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fallu que le pouvoir central se dégageât de ces entraves en recourant, dans la pratique, à des procédés extralégaux qu'il conviendrait de régulariser par voie législative.

A) Définition de la police. Son rôle et son objet. De la distinction de la police administrative en police générale et en police municipale. La police municipale n'est qu'une délégation du chef de l'Etat contrairement à la théorie de Henrion de Pansey.

La police nous apparaît comme une partie de la puissance publique ayant pour but de protéger les personnes et leurs biens contre les maux ou les dangers qui peuvent les atteindre et dont il est possible d'écarter les causes ou d'atténuer les effets. On peut dire qu'elle est l'ordre même qui préside à une Société.

Mais, pour atteindre ce but, quels objets va-t-elle réglementer? Quel sera son domaine?

De nombreuses énumérations ont tenté de délimiter sa sphère d'intervention. Dans son important traité, Delamarre prétendait renfermer toute la police dans les onze parties suivantes : « la religion, la discipline des << mœurs, la santé, les vivres, la sûreté et la tranquillité publiques, la voirie, les sciences et les arts libéraux, le « commerce, les manufactures et les arts mécaniques, « les serviteurs domestiques, les manouvriers et les pau«vres. » D'autres auteurs ont donné des nomenclatures analogues. Dans ses études administratives, M. Vivien proposait de désigner sous le nom de police « tout ce qui

importe au bien-être habituel, à la sécurité et au confort du peuple.

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Le Code des délits et des peines, du 3 brumaire an IV, drécise le rôle et l'objet de la police dans son livre premier.

« Art. 16. - La police est instituée pour maintenir « l'ordre public, la liberté, la propriété, la sûreté indivi« duelle.

« Art. 17.

Son caractère principal est la vigilance. «La société, considérée en masse, est l'objet de sa solli« citude.

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« Art. 19. - La police administrative a pour objet le << maintien habituel de l'ordre public dans chaque lieu « et dans chaque partie de l'administration générale. «Elle tend principalement à prévenir les délits.

« Art. 20. - La police judiciaire recherche les délits «que la police administrative n'a pas pu empêcher de « commettre, en rassemble les preuves et en livre les << auteurs aux tribunaux chargés par la loi de les punir. »

Nous dirons donc que la police administrative prend les mesures préventives nécessaires pour assurer la sécurité publique.

Mais la plupart des auteurs établissent une sous-distinction et traitent séparément de la police générale et de la police municipale. Pour beaucoup d'entre eux, cette subdivision n'offre pas seulement l'intérêt d'un procédé

d'exposition. Elle a une portée bien plus considérable, car on la représente comme une conséquence de cette théorie d'après laquelle la police municipale est indépendante de la police générale.

Henrion de Pansey, notamment, a distingué très nettement ces deux sortes de police. Il a prétendu que la commune, antérieure à l'Etat, s'était trouvée investie, dès l'origine, d'un pouvoir propre, en vertu duquel elle devait exercer en toute indépendance les attributions de police à l'intérieur de son territoire. Cette théorie a donné naissance à des prétentions trop graves pour que nous ne l'examinions pas de très près avant d'y substituer une autre, d'après laquelle la police municipale n'est pas une police d'une nature particulière, mais un démembrement de la police générale, une délégation révocable consentie par l'Etat qui se dessaisit, au profit de la commune, d'une partie de ses attributions.

Ramenée à ses éléments essentiels, la thèse de Henrion de Pansey peut se résumer ainsi :

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«

Indépendamment des pouvoirs législatif, exécutif et judiciaire, il y a le pouvoir municipal, le plus ancien de tous. C'est, en effet, le premier dont le besoin se soit fait sentir, les premières bourgades ayant reconnu la nécessité d'une administration intérieure et d'une police locale. C'est de l'agrégation successive de ces municipalités particulières qu'est né le gouvernement. Dans chaque municipalité particulière, les habitants «ont chargé des mandataires ou officiers municipaux de

« veiller à leurs intérêts communs. Le pouvoir de faire,

«

dans la circonscription de chaque municipalité, les rè

glements que le maintien de la police locale exige, n'est « donc pas une concession de la puissance publique. Les officiers municipaux le tiennent de leur mandat, ou, plus exactement, de cette règle du droit naturel qui « autorise tous les individus et, par conséquent, les corporations d'habitants, qui, relativement à la grande

«

«

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<< famille, ne sont elles-mêmes que des individus, - à « veiller à leur conservation.

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« Quant à la sanction de ces règlements, elle a nécessité l'intervention du législateur qui a agi de la sorte dans l'intérêt de la société tout entière, puisqu'elle ne se compose que des sociétés partielles et que l'on ne « peut mettre en harmonie les différentes parties d'un <«<tout qu'en faisant régner l'ordre dans chacune d'elles. Ꭰ

Avant de discuter cette théorie, il importe de signaler, dans la thèse exposée ci-dessus, une double impropriété de termes. Henrion de Pansey se sert du mot « Gouvernement » au lieu du mot « Etat» et il est clair, cependant, qu'il n'entend pas parler de la manifestation extérieure et temporaire de la souveraineté, mais de la souveraineté elle-même. Le Gouvernement ne constitue pas plus l'Etat que le maire ne constitue la commune.

L'auteur semble encore affecter d'éviter le mot « Etat » quand il emploie l'expression « société tout entière » dont le sens est pourtant bien différent. Si, en effet, l'Etat est investi de la personnalité juridique et s'il a un

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