Page images
PDF
EPUB

La promesse peut-être unilatérale ou synallagmatique.

Pour que la promesse de bail même unilatérale oblige celui qui l'a faite, il faut naturellement qu'elle ait été acceptée par l'autre partie (1).

consente

La promesse de bail équivaut à un bail, lorsqu'il y ment réciproque sur la chose louée, sur le prix de la location et sur les autres conditions. L'obligation de réaliser cette promesse ne peut être considérée comme une simple obligation de faire, résoluble en dommages-intérêts, en cas d'inexécution (2).

La promesse de bail est soumise en ce qui concerne la preuve, aux mêmes règles que le bail: ainsi, quand il s'agit de maisons ou de biens ruraux, on ne peut faire entendre des témoins pour établir cette promesse.

De même que les promesses de vente, les promesses de louage peuvent être faites avec des arrhes ou sans arrhes. - Appliquez au louage ce que nous avons dit à cet égard au titre de la vente (1590)

En matière de louage, les arrhes sont presque toujours données comme denier à Dieu, avec faculté, pour chacune des parties, de se dédire dans un certain délai (ordinairement vingt-quatre heures): l'une en rendant la somme, et l'autre en la perdant. Ce terme expiré, le contrat est définitif et irrévocable.

La preuve par témoins de la dation du denier à Dieu ne doit être admise, comme de raison, qu'autant que l'existence du bail peut être prouvée, de cette manière; autrement, on ne manquerait jamais d'employer cette voie détournée pour éluder la règle de l'art. 1715. A Paris on donne le denier à Dieu pour toute location soit de maisons, soit d'appartements, ou lorsqu'on prend un domestique à son service:

Au premier cas, la somme est remise au porteur, comme gratification, pour la peine qu'il a prise de faire voir les lieux.

Au deuxième cas le denier à Dieu est remis aux domestiques. Dès que le bail a reçu un commencement d'exécution, le contrat est irrévocablement formé; en conséquence, les parties ne peuvent refuser de l'exécuter l'une en offrant de perdre les arrhes, l'autre en offrant de les restituer (3).

Ne confondons pas les arrhes avec les sommes payées à titre de pot-de-vin ou d'épingle: dans ce dernier cas, le contrat est parfait ; le payement qui a eu lieu est un commencement d'exécution.

Quels sont les moyens de contrainte accordés contre la partie qui refuse d'exécuter le contrat? Si le louage a des choses pour objet, le bailleur peut exiger les loyers ou fermages pendant toute la du

(1) Dur, t. 17, no 48; Troplong, no 121; Duvergier, no 43.

(2) Dur, no 48: Duvergier, no 43 et suiv.; Troplong, no 121; Merlin, v., Bail, § 6, no 1, Quest., vo, Bail, § 1. Paris, 7 nivôse an X; Cass., 3 avril 1828; Dal., n° 80; Dev., 1838, 1, 299; Pal., 1838, 1, 524.

(3) Dur, n. 49; Troplong, n. 125.

rée du bail; de son côté, le preneur peut se faire mettre en possession manu militari. - Quant au louage d'ouvrage, il se résout nécessairement de part et d'autre en dommages-intérêts (1).

Il nous reste à faire observer que les clauses obscures ou ambiguës s'interprètent, en matière de louage, suivant les règles que nous avons établies sous l'art, 1602. (Duvergier, n. 261).

Le louage a beaucoup de rapports avec la vente; mais on signale entre ces deux contrats les différences suivantes :

1o La vente transfère la propriété (jus in re), ou du moins elle confère un titre qui permet de l'acquérir par prescription; tandis que le louage ne peut même servir de base à la prescription en effet, le bailleur conserve la propriété, ainsi que la possession et jouissance de la chose, puisqu'il jouit par le preneur, lequel lui paye des loyers et fermages (2229). 2o Dans la vente, toutes les actions de ceux qui prétendent quelques droits sur l'immeuble sont dirigées contre l'acquéreur : ces sortes d'actions ne peuvent être formées contre le preneur : le bailleur seul doit y répondre.

