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» et leurs légataires, comme un privilége, mais » bien comme une exception aux priviléges et » aux hypothèques ; et que c'est à ce titre que » cette loi a réservé ce droit par l'art. 14; d'où il suit qu'elle n'a pas voulu l'assujétir aux » règles établies par l'art. 39, concernant les » priviléges et hypothèques, et par conséquent » que la date de l'inscription prise par les » sieurs Grimaud est indifferente »; adjuge aux sieurs Grimaud la Séparation de patrimoines qu'ils réclament, et ordonne qu'ils seront colloques avant la dame Duliège.

La dame Duliège se pourvoit en cassation; mais par arrêt du 22 janvier 1806, au rapport de M. Vallée,

« Attendu qu'en ordonnant la Séparation des patrimoines, la cour d'appel de Paris, loin d'avoir contrevenu à la loi du 11 brumaire an 2, s'y est parfaitement conformée ;

» La cour rejette le pourvoi.... ».

20 Le 8 septembre 1748, contrat notarié par lequel François-Thomas Gibault fieffe à JeanFrançois Lesouef, le domaine de la Champagne, situé dans la commune de Chevilly, pres Coutances, moyennant une rente foncière de 400 livres.

» En 1788, les enfans du fieffataire reconnaissent cette rente par un titre-nouvel, et s'obligent de la payer et continuer comme par le passé, ux termes, priviléges et hypothè des titres et contrats qui la concernent, ques sans y déroger ni innovation.

Le 21 messidor an 10, Andre Lesouef vend le domaine de la Champagne aux sieurs Sarrot et Lécrivain, sans les charger de la rente de 400 livres.

Les acquéreurs ne payent pas le prix, et s'obligent seulement de le verser entre les mains de qui il appartiendra.

Le contrat d'acquisition est transcrit au bureau des hypothèques, et notifié, conformément à la loi du 11 brumaire an 7, aux creanciers inscrits.

Ceux-ci surenchérissent le prix de la vente, et provoquent la vente judiciaire du do

maine.

Le 17 thermidor an 10, les sieurs Gibault frères, petits-fils et heritiers du fiellateur, prennent une inscription, tant pour le capitalque pour les arrerages gchus de la rente.

Le 25 nivose an 11, le domaine est adjugé au sieur Lefandeux, l'un des créanciers inscrits avant la transcription du contrat de vente du 21 messidor an 10.

En conséquence, le procès-verbal d'ordre est ouvert, et les sieurs Gibault y forment une demande en Séparation de patrimoines, en vertu de laquelle ils prétendent se faire collo.

quer avant les créanciers personnels d'André Lesouef, quoiqu'inscrits antérieurement à la transcription du contrat du 21 messidor an 10, et à l'inscription qu'ils n'ont prise eux-mêmes que le 17 thermidor suivant.

Le sieur Lefaudeux et les autres créanciers personnels d'André Lesouef, opposent à cette demande deux moyens. D'une part, disent-ils, la Separation de patrimoines ne peut pas être réclamée après la vente des biens provenans de l'auteur de l'héritier; les lois romaines sont tres formelles à cet égard, et jamais on ne s'est écarte de leurs dispositions D'un autre cote, depuis la loi du 11 brumaire an 7, il n'y a plus d'hypotheque ni de privilege sans inscription.

Le 6 fructidor an 11, jugement du tribunal civil de Coutances, qui, sans s'arrêter a la demande des sieurs Gibault en Séparation de patrimoines, ordonne que les creanciers seront colloques dans l'ordre de leurs inscriptions respectives.

Les sieurs Gibault appellent de ce jugement; et le 7 germinal an 12, arrêt par lequel,

« Considérant que la demande en Séparation de patrimoines dont il s'agit, a été faite conlormement aux lois anciennes qui autorisaieut cette demande après la vente des biens du defunt faite par l'heritier, mais avant la distribution des deniers provenans de la vente, et qui permettaient cette demande aux creanciers chirographaires du defunt,'de mème qu'aux créanciers hypothecaires; que l'art. 14 de la loi du 11 brumaire an 7 n'a mis d'autre condition pour ladite demande, que de se cou former à ces lois ;

» La cour (d'appel de Caen)....., réformant, ordonne que, par préférence aux citoyens Magne et Lefaudeux, ainsi qu'a tous autres créanciers du fils de Lesoucf, les citoyens Gibault sont et demeurent colloques, tant pour le capital que pour les arrérages de la renie a eux dus; sauf neanmoins le droit de l'acquereur de la continuer ».

