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aux princes qui ne font pas partie du comité, qu'ils se sont soumis de la manière susdite, par leurs Traités d'alliance, à l'organisation future de l'Allemagne; cependant on leur promettra expressément que les bases d'une future constitution que le comité posera, ne seront mises en exécution qu'après leur avoir été communiquées.

Quatrième. Quels moyens ont les membres du comité ou veulent-ils employer pour faire adopter leur opinion par leurs co-États?

On a été unaniment d'avis que la mission du comité d'établir les principes de la constitution future étant fondée sur le droit et sur les circonstances, il ne faudra pas imaginer des moyens particuliers pour les faire admettre, d'autant plus que l'accord parfait des cinq Cours fournirait le moyen le plus sûr pour faire agréer aux autres États des principes qui ne doivent avoir d'autre but que le véritable intérêt de l'Allemagne dans son ensemble et ses parties.

Cinquième. De quels membres le comité se composera-t-il ?

On a indiqué alors les plénipotentiaires pour chaque Cour, savoir: 1° Pour l'Autriche, M. le prince de Metternich et M. le baron de Wessenberg;

2o Pour la Prusse, M. le chancelier d'État, prince de Hardenberg, et M. le ministre d'État, baron de Humboldt;

3o Pour la Bavière, M. le feld-maréchal, prince de Wrède;

4o Pour le Hanovre, MM. les comtes de Munster et de Hardenberg; 5o Pour le Wurtemberg, M. le ministre d'État, baron de Linden. Les membres ont chargé unanimement le conseiller aulique Martens, de la rédaction du protocole; cependant, MM. les plénipotentiaires se sont réservé la faculté d'amener aux séances leurs secrétaires de légation, pour accélérer les copies du protocole approuvé.

Sixième. On a fixé la séance d'après-demain, à midi, pour procéder à la représentation des pouvoirs des plénipotentiaires, et pour examiner le projet de Déclaration; quant aux pouvoirs, on est convenu que les pouvoirs généraux donnés pour le Congrès, seraient regardés comme suffisants, et qu'on en joindrait des copies certifiées aux actes.

La séance a été levée, après que le protocole a été approuvé et signé par les membres présents.

Fait à Vienne, le 14 octobre 1814.

Signé Metternich; Hardenberg; Wrède; Wessenberg;

Humboldt; Munster; Hardenberg.

Memorandum de lord Castlereagh, au sujet de la situation de l'Autriche et de la Prusse en présence des prétentions de la Russie sur la Pologne.

Vienne, le 14 octobre 1814.

La question de la Pologne et des Traités qui la concernent ayant été soumise de la manière la plus complète à l'examen de l'empereur de Russie, toute hésitation pour amener S. M. Impériale à une décision ne peut produire aucun avantage réel, mais ne conduira qu'à une interprétation erronée de la détermination de ses Alliés à cet égard.

Il est considéré comme étant de la plus grande importance, même avant le départ de S. M. Impériale pour Bade, qu'elle soit informée du projet bien arrêté sur lequel ses Alliés ont l'intention d'insister auprès de S. M. Impériale et dont elles se croient en droit, aussi bien par les Traités que par les principes généraux de politique et de justice, de réclamer l'acceptation par S. M. Impériale. Ils doivent en outre apprendre à l'empereur, qu'aussitôt après le retour de S. M. Impériale à Vienne, ils se proposent de faire une nouvelle tentative pour terminer cette question amicalement avec elle. Dans l'espoir dont ils se flattent où ils arriveraient promptement à un arrangement satisfaisant des affaires de l'Europe, ils désireraient dans ce but que le Congrès fût ajourné. Si malheureusement au contraire, ils ne parvenaient pas à obtenir le résultat qu'ils recherchent si ardemment, ils considéreraient alors comme leur devoir de laisser le Congrès se réunir comme il a été convenu pour que le sujet soit formellement et officiellement porté devant lui.

