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à ce dernier les devoirs qu'il doit remplir, afin de se montrer digne de cette intervention et de ces bienfaits, et de concourir pour sa part au bien général.

Ces préliminaires établis, voyons quelle était autrefois la situation des classes ouvrières, et traçons un abrégé historique très-succinct du travail, si l'on peut s'exprimer ainsi depuis les temps les plus reculés jusqu'à nos jours. C'est le moyen le plus sûr d'élucider la question et de faire comprendre les améliorations apportées successivement au sort des travailleurs, les progrès accomplis dans ces derniers temps et l'influence salutaire exercée dans toutes les branches du prolétariat par la sollicitude constante et la féconde initiative du gouvernement de Napoléon III.

Un mot encore pour expliquer la pensée et le but de cet ouvrage : qu'on me pardonne d'entrer à ce sujet dans quelques détails qui me sont personnels.

Je ne suis ni un savant ni un écrivain. Fils d'ouvrier, ouvrier moi-même, j'ai vécu avec les ouvriers, je connais leurs besoins, leurs vœux, leurs découragements et leurs aspirations.

J'ai coopéré en 1818 comme secrétaire à l'établissement de la caisse de secours mutuels des ouvriers tapissiers.

En 1847, lors de l'installation, à Paris, des conseils de prud'hommes, des tissus, des produits chimiques et des industries diverses, je fus élu prud'homme titulaire dans la section des tissus.

Plus tard et alors que j'étais retiré de la vie commerciale, ému de l'incurie qui présidait au règlement des mémoires des tapissiers et fabricants de meubles, livrés le plus souvent à l'appréciation insolite d'architectes ou de vérificateurs incapables aussi bien en pratique qu'en théorie; je fondai la chambre syndicale

des maîtres tapissiers de la ville de Paris. Je n'avais pas seulement en vue de sauvegarder les intérêts de ces deux industries, mais encore ceux des acheteurs, en les garantissant, par l'examen consciencieux d'hommes spéciaux et compétents, des effets d'une concurrence exagérée et déloyale. Grâce au concours que j'ai trouvé parmi mes anciens confrères, le succès a couronné cette entreprise.

Enfin, en 1849, je fus élu juge suppléant au tribunal de commerce de la Seine.

J'ai parcouru les différents échelons de la vie commerciale, et, dans toutes les conditions où je me suis trouvé, ma préoccupation unique, celle qui a réglé ma vie, entière et à laquelle j'ai subordonné toutes les autres, a été l'état précaire et misérable des ouvriers.

C'est à eux que j'ai consacré les jours de repos que Dieu a daigné m'accorder après de longues années de peine et de labeur.

A défaut de science et de talent j'apporte dans ce livre le produit d'une expérience déjà longue et de réflexions consciencieuses. « Il faut beaucoup de philosophie, dit Jean-Jacques, pour observer ce qu'on voit tous les jours. » Sans être philosophe, je dirai ce que j'ai observé, en en déduisant ce que je crois utile à la classe si intéressante des travailleurs.

En terminant, je dirai comme Pierre Charron « J'adjouste icy deux ou trois mots de » bonne foy, l'un que j'ay questé par cy par

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là, et tiré la plus part des matériaux de c'est » ouvrage, des meilleurs autheurs qui ont » traitté cette matière morale et politique, » vraye science de l'homme tant anciens que » modernes. C'est le recueil d'une partie de » mes études; la forme et l'ordre sont à moy. Si je l'ay arrangé au jugement et à propos, » les sages en jugeront, car meshuy en ce suject autres ne peuvent être mes juges et de ceux là volontairement recevray la répri

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» mande: et ce que j'ay prins d'autruy, je l'ay » mis en leurs propres termes, ne la pouvant » mieux dire qu'eux. Le second, que j'ay icy » usé d'une grande liberté et franchise à dire » mes advis et à heurter les opinions contraires, bien que toutes vulgaires et communement recües'.

1 De la Sagesse. Préface.

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