Recours en cassation de la part des sieurs Lefaudeux et consorts. Mais par arrêt du S septembre 1806, au rapport de M. Busschop,

« Considérant que l'art. 14 de la loi du in brumaire a totalement distrait des privileges et hypotheques que cette loi a voulu etablir et conserver, le droit de Séparation de patrimoines qu'ont les créanciers et légataires de personnes décédées; et qu'ainsi, on ne peut pas étendre à ce droit de séparation les formalites que la même loi n'a prescrites que pour la conservation des priviléges et hypothèques; d'où il suit que l'arrêt attaque, bien loin de

s'être écarté des dispositions de ladite loi, s'y est parfaitement conformé :

» La cour rejette le pourvoi....».]]

S. IV. Sur quels biens peut s'exercer le droit de Separation?

I. Il n'y a là-dessus aucune différence entre les meubles et les immeubles : tous sont indistinctement soumis à la Separation, tant qu'ils existent dans les mains de l'héritier,qu'ils peuvent être demêles d'avec ceux desquels il s'agit de les séparer, et que le droit des créanciers du defunt n'est pas prescrit.

II. Mais c'est une question si, dans l'exercice de ce droit, les biens donnes par un père à son fils, et rapportés par le second à la succession du premier, doivent être considerés comme biens du père ou comme biens du fils, et si, en consequence, les créanciers de l'un peuvent les comprendre dans la Séparation qu'ils exercent contre les créanciers de l'autre.

On dit pour les créanciers du père, que, par le rapport, le bien donné tombe dans la succession et rentre dans le patrimoine du donateur, comme s'il n'en était jamais sorti ; et l'on ajoute à cette raison l'autorité d'un arrêt du parlement de Paris, rapporté en ces termes par Gouget, Traité des Criées, part. 3, quest. 35, page 737. « Une donation pure et irrevo» cable entre-vifs avait été faite par un pere, >> en faveur de mariage, à son fils, d'une sienne terre en avancement d'hoirie; s'étant le fils » depuis porté heritier de son père, la terre à » lui donnée avec tous ses autres biens criés et » décrétés : la contention était entre les créan» ciers du père et ceux envers lesquels le fils se » trouvait particulierement obligé, par l'ordre » des hypothèques qu'ils prétendaient respecti>>vement sur la chose donnée... Jugé là-dessus, » par arrêt du 9 mai 1615, donné en la première » chambre des enquêtes, sur l'ordre du prix >> provenant de la vente des biens de Philippe » de Biencourt, sieur de Poictrincourt, que les » créanciers du pere seraient portés entr'eux » selon leur ordre, et payés sur la terre qu'il » avait donnée,et ce,par preference aux créan »ciers avec lesquels le fils se trouvait avoir » particulierement contracte, soit auparavant » ou depuis la donation ».

Néanmoins Lebrun décide que les créanciers du fils doivent être preferés, parceque le rapport n'a pour objet que l'égalité entre les enfans, et n'opère ses effets qu'à l'égard des heritiers entre eux.

L'arrêt rapporté par Gouget, paraît avoir été rendu dans une espèce où les créanciers du pére avaient une hypothèque antérieure à

la donation faite au fils. A la vérité, Gouget
ne le dit pas expressément, mais il le fait bien
entendre, lorsqu'après en avoir rendu un
compte fort vague, il en restreint la décision
à ce cas. Voici ses termes : « Je limite nean-
» moins cela, pour n'avoir lieu sinon respectu
» des créanciers hypothécaires du père, qui
» auraient contracté avec lui auparavant la
>> même donation. Car autrement, n'ayant
» plus rien en la chose, aussi les hypothèques
» qu'il y aurait depuis affectées, ne pourraient-
» elles subsister, ni avoir effet, attendu que
>> nul ne peut valablement constituer hypothe-
» que, sinon sur la chose sienne, mèmement
» au préjudice des créanciers, qui cependant
>> auraient, sur l assurance de sa donation,
» contracté de bonne foi avec le donataire,
» quibus jus in re quæsitum esset, voire non-
» obstant le donataire se fut après porte
que
» heritier de son père, et appréhendé la suc-
»cession ».

III. Que doit-on décider par rapport aux fruits, soit naturels, soit civils que les biens héréditaires ont produits avant la demande en Séparation? Peuvent-ils, en vertu de cette demande, être reclames par les créanciers du défunt, à l'exclusion de ceux de l'heritier?

La négative a été prononcee par un arrêt du parlement de Paris, du 16 fevrier 1694, rapporte dans le Dictionnaire des arrêts, de Brillon, au mot Séparation, no 4.

S. V. Quels sont les effets de la Siparation de patrimoines?

I. La Séparation, comme on l'a déjà dit, fait préférer les créanciers et les legataires du defunt, sur les biens qu'il a laisses, aux créanciers personnels de l'héritier.

