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Dans la parcelle à parcourir cette année, le comptage a fait constater un vieux matériel de 1200m3 de vieux bois. L'opérateur qui marquera coupe devra donc :

la

1o Marquer en délivrance 400m3 de vieux bois;

2o Abandonner le tiers du vieux matériel.

Mais il est bien clair que ces deux prescriptions se confondent, et que l'une fait double emploi. Or il est très facile d'exploiter le tiers du volume des gros bois sans aucune préoccupation de ce volume, et même sans le connaître il suffit d'abattre un gros arbre sur trois, en choisissant naturellement les plus défectueux, qui seront de toutes dimensions; d'où l'inutilité absolue de l'inventaire préalable du matériel.

Cet abandon du tiers des gros bois ne résulte pas en effet du comptage il était prescrit antérieurement. Par conséquent, puisque l'on a décidé avant de faire le comptage ce que l'on ordonnera par la suite, c'est-à-dire l'abatage du tiers des gros arbres, rien n'oblige à faire cette longue, pénible et coûteuse opération, que l'on sait d'avance être inutile.

Partageons-donc la série en un nombre de coupes égal au tiers de la période, et parcourons chaque année une coupe, dans laquelle nous. ferons les opérations suivantes :

1° Enlèvement d'un gros arbre sur trois, ce qui réalisera le tiers du gros matériel;

2o Opérations culturales suivant les circonstances dans le surplus du peuplement.

Ce système étant exposé, il convient d'examiner les objections possibles :

a) L'enlèvement d'un gros arbre sur trois est-il facilement réalisable dans la pratique?

En fait, cette opération ne présente pas de difficultés; elle est simple; les gardes la comprennent et l'exécutent avec une approximation très suffisante. Du reste, cette façon de procéder est inévitable; car, comment prendre sur l'étendue exacte d'une parcelle le volume exact qu'elle doit fournir?

Sans autre indication la chose n'est pas facile; on y parviendra rarement et par hasard. La possibilité par pied d'arbre se heurte à la même difficulté d'application. Une autre règle est donc nécessaire: l'aménagement la fournit, puisqu'il aboutit à la réalisation d'un gros arbre sur trois ; c'est à cette seconde prescription que l'on s'attache en opérant, et, par le fait même, on réalise le volume disponible, qu'il n'était pas nécessaire de connaître d'avance.

La prescription d'un taux d'abatage pour les coupes de futaie est prévue par Broilliard, qui insiste, dans plusieurs de ses écrits, sur son utilité.

b) Le rapport sera-t-il soutenu?

Il le sera tout aussi bien que dans les taillis composés, qui sont aménagés par contenance. On devra du reste donner aux coupes des surfaces non pas égales, mais inversement proportionnelles à la productivité du sol et à la valeur du bois sur pied. Dans la plupart des forêts on pourra établir plusieurs séries: les bonnes et les mauvaises coupes se compenseront chaque année.

Le rapport soutenu est une préoccupation excessive pour beaucoup de forestiers; or, il ne me paraît pas possible de le fixer, de le maintenir pendant de longues années avec la précision que l'on a en vue. Aucun industriel ou cultivateur ne calcule ses bénéfices 10 ou 15 ans d'avance, et il est invraisemblable qu'une pareille emprise sur l'avenir soit possible dans les futaies jardinées, dont la constitution et la production sont si variables.

c) L'enlèvement d'un gros arbre sur trois est une règle trop rigide, et son application systématique serait nuisible à la forêt.

Cela ne fait pas de doute; mais il s'agit là d'une règle générale, dont on s'écartera forcément dans un sens ou dans l'autre, sur chaque point de la forêt. Comme toutes les règles, celle-ci doit être appliquée avec discernement; et il ne suffit pas pour bien marquer une coupe de savoir compter jusqu'à trois ; il faudra encore être forestier. Si 3, 4, 5... sapins voisins sont en parfait état, et suffisamment espacés, on les conservera tous, parce qu'un peu plus loin on devra en abattre 2 sur 3, ou 3 sur 4.