Il suit de ces distinctions que l'acquéreur est intéressé à appeler son vendeur en garantie sur les premières poursuites, tandis que le preneur, simple détenteur, n'acquiert le droit d'agir contre le bailleur pour se faire indemniser, qu'au moment où il est tenu d'abondonner.

Le bail diffère de la vente, lors même que ce dernier contrat a des fruits pour objet : ainsi, le preneur acquiert une chose incorporelle (le droit de cultiver et de jouir); l'acheteur de fruits devient immédiatement propriétaire de corps certains. Dans le bail, les frais de culture et de semence sont à la charge du preneur; dans la vente de fruits, le vendeur supporte ces frais sans recours contre l'acheteur, sauf stipulation contraire (Proudhon, Usuf., n. 993). Le bail est fait moyennant un nombre d'annuités, égal au nombre d'années de jouissance; la vente est consentie moyennant un prix unique: peu importe que ce prix soit payable en plusieurs termes. Le bail confère le pouvoir général d'administrer la chose qui en est l'objet ; la vente de fruits donne seulement à l'acquéreur le droit d'enlever la récolte vendue.

Le louage diffère de l'usufruit, notamment sous les rapports suivants: l'usufruit est un démembrement de la propriété ; il est immobilier, quand il s'applique à un immeuble: dès lors, il est susceptible d'hypothèque: Le louage ne démembre pas la propriété; il ne s'attache à elle que pour la rendre productive; le preneur n'est pas même possesseur, puisque son droit est mélangé de précarité; il n'a qu'un droit personnel. Par suite, on décide que ce droit ne peut être concédé à titre gratuit: de quelle utilité, en effet, serait pour le propriétaire, un bail sans prix ?— L'usufruitier prend les choses dans l'état où elles se trouvent; le preneur peut exiger (1) Duvergler, n. 48 et suiv., 47; Paris, 7 nivése an X,

qu'elles lui soient livrées en bon état (1720).-Le preneur peut exiger une indemnité pour non-jouissance occasionnée par cas fortuit ou par force majeure (1769 et 1773): l'usufruitier ne jouit pas du même droit ; l'usufruit s'éteint par la mort de l'usufruitier le bail n'est pas résolu par la mort du preneur. (1742).-L'usufruit établi sans terme ne s'éteint qu'à la mort de l'usufruitier: la durée du bail fait sans limitation, est restreinte au temps nécessaire pour que le preneur puisse recueillir les fruits pendant un terme d'usage (1736, 1758, 1774 et 1775). L'usufruitier n'étant tenu qu'à raison de la chose, peut se soustraire aux charges de l'usufruit, en renonçant à son droit; le preneur n'est pas libre de renoncer à son bail; on peut le contraindre à remplir les obligations qu'il s'est imposées. Enfin, dans l'usufruit, le propriétaire s'oblige à laisser jouir (pati frui): dans le louage, il s'oblige à faire jouir (præstare uti frui licere). Cette dernière distinction est la plus féconde en conséquences; nous les signalerons successivement.

Quoique le louage diffère de l'usufruit par sa nature, et produise sous certains rapports des effets moins étendus, les règles établies sur ce dernier droit, servent en général à déterminer ce que le preneur peut percevoir et conserver: de même que l'usufruitier, il a le droit de jouir; car jouir d'une chose, c'est recueillir tous les fruits et toute l'utilité qu'elle peut procurer.