II. Cet effet de la Séparation a-t-il lieu dans les pays de nantissement, lorsque les creanciers de l'héritier ont pris hypotheque sur les biens de la succession, avant que les créanciers du defunt eussent forme leur demande en Séparation?

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Pour faire mieux entendre la question, supposons qu'elle se présente dans la coutume d'Artois. L'art. 74 de cette loi municipale porte: « Toutes sentences, promesses, testa» mens. et généralement toutes obligations » personnelles n'engendrent hypotheque, sai» sine ou réalisation sur les héritages du con» damné, promettant, testateur ou obligé; » mais pour valablement charger ou hypothe » quer heritage, il faut que ce soit par l'une >> des trois voies à ce introduites, savoir, par »mise de fait. etc. ».

Peut-on inférer de là que, dans la coutume d'Artois, les créanciers de l'héritier nantis sur les biens de la succession, acquièrent un droit réel et la préférence contre les créanciers du défunt qui n'ont pas été nantis, mais ont exercé le bénéfice de Séparation? Non le seul effet de l'art. 74 est que Thypothèque qui s'acquérait chez les Romains par la simple convention des parties, et à laquelle donnent lieu en France tous les actes revêtus d'un caractère public, ne s'acquiert, dans la coutume d'Artois, que par les formalités du nantissement, en sorte qu'entre les différens créanciers d'un même débiteur, il n'y a que ceux dont les contrats ont été nantis, qui puissent se faire colloquer par ordre d'hypothèque.

Mais cette disposition n'exclud pas les au tres privileges ou droits de préference qui ont lieu indépendamment de l'hypothèque.

Par exemple, il est certain que, dans la coutume d'Artois, les créanciers du défunt, quoique dépourvus de nantissement, sont préferes à ses legataires, parce que, pour cela, ils n'ont pas besoin d'hypothèque, mais seulement de la maxime de droit, bona non intelliguntur, nisi deducto ære alieno. (On n'entend par biens, que ce qui reste après la déduction des dettes.)

Il en est de même, à plus forte raison, dans le cas de la concurrence des créanciers ou légataires d'une succession avec les créauciers de l'héritier : ceux-ci ne peuvent saisir les biens de la succession qu'autant qu'ils appartiennent à l'héritier même ; et par la régle qu'on vient de rappeler, bona non intelliguntur, nisi deducto ære alieno, il n'appartient à l'héritier que ce qui reste après le paiement des charges hereditaires. Il faut donc que ces charges soient acquittées avant que les creanciers, même hypothecaires de l'héritier, puissent rien pretendre aux biens de la suc

cession.

C'est, dit Brodeau, lettre H, S. 19, ce qui a été jugé par plusieurs arrêts donnés en pays de nantissement. C'est aussi l'espèce et la décision précise de l'arrêt du 3 septembre 1692. que nous avons cité plus haut, S. 3, no 5.

[[ III. Par la même raison, les créanciers de l'héritier, qui ont pris des inscriptions hypothécaires sur les biens de la succession, ne laissent pas d'être primés par les créanciers du défunt, lorsque ceux-ci exercent le droit de Separation de patrimoines.

Mais, comme on l'a vu ci-devant. §. 3, no 6. il faut pour cela, que les créanciers du défunt aient fait inscrire sur chacun de ses

biens, dans les six mois de l'ouverture de la succession, le privilège qu'ils ont de demander cette Séparation.

Du reste, « avant l'expiration de ce délai, » aucune hypothéque ne peut être établie avec » effet sur ces biens par les héritiers ou repre» sentans, au prejudice de ces créanciers ou » legataires ». Ce sont les termes de l'art. 2111 du Code civil. ]]

IV. Lorsqu'il n'y a qu'une partie des creanciers du defunt qui demande la Séparation de biens, quel en est l'effet?

Il est le même pour eux, que si tous l'avaient demandé : c'est-à-dire qu'ils sont preferes aux créanciers de l'héritier, sur les biens du defunt, non pas pour la totalité de leurs créances, mais seulement à concurrence de ce qu'ils y auraient pris, si les autres créanciers de la succession avaient obtenu la Separation comme eux.

V. Lorsque les créanciers du défunt sont payés, ceux de l'héritier peuvent se venger sur ce qui reste dans la succession. C'est ce que décident la loi 1, §. pénultième, et la loi 3, §. dernier, D. de Separationibus.

VI. Mais s'il ne se trouve pas dans la succession de quoi payer les créanciers du defunt, ceux-ci peuvent-ils, après l'avoir épuisée, revenir sur le patrimoine de l'héritier ?

