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DE LA

RÉVOLUTION

FRANÇAISE

(1787 A 1799);

PAR M. ALBERT MAURIN.

TOME II.

PARIS.

AU BUREAU DE LA SOCIÉTÉ DES TRAVAILLEURS RÉUNIS,

21, RUE SAINT-MARC.

1849.

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Né à Onarville le 14 janvier 1754; mort à Paris, sur l'échafaud, le 31 octobre 1793.

Le mouvement révolutionnaire de 1789 s'était fait plutôt en haine des abus qu'en faveur d'une idée gouvernementale. On avait vu les inconvénients d'une monarchie absolue, les malheurs du régime aristocratique, et l'on prit les armes pour s'en délivrer. Nous ressemblions, à cette époque, à une horde d'émigrés qui fuit un climat rigoureux pour chercher un ciel plus doux. Elle s'empare d'une contrée, s'y établit, et possède des terres avant d'avoir une patrie. L'attachement que nous inspirent les

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lieux qui nous ont vus naître ne tient pas exclusivement au sol; la famille et les habitudes nous font seules une patrie morale; les institutions et les lois, voilà notre patrie politique. A ce compte, nous cessâmes un instant d'avoir une patrie politique, lorsque la monarchie absolue fut renversée avec tout l'échafaudage de coutumes, de traditions qui l'entourait et lui servait de soutien. Lancée dans la carrière des essais, des tâtonnements, des innovations, incertaine entre le principe de l'autorité qui s'effaçait et celui de la liberté encore peu compris; vivant sous un pouvoir mal défini, au milieu d'agitations et de soulèvements continuels, la France, de 1789 à 1792, ne pouvait rien faire de grand ni de durable. Sous peine de périr, il lui fallait sortir à tout prix de cet état provisoire. La royauté constitutionnelle, sans précédents chez nous, était devenue impraticable même comme transition, par suite des coupables manoeuvres de la cour. Une seule voie de salut s'offrait au pays: la république surgit du 10 août, et nous eûmes enfin une patrie politique.

Le nouveau gouvernement avait pour mission de créer notre unité sociale et nationale. Il semble que les débris du trône, dernier obstacle qui s'opposât à l'avènement de la démocratie, étant dispersés, cette mission devait s'accomplir sans déchirements, sans violences, par les voies pacifiques et légales. Il n'en fut rien. Les partis qui n'avaient pas été assez puissants pour sauver la royauté, retrouvèrent tout à coup leur énergie en passant à l'état de conspiration. Pour frapper vite et fort ses ennemis, la république concentra de plus en plus le pouvoir en rejetant successivement de son sein tous ceux qui essayaient de ralentir son action providentielle. Constitutionnels, Girondins, Dantonistes, Hébertistes périrent ainsi les uns après les autres sur l'échafaud; Robespierre y monta lui-même, mais alors notre unité sociale était fondée. Un soldat se leva enfin qui, poussant à leur dernier degré ces éliminations, demeura seul maître des destinées du peuple. Il fonda notre unité nationale, et disparut à son tour. Ainsi, dans cet immense tourbillon où s'engloutissent

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