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signifiée, en même temps que l'exploit d'assignation, ils pouvaient et devaient, si bon leur semblait, s'inscrire en faux avant l'audience du 24 octobre, précaution qui ne les eût pas rendus irrecevables à soulever contre le procès-verbal l'exception de forme dont ils ont été déboutés; que cette solution est d'ailleurs conforme aux décisions de la jurisprudence (Cassation, 27 novembre 1874); qu'il y a donc lieu de déclarer l'inscription de faux faite par les prévenus comme irrégulière et tardive; que c'est le cas de les débouter de leurs conclusions et de les condamner aux dépens de l'incident soulevé par eux; Par ces motifs, le tribunal déboute Trouillat et Bonnot de leurs conclusions, les condamne aux dépens de l'incident, dit qu'il sera immédiatement passé outre aux débats...

Sur ce jugement, les prévenus se retirèrent, et c'est par défaut qu'ils furent condamnés aux peines portées par la loi pour pêche la nuit avec engins prohibés.

Les prévenus interjetèrent ensuite appel du jugement qui avait rejeté leur déclaration d'inscription de faux.

La Cour de Grenoble, statuant sur cet appel le 31 mars 1912, a rendu l'arrêt suivant :

LA COUR, adoptant les motifs des premiers juges;

Attendu en outre que les prévenus soutiennent à tort que n'ayant comparu à l'audience du 24 octobre fixée par la citation que pour déposer des conclusions tendant à la nullité du procès-verbal et de la citation, ils n'avaient pu encourir la déchéance résultant des termes de l'art. 56 de la loi du 15 avril 1829, par le motif qu'ils n'avaient pu préalablement faire une déclaration d'inscription de faux qui aurait constitué une défense au fond et les aurait rendus irrecevables à invoquer des exceptions de forme;

Attendu que cette distinction entre la comparution sur une exception et la comparution sur le fond est purement arbitraire en présence des termes précis de la loi, et que seule l'annulation de lacitation aurait pu rétroactivement faire disparaître la déchéance;

Attendu que la prétendue nullité du procès-verbal qui a été invoquée par les prévenus était substantielle, constituait un moyen qui pouvait être produit même après toute défense au fond; qu'au surplus, lors de l'inscription de faux les prévenus auraient pu insérer toutes réserves à cet égard; mais qu'on ne pourrait, sans faire échec au texte et à l'esprit de la loi, autoriser les inculpés à faire, par des exceptions même mal fondées, tomber une déchéance régulièrement encourue;

Par ces motifs, la Cour...

Du 21 mars 1912. Cour d'appel de Grenoble (Ch.corr.).

(Communication de M. l'Inspecteur L. Breton.)

Observations. Les deux questions posées dans cette affaire ont été résolues par le tribunal et par la Cour conformément aux principes et à la jurisprudence.

En premier lieu, au sujet de la prétendue nullité du procès-verbal, il s'agissait d'une erreur de date, erreur matérielle qui pouvait toujours être rectifiée à l'aide des autres énonciations de l'acte et par tous autres moyens de preuve (voir un cas analogue dans notre Cours de Droit forestier, no 327, note 4). Le procès-verbal, clos le 13, portait mention de l'enregistrement à la date du 12; il en résultait cette anomalie apparente que l'enregistrement aurait précédé la clôture. Un simple extrait du registre authentique du receveur, rétablissant la date exacte, suffisait certainement pour faire disparaître l'irrégularité relevée par la défense.

La seconde question ne pouvait non plus faire doute. La loi de 1829, dans un texte identique à celui du Code forestier, exige pour la validité de l'inscription de faux que la déclaration ait été faite avant l'audience indiquée par la citation; elle n'admet une déclaration postérieure que si le prévenu a fait défaut. Or les prévenus avaient bien comparu à la date fixée par la citation; ils avaient soulevé devant le tribunal l'exception fondée sur la nullité du procès-verbal et, déboutés de cette prétention par un jugement interlocutoire, ils prétendaient leur déclaration valable parce qu'elle était faite antérieurement à l'audience où l'affaire devait être jugée au fond. Comme l'ont fait très bien remarquer le tribunal et la Cour, cette distinction entre la comparution sur une exception et la comparution sur le fond est arbitraire et contraire au texte de la loi. La date de la première citation doit seule être considérée. Cette solution avait été déjà donnée, dans un cas très analogue, notamment par un arrêt de cassation de 1874 (voir notre Cours de Droit forestier, no 348, note 1); le jugement et l'arrêt ci-dessus relatés confirment cette jurisprudence.