On devra seulement ne pas perdre de vue la règle du tiers des gros arbres, et s'y conformer dans la mesure du possible, ce qui n'est pas bien difficile.

Il a été dit au chapitre 1er que la possibilité devait être calculée à chaque rotation afin de la maintenir toujours en harmonie avec l'état changeant de la forêt. Mais la récolte d'une fraction constante de ce vieux matériel opère cette révision de possibilité d'une façon simple, automatique et obligatoire; et comme cette opération peut être poursuivie indéfiniment, elle conduit la forêt vers un état normal et stable.

Cet état normal ne sera cependant réalisé que sur l'ensemble de la forêt; en chaque point, les peuplements s'en écarteront dans un sens, puis dans l'autre, suivant mille circonstances locales: leur état véritable oscillera indéfiniment autour de l'état normal, dans une perpétuelle

évolution. Mais l'état moyen de l'ensemble, à chaque instant, sera normal et fixe.

La combinaison qui assure ce résultat mérite seule le nom d'aménagement, c'est-à-dire de règle simple et permanente. Le calcul périodique d'un volume disponible, toujours variable, n'est au contraire que la répétition continuelle d'un expédient, la prorogation indéfinie du provisoire.

La durée de la rotation a une très grande importance dans l'aménagement par contenance, puisque les coupes reviendront certainement sur le même point à échéance fixe: mais la rotation peut beaucoup varier dans l'intérieur d'une même période.

Si la période est de 48 ans, on peut choisir :

2 rotations de 24 ans; le martelage enlèvera 1 gros arbre sur 2

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Chaque système a ses partisans.

J'ai dit plus haut que je préférais les rotations un peu longues, de 15 à 20 ans.

Voici un autre argument en faveur de la même conclusion, pour le cas d'un aménagement par contenance.

Beaucoup de futaies jardinées sont aujourd'hui surchargées d'un vieux matériel en excès par suite de l'application de la note de 1883 dans calcul de l'accroissement, avec précomptage général de tous les bois exploités, et bien souvent encore avec transfert de vieux bois parmi les moyens pour loger la forêt dans le lit de Procuste du rapport 3/5. Cette pléthore sera suivie d'une disette, comme il arrivera aussi dans les taillis sous futaies surmontés de trop de réserves, où les baliveaux sont introuvables.

En attendant, il faut liquider avec lenteur et régularité, car le rapport soutenu a d'autant plus d'intérêt que les volumes sont plus importants. Mais il semble indifférent de réaliser le quart des arbres sur le 1/12 de la surface, ou le tiers sur 1/16,ou encore la moitié sur le 1/24. Il n'en est pas ainsi dans la réalité; les volumes martelés annuellement varieront beaucoup suivant la rotation, pour peu qu'il existe des arbres chaudronnés, couronnés, pourris au pied, etc... Si l'on a choisi la rotation de 12 ans, et que les gros arbres défectueux soient dans la proportion du tiers, ce qui n'est pas rare, on devra bien, dès le début, abattre le tiers du vieux matériel, et non pas seulement le quart, comme

on l'avait projeté : on réalisera ainsi un volume qui dépassera de 33 pour 100 celui que l'on comptait abattre une chute imprévue de la possibilité se constatera dès la seconde rotation, parce que la première aura été trop productive.

En résumé, en cas de vieux matériel surabondant, c'est la proportion des arbres défectueux qui doit faire fixer la première rotation : les rotations suivantes pourront différer.

Si cependant le vieux matériel défectueux réprésentait un volume énorme, si un arbre sur deux devait être réalisé au passage de la coupe, une longue rotation causerait la perte d'un fort volume de bois en train de se gâter; on choisirait alors une première rotation courte, qui serait suivie d'un repos absolu de plusieurs années : les recettes extraordinaires ainsi encaissées ne seraient pas de suite disponibles, mais devraient être mises partiellement en réserve pour subvenir aux besoins du propriétaire pendant le chômage des exploitations.

BIZOT DE FONTENY.