Il faut également distinguer le louage, du droit de superficie: le contrat de superficie était d'un fréquent usage autrefois il se formait, lorsque le propriétaire d'un fonds aliénait, pour un certain temps, ordinairement moyennant une redevance annuelle, la surface d'un terrain, à charge par le concessionnaire de construire sur ce terrain. Le contrat de superficie démembrait la propriété ; le superficiaire possédait la superficie comme sienne; il pouvait lagrever d'hypothèques, de servitudes et même en disposer; Toutes ces facultés sont incompatibles avec le caractère du louage.- La propriété superficiaire pouvait être acquise à titre gratuit le louage a toujours eu lieu moyennant un certain prix.— Le nu-propriétaire, reprenait sa chose sans être tenu de payer d'indemnité, à raison des améliorations superficiaires qui adhéraient au fonds: cette faveur n'est pas accordée au bailleur, à l'égard de son fermier. Ne confondons pas le louage avec l'emphyteose: dans l'origine, on nommait emphytéose, la concession temporaire ou perpétuelle d'un terrain allodial, nu et stérile, pour l'améliorer par des constructions et des plantations, sous la réserve d'une redevance modique, établie en reconnaissance du domaine direct que s'était réservé le bailleur. A l'expiration du terme stipulé, ou à défaut du payement de la redevance, le bailleur reprenait le fonds dans l'état où le preneur l'avait mis, sans être soumis au payement d'une indemnité. Plus tard Plus tard, on put donner à emphyteose des

[ocr errors]

fonds déjà mis en culture, et même des bâtiments; l'obligation de construire, de planter et d'améliorer cessa d'être essentielle; l'emphythéote fut seulement tenu d'apporter à la conservation de l'héritage les soins d'un bon père de famille : en conséquence, on admit la définition suivante, plus large et plus en harmonie avec les modifications que ce contrat avait subies (1).— « L'emphythéose est une convention, par laquelle un propriétaire concède soit à perpétuité soit pour un temps prolongé, un terrain stérile ou productif, à l'effet par le preneur, d'en jouir, moyennant une modique redevance annuelle, et de ne pouvoir en être privé par le concédant, qu'en cas de non-payement de cette redevance. >>

On signale entre l'emphythéose et le louage les différences suivantes : l'emphythéose n'imposait dans le moyen âge et n'impose encore aujourd'hui à l'emphythéote que des prestations peu élevées; tandis que le prix du bail doit être en rapport avec les produits de la chose Pensio constituitur non pro mercede, in quo differt à locatione, sed in recognitionem domini. - Cependant, par la suite des temps, les prestations furent augmentées, de manière à former un produit net et lucratif, calculé sur l'importance des fruits; alors, le bail emphythéotique se rapprocha beaucoup du louage fait à longues années mais entre autres différences, il y eut toujours celles-ci : que l'emphythéose put s'établir non-seulement à titre onéreux, mais encore à titre gratuit et même par prescription; ce qui ne peut avoir lieu en matière de louage; que l'emphythéote acquérait le domaine utile, et jouissait comme propriétaire; tandis que le bail laisse toute l'utilité de la chose entre les mains du propriétaire : — enfin, que l'emphythéote était libre de changer librement la superficie, de vendre et d'hypothéquer le fonds; facultés dont ne peut jouir le fermier.

L'emphythéose subsiste encore sous le Code civil, avec les caractères que l'ancien droit lui attribuait : toutefois, aux termes de la loi du 18-29 décembre 1790, la durée des baux emphythéotiques ne peut excéder 99 ans. (Voyez au surplus nos observations sur les art. 526 et 530.)

Le contrat de superficie a beaucoup de rapports avec l'emphythéose en effet, le superficiaire de même que l'emphythéote, acquiert une partie du domaine utile néanmoins, on remarque cette différence, que les droits de l'un sont restreints au bâtiment qui forme la superficie, de telle sorte qu'ils s'éteignent interitu rei, si le bâtiment cesse d'exister; tandis que les droits de l'autre subsistent, nonobstant les changements que la superficie a éprouvés ; car ils reposent sur le sol même.

(1) Voy., sur l'emphythéose, Troplong (art. 1709); Duvercler, n. 142 et suiv.; Proudhon. Usuf., n. 217; Toullier, n. 101, t.3; Dur, n. 80, t. 1; Merlin, Quest., vo, Emphythéose, $3, a. 2; Favard, Rép., va, Emphythéose, Carré, Compétence, 22, n. 412.