Il est proposé, afin que les ministres des deux puissances soient complétement en mesure de soumettre à l'empereur à son retour leur détermination finale, qu'ils s'entendent pour fixer le minimum de concession qu'ils croyent devoir réclamer de l'empereur;

Qu'en soumettant cette détermination à l'empereur, au nom de leurs Cours respectives, ils puissent lui dire qu'en vue de la conservation de l'harmonie qui a signalé l'alliance, ils ont réduit leurs prétentions aux limites les plus étroites possibles; que dans le cas où ils seraient forcés d'adopter une ligne de conduite différente, ils doivent se considérer comme étant complétement en droit de proposer d'autres arrangements plus larges;

Qu'il peut être désirable, même dans cette ouverture amicale, de soumettre à l'empereur différentes propositions sur le côté politique de la question, afin de garder toujours en vue que c'est la Russie seule et non les autres Cours, qui forme réellement un obstacle à la délivrance de la Pologne.

Dans le cas où cette question deviendrait un des objets de discussion du Congrès, il est proposé qu'elle soit mise en avant par une note officielle du ministre d'Autriche, séparément ou conjointement avec celui de Russie, adressée au ministre de Russie, et réclamant de cette puissance l'exécution de l'article du Traité du 27 juin 1813, et que cette note, après avoir exposé les vues, les droits et les opinions de ces puissances, conclut par l'offre au choix de l'empereur de l'une ou l'autre des propositions suivantes :

1° La réunion entière et complète de la Pologne sous un souverain indépendant comme avant le premier partage; si un semblable arrangement était accepté par l'empereur, l'Autriche et la Prusse sont prêtes à faire les sacrifices nécessaires.

2. Si l'empereur s'oppose à cette mesure comme occasionnant un trop grand sacrifice de territoire de la part de la Russie, les Cours d'Autriche et de Prusse sont disposées à consentir à l'établissement du royaume de Pologne tel qu'il existait en 1791, lorsqu'il se donna une constitution sous Poniatowski.

3o Ou bien si l'empereur repousse l'établissement de la Pologne, sur une échelle territoriale néanmoins modifiée, en un royaume réellement indépendant et préfère s'en tenir au principe du partage, les deux puissances (tout en protestant contre son droit d'agir relativement à son partage de la Pologne, contrairement aux stipulations de la convention de 1797), sont disposées à donner leur adhésion à ce principe de partage, pourvu qu'il soit appliqué d'une façon équitable et d'après les égards dus à la sécurité au point de vue militaire de leurs États respectifs.

Pour l'exécution de ce principe, ils proposent que la Vistule, à travers le duché de Varsovie jusqu'à Sandomir, serve de frontière à la Russie, la Prusse recevant Thorn sur la rive droite, si l'empereur désire posséder Varsovie sur la rive gauche.

En addition à cette note, l'Autriche devrait adresser une note séparée à la Prusse pour réclamer son intervention suivant le Traité de septembre 1813, par lequel elle s'est engagée à veiller à l'exécution à l'amiable du Traité de juin 1813. Des copies de ces différentes notes seraient soumises au Congrès, et les diverses puissances de l'Europe seraient invitées à soutenir lesdites ouvertures et à déclarer à l'empereur de Russie jusqu'à quel point et à quelles conditions l'Europe réunie en Congrès peut ou ne peut pas admettre les prétentions de S. M. Impériale à un agrandissement en Pologne.

Il est désirable qu'il soit bien nettement fait comprendre à l'empereur que, malgré leur désir d'éviter un appel aussi pénible par toute modification possible de leurs justes demandes, dans la mesure du minimum qu'ils sont convenus de proposer à S. M. Impériale, les Alliés,

s'ils sont forcés de faire appel à l'Europe par suite du refus d'une telle modification, doivent alors adhérer plus strictement à l'échelle de leurs justes prétentions; il ne resterait plus alors qu'aux puissances du continent de décider des mesures qui seraient nécessitées par une semblable infraction aux Traités et par un empiétement sur la sûreté militaire des États alliés voisins et indépendants en contravention avec les stipulations expresses des engagements existants.

Lettre du Duc régnant de Saxe-Cobourg-Saalfeld à lord Castlereagh, examinant la question de droit vis-à-vis de la Saxe, et la question générale.

Vienne, le 14 octobre 1814.

Son Excellence m'a permis de lui dire par écrit ce que je pense du sort de la Saxe. Je serai court; les hommes d'État n'ont pas de temps à perdre. L'arrêt de mort politique, dont la Saxe est menacée, doit être justifié par le droit, et motivé par l'intérêt général de l'Europe.

Question de droit.