Cette question est difficile par la contrariété des lois qui l'ont prévuc.

Suivant la loi 1, S. pénultième, D. de Separationibus, la Séparation exclud ceux qui l'ont obtenue, de tout recours sur les biens de l'héritier; mais si la demande en a eté faite par ignorance du véritable ctat des choses, et que cette ignorance ait été occasion. née par une cause très-juste, les créanciers du défunt peuvent se faire restituer en entier contre la Séparation : Item sciendum est vulgo placere creditores quidem heredis, si quidi superfuerit ex bonis testatoris,posse habere in suum debitum : creditores verò testatoris ex bonis heredis nihil. Cujus rei ratio illa est quòd qui impetravit Separationem,sibi debet imputare suam facilitatem, si cùm essent bona idonea heredis, illi maluerint bona potiùs defuncti sibi separari: heredis autem creditoribus hoc imputari non possit. At si creditores defuncti desiderent ut etiam in bonis heredis substituantur, non sunt audiendi; Separatio enim quam ipsi petierunt eos ab istis bonis separavit. Si tamen temerè Separationem petierunt creditores defuncti, impetrare veniam possunt, justissima scili

eet ignorantiæ causa allegată. Cette décision est du jurisconsulte Ulpien.

La loi 3 du même titre, qui a pour auteur le fameux Papinien, propose d'abord un cas absolument particulier, et sur lequel il ne pent y avoir l'ombre de difficulté.

Un débiteur se trouve héritier de sa caution. Le créancier demande la Séparation des biens de celle-ci d'avec le patrimoine du premier; et après avoir rempli, au moyen de leur valeur, une portion de sa créance, il veut revenir contre l'héritier : y est-il fondé? Sans doute. La qualité d'héritier n'a pas effacé dans la personne de son debiteur, celle de principal oblige. Le créancier a donc deux titres contre lui. Qu'importe que, par la Séparation. il ait renoncé à l'effet de celui de l'héritier? Le titre de principal obligé demeure toujours.

Après avoir ainsi résolu cette espèce particulière, Papinien passe a la thèse générale, et il décide que les créanciers du défunt, qui ont obtenu la Séparation, peuvent encore recourir contre l'héritier, pourvu que tous les créanciers de celui-ci soient payés: Debitor fidejussoris heres extitit, ejusque bona venierunt: quamvis obligatio fidejussionis extincta sit, nihilominùs Separatio impetrabitur, petente eo cui fidejussor fuerat obligatus, sive solus sit hereditarius creditor, sive plures. Neque enim ratio juris ( quæ ) causam fidejussionis propter principalem obligationem, quoe major fuit, exclusit, damno debet adficere creditorem qui sibi diligenter prospexerat. Quid ergò si, bonis fidejussoris separatis, solidum ex hereditate stipulator consequi non possit? Utrùm portio cùm cæteris heredis creditoribus ei quærenda erit? An contentus esse debebit bonis que separari maluit? Sed cùm stipulator iste, non aditá fidejussoris à reo héreditate, bonis fidejussoris venditis, in residuum promisceri debitoris creditoribus potuerit, ratio non patitur eum in proposito summoveri. Sed in quolibet alio creditore, qui Separationem impetravit, probari commodius est ut si solidum ex hereditate servari non possit, ità demùm aliquid ex bonis heredis ferat, si proprii creditores heredis fuerint dimissi: quod sine dubio admittendum est circà creditores heredis demissis hereditariis.

Dans la loi 5, le jurisconsulte Paul rejette cette décision, et adopte de point en point celle d'Ulpien; il ajoute seulement que, si, après la séparation obtenue, l'héritier fait quelques acquisitions ex hereditate, c'est-àdire, par droit héréditaire, et en vertu de titres appartenant à la succession, elles pour

ront être réclamées et saisies par les créanciers du défunt, quoique séparés: Si credito. res hereditarii Separationem bonorum impe traverunt, et inveniatur non idonea hereditas, heres autem idoneus, non poterunt reverti ad heredem, sed eò quod semel postulaverunt, stare debent. Sed si, post impetratam Separationem, aliquid heres adquisierit, si quidem ex hereditate, admitti debebunt ad id quod adquisitum est illis qui Separationem impetraverunt. Sed si illis satisfactum fuerit, quod superest tribuetur proprüs heredis creditoribus. At si ex aliá causá heres adquisierit, non admittentur hereditarii creditores. Quòd si proprii ad solidum pervenerunt, id quod supererit tribuendum hereditariis quidam putant, mihi autem id non videtur: cùm enim Separationem petierunt, recesserunt à persona heredis, et bona secuti sunt, et quasi defuncti bona vendiderunt quæ augmenta non possunt recipere. Idemque existimo dicendum, etiamsi circà Separationem bonorum decepti, minùs consecuti sunt quàm proprii heredis creditores. Proprii autem heredis creditores habent propria ejus bona, et personam, quæ potest, donec vivit, acquirere.

