne s'oppose au choix d'un notaire ou de toute autre personne pour experts;

» La cour rejette le pourvoi..... V. l'article Adoption, et mon Recueil de Questions de droit, au même mot.]]

REVOCATION DE CODICILLE. Nous entendons ici par Codicille, non-seulement les actes qualities de ce nom dans les pays de droit écrit, mais encore les testamens qui se font dans les coutumes où ils peuvent valoir sans institution d'héritier [[et par conséquent ceux qui se font aujourd'hui dans tous les pays regis par le Code civil. ]]

Tous ces actes sont essentiellement des dispositions de dernière volonté, et peuvent consequement être révoqués jusqu'à la mort de celui qui les a faits.

Cette revocation peut s'opérer
10. Par un testament postérieur,
20. Par un codicille,

30. Par une donation entre-vifs,

4o. Par une simple déclaration, 50. Par la survenance d'enfant,

60. Par le laps de temps, lorsqu'il s'agit d'un codicille fait dans une forme extraordinaire et privilégiée ;

70. Par le changement d'état, qui ôte la capacité de tester;

80. Par la laceration, rupture ou radiation du codicille.

De ces buit causes de Révocation, les trois dernieres sont absolument, et dans tous les points, communes aux testamens et aux codicilles : ainsi, nous ne parlerons, dans cet article, que des cinq premières, et nous réserverons les trois autres pour l'article Révocation de testament.

S. I. De la Révocation d'un codicille par un testament postérieur.

I. Lorsqu'un testament révoque généralement toutes les dispositions précédentes que le testateur a pu faire, il ne peut être douteux que les codicilles, dont la confection est antérieure à cet acte, ne soient anéantis. C'est d'ailleurs ce que nous enseigne la loi 19, C. de fideicommissis.

II. Mais que doit-on décider à l'égard d'un testament qui ne contient pas de clause révo catoire ?

Il y a, sur ce point, une différence remarquable entre la jurisprudence du Digeste et

celle des Institutes.

La loi 5, D. de jure codicillorum, dont Pa pinien est l'auteur, veut que le testament emporte de plein droit la Révocation des codicilles antérieurs ; à moins qu'il ne les confirme expressément par une clause particulière : Antè tabulas testamenti codicilli facti non aliter valent, quàm si testamento quod posteà factum est, vel codicillis confirmentur.

Les compilateurs du Digeste avaient oublie, en transcrivant cette loi, de faire mention du rescrit des empereurs Severe et Antonin qui en avaient rejeté la décision. Mais cet oubli a été réparé dans les Institutes; voici ce que porte le §. 1, de codicillis:

« Une personne ayant fait d'abord un codi»cille et ensuite un testament, Papinien a pré» tendu que le codicille ne pouvait valoir, » moins que le testament n'en eút ordonné » spécialement l'exécution. Mais les empereurs » Severe et Antonin ont déclaré par un rescrit, » qu'on pouvait demander un fideicommis en » vertu d'un codicille antérieur au testament, » dés qu'il paraissait que l'auteur du testament » ne s'était point écarté, en le faisant, de l'in » tention qu'il avait manifestée dans son codi.

» cille»: Si apparet eum qui testamentum fecit, à voluntate quam in codicillis expresse. rat, non recessisse.

Ces derniers termes peuvent, du premier coup d'œil, paraître obscurs ou équivoques. Il semble en effet qu'ils laissent douter si, pour qu'un codicille ne soit pas révoqué par un testament postérieur, il ne faut pas que le testateur ait témoigne dans celui-ci une intention formelle de laisser subsister celui-là.

Mais ce doute s'évanouira, si l'on fait attention à l'opposition que met le texte dont il s'agit, entre l'opinion de Papinien et le rescrit des empereurs Severe et Antonin, opposition qui certainement n'existerait pas, si les deux législateurs avaient, comme le jurisconsulte, pensé qu'il fût necessaire, pour laisser son effet à un codicille, de le confirmer d'une manière quelconque par le testament postérieur. Il faut donc dire, avec Vinnius, que le testateur est suffisamment censé n'avoir pas voulu déroger à sa disposition précédente, par cela seul qu'il n'y a pas réellement déroge: Satis apparet non recessisse, ex eo ipso quod non appa

ret recessisse.