VARIÉTÉS ET TYPES DIVERS DU PIN
SYLVESTRE

Dans notre no du 15 novembre courant, M. Huffel cite l'opinion des maîtres éminents, Mathieu et Fliche, qui, tout en considérant que les différences de race signalées chez le pin sylvestre sont plutôt nominales que réelles, concluent que cependant il ne faudrait point méconnaître la valeur des races et se désintéresser de la provenance des graines qu'on emploie.

Mon expérience de planteur en Sologne, et la nécessité pour un particulier de jouir plus ou moins des produits de ses reboisements dans une quarantaine d'années, m'ont amené à attribuer une très grande importance à la provenance des graines et à la valeur relative des races du pin sylvestre.

En 1864, Vilmorin, créateur des massifs des Barres, qui avaient alors 40 ans, constatait encore, comme port et comme qualité, une différence toute en faveur de la variété de Riga. Cependant, comme les massifs furent toujours tenus assez serrés, les sujets n'avaient pas dû, je pense, pousser de très grosses branches, et depuis, les plus défectueux sont sans doute tombés dans les éclaircies, rendant un produit de moindre valeur que s'ils avaient été beaux et droits. A force d'éclaircies successives on peut ordinairement, au bout de 80 ans, trier un beau peuplement, d'au

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tant plus que Vilmorin constate (cité au catalogue 1878, p. 56) que dans la masse des Haguenau, par exemple, il existe des individus réguliers de tige et de couronne, pouvant être comparés aux meilleurs Pins du Nord. Ces pins d'élite, assurément, peuvent souvent exister en nombre suffisant pour former un beau massif vers la fin de la révolution en forêt domaniale; mais avec des pins de provenance inférieure on n'arrive pas en quarante ans à obtenir un beau peuplement régulier.

Mes boisements en pin sylvestre, tous faits au moyen du repiquage, montrent une très grande variabilité de forme et de valeur que je ne puis attribuer qu'à l'hérédité des sujets.

En 1871-72 je plantais, avec des plants achetés à Orléans, une cin quantaine d'hectares, la graine dont ces plants avaient été obtenus provenait probablement des sécheries de Haguenau ou de l'Allemagne, car il n'en existait pas alors d'autres à notre portée commerciale. Plantés à 4 pieds (1m 33 environ) en tous sens, ces pins poussèrent avec très peu de pertes et aujourd'hui, après quelques éclaircies assez productives, ils forment, avec peu d'exceptions, de beaux peuplements.

En 1875, encouragé par ce succès, je fis de nouvelles plantations sur une quarantaine d'hectares, toujours avec des plants achetés à Orléans et au même espacement de 1m33.En l'année suivante 1876, cette plantation fut dévastée par une terrible sécheresse prolongée, dont tout planteur de cette époque a longtemps gardé le souvenir. Ces massifs sont donc restés un peu clairs, malgré des regarnis incomplets qui furent bientôt étouffés par les premiers pieds, plus âgés de deux ans. Les arbres sont néanmoins venus beaux et droits; seulement il me semble qu'ils sont moins rustiques que ceux plantés en 1871-72; ils subirent des pertes considérables par la sécheresse de 1900, dont les premiers ne furent pas affectés.

Outre la belle venue de ces plantations, j'avais observé que dans les premières, à certains endroits où la reprise fut partielle et les plants venus à 2 mètres en moyenne l'un de l'autre, les jeunes arbres étaient beaux et droits, et poussaient vigoureusement. Ayant à faire de nouveaux reboisements en 1872, et notant le succès de ces jeunes massifs plus clairs qu'à l'espacement ordinaire: Bonne affaire, me dis-je, je planterai dès maintenant à 5 pieds en tous sens (1m66) au lieu de 4, réalisant ainsi une économie énorme, en employant 3.600 plants par hectare au lieu de 5.625, pour obtenir une réussite égale. Ainsi fut fait sur une assez grande étendue, avec des plants en partie achetés, en parties élevés chez moi de graines de Darmstadt. Mais le résultat fut une grosse déception; quoique la reprise fût bonne, et ne fût suivie

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