Quel parti prendre dans ce choc de décisions ?

Lebrun se détermine pour celle de Papinien. >> Outre la grande autorité de ce jurisconsulte, » qui était un contre-poids suffisant contre » tous les autres (dit-il), la raison et les maxi» mes demandent que son sentiment prévaille; » car la Séparation obtenue par les créanciers » du défunt, n'etait pas capable d'effacer l'adi» tion ou l'immixtion de l'héritier, et ne ser»vait pas d'exception à la maxime, qui semel west heres, nunquàm desinit esse heres... » Ainsi, l'héritier demeurait toujours sujet à » l'action personnelle, et ses propres créan » ciers payés, il était juste que ceux du défunt » le fussent sur le résidu ».

Raviot sur Périer, quest. 291, tient à peu près le même langage: « Nous ne suivons » point en France, dit-il, la décision de la loi » 5, de Separationibus. Les créanciers du dé>> funt ont un privilége sur les effets de leur » debiteur; mais il ne s'ensuit pas qu'ils n'aient » droit d'agir contre l'heritier qui, par l'im » mixtion, est devenu leur débiteur, d'autant » plus qu'il est à présumer qu'il s'est emparé » de plusieurs effets sur lesquels les créanciers » du défunt n'auraient pu être payés ».

On voit néanmoins que cet auteur ne s'explique pas précisément sur le point de savoir si les créanciers du defunt, qui ont obtenu la Séparation de patrimoines, doivent, quant

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aux biens de l'héritier, être primés par les créanciers personnels de celui-ci, et si, comme l'enseigne Lebrun, d'après Papinien, ils ne peuvent se faire payer que sur le résidu.

Mais Pothier traite spécialement cette question, et voici comment il la résoud :

» La Séparation de biens introduite en faveur des créanciers de la succession (dit-il), ne doit pas être retorquée contre eux. En la demandant, ils n'ont pas eu l'intention de libérer l'héritier de l'obligation qu'il a contractée envers eux par l'acceptation de la succession, mais seulement d'être préférés sur ces biens aux créanciers de l'héritier.

» Mais au moins, ils ne doivent être payés sur les biens de l'héritier, qu'après les créanciers de l'héritier, quoiqu'ils puissent dire qu'étant aussi creanciers, ils doivent venir en concurrence sur les biens de l'héritier avec les autres créanciers; car, puisqu'on leur sépare ceux de la succession dans lesquels les créanciers de l'héritier pourraient demander une concurrence avec eux, il est équitable que les créanciers de la succession leur laissent les biens de l'héritier ».

Telle est aussi la doctrine de Domat.

[[« Nonobstant ces autorités (dit M. Chabot, dans son commentaire sur le titre des Successions du Code civil, art. 878), nous pensons si tous les créanciers, soit de la succesque, sion, soit des héritiers, n'ont pas d'hypothė

que, ils doivent venir tous également par concurrence sur les biens propres des héritiers; et que ceux qui sont hypothécaires, doivent être préférés suivant l'ordre des hypothèques. Cela est conforme aux principes établis par le Code civil, et il n'y a pas été déroge pour le cas particulier dont il s'agit.

» n'est pas dit dans l'art. 878, que les créanciers de la succession, en demandant la Séparation des patrimoines, perdent les droits qu'ils ont acquis sur les biens personnels de l'héritier par l'acceptation qu'il a faite de la succession; ils les conservent donc tout entiers, comme s'ils n'avaient pas demandé la Séparation. En usant d'un bénefice que la loi leur accorde, ils ne peuvent être privés du bénefice des autres dispositions du Code auxquelles il n'a pas été dérogé contre eux ».

C'était dans la première édition de son oùvrage, publié en 1804, que M. Chabot s'exprimait ainsi. Dans les éditions suivantes, et notamment dans la dernière, qui est de 187, il a persiste dans la même doctrine,et il y a ajouté des développemens qui la mettent au-dessus de toute contradiction.

Au surplus, V. mon Recueil de Questions de droit, aux mots Séparation de patrimoines. ]]

SEPTUAGENAIRE. V. les articles Contrainte par corps, nes 16 et suivans, et Tutelle, sect. 4, §. 2, art. 3.

FIN DU TOME TRENTIÈME.

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