III. Comment donc un testament qui ne contient pas de clause révocatoire, peut-il deroger à un codicille precedent?

Cela peut arriver de deux manières : ou par une disposition contraire à celle qui est conte nue dans le codicille, ou par une disposition qui, à la vérité, est faite en faveur de la même personne et a le même objet, mais ne laisse pas d'être différente.

La loi 28, D. de adimendis legatis, nous fournit un exemple de ce second genre de Revocation. Un testateur avait legue un fonds à Mevius, et l'avait chargé de le rendre à Titius : par une disposition postérieure, il avait laissé à titre de fideicommis le même fonds à la même personne, mais sans lui imposer la charge de le rendre. Le jurisconsulte demande si la substitution établie par le premier acte en faveur de Titius, subsiste encore, ou si elle est revoquée par le deuxième; et il répond qu'il faut s'en tenir à la dernière disposition : ce qui an. nonce bien clairement qu'il n'y a plus de substitution pour Titius.

Mais si le testateur fait, en faveur des niêmes personnes, et à diverses époques, des dispositions différentes, et que les unes corrigent les autres en certains points, il n'est censé avoir dérogé aux premières qu'en ce qu'il a réformé; le surplus conserve tout son effet. C'est ce que décide la loi 30, §. 3, D. de adimendis legatis : « Un testateur (dit-clle) institue ses >> filles par portions inégales, et fait entre elles

» la distribution de presque tous ses biens; » après quoi, il ajoute : Le restant de mes » biens appartiendra à telle et telle, deux de » mes filles, et elles supporteront seules tou»tes les charges de ma succession. Quelque » temps après, il fait, entre les mêmes filles » dont il avait été question dans son testa>>ment, une distribution toute différente de ses » biens; mais il en omet quelques uns, et ne les » assigne nommément à aucune de ses héri»tieres. On demande si ces biens doivent ap» partenir aux deux filles que le testament ap. » pelait à tout ce qui n'était point distribue »nommément. Il faut répondre que le testa»teur n'a pas révoqué toute sa disposition, mais qu'il y a seulement dérogé dans les » points qu'il a reformés ».

[ocr errors]

La loi 27, S. 1, D. de legatis 3o, prévoit un cas singulier. Un testateur, nommé Pompeius Hermippus, avait un fils et une fille, nommes Hermippus et Titiana; il les institua tous deux héritiers, son fils pour deux tiers, et sa fille pour le tiers restant; après cette disposition, il leur fit à chacun divers prélegs, et ordonna que, si Hermippus venait à mourir sans enfans, tel immeuble serait donné à Titiana. Par une autre disposition, il légua à sa fille des biens spécialement désignés, avec la clause qu'elle devait s'en contenter pour toute portion héréditaire, et pour lui tenir lieu de ce qui lui avait été laissé précédemment. Les biens d'Hermippus fils ayant été confisqués, Titiana demanda le fonds qui lui avait été assigné par la première disposition de son père, en cas que son frère mourut sans enfans. Le jurisconsulte Paul, consulté sur cette prétention, répondit que d'abord il lui paraissait que la première disposition avait été totalement révoquée par la seconde ; mais que l'équité réclamait l'exécution du fideicommis que Hermippus avait été chargé de rendre après sa mort; et qu'il n'avait été dérogé à la première disposition, que pour les choses que le fils devait délivrer, pendant sa vie, à sa sœur.

Un testateur me fait, par son codicille, un legs conditionnel : il répète le même legs dans son testament, mais il n'y met plus de condition. Le codicille doit-il être regardé en cela comme révoqué ? Les lois 87, 88 et 89, D. de conditionibus et demonstrationibus, décident qu'oui.

La loi 18, D. de alimentis legatis, propose cette espèce. Un testateur affranchit ses esclaves, et leur lègue à chacun une pension de dix écus par mois. Il fait ensuite une autre dispo sition par laquelle il leur lègue sept écus par mois pour leurs alimens, et dix écus par au pour leur vestiaire. Les affranchis peuvent-ils

« PreviousContinue »