CH. G.

CHRONIQUE FORESTIÈRE

Mérite agricole.

A l'occasion de cérémonies et par divers arrêtés

du président du Conseil, ministre de l'Instruction publique, sont

nommés:

Officier de l'Instruction publique :

M. Fabre, inspecteur des Eaux et Forêts en retraite, à Dijon.

Officiers d'Académie :

MM. Rives, inspecteur des Eaux et Forêts, à Bourg.

Lafargue, inspecteur adjoint des Eaux et Forêts, à Blois.
Latronce, inspecteur adjoint du cadre indigène des Forêts en
Indochine.

Pension civile.

ci-après est approuvée :

Par décret du 19 mai 1913, la pension civile

M. Versini (Xavier-Antoine-Séraphin), inspecteur adjoint; 31 ans 16 jours de services. Pension avec jouissance du 16 janvier 1913. - 2,350 fr.

Tableau de concours en 1913 pour la Légion d'honneur. - Nous avons donné dans notre numéro du 15 mai dernier les noms des agents inscrits au tableau de concours pour la Légion d'honneur. A ces noms

il

y a lieu d'ajouter celui,qui avait été omis, de M. Garnier, inspecteur, chargé du service du contrôle dans le département d'Oran, qui figurait au << Journal Officiel », entre M. Chancerel et M. Steiner.

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La loi Audiffred. La proposition de loi Audiffred,qui avait été adoptée par le Sénat 1, vient d'être votée par la Chambre, sans aucune discussion, dans sa séance du 3 juin 1913. Au point de vue des intérêts forestiers, c'est un événement considérable. Le régime forestier s'appliquera désormais à de nombreux terrains boisés qui ne pouvaient jusqu'ici y être soumis. Ainsi l'action de l'Administration forestière est appelée à s'étendre et le rôle des agents des Eaux et Forêts à devenir. de plus en plus important.

Il ne faut pas se dissimuler qu'au début, la soumission des bois particuliers entraînera certaines difficultés pratiques. Si ces bois sont éloignés des centres où l'Administration a ses fonctionnaires, s'ils sont dispersés dans des régions peu accessibles, certaines mesures seront à prendre que seule, probablement, pourra efficacement suggérer l'expérience.

D'ailleurs un règlement d'administration interviendra qui mettra au point bien des questions encore incertaines. Les difficultés n'ont jamais effrayé les forestiers. Ils ont en toutes circonstances donné la preuve de leur dévouement. Il va de soi, d'ailleurs, que si leur travail s'accroît, le Gouvernement saura le reconnaître en augmentant notablement les indemnités diverses attachées à chaque grade. Le découragement ne manquerait pas de se produire dans tous les rangs, si, comme en 1897, un service nouveau était créé, auquel ne correspondraient pas des crédits

1.

Nous avons donné le texte voté par le Sénat dans notre numéro du 1er janvier 1913, page 22. Comme il a été repris intégralement par la Chambre des Députés, il serait sans intérêt de le reproduire de nouveau.

nouveaux. C'est une question de justice, en même temps que de bonne administration.

Le saumon. Une communication a été faite à l'Académie des sciences par M. Edmond Perrier, sur les travaux de M. Louis Roule, Professeur au Muséum, relatifs à la biologie du saumon.

L'attention de M. Roule avait été attirée, tout d'abord, ainsi qu'il y avait été convié par le ministère de l'Agriculture et par le département du Finistère, sur la recherche des moyens capables de remédier au dépeuplement progressif des cours d'eau et de préparer un repeuplement possible.

Il a entrepris ces recherches en commençant une enquête préliminaire sur l'état des individus pris au début de leur montée. Il a pu procéder à cet examen grâce à l'aide obligeante que lui a prêtée M. Fatou, inspecteur des Eaux et Forêts à Lorient, qui lui a fait envoyer par intervalles, depuis la fin de l'automne dernier, un certain nombre de pièces capturées dans la rivière d'Ellé, auprès de Quimperlé. Voici quelques-uns des principaux résultats de ses investigations.