Il faut également distinguer les baux à vie, de l'usufruit et de l'emphythéose ces baux ne confèrent pas de droits réels; on les considère comme des baux ordinaires; seulement leur durée est incertaine. Dans le bail à vie, le bailleur recueille les fruits civils de l'objet donné à bail; le preneur perçoit les fruits naturels : l'usufruitier et l'emphythéose perçoivent les fruits naturels et les fruits civils.

La question de savoir si les parties ont entendu constituer un usufruit ou un bail à vie dépend des circonstances: il faut s'attacher au but que les parties se sont proposé, bien plus qu'à la qualification donnée à l'acte.

Les baux à vie peuvent être consentis non-seulement pour la vie du preneur, mais encore sur plusieurs têtes, pourvu qu'elles n'excèdent pas le nombre de trois (1).

Les redevances perpétuelles, sous quelque forme qu'elles se déguisent, sont soumises aux règles déterminées par l'art. 530 sur le rachat.

Choses qui peuvent élre l'objet du louage.

1713. On peut louer toutes sortes de biens meubles ou immeubles (2)

Toutes choses, meubles ou immeubles, susceptibles de procurer par l'usage de l'utilité ou de l'agrément, peuvent être l'objet du louage. La loi n'exige pas même que la chose soit déterminée. On peut

(1) Loi des 28-29 décembre 1790, art. 1er; Duvergier. n. 28, 29, 30, 201 et suiv.; T10plong, n. 25 et 26; Championnière, t. 4, n. 3077; Proudhon, Usuf., n. 98 et suiv., 103; Dur, n. 19; Toullier, n. 387 et suiv.

(2) D'après la loi du 21 avril 1850 (art. 7), les mines ne peuvent être vendues par lots ou partagées sans l'autorisation du gouvernement. Le législateur a considéré, que l'unité de la concession se trouverait rompue par des exploitations partielles, et que la conservation des gites serait souvent compromise par des travaux que les acquéreurs ou les copartageants entreprendraient séparément, chacun pour leur compte. Mais peuvent-elles être louées? Nul doute que le concessionnaire peut, sans autorisation, louer son droit en totalité peu importe en effet à l'administration, puisque les travaux s'exécutent avec ensemble, comme une seule et même entreprise. Il est vrai que le minerai, une fois extrait, ne se reproduit pas : mais observons, qu'à la différence des choses fongibles, les réunions de gîtes ne s'épuisent pas du premier coup par les extractions: dès lors elles constituent une propriété susceptible de location. Mais c'est une grave question, que celle de savoir si l'art. 7 de la loi du 21 avril 1810, qui exige l'autorisation préalable du gouvernement pour la vente par lots ou pour le partage, s'applique à l'amodiation partielle : Troplong (art. 1713) ne le pense pas. Voy. en ce sens Rolland, vo Bail n. 108; Favard, v Louage, sect. 1re, § 1, n. 2. Ces auteurs s'appuient notamment sur un arrêt de la cour de cassation du 20 décembre 1837 (Dev., 1838, 1, 91). « La loi de 1820, disent-ils, n'exige cette autorisation que pour les ventes partielles ou pour les partages; elle garde le silence sur les locations. Les garanties, soit en faveur du gouvernement, soit en faveur du propriétaire de la superficie sont les mêmes, puisque la propriété et la responsabilité reposent toujours sur la tête du concessionnaire primitif. » — Mais la cour de cassation, s'inspirant mieux de l'esprit de la lol, est revenue sur sa jurisprudence: elle a considéré, que le bail partiel entraîne la division de l'exploitation, et qu'll tombe dès lors sous le coup de l'art. 7 de la loi de 1810 (Cass., 4, janvier 1544; Dev., 1844, 1, 723, 26 novembre 1845; Dev., 46, 1, 240; Lyon, 13 ma 1842; Dev,, 1842, 2, 435; Montpellier, 21 août 1341: Dev., 1842, 2, 80.

« PreviousContinue »