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bonne raison, dit qu'il était naturel de chercher à diminuer la puissance de son ennemi, il lui répondit : « C'est précisément cette disposition à di« minuer la puissance de ses voisins et à augmen« ter la sienne, qui lui suscite continuellement « des guerres. Vous êtes déjà une nation si forte « par vous-mêmes, par votre réunion sous les « mêmes lois, par l'uniformité de vos habitudes << et de votre langage, que vous inspirez naturel« lement de l'effroi. Qu'avez-vous besoin de vous << agrandir continuellement? »

La raison n'était-elle pas du côté du jeune prince qui s'exprimait de la sorte? et qu'aurait-on pensé de lui, si, traitant séparément, abandonnant son allié, il avait, pour éviter une bataille que l'on se flatte toujours de gagner, il avait laissé l'Autriche envahie à la discrétion d'un vainqueur exigeant?

CHAPITRE IV.

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Mes fonctions à Hambourg. — Le roi de Suède à Stralsund. -Bulletin envoyé par moi, sur la position des armées russes. Débarquement des Anglais dans l'Elbe et le Weser. Causes de la satisfaction de l'empereur.- Duroc et l'empereur Alexandre à Berlin. -Dumouriez et la femme Saint-Martin. -Recrutement des Anglais dans le Hanôvre. Anecdote racontée par Rapp. La fille de M. de Marbœuf et Napoléon.-Trahison du roi de Naples. -Le Soleil d'Austerlitz.-Insolence du prince de Dolgorowski, et les hauteurs de Montmartre.-Récit que me fait Rapp de la bataille d'Austerlitz.-Mort du colonel Morland. Rapp à Austerlitz, et Kellermann à Marengo. -Rapp blessé, et le tableau de Gérard.

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Je viens de dire une partie de ce que j'appris des événemens qui se passèrent sur le théâtre de la guerre avant la bataille d'Austerlitz. Je vais

maintenant raconter ce que je fis à Hambourg, afin de seconder les succès de l'armée française, dans le sens de mes instructions; je dirai ensuite ce que j'ai su relativement à cette bataille mémorable et au traité de Presbourg qui changea la forme politique de l'Europe en créant de nouveaux royaumes.

J'avais envoyé un agent au devant des troupes russes qui s'avançaient à marches forcées sur les bords de l'Elbe. Cet agent m'écrivit de Gadbusch qu'une colonne russe, suivant la route de Wissenbourg, passerait l'Elbe à Boëtzembourg; une autre colonne qui venait par Rhéna et Platzeburg, devait passer ce fleuve à Lauenburg; une troisième colonne venant par Gustrin et Grabo, devait le passer à Domitz. On supposait alors que ces troupes qui avaient mis une grande hésitation dans leurs opérations, se dirigeraient sur la Hollande par les duchés de Bremen et d'Oldenbourg. A ces nouvelles, l'électorat de Hanovre fut évacué les Français, et le général Barbou qui y commandait, se concentra dans Hameln.

par

Le 2 novembre 1805, le roi de Suède arriva à Stralsund. Je prévins le gouvernement que son armée donnerait probablement aux opérations de l'armée combinée, une autre tournure; car

jusqu'à ce moment l'indécision de sa marche, l'incertitude de ses mouvemens, les contre-ordres successifs, n'avaient pas permis d'apercevoir un plan déterminé. Il paraissait d'abord que toutes les troupes suédo-russes passeraient l'Elbe sur le même point, à Lauenbourg, à six milles de Hambourg; et il n'y avait pas encore, le 5 novembre, un seul Russe sur la rive méridionale de l'Elbe.

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La première colonne de la grande armée russe avait passé à Varsovie le 1 novembre; le 2, on attendait le grand-duc Constantin avec les gardes. Cette colonne qui se montait à six mille hommes, était la première qui traversait la Pologne prus

sienne.

Dans ce moment, nous étions encore menacés de voir débarquer incessamment dans le Weser et dans l'Elbe, l'armée hanovrienne augmentée de quelques milliers d'Anglais. Leur projet était vraisemblablement, ou d'attaquer la Hollande, ou de tenter quelque opération sur les derrières de la grande armée française.

Le gouvernement français tenait beaucoup à avoir des détails exacts sur la marche des troupes suédo-russes dans le Hanôvre, et sur celle de l'arméc russe pour la Pologne. Mes agens à Varsovie

et à Stralsund me servaient on ne peut pas mieux. J'envoyai le bulletin suivant :

<< Les troupes russes sont en pleine marche vers le Hanôvre, elles passent l'Elbe à deux endroits distans l'un de l'autre de trois lieues, Lauenbourg et Boltzbourg. Les troupes suédoises vont suivre.

« Le roi de Suède vient aussi dans le Hanovre. Il a quitté Stralsund le 9 novembre.

« Il règne en Hanôvre une très-grande disette de grains et de tous autres objets de première nécessité. Il n'y a aucune espèce de magasins, et je ne sais pas comment feront les anglo-suédorusses pour y rester long-temps, d'autant plus que les troupes prussiennes contribuent à la consommation et à la chèreté des vivres.

«La première colonne de la troisième armée russe, qui passe à Varsovie, a traversé cette ville le 2 novembre; elle était composée de quatre mille hommes, et accompagnée du général prince Volkonski, du lieutenant-général Von Essen, du prince de Mecklenbourg, des lieutenans-généraux Bourke et Steinow. Cette colonne avait avec elle douze canons de 12, quatorze de 9, vingt-deux de 6; total, quarante-huit. Trois cents hommes d'artillerie légère.

« La deuxième colonne a traversé Varsovie le 4.

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