Ces exemplaires, au nombre de 10,ont été pêchés aux dates suivantes : 5 décembre (2 exemplaires), 18 décembre, 24 décembre (2 exemplaires), 25 janvier, 6 février (2 exemplaires), 24 février, 12 avril. Le plus petit, de sexualité mâle, mesurait 52 centimètres de longueur; les deux plus grands, l'un mâle et l'autre femelle, mesuraient 82 centimètres et 83 centimètres. Tous étaient matures, ayant achevé leur élaboration génitale. Les individus mâles, au nombre de 5, ont été pris le 5 décembre, le 24 décembre, et le 6 février; les individus femelles également au nombre de 5, ont été pris aux autres dates, et par conséquent, dans la moyenne, de façon plus tardive. Le mâle de 83 centimètres était bécard; les autres ne montraient aucune trace de malformation maxillaire accentuée.

L'examen des écailles et de leurs lignes de croissance a donné d'importantes indications complémentaires. Sur les 10 individus, 3 seulement montraient avec netteté que leurs phases d'alevinage en eau douce avaient duré une seule année (2 mâles et 1 femelle); chez les 7 autres, elles accusaient deux années. La période de croissance en mer avait pris 'deux années chez 6 individus (3 mâles et 3 femelles), et trois années chez les 4 autres. La plupart n'offraient aucune éraillure marginale et venaient pondre en eau douce par la première fois. Seuls, 3 individus, dont 3 måles, montraient quelques irrégularités qui décelaient une interruption de croissance, et peut-être une ponte ancienne. Il est à re

marquer que le grand mâle bécard de 83 centimètres ne présentait rien de tel, et qu'il est permis de présumer à son égard qu'il accomplissait alors sa première montée.

Ces résultats, obtenus sur les saumons qui fréquentent l'un des nombreux fleuves côtiers de la Bretagne, s'accordent de près avec ceux que mentionnent les auteurs récents, et notamment Dahl (1905). Ils s'accordent surtout avec ceux que miss P.-C.Esdaile a signalés dernièrement (1912), après avoir étudié des saumons pris dans la Vienne et la Creuse. Les conclusions de ces recherches ont une extrême valeur au sujet de la biologie des saumons de nos pays et de son application à la réglementation des pêches, ainsi qu'au repeuplement tenté pour conserver et accroître dans nos rivières une espèce aussi précieuse. Selon elles, les phases d'alevinage en eau douce ne se bornent pas à quelques mois, contrairement à ce que l'on admet trop souvent, mais s'étendent sur une ou deux années. La croissance en mer prend, en ce qui la concerne, deux ou trois années complémentaires; les jeunes alevins de descente ne reviennent qu'après ce délai accompli. Les reproducteurs, ou du moins la majorité d'entre eux, n'accomplissent pas à plusieurs reprises, année par année, des remontes qui, ayant la ponte pour objet, seraient suivies d'un retour à la mer destiné à préparer une nouvelle montée ; ils ne pondent, en réalité, qu'une seule fois dans leur existence, et, sans doute, disparaissent ensuite.

M. Roule a l'intention de continuer ces études afin de conclure après des constatations encore plus nombreuses. Il compte, au surplus, rechercher les influences qui, d'après les états variables au milieu aquatique, dirigent les individus dans leur déplacement, et les entraînent en plus grand nombre vers certaines rivières plutôt que vers d'autres.

Le jour et la nuit. Tel est le titre d'un article spirituel qu'inspire à la sévère Gazette du Palais un arrêt de la Cour de Paris, du 25 avril 1913, relaxant un chasseur poursuivi pour avoir chassé, le soleil n'étant pas encore levé, mais la clarté du ciel étant telle que « on y voyait à chasser ». Voici les réflexions de notre confrère:

A l'heure de l'affût, soit que la lumière
Précipite ses traits dans l'humide séjour,
Soit lorsque le soleil rentre dans sa carrière,

Et que n'étant plus nuit, il n'est pas encor jour...

a dit le bon La Fontaine.

Et vous pouvez chercher une plus jolie définition du crépuscule, ou de l'aube. Vous pouvez chercher aussi, pour l'affût, un moment plus propice:

Je foudroie, à discrétion,

Un lapin qui n'y pensait guère.

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