Pour que la mesure proposée relativement à la Saxe puisse être soutenue sous le point du droit, il faut de deux choses l'une

Que la souveraineté se perde ou s'acquière par le droit de conquête; Ou que le roi de Saxe puisse être jugé. L'Angleterre, en reprenant l'Électorat de Hanovre, n'a pas reconnu le principe de conquête. Napoléon lui-même a protesté, lorsque vous cédiez la Guadeloupe à la Suède Donc la force seule n'a été admise ni par vous, ni par votre ennemi, comme un titre légal à disposer définitivement d'un pays.

Pour juger le roi de Saxe, il faudrait d'abord le tribunal qui eût le droit de le juger, il faudrait ensuite l'entendre devant ce tribunal.

Nous ne reconnaissons pas le droit de ceux qui, dans le cas présent, voudraient former ce tribunal, et ces prétendus juges se refusent même à entendre celui qu'ils accusent.

Le souverain de la Saxe n'a d'autres juges que ceux du roi d'Angleterre Dieu et la Nation; et aussi longtemps que la famille européenne ne sera pas soumise à un tribunal suprême et commun, il n'y aura pas d'autres arbitres que des rois; or celui des deux, dont il nous est permis de connaître et d'interpréter l'avis, s'est décidément prononcé en faveur de ce prince, car, la nation entière le réclame. Votre Excellence elle-même m'a dit qu'il y avait dans le cœur de tout homme un sentiment de justice. Rassemblons, dans quelque forme que cela soit, un nombre de personnes de tout pays et de toute classe, soumettonsleur la question, dont il s'agit, je m'en rapporterai à leur décision.

Question de l'intérêt général.

Examinons à présent, si le bonheur de la Prusse, l'intérêt de l'Allemagne, la situation générale de l'Europe demandent si impérieusement la suppression de la Saxe.

Vous voulez, mylord, que la Prusse soit forte! c'est l'affaiblir, c'est lui donner une population qui d'un siècle n'oubliera pas ces sentiments pour l'ancienne dynastie, et nourrira dans son sein un germe perpétuel de mécontentement et de troubles. L'homme d'État ne doit pas oublier que la Saxe n'est pas un composé et ramas de petits États, fruit injuste des temps passés. La Saxe est telle qu'elle était, il y a des siècles, son origine nationale est fondée, et cet État est d'autant moins fait pour être une province tranquillement soumise. Vous voulez unir l'Autriche à la Prusse! La Saxe donnée à cette dernière suffirait pour les diviser. Les frontières de l'Autriche seront compromises, ses mouvements militaires gênés et menacés, et les deux États placés aux portes de l'un et de l'autre, se trouveront tôt ou tard dans une situation hostile permanente, dangereuse pour eux et pour l'Europe.

Vous voulez diviser la Russie et la Prusse! Vous n'y parviendrez pas. Il y a entre les deux souverains des liens personnels qu'il n'est au pouvoir de personne de rompre. L'affection à part, vous unissez leurs intérêts quand vous pensez les séparer; car la Prusse será appuyée par la Russie dans ses projets d'agrandissement en Allemagne, projets par lesquels elle saura bientôt franchir les limites que vous prétendez lui assigner aujourd'hui et elle appuyera de son côté les desseins de la Russie sur l'empire ottoman renversé, la paix de l'Europe ébranlée, et tout cela par suite de votre plan. Voulez-vous savoir, mylord, quel est l'intérêt de l'Allemagne? Consultez ses vœux; car vous ne pensez certainement pas que les grands et les petits États ignorent complétement ce qui peut les sauver ou les perdre; or, un seul excepté, tous à l'unanimité regardent l'Allemagne comme perdue, si la Saxe l'est. L'espèce d'équilibre, que votre plan tend à établir est donc le renversement de tout équilibre; la première conséquence serait une guerre civile en Allemagne, et dans l'Europe un état de convulsion générale dont il est peu probable que l'Angleterre ne ressente pas les suites.

L'Allemagne a fixé ses regards sur l'Angleterre, elle portera sa cause au tribunal d'une nation juste et éclairée; ennnemie de tout acte de violence, elle ne saurait sanctionner la suppression d'un peuple attaché à la nation anglaise par les liens de la religion, des arts et du commerce. Les observations que je me suis permis de soumettre à Votre Excellence sont dictées par le sentiment du bien général, et vous n'ignorez pas, mylord, que l'intérêt personnel pourrait me faire tenir un autre langage; mais j'aime ma patrie et l'honneur; et l'amitié même

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